La Fin Infinie
Chapitre 5 : Chapitre II : La mélancolie de Luke.
2233 mots, Catégorie: K+
Dernière mise à jour 30/09/2017 00:43
Il sourit.
Alors comme ça, la petite Penelope commençait à avoir des doutes. Et le pauvre Sycamore, même quelqu’un d’aussi intelligent que lui ne pouvait pas trouver une excuse plus crédible que de sortir un simple « Ne t’en mêle pas. »
Pitoyable.
S recula un peu, s’adossant sur le dossier de sa chaise. Il devait préparer la suite. Il n’était pas encore sûr de tout, mais il savait que ça allait venir peu à peu, comme d’habitude.
Escrime. Quelle jolie référence… mais ça n’avait rien à voir.
Il fallait désigner sa prochaine victime.
Penelope ? Pourquoi pas ? Cette fille avait le don d’être désagréable. Personne n’allait regretter sa mort. En plus, si elle n’écoutait pas les précieux conseils de ce cher Descole et cherchait à en savoir plus, ne serait-ce pas une raison suffisante pour l’éliminer ?
Ça restait une option.
Pourquoi pas Descole lui-même ? Il en savait trop, c’était clair. Mais en même temps… il risquait d’avoir encore besoin de lui un moment.
De toute façon, il y avait un tas d’autres possibilités.
Luke ? Ou alors Flora… mais les deux n’en savent rien. Les tuer serait purement inutile.
Emmy ? Rodderick ? Non… ils étaient de l’autre côté.
Ou alors…
S soupira. À la base, il avait commencé à tuer pour des raisons… stratégiques. Par besoin. Et voilà qu’il cherchait quelqu’un à occire pour le plaisir. Non, ce n’était pas comme ça qu’il fallait procéder.
Il tuerait la bonne personne le moment venu. Pour l’instant, il allait se concentrer sur le plus important.
Les aiguilles de l’horloge qu’il n’avait pas auraient affiché sept heures du soir.
*******
Flora regarda la lettre que Ramon lui avait confiée, non sans une certaine joie. Des gens qui pourraient lui envoyer une lettre, il n’y en avait pas mille. C’était soit Luke, soit Penelope.
Ses deux amis lui avaient tellement manqué.
Elle prit la lettre et monta dans sa chambre. Depuis son retour à Saint-Mystère, elle occupait l’une des plus belles pièces du manoir. Les habitants avaient été si heureux de la retrouver, et s’étaient montrés si bons et chaleureux qu’elle avait presque oublié que ce n’étaient pas de vrais humains
Elle s’assit sur le bord de son lit et ouvrit l’enveloppe. C’était une lettre de Luke.
« Chère Flora,
Bonjour, comment ça va ? J’espère que ce n’est pas trop dur de vivre dans un village peuplé uniquement de robots.
Pour ma part, ce serait mentir que de dire que je vais bien, mais bon, ce n’est rien de nouveau. Il y a trop de choses qui me tourmentent. La mort du professeur, le destin de Clive et Janice. Le devenir d’Emmy. Et puis Penelope aussi… comment a-t-elle pu se résoudre à suivre un criminel comme Descole ? Descole, d’ailleurs, est-il vraiment un criminel ? Et si j’avais tort ? Et si c’était quelqu’un d’autre qui a tué le professeur ?
C’est vraiment dur, Flora.
Je suis désolé. Mon but en t’écrivant n’était pas de te déprimer, loin de là. Il se passe aussi des choses agréables dans ma vie. La nouvelle ville dans laquelle j’habite est parfaitement charmante, et ma nouvelle école aussi. Je peux enfin être à côté de mes parents ; je peux enfin mener une vie normale.
J’ai raconté ce qui s’est passé à Axerik à mes parents, et ils étaient vraiment tristes eux aussi. Le professeur était leur ami à l’université, tu le savais ?
Mon père a aussi envoyé une lettre à Roland et Lucile Layton, les parents adoptifs du professeur. Je ne pense pas que ça va leur apprendre quoi que ce soit, vu que tous les médias parlent déjà de la mort du professeur Layton, mais c’était un geste qu’il tenait à faire. Je n’ai même pas la force d’imaginer la douleur qu’ils doivent ressentir…
La mort du professeur aura fait du mal à beaucoup de gens. C’est le genre de personne que personne ne veut perdre, et c’est souvent ce genre de personnes qui meurent les premières.
Pardon, je m’emporte encore.
Et toi, Flora, quelles sont tes nouvelles ? As-tu pu contacter Penelope ? As-tu reçu une lettre de sa part ? J’aimerais au moins savoir ce qu’elle est devenue.
L’autre jour, en lisant un livre, je suis tombé sur une énigme. D’ordinaire j’aurais été vraiment heureux et j’aurais tenté par tous les moyens de la résoudre. Mais là, devine ce que j’ai fait ? J’ai juste refermé le livre. J’ai fui une énigme, ma plus grande passion !
De même, j’ai l’impression de moins aimer le thé, les puzzles, l’archéologie et l’aventure. Je suis devenu quelqu’un de si fade. J’imagine que j’ai grandi…
Dis, Flora, est-ce que le professeur te manque ?
Je me rends compte après son départ que tant de choses ont changé. Ma vie prend un tournant différent. Mes ambitions ne sont plus les mêmes. Si je t’en parle à toi, c’est car j’ai l’impression que nous sommes dans la même situation. Nous avons tous les deux rattaché notre existence à celle du professeur. Désormais qu’il est parti, serons-nous capables de voler de nos propres ailes ? Je ne sais pas toi, mais moi je n’en suis pas sûr.
Je ne pense pas que j’ai autre chose à dire. En commençant la lettre, je me disais que j’allais te raconter ma vie, te décrire ma nouvelle maison et parler des quelques amis que je me suis fait. Mais… je me retrouve à pleurer encore quelque chose qui est censé être terminé. J’aimerais tant redevenir le petit garçon insouciant que j’étais il y a quelques mois seulement, mais Axerik m’a changé. Axerik nous a tous changé.
Alors je vais m’arrêter là. Je suis désolé.
En espérant que ma prochaine lettre soit plus joyeuse, et que tu ailles un peu mieux que moi, je te dis au revoir.
Luke Triton. »
Lorsque Flora termina de lire, elle avait les larmes aux yeux. Luke avait tellement changé. On sentait la dépression dans chacun de ses mots. Apparemment, il n’avait pas pu se remettre de tout ce qui s’était passé.
Elle non plus, elle ne s’en était pas remise. Chaque jour, elle s’efforçait d’oublier pour pouvoir continuer à vivre. Luke connaissait le professeur depuis plus longtemps qu’elle, et avait passé bien plus de temps avec lui. Elle pouvait s’imaginer sa souffrance.
Si seulement ça avait été une mort naturelle. Aussi chère soit la personne perdue, on finit par accepter. Mais la façon dont cette histoire avait fini ne faisait que les tourmenter de plus en plus.
Flora ne savait même pas si essayer d’oublier était le bon choix.
Elle essuya ses larmes avec la manche de sa robe et posa la lettre sur le lit. Il fallait qu’elle lui réponde. Non, pas maintenant…
Luke allait mal. Si elle écrivait quelque chose maintenant, ce serait triste et déprimant. Elle allait attendre qu’elle aille mieux pour lui écrire quelque chose d’au moins un tout petit peu réconfortant.
Elle se laissa aller en arrière et tomba sur son lit, ses larmes resurgissant.
Penelope… elle ne l’avait plus revue non plus, ni même eu de ses nouvelles. Elle n’avait pas eu la chance de lui parler vraiment, comme une amie. Depuis leurs retrouvailles, tout allait de pire en pire…
Elle ressaisit la lettre de Luke, et se rendit compte que quelque chose était écrit sur le dos. Bizarre, Luke avait pourtant terminé sa lettre…
« NB : j’ai tellement divagué dans cette lettre que j’ai failli oublier de te dire le plus important. Fais attention, ce que je te dis là doit rester entre nous. »
Flora fronça les sourcils.
« Tout le monde sait que le professeur est mort à Axerik, n’est-ce pas ? Mais personne n’est censé savoir qu’il est mort assassiné. Nous ne l’avons dit à personne.
Lorsque j’ai révélé ceci à mes parents, ils ont été profondément choqués, mais n’empêche, leur réaction était… bizarre. Ils m’ont demandé qui a fait ça, je leur ai dit que je ne savais pas et je leur ai tout expliqué en détail. Ils m’ont dit que c’était certainement Descole, qu’il avait plus d’un tour dans son sac et qu’il était horrible.
Mais à aucun moment ils n’ont cherché à porter plainte, ni même souhaité divulguer ceci à la presse dans l’espoir de l’arrêter. Au contraire, ils m’ont demandé de n’en parler à personne tant qu’on n’était pas sûrs de l’identité de l’assassin.
Peut-être que c’est normal, comme réaction… mais je reste sceptique… voilà que je me retrouve à douter de mes propres parents.
Mais, tu sais, ce n’est pas ça qui m’a le plus intrigué.
Le lendemain, en descendant les escaliers menant au rez-de-chaussée, j’ai surpris mes parents à la cuisine en train de discuter. Je sais que c’est mal d’espionner les autres comme ça, mais je n’ai pas pu m’empêcher d’écouter une partie de leur conversation.
-Escrime. Je te dis que ça a un rapport avec escrime.
-Brenda ! Tu ne devrais pas parler de ça comme ça.
-Mais ils ont tué Hershel !
-Ils n’avaient pas intérêt à le tuer. Tu sais qu’ils avaient besoin de lui.
-Mais tu as entendu ce qu’à dit Luke ? Tout colle parfaitement. Les Aslantes, les pages déchirées, Emmy, Descole. Ne me dis pas que tu crois qu’ils n’ont rien à voir.
-Si, mais ce n’est pas eux qui ont tué Hershel ; je ne pense vraiment pas.
-Alors qui l’a fait ?
-Je n’en sais rien… ah ! Luke !
Je t’avoue que j’étais bouche bée. Je leur ai immédiatement demandé ce que « escrime » voulait dire, et ils m’ont répondu que c’était le mot français pour « fencing ».
De un, je ne comprends pas pourquoi utiliser le mot en français, et de deux, comment l’escrime a pu tuer le professeur ? Bien sûr, je leur ai posé la question, et là ils ont répondu que j’avais mal compris, qu’ils parlaient d’autre chose et que c’était une vieille histoire de l’université.
Je ne sais pas comment je dois l’interpréter.
Bref, je voulais juste te le dire. Je ne sais pas si ce détail a une quelconque importance. Non, en fait, il n’en a aucune. Ce n’est pas comme si je désirais continuer mon enquête, que j’avais besoin de rassembler des indices.
J’en ai assez.
Je te dis au revoir, désolé d’avoir encore parlé pour ne rien dire. »
*******
S esquissa un large sourire. Les choses devenaient si intéressantes.
Ce n’était que le début, et pourtant, tout le monde semblait sombrer dans le chaos.
Allez, il fallait continuer.
À l’instant même, il entendit des coups à sa porte. Sans lever la tête, il demanda à la personne d’entrer.
La porte s’ouvrit et une petite fille de treize ans franchit le seuil. Elle s’approcha dans l’obscurité de la pièce et s’arrêta à un mètre de lui.
« Ta chambre est vraiment sombre, c’est déprimant. »
« Je l’aime bien comme ça. »
Elle s’avança encore jusqu’à arriver derrière lui. Passant la tête au-dessus de son épaule, elle regarda ce qu’il était en train de faire.
« Encore collé à ton PC ? Tu fais quoi ? »
« J’écris. »
« Ta fanfiction ? »
« Exact. »
Elle recula à nouveau.
« Fais une petite pause et descend. Maman t’appelle pour manger, et elle te dit que ce n’est pas la peine de lui dire que tu n’as pas faim. »
« J’ai pas faim. »
La petite fille se mit à rire.
« Et ensuite tu te plains parce que tu as la peau sur les os ! »
Elle tourna les talons et avança jusqu’à la sortie, puis tourna la tête.
« Allez, viens ! Maman va être en colère. »
Il leva la tête vers elle et soupira.
« J’arrive… »
Tout en souriant, l’enfant lui fit signe de la main.
« OK. Je t’attends en bas, Sean. »
Et elle s’en alla, le laissant seul dans la pièce obscure.