Une histoire onirique
Chapitre 1 : Une histoire onirique
1504 mots, Catégorie: G
Dernière mise à jour 14/04/2022 13:53
Cette fanfiction participe au Défi d'écriture du forum fanfictions.fr: Quelques gouttes d'OS dans l'océan-(mars- avril 2022)
Tôt le matin, la ville de Londres était encore sombre. Tôt le matin, dans le froid, du jour on ne voyait que l’ombre. Seuls quelques commerçants se pressaient, se dirigeaient vers la place du marché. Le reste de la capitale était endormi. Endormi, vraiment ? Non, pas tous les habitants. On pouvait apercevoir une petite lucarne illuminée dans la mansarde.
Accoudée à la fenêtre, Sarah Crew profitait de ses derniers moments avec l’extérieur avant que ne débute une journée de dur labeur. Rêveuse, elle laissait son regard s’échapper. Non loin de là, la Tamise s’écoulait, surplombée par un pont encore vide à cette heure-là. Les yeux clos, Sarah s’imaginait une promenade, le soleil brillant bien haut. Loin de la servitude, profitant de quelque mansuétude des marins. Hélas, ce joli rêve toucha vite à sa fin. Mrs Marie l’interpellait depuis les cuisines, hurlant qu’il était déjà cinq heures du matin.
« Pourquoi diable cette journée serait-elle différente des autres ? Pourquoi m’imaginais-je qu’aujourd’hui j’aurais droit à plus de graines d’épeautres ? » Telles étaient les pensées rongeant Sarah durant ce jour de grand froid. Malgré tout, elle ne pouvait s’empêcher de laisser ses songes s’évader. En cuisine, dans les chambres, dans les escaliers. Le personnel lui fit de nombreux reproches ; James menaça de lui retirer la faible lumière émanant d’une torche.
Ereintée par cette longue journée, Sarah alla s’écrouler sur son lit, aux alentours de minuit. Contrairement à toutes les nuits où des cauchemars venaient hanter son sommeil, cette fois ses songes furent éclairés par le soleil.
oOo
C’était une belle journée pour partir en balade. Une belle journée pour se promener sur la plage. Accompagnée de Peter, le jeune garçon qui autrefois fut son chauffeur, Sarah fixait le large, persuadée qu’un trésor était enfoui dans les profondeurs. Mais, il fallait se faire une raison : il était bien trop dangereux de traverser à la nage cette eau peuplée de poissons. Non sans un soupir, Sarah s’obligea à s’éloigner de la crique. Faisant cas de son air mélancolique, Peter coupa court à ses rêveries. Il dit :
« Partir en expédition t’intéresserait-il ? Je connais un ami qui peut nous prêter du matériel, pas loin d’ici. »
Nul besoin de mots : Sarah se précipitait déjà vers un bateau !
C’est ainsi qu’une heure plus tard, ils se retrouvaient sur l’océan, les eaux arpentant. Peter s’occupait de mener les rames, tandis que la jeune fille fixait une carte.
« Il y a une île, indiqua-t-elle. Nous y rendons-nous, au risque de n’y trouver que des bagatelles ?
- Nous irons, nous traverserons tant qu’il se trouve encore des poissons, répondit-il avec un sourire.
« Toujours aussi poétique… songea Sarah. Ce voyage tombe à pic. Peut-être nos cœurs trouveront ils enfin le bonheur. »
Une secousse la ramena à la réalité : sur l’île ils venaient d’amarrer.
Ne prêtant pas attention au vent menaçant d’altérer leur mission, les deux amis sautèrent à pieds joints sur le sable. Peter avait sorti la pelle que lui avait prêté son camarade, sur la plage. Obnubilée par son travail, Sarah n’entendit d’abord pas la voix qui semblait provenir du large. Voix qui prenait de plus en plus d’ampleur, répétant son nom, semblant vouloir l’attirer vers les profondeurs. Elle se sentit faiblir… rétrécir… ferma les yeux…
Lorsqu’elle jugea le danger écarté, tout bruit avait disparu, à son grand étonnement. Seule restait la voix qui répétait son nom, inlassablement. Elle rouvrit les yeux… pour contempler le plafond gris et morne de la triste mansarde. L’aube se faufilait discrètement à travers la lucarne. Emergeant à grand peine de son sommeil, elle se leva, se chaussa, puis descendit commencer ses tâches.
- C’est pas trop tôt ! l’accueillit Marie de son habituelle voix sèche et éraillée. Ca fait dix minutes, que j’attends que tu redescendes de la lune !
Elle lui jeta un tablier.
- Commence à préparer le petit-déjeuner. Dans deux heures, les filles seront levées.
Comme tous les jours depuis qu’elle était devenue orpheline, la besogne de Sarah ne laissait guère place à toute autre rêverie enfantine. Mais le rêve… le rêve, lui persistait. De telle manière à ce qu’il occupait les pensées de Sarah dans toutes ses activités. Pénétrant bon gré mal gré dans la suite de l’élève qui la détestait, Sarah s’autorisa à promener son regard sur ce qui était son appartement, autrefois. Heureusement, Lavinia ne s’y trouvait pas. S’approchant de la fenêtre, elle laissa ses souvenirs renaître.
Mlle Mangin, tout sourire, ravie qu’elle vienne étudier ici.
Mlle Amélia, rangeant son extravagante garde-robe juste là.
Son père, peu de temps avant son départ… et pas seulement du pensionnat.
Alors qu’elle jetait un œil au spectacle de la rue, son rêve se rappela brusquement à elle, la frappant comme un coup de massue. Elle revoyait Peter, s’excusant d’être venu à la place de son père. Elle, promettant qu’elle ne lui en tiendrait pas rigueur.
Le reste de la journée se déroula sans aucun accroc. La nuit, de retour en haut, Sarah s’assit à la petite table qui lui servait de bureau. Repoussant la fatigue, elle prit une feuille, un crayon et écrivit…
oOo
Le visage recouvert de terre, Peter sort le coffre pour lequel nous avons traversé la mer. L’excitation se lit sur nos visages : que trouverons nous ici, si loin du monde et de tout village ? Pas le temps d’émettre nos idées : l’île commence à être submergée par la marée. Jugeant nécessaire d’ouvrir le coffre une fois sur terre, nous retournons prendre place dans la barque, prêts à prendre les rames.
La météo est en accord tout le long du voyage vers la plage. J’engage une conversation animée avec Peter :
- J’ai appris à être chauffeur dès l’âge de huit ans, m’explique-t-il, mon père ne pouvant plus le faire des suites de son accident.
- Et tu n’avais pas peur ? je demande, impressionnée.
- Si, avoue-t-il, non sans rougir.
« Qu’il est mignon quand il vire rubicond ! », je songe, amusée.
- Mais, reprend-il, je m’entrainais d’abord avec des amis. Mon père pouvait ainsi nous guider depuis son lit.
Je ne peux m’empêcher de sourire en imaginant Peter, petit, apprenant à conduire. Heureusement qu’il est occupé par les rames, cherchant à maintenir leur bon maniement.
La traversée me paraît cette fois plus longue, sans doute le bateau est-il alourdi par le trésor. Mais, au fait, que contient-il ? De l’or ?
Nous répondrons à cette question une fois de retour avec le reste du monde. Je vois déjà des marins venir à notre rencontre, hurlant des « enfin », lorsqu’on se montre…
Sarah posa son crayon, l’esprit empli d’une fantaisie pareille à un bonbon. Soudain, elle le reprit, et ajouta une petite note en guise de fin :
« … mais tout ceci n’est qu’une utopie. J’aurai beau me battre, je sais que jamais je ne connaitrai un voyage comme celui-ci. Enfin, pas tout de suite… »
En allant se coucher, Sarah constata qu’il ne lui restait que trois heures pour se reposer. Mais rien n’était grave, tant qu’elle connaissait la fin de son expédition. Rien n’était grave tant qu’elle pouvait travailler sans risquer de punition…
oOo
Accoudée à la fenêtre, Sarah laissait tranquillement ses songes émettre. Le fleuve lui inspirait à présent une vie de bonheur- loin de l’esclavage, loin des maux de tout âge.
Peut-être Peter l’attendait-il, non loin de là. Peut-être l’attendait-il avec ses chevaux, son attelage.
Peut-être son rêve allait-il se réaliser…
Elle connaitrait alors une vie de vérité.
Une vie de liberté.