Lyn, Grandir au fil du temps

Chapitre 1 : Le grand jour

1713 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 21/09/2024 18:39

Ça y est, c’est le grand jour.

Je le sais, mais je n’ouvre pas encore les yeux. Je veux profiter de ce rayon de soleil matinal qui effleure ma joue, du contact doux et rassurant des draps.

Je m’appelle Lyn Monda et, d’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours attendu le jour de mon départ. Je vais enfin pouvoir partir du foyer où je me trouve depuis plus de dix ans.

Hé oui, je suis orpheline… ou du moins considérée comme depuis que mes parents ont disparu. Je n’ai aucune famille proche mais à ce qu’on m’a dit, mes parents étaient de fervents protecteurs de l’Autre Monde.

C’est là que je veux me rendre ! Mais pour y aller, il faut l’autorisation des parents quand on a moins de seize ans, du moins dans cette partie du pays et quand les jeunes ne fuguent pas. Donc maintenant que j’ai cet âge, je peux enfin y aller

 

Ça y est, c’est le grand jour.

Je veux aller dans l’Autre Monde parce que le Monde Primaire, celui dans lequel je vis actuellement et où vivent la plupart des gens, ne me convient pas. Tout est superficiel et les gens ne pensent plus qu’à eux. Et l’espoir de vivre une grande aventure m’a vite convaincue de partir quand j’ai eu l’âge d’y réfléchir sérieusement. Et ce serait mentir de dire que je n’ai pas l’espoir de comprendre ce qui est arrivé à mes parents, on ne les a jamais retrouvés...

Ils avaient été choisis eux aussi. C’est, en fait, une grande chance ! Peu d’entre nous y ont accès dernièrement. Il ne suffit pas d’avoir l’autorisation de ses parents ou d’avoir seize ans pour pouvoir y aller, loin de là ! Il faut être choisi - Par qui ? Mystère - Mais le fait est que tout le monde ne peut pas voir le portail et que tous ceux qui le voient ne choisissent pas d’y aller. L’Autre Monde est en effet très différent du Monde Primaire. Les gens là-bas vivent simplement, sans manipulation ou domination, ils se respectent et respectent leur environnement, ils cohabitent même avec les habitants si particuliers qui y vivent. Ici ce ne serait pas possible et je ne comprends pas qu’on ne puisse pas avoir envie d’y aller quand on en a la chance. Moi, je veux y aller !

J’ai quand même profité de mes années ici. J’ai travaillé sérieusement à l’école et j’y ai même pris plaisir. Je faisais aussi des activités comme la natation ou le violon, et j’ai des Amis. Mais rien n’y fera, je dois y aller !

 

Je finis par ouvrir les yeux.

Je me sens en pleine forme, après tout, c’est le grand jour !

Ma chambre est en ordre, il ne reste plus grand-chose. Ma valise est prête depuis longtemps. Ce n’est même pas une valise mais plutôt un sac à dos spécial randonnée, bien pratique, dans lequel j’ai mis quelques vêtements avec le strict minimum nécessaire en affaire de toilettes, une trousse de secours, quelques rations alimentaires.

J’adore mes amis, la vie ici aurait été beaucoup moins drôle et intéressante sans eux. Mais malgré la tristesse de la séparation, je suis plus décidée que jamais à partir !

 

Je me lève et je mets de la musique. J’adore la musique, elle reflète parfois si bien nos émotions. J’ai donc pris l’iPod qu’un ami m’a offert il y a peu, et j’ai mis énormément de musiques, bien qu’il soit probable que je n’ai pas le temps de l’écouter ni les moyens de le recharger.

Dans mon portefeuille j’ai mis une photo : celle de mes parents avec moi près du portail. C’est surprenant d’ailleurs, moi je le vois, mais quasiment personne ne le voit sur la photo. J’ai bien sûr pris mes papiers et de l’argent qui sera converti là-bas, argent que je tiens de mes parents disparus et que j‘ai économisé.

 

Je m’habille en prenant soin de mettre des vêtements pratiques pour là-bas : un short, une tunique à manche courte, un foulard dans les cheveux. Je n’oublie pas la petite banane pour y mettre ce qu’on me donnera une fois là-bas.

Ça y est, je peux descendre déjeuner.

 

Je prends mon petit-déjeuner comme tous les jours, mais je suis déjà ailleurs pendant les conversations qui, forcément, tournent autour de mon départ.

_Alors Lyn, prête pour le grand départ ? Les gens en parlent un peu dans notre petite ville, ça devient rare qu’un jeune parte dans l’Autre Monde ! Moi je n’aimerais pas y aller, on ne sait pas vraiment ce qui nous y attend et puis on a bien plus de possibilités ici !

Cette question vient d’un éducateur du foyer avec qui je m’entends plutôt bien, mais qui n’a jamais vraiment compris mon désir de partir. Lui au moins n’est pas persuadé que je pars uniquement pour retrouver mes parents. Enfin, je comprends que des gens puissent penser ça, je n’ai jamais accepté de voir une potentielle famille d’adoption. A quoi bon s’attacher à des gens que je quitterai de toute façon à seize ans pour aller dans l’Autre monde.

_Oh oui, je suis prête depuis longtemps tu sais ! Moi je ne comprends pas qu’on ne puisse pas avoir envie d’y aller ! Allez, je me dépêche de finir !

Il rigole.

_Tu as l’air pressée, mais attends, on a un petit quelque chose pour toi ! Pour la plus fidèle de nos résidentes !

C’est ça que j’aime chez lui, il tourne tout à la rigolade, ça rend les choses souvent bien plus faciles.

Les personnes du foyer, avec qui je m’entends bien, m’offrent le strict minimum pour camper. Ça me sera bien utile, même si je me suis bien renseignée pour me débrouiller toute seule.

Je remonte dans ma chambre pour la dernière fois et je prends mon sac, prêt depuis longtemps.

Je me retourne et je finis par quitter cette chambre. Elle ne va pas me manquer !

 

Je dis au revoir à tous les éducateurs qui me souhaitent chaleureusement bonne chance et aux quelques jeunes qui sont encore au foyer. Certains me disent que j’ai de la chance, d’autres qu’on s’y retrouvera dans une paire d’année et d’autres encore se contentent d’un au revoir.

C’est le grand jour, je prends mon envol ! 

 

Le portail se trouve à un endroit fixe pour une personne.

Chaque personne qui peut le voir ne le voit pas au même endroit. C’est une chose bien mystérieuse, mais ce qui m’importe c’est que j’y vais !

Une peur irraisonnée me surprend « Le portail sera-t-il toujours là ? Vais-je pouvoir entrer ? Qu’y a-t-il vraiment de l’autre côté ? Un monde aussi utopique peut-il exister ?»

Alors que toutes ces questions me taraudent, je me dirige instinctivement vers le petit parc de la ville. Il est symbolique pour moi, c’est là que je venais jouer avec mes parents et c’est là que je les ai vus pour la dernière fois. Peut-être que la présence du portail à cet endroit n’est pas une coïncidence. Il n’y pas grand monde à cette heure-ci. Je n’ai pas trop diffusé le fait que je parte aujourd’hui et encore moins où se trouve le portail.

 

Mes Amis sont venus, mais je leur ai bien dit que c’est un évènement heureux et qu’il faut s’en réjouir ! Ils sont là, comme toujours. Le portail aussi, ma peur s’envole.

_Alors tu es décidée ? Mais pourquoi je pose la question moi ?! Allez, sauve-toi et profite à fond, on t‘a assez retenu !

Un clin d‘œil malicieux apparaît sur son visage. Lui, c’est Jules, un charmant blond aux yeux bleus. On est amis depuis dix ans, depuis la maternelle. On a fait pas mal de bêtises tous les deux, on rigole beaucoup ! Sa bonne humeur va me manquer.

_Prend soin de toi Lyn. Tu vas faire de nouvelles rencontres et vivre une nouvelle vie… Tu vas me manquer. 

Lui c’est Pierre, on s’est rencontrés au cours de musique, il est très calme et assez sensible. J’aime lui parler, ça va sans doute me manquer aussi.

Je n’aurais jamais cru que ses deux-là s’entendraient, mais le courant est passé.

_Allez les garçons, après toutes ces années j’ai plein de souvenirs que j’amène avec moi ! Vous savez ce qu’on dit, amis un jour amis toujours !

Jules me fait alors gentiment remarquer

_Tu viens de l’inventer ce dicton ? Bah, la culture c’est comme la confiture, moins on en a plus on l’étale !

_Bon ben je vais y aller moi !

Je ris de bon cœur et je grave ce moment dans mon esprit.

Jules, fidèle à lui-même nous attrape.

_Allez, on se fait un câlin !

 

Je jette un dernier regard sur ce que je quitte, des émotions de toutes sortes me submergent.

Mes yeux se fixent alors sur le portail. Il est simple, juste encadré par un liseré rouge, noir et blanc.

L’intérieur est opaque, reluisant, de toutes les couleurs.

Il m’attire.

Je ne résiste pas.

Je rentre.

 

 

Ça ne dure qu’une seconde … Je me sens comme chez moi, au chaud et protégée…

 

 

Une nouvelle vie commence !

 

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