Kitsune's trap

Chapitre 12

4406 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour il y a 2 mois

Chapitre 12


Lorsque mes yeux décident de s'ouvrir, c'est à contrecœur que je regarde l'heure sur mon réveil. Il est 8h30 et je suis encore très fatigué. Malgré tout, je ne pourrai pas me rendormir à cause de la douleur dans ma tête. Après avoir traîné une bonne dizaine de minutes je me lève péniblement, prenant appui contre le mur. Je pourrais presque me plaindre de ma condition mais une seule chose m'obsède : je ne veux pas croiser Naruto.

 

En allant à la cuisine, je jette un œil dans le salon pour visualiser les dégâts. Il va nous falloir du temps pour ranger tout ça... Tant pis. Je prends un grand verre d'eau qui se déverse dans ma bouche pâteuse comme un pur supplice. Rien n'est buvable dans ce genre de moment. Je n'ai absolument pas faim d'ailleurs. Je me contente d'attraper de quoi faire passer le mal de tête et de l'avaler avec une seconde gorgée.

 

Après une absence de plusieurs minutes, les yeux fixés sur le paysage au travers de la fenêtre, je décide d'aller voir si le blond dort encore. Je prie même pour que ce soit le cas, mais je veux le voir. Sans un bruit, j'entre dans sa chambre et me penche délicatement au dessus de lui. Mon ventre se sert à la vue de ses cernes rougis. Il a pleuré, j'en suis certain. Par ma faute. Je repars aussi discrètement que je suis venu, attrape quelques fringues et passe le palier de la porte après les avoir enfilés. J'ai besoin de prendre l'air.

 

Je marche lentement dans la fraîcheur matinale, inhalant à plein poumon l'air frais. Je me fais discret pour ne croiser personne, mais lorsque je passe non loin de l'appartement de Sakura, un kunaï se plante devant mes pieds sans prévenir. Quelle délicatesse... Je lève les yeux pour voir une main qui dépasse de sa fenêtre et qui me fait signe de venir. Après le service qu'elle m'a rendu, je ne peux décemment pas lui refuser ça.

 

J'emprunte les escaliers menant à sa porte mais je n’ai pas le temps de toquer puisque ma coéquipière ouvre a mon arrivée. Elle ne dit rien, visiblement aussi fatiguée que moi, mais me fait signe de rentrer. Une fois assis sur le canapé, sa bouche se délie.

 

- "Où est Naruto ?

 

- Il dort.

 

- Il t'en veut ?

 

- Hn ?

 

- Ta tête parle sans ton consentement Sasuke. Il s'est passé quelque chose hein ?"

 

Toujours aussi perspicace.

 

- "Pas vraiment...

 

- Même ton chakra est malade, raconte.

 

- Qu'est ce que ça peut te faire ?

 

- Tu me dois bien ça non ?

 

- ..."

 

Elle m'énerve de taper toujours la où il faut.

 

- "Il est en colère.

 

- Pourquoi ?"

 

Elle répond au tac-au-tac, sachant exactement où elle veut en venir. Je ne pourrai pas lui cacher grand chose.

 

- "Il sait pour Neko.

 

- Vu ton accoutrement hier soir, c'était pas difficile à deviner. Il fallait s'y attendre.

 

- C'est sur.

 

- Il y a autre chose n'est-ce pas ?

 

- ...

 

- Si tu ne veux pas m'en parler je ne peux pas te forcer, mais je ne pourrais pas t'aider non plus.

 

- Te parler n'arrangerait pas le problème.

 

- Ah, donc il y a bien autre chose.

 

- ... Fouine.

 

- Aller Sasuke, ose me dire que je ne t'ai pas rendu service hier ?

 

- Ce n'est pas la question.

 

- ... C'est un peu trop privé c'est ça ? Si ce n'est que ça, je ne m'en fais pas.

 

- ... C'est à dire ?

 

- J'ai encore vu juste on dirait. Mais cette fois c'est moi qui ne dirai rien."

 

Traitresse. Elle me cache quelque chose depuis un moment à ce sujet, et moins elle en dit, plus je crois comprendre ce qu'elle insinue.

 

- "Est-ce que... Naruto t'as parlé de moi ?..."

 

Ses yeux s'agrandissent soudainement, mais elle semble hésiter avant de répondre.

 

- "Comment ça ?

 

- Tu le sais très bien.

 

- Il ne m'a pas raconté ce qu'il se passait entre vous si c'est ce que tu veux savoir."

 

Sa réponse ne me satisfait pas. Je repense à cette fois où j'ai entendu le blond prononcer ces mots si étranges lorsqu'il se donnait du plaisir. Je veux savoir.

 

- "Est-ce qu'il fantasme sur un mec ?..."

 

Là, je l'ai choquée je crois...

 

- "Je... T'en as des questions toi !

 

- Répond.

 

- J'en sais rien !

 

- Menteuse.

 

- J'ai rien à te dire à ce sujet là Sasuke.

 

- Moi je pense le contraire.

 

- De toutes façons ça ne te regarde pas. T'as qu'à demander à l'intéressé, il pourra surement te répondre.

 

- Non, justement. Il ne s'en rendrait même pas compte lui même.

 

- ... Tu marques un point. Il te plaît tant que ça ?

 

- Change pas de sujet.

 

- Je prends ça pour un oui. Écoute, tout ce que je sais je le déduis de ce qu'il dit et de ce qu'il fait. On a toujours pu lire en lui comme dans un livre ouvert.

 

- Hn, mais il t'a montré des pages que je n'ai pas pu voir.

 

- Joliment dit.

 

- Alors ?

 

- Alors je pense que tu lui plais. Vraiment. Mais il ne le sait pas encore, ou ça lui fait peut être juste peur. Il m'a posé pas mal de questions sur le fait d'aimer une personne du même sexe, mais toujours en faisant comme s'il parlait d'un ami à lui. Après, de là à dire qu'il fantasme sur toi, je préfère ne pas m'avancer.

 

- Heum, c'est inutile oui. Merci Sakura."

 

Elle me répond par un simple sourire qui traduit beaucoup de choses.

 

- "Mais fais attention Sasuke, Naruto est innocent mais pas complètement idiot. Si tu lui fais du mal, il ne te le pardonnera pas facilement.

 

- Je sais."

 

Je sais bien que je me suis mis dans une sale situation avec Naruto. J'ai des choses à réparer on dirait. Lorsque je quitte l'appartement de Sakura, je n'ai plus du tout envie de me promener. Je rentre donc d'un pas légèrement plus sûr de moi à la maison, réfléchissant à ce que je vais bien pouvoir dire au blond. Lorsque j'arrive, il n'est toujours pas réveillé. Je me pose devant la télé, histoire de raccourcir l'attente. Les programmes du matin sont chiants et me laissent le loisir de penser à ce que je devrais faire.

 

Je me gonfle d'assurance mais, lorsque le cliquetis de la porte du blond résonne, je me sens soudainement vidé. Sasuke, c'est le moment de faire face à tes stupidités. Il entre dans la pièce en se tenant la tête, sans dire un mot. Il attrape la boite contenant les cachets que j'ai moi-même utilisés tout à l'heure et en fait passer un avec une gorgée d'eau prise directement au robinet. Toujours sans rien dire, il vient jusqu'au canapé et s'avachit juste à côté de moi.

 

Un silence creux s'initie tandis que son esprit semble chercher un chemin au travers d'un brouillard plutôt épais. Je préfère ne rien dire, et il faudra plusieurs minutes avant que sa bouche ne s'ouvre enfin :

 

- "S'lut.

 

- Salut.

 

- J'ai mal.

 

- Tu as beaucoup bu.

 

- Pas qu'à la tête."

 

Je ne réponds pas de peur de briser un peu plus son intégrité. Ses yeux tremblent légèrement, tentant de voir quelque chose au delà de ses souvenirs sans y parvenir.

 

- "Racontes moi.

 

- ... Quoi ?

 

- Tout, racontes moi tout.

 

- La soirée ?

 

- Entre autre, mais tout ce qu'il s'est passé avant aussi."

 

Ah... Sa demande est peut être le meilleur moyen pour moi de garder un peu de fierté, s'il m'en reste encore. Alors, avec une certaine lenteur et parfois bien peu de détails, je commence à parler. Je lui explique qu'un jour, un renard est arrivé sur le pas de ma porte et que je m'y suis attaché. Qu'il a fallu que je découvre que ce n'était pas un renard, et que mon égo en avait prit un coup, aussi stupide cela puisse paraître.

 

Je lui raconte cette fois où je l'ai suivi discrètement chez l'hokage, mais je prends soin d'éclipser mon arrivée chez lui. Inutile de lui dire que je l'ai observé dans ses plaisirs solitaires... Je lui rappelle la conversation que nous avons eu ensuite, et ce que j'en ai pensé. Tout cela, il le savait plus ou moins. Mais j'arrive à la partie qu'il ignorait, la boule au ventre. Je lui dis comment j'ai pu me transformer en Neko, et ce que j'ai ressenti à ce moment là. Je lui fais presque décrocher un sourire lorsque je précise même dans quelle merde je me suis fourré pour faire croire que le chat était chez Sakura.

 

Je m'arrête dans mon monologue à ce moment là, bien suffisamment honteux. Je n'ose pas le regarder, mais le son de sa voix heurte mes oreilles.

 

- "Et ? Racontes moi la suite.

 

- ... Tu la connais.

 

- Racontes quand même."

 

Je ne suis pas sur de savoir où il veut en venir, mais je reprends tant bien que mal. Je rappelle cette mission durant laquelle nous nous sommes rapprochés, sans jamais parler de ce que nous y avons fait. Je remémore également ces jours passés à courir sans même se voir, tout ça pour ne pas perdre une compétition qui n'existait pas vraiment. Puis j'arrive à la soirée, sans en avoir vraiment envie. Je déterre de son esprit embrouillé les souvenirs récents d'une décente rapide, vertigineuse même, dans un monde où tout n'est que flou et musique.

 

Je conclus bien maladroitement sur le départ des invités, puis sur notre réveil difficile ce matin. Je m'arrête là, attendant de savoir ce qu'il en pense comme si ses paroles pouvaient décider de mon avenir. Un profond soupir me laisse sous-entendre que mon récit ne lui a pas plu.

 

- "Alors tu ne m'as jamais rien fait.

 

- ...

 

- On ne s'est jamais touché, on a jamais vécu tout ça, c'est ça ?

 

- Je n'ai pas dis ça.

 

- Oui, tu ne l'as pas dis."

 

... A quoi joue-t-il ? Il ne souhaite quand même pas que je décrive en détail ces moments là aussi, si ?

 

- "Alors, c'était si anodin que ça…"

 

Je tourne brusquement la tête vers lui, sans savoir lequel de nous deux est le plus blessé par ces mots. Je ne sais pas ce que je m'apprêtais à faire, mais son visage me fige. Il est tellement... Vide.

 

- "Non, ce n'était pas anodin."

 

Ses pupilles se dilatent légèrement mais il ne bouge pas, perdu dans une réflexion certainement sans réponse. Il hésite puis répond, la voix faible :

 

- "Alors c'était quoi ?...

 

- ...

 

- Ok."

 

Il prend appuie pour se lever mais je le retiens soudainement, sans avoir moi même le temps de m'en rendre compte. Il se tourne pour me lancer un regard froid comme la glace, imposant une réponse courte et valable. Mon cœur se met alors à tambouriner comme il ne l'a jamais fait, et là tout me semble effroyablement clair :

 

- "Je t'aime."

 

Je ne me croyais pas capable de prononcer ces mots, surtout avec autant de facilité. Son expression se déforme, à mi chemin entre la stupéfaction et je ne sais quel sentiment étrange. Peut être est-ce du dégout ? De la peur ? Son absence de réponse me laisse dans mes questionnements, et sa main qui se retire soudainement me force à lâcher sa manche. Naruto, dis moi quelque chose, n'importe quoi...

 

- "C'est... Bizarre."

 

Il passe la porte immédiatement après avoir prononcé cette minuscule phrase qui a sur moi un effet violent. Bizarre ? Oui, peut être. Je suis près à l'assumer s'il le souhaite, mais ce n'est visiblement pas son choix. Mes pensées s'évadent un instant puis je réalise à nouveau ce que je lui ai dit. "Je t'aime". C'est à la fois si simple et si difficile. Je n'y pensais même pas il y a encore quelques minutes, ça me semble tellement étrange. On dit souvent que l'amour frappe d'un coup, sans prévenir, quand on s'y attend le moins. Après tout ce qu'il s'est passé, est ce que je peux réellement dire que c'est mon cas ?...

 

Cette réflexion, aussi humaine que futile, arrive à me rappeler à quel point ma tête peut me faire mal. Je me demande combien de temps il va falloir que j'attende avant que Naruto ne revienne. Va-t-il revenir d'ailleurs ? Rien ne l'oblige à rester ici avec moi. Malgré tout, je reste assis sur ce canapé comme une loque, attendant je ne sais quel miracle. Fermant les yeux, je me laisse aller au sommeil une seconde fois. Qui sait, peut être que celui-là sera plus réparateur que le précédent.

 

Lorsque je me réveille pour la deuxième fois aujourd'hui, il est midi et ma tête semble s'être calmée. Je réalise immédiatement que je ne suis pas seul dans la maison aux bruits provenant de la cuisine. Je me penche légèrement pour voir la source d'agitation et observer un Naruto en pleine préparation. Je ne sais pas ce qu'il essaye de faire mais je ne suis pas sur que ce soit comestible. Toujours est-il qu'il est suffisamment concentré pour ne pas se rendre compte que je ne dors plus.

 

J'hésite un peu avant de me lever pour aller le rejoindre. Il est revenu, et pas pour plier bagages. Cette simple constatation me rassure et m'encourage à faire le premier pas. Il ne m'entend pas arriver et sursaute au son de ma voix :

 

- "C'est quoi ?"

 

Lorsque ses yeux se lèvent vers moi, je me rends compte qu'il ne sait toujours pas quoi penser de ce que je lui ai dit plus tôt dans la matinée. Il ne répond pas tout de suite, cherchant à comprendre de quoi je parle. Je pointe alors du doigt l'étrange mixture devant lui.

 

- "Je... C'est sensé être un gâteau à la fin.

 

- Tu as besoin d'aide ?"

 

Il me dévisage encore un moment. J'ai l'impression de rencontrer un inconnu. Lui avoir avoué mes sentiments fait-il de moi quelqu'un de complètement différent ? On dirait.

 

- "Je suis pas contre.

 

- Hn. Il est pour qui ce gâteau ?"

 

Il ne me répond pas, faisant mine de ne pas avoir entendu ma question. Tant que ce n'est pas pour Gaara, je m'en fiche de savoir qui pourra le manger, moi. Je l'aide à rattraper ce qui aurait pu être un massacre en silence, mais quelque chose n'est plus comme avant. Il prend soin de rester à une certaine distance de moi, et sursaute à chaque fois que je le frôle. Cette situation ne me plait pas du tout, et après plusieurs minutes de retenue je finis par craquer.

 

- "Je ne vais pas te mordre, tu sais.

 

- Hein ?

 

- Je te fais peur Naruto ?

 

- Pou... Pourquoi tu dis ça ?

 

- Écoute toi bafouiller. Tu as vu comment tu te comportes ?

 

- J'ai rien fais.

 

- Ah oui ?"

 

Je tends la main vers lui et, dans un réflexe maladroit, il s'écarte encore.

 

- "Et ça ?

 

- C'est... C'est ta faute aussi !

 

- Ah ?

 

- Oui.

 

- Je t'ai tant perturbé ?"

 

Il réfléchit un moment tandis que ses joues s'empourprent. Ses yeux se fixent au sol et je commence à comprendre que je n'aurais pas de réponse.

 

- "Fais comme si je ne t'avais jamais rien dis.

 

- Pardon ?! Tu peux entendre ce genre de chose et tout oublier quelques heures après, toi ?!

 

- Je ne voulais pas te mettre dans cet état là.

 

- Bah c'est raté !

 

- Et tu en pense quoi alors ?"

 

Ma question le stoppe immédiatement. S'il ne veut pas ignorer mes dires, il va devoir les affronter de toute façon. Je reste face à lui, attendant froidement que sa voix me parvienne même si je tremble intérieurement. Le sens de tout ce temps passé avec lui est suspendu à ses lèvres.

 

- "Je... J'en sais rien.

 

- Qu'est ce qui te bloque à ce point ?

 

- Hein ?

 

- Tu peux simplement me dire que tu ne partages pas mes sentiments et on en parle plus."

 

Je crois que je le brusque un peu, mais je ne veux pas rester dans cette situation trop longtemps. Je le regarde avec insistance pour ne pas lui laisser la possibilité de fuir à nouveau.

 

- "Ben justement, j'en sais rien..."

 

Uh ? Comment ça il en sait rien ? Il ne sait pas comment me rejeter, ou il ne sait pas s'il ressent la même chose que moi ? J'ai besoin de savoir. Je m'approche de lui calmement tandis qu'il recule jusqu'à se retrouver dos au mur. Je tends lentement la main vers sa joue et il ne me repousse pas, m'incitant presque à ne pas m'arrêter. Ses yeux se ferment dans une mimique apeurée qui ne m'empêchera pas d'approcher mes lèvres des siennes. Avec toute la douceur que je possède, je l'embrasse chastement mais tendrement.

 

ça ne dure qu'une seconde, peut être moins. Je recule légèrement pour observer son visage toujours aussi rouge dont les yeux s'entrouvrent difficilement. Il m'interroge du regard, cherchant une explication à mon geste. Si je ne veux pas le laisser sans réponse, je dois lui en donner aussi.

 

- "Si ça ne te dégoûte pas, poses toi des questions."

 

Ne pouvant rien faire de plus, je retourne dans la préparation du gâteau. Naruto reste immobile encore quelques secondes avant de me rejoindre sans rien ajouter. Il a toutes les cartes en main, reste à savoir combien de temps il va mettre avant de prendre une décision. Nous ne ré-abordons pas le sujet et cuisinons calmement jusqu'à ce que nous ayons fini. Une fois le gâteau au four, je me décide d'insister sur un tout autre point.

 

- "Je peux savoir pour qui j'ai cuisiné quand même ?

 

- Pour Sakura."

 

Je tique. C'est chez elle qu'il était allé ce matin alors ? Lui aussi... Je n'ai pas finis de devoir des choses à ma coéquipière je crois.

 

- "On ira lui porter ensemble si tu veux."

 

Naruto me regarde, surpris de ma proposition. Un sourire timide s'étire au coin de ses lèvres avant qu'il hoche la tête pour approuver ma demande. Je me garde bien de lui demander la raison d'un tel cadeau, je connais déjà la réponse. Nous attendons que notre préparation cuise en silence, Naruto devant la télé et moi le nez dans divers rouleaux que je devais trier depuis longtemps. Ranger deviens bizarrement une occupation primordiale lorsque l'on souhaite paraître occupé pour ne pas avoir à parler.

 

Le calme est tel que le tintement de la minuterie arrive à nous faire sursauter. C'est lui qui se lève pour s'en occuper et, une fois le gâteau démoulé, nous nous rendons chez notre coéquipière. La pauvre, on ne lui aura pas laissé beaucoup de répits ce matin. Nous ne parlons pas durant le trajet, mais l'ambiance est plutôt détendue. Je sais que Naruto réfléchi activement et ça me suffit amplement.

 

Lorsque nous frappons à la porte, c'est une Sakura sceptique qui nous ouvre. Son sourire biscornu en dit long, je pense que nous n'allons pas rester longtemps. Elle nous fait entrer et Naruto la rejoint dans la cuisine un instant, me laissant seul au salon. Je l'entends la remercier discrètement puis ils me rejoignent.

 

- "On le mange ensemble ?"

 

Lorsque nos yeux se croisent, je comprends qu'elle sait que je la remercie aussi. Nous entamons donc le gâteau qui n'aura pas eu une vie bien longue, mais je grimace lorsque notre coéquipière lance la conversation.

 

- "Alors, elle s'est bien finit cette soirée ?"

 

Je dois probablement loucher, et Naruto en fait autant. Je suis sûr qu'intérieurement Sakura jubile. Laisser un tel silence serait trop gênant et je me décide donc à répondre.

 

- "Hn, j'ai dû surveiller Naruto pendant qu'il décuvait.

 

- Eh ! J'allais très bien, t'as rien surveillé du tout !"

 

Je jette un regard d'une froideur sans fin au blond qui comprend rapidement le problème. D'un autre côté, vu le mot que Sakura a laissé, elle sait très bien ce qu'il s'est passé mais Naruto n'est pas au courant, lui. Il se rattrape maladroitement mais bien évidement, il ne sait toujours pas mentir.

 

- "Je... Je me suis endormi tout de suite de toute façon, je me rappelle même pas du moment où les gens sont partis.

 

- Oui, ça je m'en doute."

 

Ce sourire... Sakura, sale garce... Décidément je ne la comprends pas, une fois elle m'aide et la minute d'après et s'amuse de la situation. Je la fixe lourdement mais elle ne lâche pas Naruto des yeux. Je finis donc par me tourner vers lui pour mieux voir le rouge qui est remonté jusqu'à ses oreilles. Il est pas possible, il ne lui manque plus qu'une pancarte "J'ai couché avec Sasuke". Il faut rompre le malaise.

 

- "Et toi Sakura, tu es rentrée sans soucis ?

 

- Bien sur, je ne bois pas comme vous, moi.

 

- Hn... Parle surtout pour Naruto.

 

- N'importe quoi, j'ai pas trop bu !"

 

Nos deux pairs d'yeux fixent l'Uzumaki avec un air dubitatif. Naruto, tu es bien gentil, mais là on ne peut pas te laisser dire ça...

 

- "Bon, peut être un tout petit peu alors...

 

- Si ce n'était qu'un petit peu."

 

Sakura renchéri soudainement, pour mon plus grand malheur.

 

- "T'es mal placé pour dire ça toi, qui s'est promené avec un bouteille à la main sur la piste de danse ?

 

- ... D'un autre côté, Naruto en a bu la moitié avec moi.

 

- M'impliques pas, c'est toi qui te trimbalais avec !"

 

Je me serais presque braqué quand Naruto semble avoir une illumination.

 

- "T'étais en colère d'ailleurs non ? Il s'est passé quoi ?"

 

Je me remémore ce moment un peu flou et revois tant bien que mal tous ces yeux posés sur moi, épiant le moindre de mes gestes. Sur le moment je me suis senti très oppressé, mais après coup j'imagine que seuls Shikamaru, Sakura et peut être Gaara devaient m'observer avec insistance. Dans tous les cas, je ne peux pas expliquer ça à Naruto.

 

- "Je ne me rappelle plus.

 

- Genre, aller dis nous tout !

 

- Je te dis que je ne me rappelle pas, je ne devais même pas être énervé en plus.

 

- Mouais..."

 

Sakura ne dit rien, elle n'en a certainement rien à faire en même temps. J'aide à ce que la discussion tourne court pour ne pas avoir à m'expliquer sur de nombreux sujets, et nous partons enfin. Ces quelques minutes, une trentaine tout au plus, m'ont semblées durer une éternité. Lorsque nous sortons, nous décidons de vaquer chacun à nos activités. En réalité je serais bien resté avec Naruto, mais j'imagine combien ce doit être pesant pour lui d'être en ma compagnie au vue de la situation.

 

C'est ainsi que la journée défile, encore plus lentement que la matinée. Je prends soin d'éviter de croiser le blond en espérant que la soirée soit plus productive. Pourtant, lorsque je rentre enfin, aucun sujet houleux n'est abordé. Tout se déroule comme si rien ne s'était jamais passé, et je me garde bien de faire une quelconque remarque à ce propos. Je ne sais pas s'il y pense encore ou s'il compte juste ignorer le problème, mais je ne crois pas avoir le droit de le presser davantage.

 

Je vais donc me coucher avec l'esprit perturbé, mais sans me douter de la suite des évènements. Oh, rien de particulier en soi puisque les jours suivant se sont déroulés de la même façon, comme si de rien n'était. Chaque nouvelle journée me donne l'espoir d'un changement, en vain. En revanche, plus le temps passe et plus je me rends compte de la puissance de mes sentiments à l'égard de Naruto. Sa joie et son dynamisme qui redeviennent progressivement naturels ne font que renforcer la valeur des mots que je lui ai dits. Je l'aime, vraiment. J'en viens même à me demander si je ne devrais pas me contenter de cette situation dans laquelle tout se passe pour le mieux. Seulement je suis humain (il semblerait en tout cas), et plus les jours défilent, plus je le désire.

 

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