Butterfly Reflect

Chapitre 9 : Chap 7 : We're trought

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28920 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour il y a 9 mois

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Chapitre 7 

“We’re trought”


-It’s wathever…It’s whatever…It’s wathever…Rien vu…connais pas…Rien vu…connais pas. Passé…c’est le passé, c’est le passé…Oublier…oublier…oublie…articulait imperceptiblement Izuku, répétant inlassablement ces mots, cette incantation destinée à le rendre amnésique. 


 Sentant que ses jambes le portaient à peine, il se laissa tomber sur un des sièges qui bordait le quai, et il fourra sa tête au creux de ses mains, en vue de retrouver ses esprits ainsi que l’usage de son corps qui fourmillait de la tête au pied. La situation était critique, et il devait absolument reprendre le contrôle de son mental dont il sentait l’imminent débordement. Il ne fallait pas, non il ne fallait pas laisser le tsunami se faire, surtout pas ici, dans un lieu public et pire encore, en présence d’Elliot.


-...It’s wathever....Nothing anyone says to me will change my mind…It’s whatever…It’s whatever…It’s watever…It’s whatever…My mind, it’s whatever, Good thing…My mind, it’s whatever, good thing…chantonna intérieurement Izuku les yeux fermés, en appliquant ses mains sur ses oreilles.


 Ce chant avait pour but d'étouffer d’autres sons, notamment des voix imaginaires que ce brutal retour dans le passé exhumait. Une mémoire aussi bien auditive et visuelle qu’olfactive dans laquelle Izuku était pour l’instant coincé, et dont il fallait absolument se tirer, sans quoi le contrôle allait définitivement lui échapper. 

 Le cœur au bord des lèvres, Izuku invoqua toute son énergie pour refouler la crise de panique, ainsi que la nausée qui l’accompagnait, et il entrouvrit les yeux pour s’amarrer à l’une des sangles des rangers d’Elliot qui se tenait debout devant lui. Ce dernier accorda quelques instants à Izuku ainsi qu'à lui-même, le temps que sa colère redescende, puis il s’accroupit et pencha la tête, pour essayer de trouver le regard d’Izuku qui respirait lentement et profondément, probablement dans le but de retrouver son calme. Mais de toute évidence, l’exercice ne semblait pas particulièrement efficace.


-Hey. Tu reviens…? dit Elliot à voix basses, en soulevant une des mèches noires d’Izuku. 


 Bien qu’il ait comprit qu’on s’adressait à lui, l’interpellé ne répondit pas et ne leva pas la tête, craignant de régurgiter si par malheur il ouvrait la bouche. C’est bien une des dernières choses qu’Izuku aurait voulu montrer à son ami, et d’ailleurs à cet instant, il aurait tout donné pour disparaître, ou du moins, s' il l'avait pu, il aurait fui le plus vite possible pour éloigner Elliot de cette image répugnante. Faute de quoi, Izuku serra les dents et rassembla ce qui lui restait d’énergie pour s’apprêter à dire à son ami de le laisser là et partir, mais il se ravisa en sentant Elliot poser ses coudes sur ses genoux. Dans le même temps, le nez d’Izuku sembla retrouver ses facultés normales pour le ramener dans le présent, ici, sur le quai, avec Elliot, dont l’odeur l’entoura soudainement, écartant celle nauséabonde qu’il avait senti dans le métro. Sentant que l’effluve salvatrice agissait sur lui à la manière d’un anti-venin, Izuku inspira profondément, pour s’en imprégner, puis lentement, il baissa la tête jusqu’à poser le front sur l'épaule d’Elliot, l’ancre qui allait l'empêcher d'être emporté par la tempête. Le tsunami que les grondements du Mordor avaient menacé de provoquer sembla reculer, puis petit à petit, Izuku recouvra l’usage de ses autres sens. A l’odeur d’Elliot s’ajouta celle de son perfecto qui sentait le cuir et le tabac, et sous ses pieds, il pu de nouveau sentir les aller venue des métros qui faisaient gronder le sol. Définitivement sûr que la tempête avait été contenue, le corps d’Izuku se relâcha lentement, comme un ballon qu’on dégonfle, et son cœur s’apaisa, ainsi que son ventre qui ne menaçait plus de le faire vomir. Ne restait plus qu'à recouvrer la vue, alors, Izuku leva lentement la tête, et courageusement, la tourna pour regarder Elliot. Quand leurs regards se rencontrèrent, ce dernier pencha la tête, visiblement en attente d'explications, alors sans réfléchir, Izuku s’adressa à lui, dans un mouvement de lèvres presque imperceptible.


-Si tu ne demandes pas, je n'aurais pas…à mentir…


 Elliot se tordit la bouche en hochant la tête, et il contempla ses chaussures un court instant avant de regarder Izuku de nouveau pour lui parler.


-Tu peux marcher ? dit Elliot avant de se redresser en s'appuyant sur ses genoux. 


 Izuku acquiesça, puis il imita Elliot en prenant garde à ne pas se lever trop vite pour éviter une éventuelle baisse de tension.


-Ok. Viens. On se casse d’ici.


 De nouveau, Izuku acquiesça, puis il fouilla sa poche pour trouver ses écouteurs dont il s'équipa avant de suivre machinalement son ami en regardant ses chaussures, sans même se demander où ils pouvaient bien aller. La destination l’importait peu, son seul souci de moment étant ce à quoi Elliot venait d’assister, et la honte que l'événement avait provoqué. A choisir, Izuku aurait préféré se jeter sous un métro plutôt que de se montrer ainsi. Et c'était d’autant plus humiliant pour lui alors qu’auparavant il s'était promis de soutenir son ami qui encore aujourd’hui l’avait sorti d’une très mauvaise passe. Pour Izuku, c'était à se taper la tête contre les murs, et c’est ce qu’il songea à faire, dans la vitre du métro qu’Elliot leur fit emprunter.


Give something - The soft Moon

https://www.youtube.com/watch?v=yjBFJPmVLuY


-You give something…when I…give nothing…chantonna mentalement Izuku en regardant le reflet d’Elliot dans la vitre, “...I don’t wanna loose my mind, that why I keep you so close…When I’m on my own, I could give up the ghost…Cuz’ I don’t wanna lose my mind, that’s why I keep you close…continua t-il, cette fois ci en balayant du regard la rame du métro qu’Elliot avait choisi d’emprunter. 


 En découvrant sur quelle ligne ils se trouvaient, Izuku se demanda si son ami comptait l'escorter jusque chez lui, mais en fin de compte, ils descendirent quelques stations avant la sienne et celle du lycée. En sortant de la bouche de métro, Elliot demanda à Izuku s' il pouvait courir pour éviter de finir trempé par la pluie, ce dernier acquiesça, et il suivit son ami jusqu'à ce qu'ils s’arrêtent devant l'entrée d'un petit bistrot. L'endroit était très classique, voire vieillot, mais semblait malgré tout très chaleureux. Une destination et une escale parfaite pour Izuku qui remercia mentalement Elliot d’avoir eu la meilleure idée qui soit s' il comptait lui proposer de boire une bière ici. Celle-ci lui permettrait d’au moins pouvoir tenir le coup jusqu'à ce qu’il aille se coucher, moment où, Izuku le savait, la tempête ferait rage de nouveau. Car bien qu’il ait réussi à reprendre le contrôle, il ne s'agissait là que d’un répit, et à un moment ou à un autre, le barrage allait céder. Pour maintenir l'équilibre en place il allait falloir laisser la crise se faire, et celle-ci risquait de se manifester lorsqu'il serait seul dans les ténèbres de la nuit. 

 Mais seul, Izuku ne le serait pas tout de suite, et d’ailleurs il allait être en excellente compagnie. En rentrant dans le petit bistrot, ce dernier valida définitivement l’idée d’Elliot qui l’avait emmené là où se trouvaient Denki et Kiri, de véritables anti-depresseurs humains, probablement capable de vous arracher un sourire même dans les pires moments.    


-Wah frérot…?! Qu'est ce que tu fous là ? dit Denki, occupé à essuyer des verres derrière le bar, “Hé mais…Y’a le petit ninja aussi ! Trop bien !” s'exclama-t-il ensuite sans se soucier des clients âgés qui sirotaient leur verre. 


 Izuku salua Denki et Kiri de la main avant de regarder les lieux, un petit troquet dont l'intérieur était aussi vieillot que l'extérieur. L’endroit ne devait pas avoir été réaménagé depuis des décennies, et tout devait être d'époque, que ce soit le carrelage, le papier peint, le mobilier ou encore le grand bar en zinc. Cependant, le tout donnait un charme particulier à l’endroit qu’Izuku trouva très chaleureux, et surtout réconfortant. Ce dernier s’avança en direction du bar en humant l’atmosphère, parfumée d’une agréable odeur anisée toute droit venue d’une tablé de trois papis qui consommaient leur ricard en regardant un petit poste de télévision presque aussi vieux qu’eux. 


-Trop cool que vous soyez venu, dit Kiri, installé à une petite table, occupé à jouer sur une console portable, “Bah…Qu’est ce qu’il y a frérot ? T’es blanc comme un cul.”, ajouta t-il à l'adresse d’Izuku qu’il trouva plus pale qu’il ne l'était d’ordinaire. 


-Froid, articula Izuku en frictionnant ses bras.  


-Aaah, petite bière pour te réchauffer moi je dis. Installez vous les frérot. Vas y Kiri sale geek, décroche et viens au bar avec nous, dit Denki.


-Oui merci…Heu…Je peux…articula Izuku en pointant aléatoirement un doigt.


-C’est là bas les chiottes. Porte au fond du couloir à droite, dit Elliot.


-Merci…articula Izuku en se rendant aux toilettes en vue de passer son visage sous l’eau et d’user d’huile essentielle pour maintenir son calme. 


-Tu veux un canon frérot ? dit Denki à Elliot en posant la main sur la tireuse à bière. 


-Ouai. Hé dites…commença Elliot en s’installant au bar. 


-Yep ? Quoi frérot ? demanda Kiri.


-C’est quoi déjà les prunes la…continua Elliot, le menton reposant entre deux doigts tandis que de l’autre main il tapotait le bar du doigt.


-Wah tu t’es cogné ou quoi ? C’est quoi ton délire de prunes ? dit Kiri en clignant des yeux.


-...T’sais genre…Bleue-violette…Insipide, dégueulasse…précisa Elliot l’air dégoûté en plissant les yeux. 


-Heu…Bleu-vio…Ah, les Qwetch ? trouva Kiri.


-Ha ! s’exclama Elliot en tapant le bar de la main, “Ouai voila. Les Qwetch. Les putains de Qwetch.”


-Moi j’aime bien les Qwetch, pas celle des magasins, celles que tu vas cueillir avec ton grand père sur l’arbre t’sais. Enfin…Si seulement ça me foutais pas la chiasse, dit Denki.


-Une putain de chiasse ouai…Une Qwetch de supermarché à la con qui fou la chiasse voila, dit Elliot en hochant la tête, “Hm… “La…Qwetch ratée”...“Qwetch édenté”...ou…Ha. “Chiasse de Qwetch”. Ouai voilà. “Chiasse de Qwetch.”, ajouta-t-il mentalement en regardant ailleurs. 


 “La chiasse de Qwetch” désormais bien enregistrée dans la mémoire d’Elliot, qui quelque part, souhaitait presque recroiser sa route un jour pour lui donner l'occasion de refaire intégralement sa dentition. Mais pour ça, encore fallait-il qu’Izuku le lui demande, et de toute évidence, connaissant l'énergumène, ce  n'était pas à l'ordre du jour, ni aujourd’hui ni plus tard. Donc inutile de s’attarder sur le sujet qui pour l’instant était classé sans suite dans la tête d’Elliot.


-Heu…Frérot…? Ça va…? l'interpella Denki en voyant l’air renfrogné, voire écoeuré de son ami, “Il s’est passé un truc …?” demanda t-il ensuite en mettant un petit coup de menton vers les toilettes où se trouvait encore Izuku.


-Tsk !…Ca flaire dans le putain de métro…marmonna Elliot en fronçant le nez, “Mon verre ?”, ajouta t-il ensuite.


-Il est sous ton nez espèce de teubé, répondit Denki en se faisant la réflexion qu’il était curieux que la puanteur du métro contrarie autant Elliot, “ Il voudra quoi petit ninja ? Demi ?”, ajouta t-il ensuite. 


-C’toi l’teubé. Pinte pour lui aussi.


-Alright pinte pour tout le monde quoi. Du coup tu fais quoi ce soir ? Tu rentres pas frérot ? Tu veux pioncer là ? proposa Denki en remplissant des verres. 


-Ouai. Je prends le téléphone du bar deux secondes, dit Elliot en se levant.


 En se rendant au téléphone, il croisa la route d’Izuku à qui il réussit à arracher un sourire en faisant mine de lui barrer la route, et lorsque celui-ci réussit à passer, Elliot fronça les narines en sentant une odeur de menthe lui chatouiller le nez. Il renifla et se frotta le bout du museau en grimaçant, puis il jeta un bref regard au dos d’ Izuku avant de se rendre au téléphone. Ce dernier se joignit à Kiri et Denki qui semblait particulièrement excités, et il s’installa au bar, où dieu merci, un généreux verre de bière l’attendait. 


-Vas y Kiri reste aussi, petite réssoi improviséeeeee ! se réjouit Denki en faisant tournoyer un torchon au-dessus de sa tête.


-Chaud, répondit Kiri en levant son verre. 


-Bon bah dès que je ferme le bar ephad on grimpe là haut et on se cale du son moi je dis. Ah, santé petit ninja. 


-On dit “Kampai” au Japon, écrit Izuku avant de lever son verre.


-Stylé, bah kampai alors ! Ça va mieux ? Tu t’es réchauffé ? 


-Oui merci. Tu bosses ici du coup ? écrit Izuku après avoir bu une gorgée de sa bière, presque aussi salvatrice que l’odeur d’Elliot. 


-Non trop pas, c'est juste que les clients sont trop ieuv, ils y voient que dalle alors je me sert, répondit Denki en haussant les épaules. 


 Surprit, Izuku resta béat, et  Denki et Kiri s'esclaffèrent en se faisant la réflexion que leur nouveau camarade était un tantinet naïf. 


-Ahahaha ! T'es con frérot ? dit Denki en mettant une petite tape sur l’épaule d'Izuku, “Je fais des heures ici pour payer une partie du loyer au proprio du bar, c’est un ami de la famille. J'habite au-dessus. Mes darons voyagent tout le temps alors on s'est arrangé comme ça.”


-Malheureusement ils le trimbale pas avec eux, dit Kiri discrètement à Izuku avant de se prendre un torchon dans la figure.


-Vas y gros gitan, t'es bien content d'avoir des canons gratos, dit Denki.


-C'est d'ailleurs une des seules raisons qui me pousse à supporter ta tronche. Hé, avoue que c'est plutôt cool de pas avoir à parler qu'à des retraités, ça vaut bien quelques verres gratos. A moins que les sujets tels que «Béatrice qui a encore une fois perdu son dentier» ou “Béatrice qui trouve que la nouvelle génération est une bande de branleurs” te fascinent. Mais j'en doute. 


-Dame Béatrice, corrigea Denki.


- Mdr. Dame Béatrice la pouffiasse !  s'exclama Kiri en imitant le personnage d'un film culte.


-Putain comment tu le fait bien, à chaque fois ça me bute. Kiri Jacouillet, dit Denki en rigolant, “Han  mais j'avoue cette Béatrice avec ses putains de bigoudis la. Tous les matins, à la même table, devant la télé, avec son p'tit iench, et son déca, et le soir, même heure, même table, même iench, et un petit verre de blanc.”


-Roho, hé Izuku, tu devrais rester aussi pour pas rater ce spectacle demain matin. C'est à voir au moins une fois dans sa vie.  


-J'ai un clic-clac grand confort testé et approuvé par Elliot, le plus grand squatteur de tous les temps, insista Denki en haussant les sourcils, l'air aguicheur. 


-Pf, c'est Kiri le squatteur ouai, intervint Elliot qui venait de les rejoindre après son coup de fil. 


-J'avoue Kiri comment tu squattes en fait. Et Elliot il fait  à manger quand il vient. Toi tu sers à rien. En plus t'habites pas loin, Elliot lui il est à l'autre bout du monde.  


-Vas y t'sais quoi, la prochaine fois que t'es dans la galère pour réparer ton presse purée daubé m’appelle même pas, répliqua Kiri.


-Presse purée ? écrit Izuku en se demandant ce qu'il pouvait bien avoir à réparer sur un tel objet.


-Ouai son putain de cyclomoteur tout claqué la. Faut que tu le vois un jour dessus avec son casque qui lui fait une tête de gland. Ca aussi c’est à voir au moins une fois dans sa vie, ricana Kiri.


-Pas besoin du casque, ajouta  Elliot.


-Dixit le mec qui ressemble à un chihuahua,  répliqua Denki.


-Ha !? s’exclama Elliot en faisant mine de vouloir passer par-dessus le bar.


-Attention Denki, ne sous estime pas un chihuahua qui montre les dents, prévint Kiri en agitant le doigt.


-Sérieux les mecs, je vous chie dessus. Une chiasse de Qwetch tiens…commença Denki.


 Izuku fronça le nez en voyant Denki évoquer cet abominable fruit, un mot qu’il noya aussitôt dans une grande gorgée de bière.


-...Bon, toi Elliot t'es loin, je te laisse pas en galère, Izuku il est gentil alors il reste aussi, mais toi Kiri, comment tu vas passer la soirée sous la pluie, poursuivi Denki.


-Tu restes ? demanda Elliot à Izuku pendant que Denki et Kiri s’échangeaient d'autres politesses.


- Moi ça va, j'habite pas loin, je peux rentrer après, articula Izuku.


-Ha…? Et…Si t'as pas envie de rentrer, articula Elliot avant de boire une gorgée de sa bière.


-Dans le mille…songea Izuku en se demandant jusqu’où pouvait voir le rayon x de son bat-ami. 


 A choisir, Izuku aurait de loin préféré passer sa soirée voire la nuit entière à bavarder avec eux tous pour détourner son attention du reste, le tout en buvant quelques bières pour s'anesthésier. Bref, il n’avait qu’une envie : mettre la tête dans le sable pour s'épargner d'être tourmenté par un flot de pensées parasites. Il n’y couperait pas, à un moment ou à un autre il allait devoir faire face, et il savait comment ça finirait, mais l’opportunité de reculer l’instant fatidique était trop belle. Alors, en croisant les doigts, Izuku tenta sa chance, et il envoya un message à sa mère en lui indiquant de manière précise où il était et avec qui, afin d’augmenter les chances d’obtenir son aval. Et après un long questionnaire pour savoir s' il commençait tôt le lendemain, s' il avait bien fait ses devoirs, ou encore s' il pourrait dîner, Izuku obtint son accord. Ce dernier soupira de soulagement en se remerciant lui-même d’avoir respecté le deal d’envoyer régulièrement des messages la dernière fois qu’il était sorti, chose qui avait certainement dû motiver le choix de sa mère. 


-C'est bon, je reste, articula Izuku à Elliot qui lui leva son verre pour trinquer. 



***



-Ah…Petit poussin devient grand et commence à voler de ses propres ailes…dit Irène en verrouillant son portable. 


 Bien qu’elle soit actuellement en train de se demander si elle n'était pas un peu trop laxiste, Irène se réjouissait tellement de voir son fils reprendre une vie normale de lycéen qu’il avait été difficile de lui refuser sa demande. Comme tous les parents, il était parfois compliqué pour elle de trouver le juste équilibre dans l'éducation de ses enfants, et plus encore en ce qui concernait Izuku. Mais après tout, elle pouvait avoir toute confiance en son fils qui avait tenu parole lors de sa première sortie, et puis c’est aussi ainsi qu’elle avait fait avec Nami, et c'était plutôt une réussite. Quoique, lors d’une sortie nocturne, cette dernière avait déjà eu une mauvaise expérience, qui fort heureusement s'était bien terminée. Irène frissonna en y repensant, puis pour se rassurer, elle se rappela que sa fille devait ce moment à de mauvaises fréquentations, ce qui ne semblait pas être le cas d’Izuku qui était visiblement bien entouré. Enfin, encore fallait-il s’en assurer car du deal manquait une promesse, celle de rencontrer Elliot que le cœur de maman d’Irène devait à tout prix passer au rayon x pour être rassuré une bonne fois pour toute.  


-Je me demande à quoi il ressemble…Enfin…Un “grand blond avec des piercings” d'après poussin, mais ça reste vague…songea Irène une cigarette en bouche en s’emmitouflant dans son gros gilet.


 Puis, alors qu’elle se rendait sur le balcon avec une tasse de thé, Irène sursauta en entendant son portable sonner dans le salon. Elle s’y précipita, pensant que c'était son fils qui l’appelait, avant de soupirer en se tapant le front, se rappelant que pour une raison évidente, Izuku ne téléphonait jamais. Quel dommage d’ailleurs, car de loin, Irène aurait préféré voir le nom de son fils ou celui de sa fille s’afficher sur l'écran, plutôt que celui qu’elle avait sous les yeux. Et ce nom-là avait un don tout particulier, celui de lui faire perdre son calme, qu’elle avait pourtant Olympien de manière générale.  


-Oh....pffff… soupira t-elle en regardant l’écran, l’air dépité, “Bon aller, courage ma cocotte…On respire et surtout, surtout…on-ne-s'énerve-pas…” souffla-t-elle ensuite avant de décrocher.


-Allo Irène ?


-Bonsoir Tenya, comment vas-tu ? Tu n’es pas couché ? Il est tard chez toi… répondit Irène avant d’allumer sa cigarette dont elle tira une grosse bouffée. 


-Je viens de finir le travail. Izuku est à côté ? Transmets lui ce que je vais te dire s’il te plait.


-Ça va merci et toi ? dit Irène dont le pied martelait déjà le sol d’agacement, “Il est 1h du matin au Japon Tenya, tu devrais te reposer. Et non, Izuku n'est pas là.


-Comment ça, “Izuku n’est pas là”...?


-Il est de sortie avec des amis. 


-Pardon…? “De sortie”...? En pleine semaine ?? A cette heure-ci ?? Vraiment Irène, je doute franchement de tes capacités à élever ces enfants….fulmina Tenya. 


-Nos enfants. Et sinon peux tu te réjouir d'apprendre que notre fils est avec des amis ? dit Irène en tapotant nerveusement sa cigarette, sentant sa patience la quitter de manière précoce.


-Quelle idée vraiment ! Il devrait être en train d’étudier a l'heure qu'il est ! 


-Izuku a déjà fait ses devoirs. Et il a de très bonnes notes à l’école, il est premier de sa classe. Et je sais pas si tu te souviens hein, mais il a pris énormément d’avance, même trop,  il y à deux ans…Alors il peut bien s'amuser de temps en temps non ? Maintenant qu'il y arrive Tenya, dit Irène sur le ton du reproche.


-“S’amuser”…Ce n’est plus un bébé que je sache. Et oui, je me souviens merci, inutile de parler du passé. Et être premier de la classe c’est une chose, mais il faut aussi le rester, et pour ça il est déconseillé de se relâcher. Et d’ailleurs dans le présent, c’est toi qui te relâches Irène, ton éducation est plus que discutable…


-Écoutes, l'éducation, si tu t'en était plus soucié à l'époque plutôt que de penser à ta carrière, je pourrais écouter tes conseils, mais la vraiment, non merci, je m'en passe, répondit Irène avec un petit rire. 


-Ah, ne commence pas…! Bon…Quand rentre-t-il ? 


-Demain. 


-“Demain”...? C'est une blague ?! Il découche maintenant ? Nami aussi ?? Bon, peu importe, de toute façon je vais régler le problème…


-Pardon ? Comment ça “régler le problème” ?? Izuku va mieux, merci de t'en inquiéter, il se fait des amis, et ça se passe bien au lycée, alors où est le problème ?? Tout ce qu’il y a à signaler en ce moment c’est des solutions, et des résultats ! Si tu arrêtais une bonne fois pour toute de considérer notre fils comme un “problème” justement, ça irait mieux pour toi et pour vous deux tu crois pas ?? 


-Il a eu un problème, et c’est justement parce que ce “problème” là semble réglé, qu’il faut s'attaquer à un autre : son avenir, dont visiblement tu te préoccupes peu. Et c’est bien parce que toi tu ne penses qu’au passé que tu es laxiste avec Izuku. Tout lui passer, ne rien lui refuser, ça ne fera pas de lui un homme responsable et respectable Irène. 


-Un problème ?? Un cataclysme oui ! Et un…”Un homme responsable” ? Mais…Mais avant d’être un homme, laisse le être un jeune homme, un ado quoi ! Il a 15 ans, et toi tu l'imagines déjà en costard cravate un attaché case à la main ! D’ailleurs…quelque chose me dit que le costard cravate, c’est pas pour lui, alors lâche lui la grappe avec tes “projets d’avenir” à la noix. “Niniania…il faut faire S, math sup…”, mon cul sur la commode…Fiche lui la paix avec ça ! Et responsable et respectable, Izuku l’est déjà !


-Ah je t’en prie, le langage ! J'espère que tu ne parles pas comme ça devant les enfants Irène…Et des projets d’avenir, notre fils n’en a pas, alors pardonne-moi de vouloir lui en assurer un ! 


-Je répète : Izuku-à-15-ans. On peut pas exiger d’un gamin de cet age qu’il sache déjà à quelle profession il va dédier le restant de sa vie. 


-Ah bon ? Alors comment se fait-il que moi je savais déjà à son âge ? Je pense surtout qu’Izuku ne s’en inquiète pas parce que sa maman poule le couve et lui passe tout…


-Pf, tu parles, comme si on t’avais laissé le choix…A peine étais tu sortit du ventre de ta mère que ton avenir était tout tracé. On ne t'a présenté qu’une porte et tu l’as empruntée. Or, moi j'aimerais que nos enfants puissent avoir quantité de portes devant eux. Et pardon, mais j’ai souvenir que tu t’es bien amusé toi aussi, ta jeunesse tu en as profité et d’ailleurs, ça te ferais pas de mal de lâcher ton fichu attaché case pour aller t’amuser ! 


-Oui…La porte ouverte à l’instabilité ou pire encore, à la marginalité. Quelle bonne idée pf ! Un porte, une seule, c’est une tâche dans laquelle investir toute son énergie pour s’assurer un avenir brillant. Et oui, certe, je me suis “amusé” mais ça ne m’a en rien empêché de reprendre les rennes quand il l’a fallu. 


-Pf, tu parles d’un avenir brillant…On voit ce que ça à donné, pouffa Irène avec ironie, “Puis, “reprendre les rennes”...non, moi j’aurais plutôt dit “faire l’autruche”. Tu t’es noyé dans le travail pour pallier à la perte de ton père…


-C’est quoi le rapport ?? Pourquoi tu remets ça sur le tapis ?? Mon père est décédé, j’ai repris l’entreprise point ! Avec fierté ! Je…la coupa Tenya avant d’être lui-même interrompu.


-Bref ! Je sais qu’il est inutile d’aborder ce sujet la avec toi…Mais en ce qui concerne ton “avenir brillant”, dans ton cas ça à donné un chef d’entreprise obnubilé par le travail, délaissant sa famille, et qui aujourd’hui entretient un rapport conflictuel avec son fils avec qui il ne communique plus. Ah si pardon, Izuku t’envoies un tableau excel avec ses notes, parce que c’est la seule chose qui t'intéresse, alors qu’il serait judicieux d’une bonne fois pour toute s'intéresser véritablement à lui et d’aborder les sujets, enfin avant toute chose, LE sujet qui fâche…Depuis, tu n’en a jamais parlé avec lui…D’ailleurs c'est marrant de t’entendre parler de vouloir régler des problèmes quand toi le premier tu ne sais pas les régler tes problèmes…


-Ah bon…? C’est la seule chose qui m'intéresse…? Je ne règle pas les problèmes…? Alors détrompe toi Irène, je suis son père, un rôle que je compte bien remplir, et tu vas voir, on va parler, crois moi. J'arrive en France demain et je viens samedi à l’heure du déjeuner. Qu'Izuku soit là.  


-Hein…?? Que..Quoi..? Attends…D’un coup comme ça…? Que se passe t-il ?? Tu me fais peur…


-On fera une réunion chez toi, et on va discuter. Rien de grave, c’est d’ailleurs tout le contraire, et si tu penses que je ne fais rien pour mes enfants…Je vais te prouver le contraire. Ça ne va pas se passer comme l’année dernière…


-L’année dernière, tu devais partir Tenya ! Je m’en veux de t’avoir écarté, mais tu sais comme moi que c'était la meilleure chose à faire, la santé mentale de notre fils en dépendait ! Et c'était aussi le temps que toi tu puisses encaisser et revenir armé auprès d’Izuku, or tu n’es jamais revenu ! TU as choisis de ne pas t’impliquer dans tout ça, TU n’as pas fais le nécessaire pour endurer tout ça et soigner TON mental, chose que notre fils lui, à faite. Mais la pour le coup…je crains que ta soudaine visite ne le déstabilise. Ne peut-on pas faire autrement pour qu’il puisse s’y préparer ? 


-Pardon…? Tu sous-entends que moi aussi j’aurais dû voir des psychologues…des…des psychiatres et que sais-je encore ? Quelle connerie ! Je n’ai jamais été malade moi que je sache ! Et figure-toi que je n’ai pas eu besoin de ça pour “encaisser”, et le tout en gérant mon entreprise. C’est d’ailleurs un exemple à suivre pour nos enfants : être suffisamment solide pour endurer, sans perdre pied. Être fort, voilà ce que je veux enseigner à Nami et Izuku Irène.


-Langage ! ironisa Irène avant de poursuivre, “Donc toi si je comprends bien, tu sous-entend que ça a été ça le “problème” d’Izuku ? Que tout ça, le fait qu’il soit “malade” c'est venu du fait qu’il n'était pas assez fort, solide, inébranlable ou que sais-je encore ? Alors je vais t’apprendre deux choses Tenya : l’une d’entre elle est dans mon bureau ici, et je vais me faire un plaisir de t’en faire une copie, c’est le dossier médical d’Izuku qui te rappellera comment et pourquoi il en est arrivé là, car je crois qu’il serait bon que tu te rappelles que votre relation bancale y est pour quelque chose. Et l’autre est toute simple, écoute moi bien : se montrer vulnérable et assumer ses faiblesses, c’est justement faire preuve de force et de courage. Et là dessus, c’est plutôt notre fils qui aurait des choses à t'apprendre…”


-Et bien c’est formidable, Izuku pourra donc faire démonstration de sa force samedi. Après tout, si il est maintenant suffisamment rétabli pour être capable de sortir avec des “amis”, je crois qu’il pourra facilement “supporter” une visite de son père... Donc, samedi, à l’heure du déjeuner, point. Je ne peux de toute manière pas m’absenter de l’entreprise autrement qu’à ce moment.   


-Rah !! Ce que tu peux être….Ah ! Bref…Peux tu au moins me dire de quoi il s'agit Tenya ??


-Il s'agit de soigner Izuku une bonne fois pour toute, et d’une manière toute autre que celle d’aller parler inutilement à des psychologues pour guérir un mental qui visiblement se porte comme un charme, suffisamment pour qu’il aille s’amuser.


-Pardon…??! “Inutilement” ?? Comment peux tu…commença Irène en écrasant plus que de nécessaire son mégot dans le cendrier.


-Qu'il soit là sans faute, samedi midi, la coupa Tenya.  


-Tenya…! Pf ! Bon tu fais toujours à ta manière de toute façon…Ne lui envoie pas de message, je le préviendrai. 


-Il ne me répond jamais de toute façon, comme tu l’as si bien dit, tout ce que je reçois de sa part, c’est un tableau excel. Je te laisse, à samedi.  


-Oui, merci, bonne soirée à toi aussi !! dit Irène en s'adressant à la tonalité du téléphone. 


 De rage, elle jeta son portable sur la table de la terrasse, puis elle se ralluma une cigarette en s’enroulant plus encore dans son gros gilet. Cet appel et cette future visite de son ex mari lui avaient mis les nerfs en boules, et faisaient naître une anxiété dont elle se serait bien passé. L’angoisse de voir le tout récent bonheur de son fils être balayé par la seule et unique intervention de Tenya noua la gorge d’Irène qui savait pertinemment que ce dernier risquait de mettre à mal tous les efforts d’Izuku. Son fils, Irène savait que c'était un battant, il l’avait suffisamment prouvé par le passé, mais comme tout combattant, il avait aussi ses points faibles, et son père en faisait malheureusement partie. 


-Allez ma cocotte, ça va bien se passer…Ton poussin n’est plus seul, il est entouré, bien entouré, rien, non rien ne peut l’atteindre…se rassura Irène en tapotant sa cigarette dans le cendrier.


 Ce faisant, elle haussa les sourcils en regardant les mégots qui s’y trouvaient. L’un d’entre eux n'était de toute évidence pas le sien, Irène ne fumant que des vogues mentholée, une marque facilement reconnaissable. Quelqu’un d’autre était donc venu ici, et Irène devina sans difficulté de qui il s'agissait. Lorsque qu’il était revenu de sa première sortie, Izuku sentait le tabac, et il avait alors dit qu’Elliot ainsi que sa famille, en réalité de très proches amis, étaient pour la plupart fumeurs eux aussi. 


-Izuku…? Izuku à invité Elliot à la maison..? Spontanément…? Si spontanément qu’il ne me l’a pas précisé…? dit Irène l’air surpris avant de poser sa cigarette dans le cendrier, “Bon…Je suis trèèèèèès mal placée pour dire ça mais…C’est pas bien de fumer si jeune Elliot…” pensa t-elle ensuite en se rendant dans la cuisine pour vérifier le lave vaisselle. 


 C’est avec émotion qu’Irène y trouva des couverts pour deux, et un tupperware qui ne lui appartenait pas. Pour d’autres ça aurait été banal, mais pour elle, c'était une victoire supplémentaire. De toute évidence, Elliot occupait une place toute particulière dans le cœur de son fils qui l’avait invité chez lui, chez sa famille, dans une intimité qu’il se gardait en temps normal de faire connaître aux autres. Un pas en avant, même un sacré bon qu’il fallait absolument encourager et surtout préserver. 


-Ho non Tenya…Tu ne vas rien régler du tout. Et tu vas avoir affaire à moi si tu comptes gâcher tous les efforts de mon poussin…Ça va barder !! dit Irène les mains sur les hanches, en regardant une photo de ses enfants, affichée sur le frigo. 



***


-Allez, allez !! On plie ça viteuf et on se taille ! dit Denki en fermant les rideaux du bistrot.


 Une fois l’établissement clôturé, tout le monde s’activa pour ranger et nettoyer les lieux. Elliot invita Izuku à aider Denki à laver les verres et le bar, tandis que lui et Kiri s’occupaient de mettre les chaises sur les tables et de laver le sol. 


-P’tain ! T’sais pas tenir un balais ou quoi ?? fulmina Elliot en ramassant un petit papier, sa serpillière en main. 


-Vas y mais t’es une vraie daronne toi ma parole… Fais pas un drama pour un pauvre papier…bougonna Kiri.


 En guise de réponse, Elliot transforma le petit papier en boule et l’envoya dans la tête de Kiri d’une pichenette. La provocation donna lieu à un combat de manche à balais qui redonna le sourire à Izuku. Amusé, ce dernier leur proposa une initiation au kendo, l’art du sabre Japonais. 


-Bon sinon…Avant de devenir des samouraïs, ça vous dirait pas de vous grouiller pour qu’on se cale chez moi ? soupira Denki. 


 Une fois le duel de manche à balais remis à plus tard, chacun retourna à sa tâche, et une fois les lieux propres tout le monde suivit Denki. Ce dernier vivait au dernier étage du bâtiment dans un studio mansardé (remis à neuf contrairement au bistrot) dont il fit faire la visite à Izuku qui le  trouva très joli et plutôt bien aménagé. Bien que l’endroit ne soit pas très grand, il avait été intelligemment configuré de sorte à ne pas perdre inutilement de place, et il était meublé du strict nécessaire pour garder un maximum d’espace. La kitchenette située à droite de l'entrée était simplement équipée d’un petit frigo, de placards, ainsi que d’une petite plaque de cuisson, et elle était séparée du reste de l’appartement par la charpenterie du toit. Des poutres en bois que Denki avait décoré de guirlandes qui y étaient enroulées, donnant au tout un aspect féerique et chaleureux. C’est dans ce décor fantastique aux allures de ciel étoilé que Denki invita ses amis à rejoindre la pièce à vivre, équipée en son centre de deux gros fauteuils moelleux, d’un petit canapé clic-clac, et d’une table basse, le tout dépareillé, comme le reste du mobilier. Derrière ce petit salon, contre le mur de droite, se trouvait le lit de Denki, et du côté opposé, une porte pour accéder à la seule autre pièce de l’appartement, la salle de bain. Avant celle-ci se trouvait un petit espace que l’avancée du toit isolait un peu du reste de l’appartement, et qui avait été aménagé en bureau, ou plutôt en atelier du mixage. Denki s'était fabriqué un véritable mini studio équipé d’un ordinateur, d’enceintes, d’un micro, d’une table de mixage et divers appareils dédiés à la création de musique. Bref, l’endroit était une véritable garçonnière dans laquelle tout adolescent aurait rêvé vivre.


-Héhé…C'est mon petit coin perso pour mixer, dit fièrement Denki à Izuku avant d’allumer son PC portable. “Je cale un petit son hop…Je mets la zik en aléatoire mais hésite pas si tu veux mettre des sons toi aussi. Elliot nous a dit que t’avais des trucs cool. Tiens d’ailleurs, vu que tu kiffe aussi la musique, faudrait que tu viennes en teuf un jour pour profiter de mes talents. Ça fera p't'être venir Elliot comme ça. On a réussi à le traîner qu’une fois avec Kiri.”


“Four to the floor” - Starsailor

https://www.youtube.com/watch?v=d9WHUTKMD8k



-Wah ce son à l’ancienne…Pf ! Et “le talent”...Vas y redescend le DJ en mousse la. Comment tu te la pètes, dit Kiri en décapsulant des bières pour tout le monde.


-Bah quoi, on est four to the flour là non ? répondit Denki en montrant la petite assemblée, “Et c’est DJ “Tazer” s'il te plaît”, corrigea t’il ensuite avant de s’adresser à Izuku en lui adressant un clin d’oeil, “C'est toi qui m'a donné l'idée.”


-Génial ! articula Izuku, ravi d’avoir pu rendre ce service à Denki.


-Dommage que ton talent en jette pas autant que ton blaze monsieur David Ghetto, ricana Kiri.


-Alors, pour commencer, Kiri je te propose de fermer ta gueule, surtout quand on sait que t'es le premier à t’exciter devant les baffles quand je mixe, et les autres je vous en prie, installez vous, dit Denki en mettant sa main sur le visage de Kiri.


-Ah attends Izuku, on est comme les vieux du bar nous, on a notre petit setup habituel. On a nos fauteuils de patron avec Denki. Mets toi sur le canap’ avec Elliot, dit Kiri en se libérant de la main de Denki.


-D’accord, articula Izuku en s'installant sur le petit canapé clic-clac à côté d’Elliot. 


-Nickel. Bon, chers chevaliers de la table ronde des frérots, mettez vous ienb hein. Bon comme d'hab, petites bières au frigo : vous vous servez, j'suis pas la bonniche, et Kiri si tu t'endors par terre tout bourré même pas je te ramasse. 


-T’inquiètes frérot, ça arrivera plus, j'aime trop dormir à tes côtés et t'entendre parler dans ton sommeil, dit Kiri en imitant un baiser. 


 En guise de réponse, Denki t’iras la langue en faisant semblant de vouloir vomir, puis après avoir trinqué avec tout le monde il s’installa et réclama de quoi rouler un joint à Elliot. Ce dernier s’en prépara un aussi (Izuku pouffa en constatant une différence de taille entre le joint d’Elliot, roulé comme une cigarette, et celui de Denki qui était immense), et une fois les pétards allumés, la soirée débuta. Soirée qui avait tout d’un spectacle, animée par le duo comique Kiri et Denki. Ces deux-là avaient un don pour faire des sketchs même sans le vouloir, pour le plus grand bonheur d’Izuku qui y trouva là un excellent moyen de se détourner du reste. Pendant un de leur énième échange de vannes en tout genre, ce dernier jeta un regard reconnaissant au dos d’Elliot qui fumait à la fenêtre, et il le remercia une nouvelle fois mentalement d’avoir deviné de quoi il avait besoin, et d’avoir eu l’idée de génie de l’emmener ici. C'était à se demander si Elliot n'était pas doté de capacités extrasensorielles, ou du moins d’une empathie particulièrement aiguisée et surtout insoupçonnable chez lui. 


-Hehe…Brute de décoffrage au coeur tendre…songea Izuku en regardant les ronds de fumée qu’Elliot s’amusait à faire, “Je te revaudrais ça, promis…On sera quitte.” ajouta-t-il par la pensée avant de détourner le regard des épaules d’Elliot qui venait de se retourner après que Denki l’ait interpellé. 


-Frérot ! Mate ! Le peuple à parlé ! s’exclama Denki en tendant son portable. “Kiri, tu me dois un paquet de clopes.”, ajouta-t-il en mettant un coup de coude à ce dernier.


-De où ?! s'indigna Kiri.


-Bah la nouvelle est tombée : je sais de source sûre qu'on entraîne, je cite, “Naruto” dans les bas fonds, expliqua Denki en tapotant son écran de téléphone, “Ah…Déso, on a parié sur toi frérot…” dit-il ensuite à l'adresse d’Izuku qui avait levé un sourcil.


-Pourquoi ? articula Izuku, l’air déconcerté.


-Les rumeurs du peuple du bahut. T'as pas au courant de la dernière ? T’as pas Facebook ? dit Denki en levant son téléphone.


-Non, articula Izuku en tournant la tête, peu sûr de savoir s' il voulait prendre connaissance de la dite rumeur. 


-Sérieux ? dit Denki l’air surpris, “Bon, tiens.”, ajouta-t-il ensuite en donnant son téléphone à Izuku qui s’en saisit un peu à contre-coeur. 


 Ce dernier jeta un regard en biais à l'écran qui affichait un groupe privé nommée : «UA, les cassosseries», suivit du hashtag : “#quandtesunboloss”, bref, un nom qui en disait long sur le contenu. Sans surprise, Izuku devina que la page avait été faite pour humilier et se moquer des élèves impopulaires dont lui ainsi que Denki, Kiri, et Elliot devaient visiblement faire partie. Un cliché d’eux, pris dans la plus grande discrétion, y avait été publié. Mais heureusement, sur celui-ci, lui-même et Elliot étaient flous, la photo ayant été prise au moment où Izuku détalait comme un lapin après avoir taquiné son ami qui s'élançait à sa poursuite. Des petites courses dans le lycée (qui devenaient ensuite une fuite pour échapper aux surveillants qui s’agaçaient de voir Elliot et Izuku courir partout), devenues régulières et qui visiblement défrayaient la chronique sur la page du lycée. Mais ce qui était un jeu innocent pour Izuku et Elliot était vu d’un tout autre œil par les autres élèves, d'après les commentaires qui faisaient suite à la photo.  


-Pov : when cocaïne strikes xD 

-Jvai demandé à Katiev qlq gramme pour gagner le maraton du bahu mdr.

-Il devient aussi débile que ces 3 cassos Naruto… -_-’

-Mais non, ils l’ont recruté pour surveiller leur deal. Si la bac passe, Naruto il fait un ninja run pour les prevenir :o 

-Si il y arrive sans se prendre les pieds dans les sangles de ses fringues. Sérieux c’est quoi ce look…é_è

-Jsais pas il se trimballe avec un baudrier au cas ou faut croire. :p 

-Au cas où il tombe d'un trottoir, pour lui ca doit donner le vertige lol.

-C’est un ninja minimoy. Il a les veuch et tout ptdr.

-Mé nn c l’uniforme de la team des Ksos :D 

-La seule différence c’est que Naruto il trouve pas ses fringues dans une poubelle comparé aux trois autres.

-Bi1 lé parent pété de tune ? :D

-Ah bah voila, tout s’explique : Katiev a trouvé un portefeuille sur patte. Ça vaut le coup de passer l'éponge pour ce qu’il a ramassé en EPS xD.

-Mdrrr t’es un génie.

-Svp quelqu’un aurait la vidéo d’ailleurs ? 

-Déso je l’ai plus Naruto m’a dit de la sup. J’voulais pas me faire étaler façon Katiev…T-T


-Mais…C’est vous TOUS que je vais étaler !!! s’exclama mentalement Izuku à la lecture de ces commentaires tous plus vomitifs les uns que les autres.


 Cet échantillon suffit à Izuku qui grimaça en faisant glisser son doigt sur l'écran pour y découvrir une autre photo, cette fois-ci prise à la cantine et dont la légende était : “Quand t'as réussi à gratter le RSA de tes darons. Un grand moment d’émotion pour nous tous de voir enfin Katiev manger à sa faim.”. Elliot était seul sur le cliché, et le photographe avait choisi de l’immortaliser au moment où il emmenait sa fourchette à sa bouche. Fort heureusement pour lui, sa capuche cachait son visage, et la photo était un peu floue. Mais cela n’empêcha pas Izuku de se demander si il n'était pas temps de placarder partout dans le lycée quelques articles de loi pour faire un rappel à l'ordre aux élèves paparazzi qui prenaient des photos de tout le monde, et ce partout, y compris en soirée où certains avaient été photographié dans des moments peu flatteurs. Ecoeuré par ce qu’il voyait, Izuku grimaça plus encore en slidant l'écran avant d’interrompre son geste, voyant apparaître ce qui devait être ses cheveux et ceux d’Ochaco. Il verrouilla alors aussitôt le téléphone pour s'épargner de connaître le contenu de ce post ainsi que le reste de ce stupide groupe Facebook qui réveillait de très mauvais souvenirs. Le passé, Izuku en avait assez eu pour aujourd’hui, alors il se débarrassa du portable qu’il tendit à Denki en le tenant entre deux doigts, comme si l’objet était d’une grande toxicité. 


-C'est dégueulasse, je supporte pas ces trucs, écrit Izuku. 


-T’inquiètes frérot. On s'en tape, le rassura Kiri.


-Pourquoi vous regardez ces conneries ? demanda Izuku à l'écrit, sans prendre la peine de cacher son incompréhension et son écoeurement.


-Parce que ça nous fait marrer, c'est eux les boloss, tu peux leur faire avaler n'importe quoi, expliqua Denki.


-J'avoue, y'a même des trucs qu'on a réussi à lancer nous même, confirma Kiri, “C’est une idée d’Elliot. Enfin, il nous a donné l’idée. Un coup il nous a dit…Ah oui il a dit : “Hin-hin-hin, on peut leur faire avaler tout et n’importe quoi, et devenir n’importe qui. Suffit de leur donner du grain à moudre. Hin-hin-hin.” ajouta-t-il en faisant une imitation plutôt réussie de l’attitude d’Elliot.


-Ta gueule, répliqua ce dernier en jetant un paquet de feuille vide sur Kiri. 


-Hin-Hin-Hin. Coin-coin, surrenchéri Kiri en se bouchant le nez.


 En voyant faire Kiri, Izuku pouffa en se faisant une idée un peu grotesque du rire d’Elliot qu’il imagina sous la forme d’un canard énervé. Puis remarquant que son bat-canard semblait contrarié par la comparaison, il refoula son rire avant de prêter attention à Denki.


-Alors nous ça nous a inspiré, et…ni une ni deux, on a lancé une grande étude sociologique, dit Denki en réajustant des lunettes imaginaires.


-Hinhinhin…ricana Elliot avant de jeter un regard rempli d'éclair a Kiri qui se pinça la bouche pour ne pas éclater de rire.


-Héhéhéhé…Du coup, j’ai fait un compte bidon pour aller sur leur “groupe secret” à la con… Avec Kiri on y passe de temps en temps pour droper un petit com par ci par là, et on laisse faire le moulin, dit Denki l’air malicieux


-He…? articula Izuku en clignant des yeux pour manifester son étonnement. 


-C'est ouf, tu leur donne un petit caillou genre “Katiev fais des petits boulots”, et paf ça fait des chocapic : les mecs en font une montagne, dit Kiri. 


-Ça devient : “Katiev fait des petits boulots pour payer la location de la caravane pourrie dans laquelle il vit.”


-Qui devient :  “Katiev bosse pour essayer de payer sa dope”.


-“...Qu'il consomme dans sa caravane pourrie.”, ajouta Denki en levant le doigt.


-Ah,juste, valida Kiri.


 L’air stupéfait, Izuku se tourna vers Elliot en quête d’explications. Ce qu’il voulait savoir, c'était comment ce dernier vivait cette situation que lui-même avait connue. D’ailleurs par le passé, Izuku avait fait comme Denki dans le but d’espionner une page similaire à celle du lycée, chose qui n’avait pas été sans conséquence. Mais contrairement à Izuku que les post, photos et commentaires avaient frappé de plein fouet, Elliot lui semblait plutôt indifférent.


-Moi ? M'en bats les couilles, dit Elliot en haussant les épaules avant de poursuivre,  “Nan. Ils sont cons. Ils se font avoir à leur propre jeu. Bah ouai, parfois faut retourner l'arme de l’ennemi contre lui-même hinhinhin…Ha ? Pf, nan, ça m’fais rien. Ça m'arrange. Ouai si on veut…un tri. Les photos ? Hm. Nan. Tant qu’on voit pas ma gueule…Et c’est rare qu’ils s’y risquent. Hinhin…T’sais pourquoi ? Y’en a un que j’ai grillé un jour. C’était au collège…Ouai hinhin. Son putain de portable de mes couilles est “malencontreusement” tombé, et j’ai “malencontreusement” marché dessus. Oups. Hinhin…”


-Wah putain frérot, mais c'est quoi ça, t'as un skill de ninja toi aussi ?  s'étonna Denki en clignant des yeux après avoir assisté à ce curieux échange entre Izuku et Elliot, une conversation qui avait eu tout l’air d’être un monologue.


-Vous faites de la télépathie ou quoi ?  Vous venez de quelle planète les frérot,  dit Kiri l'air méfiant.


-Vas y j'veux pas d'extraterrestre chez moi, ajouta Denki en faisant mine de trembler.


-Bah regarde sa bouche quand il parle. T'es con ou quoi ? répondit Elliot avant de reprendre sa conversation avec Izuku.


-Heu…T'as vu sa bouche bouger toi ? chuchota Denki à Kiri.


-Tellement pas. Ou vite fait quoi…Mais t'sais, y'a toujours des trucs que je comprends pas chez Elliot....Il est pas câblé comme tout le monde le frérot.


-Bah si, super câblé même. Des fois je me demande si notre pote c’est pas un robot t’sais…


-Héhéhé…Je suis nono le petit robot, l’ami d’Ulysse…chantonna Kiri avant de reprendre son sérieux, “Hé d'ailleurs, en parlant de trucs que je comprends pas, prouve moi que je te dois un paquet de clopes frérot.” 


-Ah mais frérot, tu vas pas pouvoir te défiler t’inquiètes, dit Denki en claquant des doigts pour réclamer l'attention de tout le monde, avant de tendre son portable devant lui en réajustant ses lunettes imaginaires, “Alors…D’après Facebook, et le peuple du lycée, “Naruto” aurait été vu tard le soir en mauvaise compagnie dans un tramway…”


-Aaaah…articula Izuku en se souvenant avoir vu des visages le regarder dans le tramway qui les avait emmenés chez Soul, il n'avait donc pas rêvé, et ça devait être des élèves du lycée.


-Bon Elliot, on ne te cache pas que t'as été cité, mais cette fois ci en tant que “Mr K”, précisa Kiri qui lisait par-dessus l’épaule de Denki. 


-Mdr trop classe, en mode Men in Black et tout. Pour le reste, je suppose que les “gens chelous”, ça doit être tes collègues, dit Denki en pouffant avant de se racler la gorge pour poursuivre, “Bon je continue les frérot, écoutez la suite : d'après les commentaires, le peuple s’inquiète grandement des fréquentations de Naruto et de l'influence que peuvent avoir les déchets du bahu sur un pauvre handicapé... Pardon c'est pas moi qui le dit…Ah, et apparemment y'a des gens qui disent que le petit ninja à les chevilles qui enflent depuis le cours d’EPS, je cite : “Sa touffe de weush c’est pour cacher sa grosse tête ?”, voila un commentaire pertinent dis donc…


-“Les déchets”...??? Ils sont malades ou quoi ?? s'indigna Izuku sur son téléphone.


-Bah ouai ou est l’équivalent de la lèpre pour eux, expliqua Kiri en haussant les épaules.


-Non mais attends…Tu savais rien à ce sujet genre ? Tu savais pas qu’on avait une réput’ toute éclatée ? Tout le monde le sait qu’on est infréquentable enfin, dit Denki sur le ton de l'évidence en mettant ses poings sur ses hanches.


-Si, avoua muettement Izuku avant d'écrire : “Mais je m'en fou de tout ce qu’ils disent moi. Je me fais pas une opinion des gens en consultant une page Facebook de demeurés qui ont rien d’autre à faire de leur vie que de tailler les autres.” 


-Rohohoho alors vas-y, t’as su comment ? T’as appris des trucs ? Y’a peut-être eu de l'inédit, dit Kiri l'air enjoué.


-Heu…Bah… articula Izuku en s'enfonçant légèrement dans le canapé, avant de jeter un regard à Elliot qui lui signifia d’un petit geste de la main qu’il pouvait y aller sans problème. 


We’re trough - Nevaeh

https://www.youtube.com/watch?v=7lK9V1lXNGc



-T'inquiètes frérot, je te jure on s’en fout, vraiment ça nous fait marrer. Et tu sais quoi, pour toi ce soir, on rétablit la vérité. On va jouer à “vrai ou faux”. Tiens par exemple : la rumeur dit que Denki est un pilier de bar qui se piche tous les soirs. Alors, vrai ou faux ?  


-Faux. Je ne suis qu'un simple barman. A moi, la rumeur dit que Kiri est SDF. 


-Faux et vrai ? J'ai une maison mais je suis tout le temps dehors pour esquiver ma famille de débile. 


-Ho…articula tristement Izuku, désolé que la situation familiale de Kiri soit problématique.


-T’inquiètes frérot je m'en fous. Dès que je peux je me barre de chez eux puis c'est tout, le rassura  Kiri avant de poursuivre, “Bon on continue : la rumeur dit que Monsieur K ici présent, aurait mit un coup de boule à un certain Monsieur F, Frédéric pour ne pas le citer.”


-Hinhin. Vrai, ricana Elliot en sortant de quoi se rouler un autre joint. 


-Ah putain frère, ce one-shot que tu lui as mis. Je le classe dans mes meilleurs souvenirs, dit Kiri avant de s’embrasser les doigts. 


-Ground zero ne nous déçoit jamais, ajouta Denki en regardant fièrement Elliot.


-“Ground Zéro” ? écrit Izuku


-Ouai, on l’a appelé comme ça à cause de son attaque spéciale du coup de boule. Ça fait mouche à chaque fois, expliqua Kiri. 


-Stylé, articula Izuku en acquiesçant, la bouche en forme de “u” inversé.


-Et pourquoi Frederic a fait un gros bisous au sol ce jour-là ? On se le demande, poursuivit Denki en tendant un micro imaginaire à Kiri.


-Selon le peuple, il aurait malencontreusement bousculé Monsieur K qui lui aurait fait payer cet affront en lui pétant la gueule, dit Kiri au micro invisible en regardant Elliot.


-Pf, faux. Si le gars m'avait pas pété les couilles pendant quinze ans pour que je lui vende de la C il aurait pu rester entier, dit Elliot avant de lécher sa feuille. 


-“Cé” ? articula Izuku.


-De la coke, expliqua Elliot, “Hinhin. Tu voulais une petite trace ?” ajouta-t-il en voyant l’air étonné d’Izuku.


-Pas ce soir merci, articula ce dernier avec humour. 


-Oui parce Facebook dit aussi que Mr K et nous même, on s’en met plein le nez dans les chiottes du bahut, dit Kiri sur le ton de l'évidence. 


-Faux. Bon, juste on a essayé une fois j’avoue. On a trimballé Elliot à une teuf l'été dernier, et l’occasion s’est présentée, ajouta Denki.


-Ça fait quoi ? demanda Izuku sur son téléphone.


-Hm…Rien de ouf. T’es juste plus…“performant”, dit Elliot en haussant les épaules. 


-Heu, on en parle du fait que t’as pas dormi genre pendant 72h ? dit Kiri en rigolant. 


-Ha, ouai y’a ça aussi, confirma Elliot avant d’allumer son joint, “Hé, c'est pas à moi ?” ajouta t-il en mettant un petit coup de tête.


-Ah ouai grave frérot, le jeu, dit Denki, “Vas-y nous somme toute ou…attentif.”,  ajouta t-il.


-Mon tour, dit Elliot l’air satisfait en se tournant vers Izuku, «Alors ? A ce qui parait on vole les gonzesses des autres ?”


-Ah mais ouiii ! “Naruto bourreau des coeurs”, dit Denki en imitant une banderole imaginaire.


-He…? Que…Quoi…? Qui…? articula Izuku en clignant des yeux. 


-Ouai, la petite copine du bigleux. Celle avec une tête ronde la, dit Elliot en faisant un rond avec sa main sur son visage. 


-Que…Tête r…Ochaco…? articula Izuku, amusé qu’Elliot se soit fait la même réflexion que lui, “...Mais n'importe quoi, je suis pas avec. Enfin, «faux», pardon. Et ils sortent pas ensemble avec Arthur, oui “le bigleux” c’est Arthur,  ils sont amis. Ah c’est à moi ? C'est mon tour ?  Heu…”


-Attend, attend, frérot, Elliot, on a pas compris ce qu'il a dit, intervint  Kiri.


-Il a pas volé la meuf du bigleux, et c’est la meuf de personne,  résuma Elliot. 


 -Ok donc le petit ninja n'est pas un briseur de couple tout va bien, dit Denki en s'essuyant le front, “Vas y poursuit petit ninja, allez, vend nous du rêve. Apprend nous des choses qu'on ignore sur le grand Monsieur Katiev la terreur du bahu, et ses sbires.”, ajouta t-il ensuite en se frottant les mains.  


-Bah…La semaine dernière j'étais au self… commença à articuler Izuku avant de s’interrompre pour écrire sa réponse, “J'étais au self, et à ma table il y avait deux types qui ressemblent à des Ken. Ils étaient horribles. C’etait pas des mots qui sortaient de leur bouche, c'était du venin.”


-Ahahahahahhahaha ! s'esclaffa Kiri, “Des Ken ! Tu m'a buté ! Ok de sûr, tu parles de Thomas et André avec leur petite raie sur le téco dégueulasse là. T’sais Elliot c’est ceux que t'appelle “Duo de trous du cul”.”


-Mdr, du coup Elise c'est Barbie, dit Denki en rigolant.


-Ha eux, dit Elliot avant de tirer une grosse bouffée de son joint, “Hinhin, c’est le putain de portable d’un de ces trous du cul qui a gouté à la semelle de ma godasse.” ajouta t-il  à l’adresse d’Izuku. 


-Ah…D'accord…Des godasses qui font “un bruit d’enfer” d'après eux. Du coup je comprends mieux pourquoi ils les aiment pas trop tes chaussures, articula Izuku en faisant mine de réfléchir, “D’ailleurs moi je les trouve stylées, en plus elles sont coquées, pour les concerts c’est parfait. Elles viennent d’où ?” ajouta-t-il ensuite en mettant un petit coup de menton vers les pieds d’Elliot.


-J’sais pas. C’est ma daronne qui me les a offertes. Ça fait… j’sais pas…3 ans ? Elles sont increvables. 


-Wah, elle anticipe maman Katiev, songea Izuku en comprenant pourquoi Elliot devait user de semelles, “J’aurais bien aimé trouver les mêmes, dommage que tu saches pas d’où elles viennent.”, articula-t-il ensuite en faisant mine de bouder.


-J’te les aurai bien filés, mais tes micros pieds vont se perdre dedans. Tu rentres tout entier dans une seule godasse hinhin.


-Hé…! s’insurgea muettement Izuku avant d’être interrompu par Denki.


-Oh les frérots, faite pas votre conversation en solo, on veut la suite nous, intervint ce dernier. 


-J’avoue, on veut savoir ce qu’ils ont dit les trous du cul. Mais d’ailleurs j’me rappelle la : c’est vrai qu’on t'avait vu au self avec eux, et ça m'avait grave étonné. Puis après on t’as vu tracer vers la sortie de la cantine, et éclater ton plateau. T’as voulu le casser en deux ou quoi ? Ça a fait un bruit de malade quand tu l'as tej, dit Kiri.


-Grave, t’étais tout vénère, dit Denki en secouant une main.


-La première et dernière fois que je me suis retrouvé à leur table. Ils m'ont foutu la gerbe…Ils sont juste détestables. Je peux pas me les voir en peinture. Les types, tu les croises dans le couloir en train de se pavaner, t’as juste envie de leur coller une paire de tartes.


-Ça promet, il a dû s'en dire des choses à cette table, se réjouit Denki en se frottant les mains, “Alors, sur qui sur quoi…?” 


 En guise de réponse, Izuku jeta un regard en biais en direction d’Elliot.


-Hinhinhin...Allez, balance, dit ce dernier en s'installant confortablement dans le canapé.


-Ben…Ils…Ils ont dit que…Que tu…tu te prostituais…commença à articuler Izuku en se triturant les phalanges.


-RAAAAAHAHAHAHAHAHA ! s'esclaffa Elliot qui s’effondra sur le canapé en se tenant le ventre, “...Rahahaha…J’fais le tapin.”, traduit-il ensuite à l’adresse de Denki et Kiri qui s’esclaffèrent eux aussi.


-Et…Et ils ont dit que c'était…pour te payer de la drogue…continua muettement Izuku presque dans l’espoir de provoquer un nouveau fou rire à Elliot qu’il n’avait encore jamais vu rire ainsi. 


-Rahahahahahaha…! Putaiiiiin…“Pour me payer ma came”, traduit Elliot entre deux convulsions tout en se tapant la cuisse. 


-Ahahahah! Oh putain le combo. Hé, y'a de l’évolution, t'es passé de camé, à camé qui fait le trottoir, pas mal, dit Kiri en hochant la tête.


-T'as pris du grade frérot, t'es plus un simple drogué maintenant. J'suis fier de toi, dit Denki en essuyant une larme imaginaire avant de poursuivre, “Mais attend, le jeu : vrai ou faux ? Elliot, peux tu nous dire s'il te plaît si tu traînes le soir dans le bois pour aguicher des routiers ?”


-Ha. Faux. Je vends pas mon cul, et surtout pas pour ça, dit Elliot en secouant son pochon d'herbe, “Hé Kiri. Tu dois 10 balles à Denki.”, ajouta-t-il en claquant des doigts.


-Putain…T’es comme ces gens en classe qui rappellent au prof un devoir que personne a fait…Détestable. Tu pouvais pas l’oublier ce pari ? bougonna Kiri en donnant à contre cœur un billet à Denki.


-C’était quoi le pari ? articula Izuku. 


-Quand les tocards du bahut ont commencé à dire que j’était en dèche, clodo…j’sais plus quoi, les deux là (Elliot pointa du doigt Denki et Kiri), ils ont glissé dans un putain de commentaire qu’ils avaient “entendu que je devais travailler pour subvenir à mes besoins”. Et…Hinhinhin… Denki il avait prévu que je finirai à faire le tapin, expliqua Elliot.


-C’est un oracle, articula Izuku avec humour en félicitant mentalement le trio qui avait su trouver un stratagème pour s’amuser du harcèlement dont il était victime, “C’est ce que j’aurais du faire aussi…Si seulement ils avaient été là…Avec Elliot, avec eux…tout aurait été…Différent…?” pensa t-il ensuite en regardant Denki imiter une machine à sous.  


-Merciiii ! se réjouit ce dernier en agitant son gain dans les airs, “Roh fais pas la gueule, c'est l’jeu ma pauvre Lucette.” , ajouta-t-il en faisant une petite accolade à Kiri.


-Vas y j'ai la blase, t'es madame Irma ou quoi ? Tu lis l'avenir dans ta boule magique la ? Bon bref,  alors ensuite Izuku, il se sont arrêtés là j'imagine, dit Kiri.


-Oh t’imagine bien que non, avec des types de ce calibre…Il ont sous-entendu qu'Elliot était alcoolique, écrit Izuku. 


-Moitié vrai…? proposa Elliot en regardant sa bouteille de bière. 


-Vas y c'est pas drôle, on a déjà tous les trois été alcoolique. T'as pas autre chose ? dit Kiri, l'air déçu avant de hausser les sourcils en voyant Izuku tirer sur ses manches l’air gêné, ce qui voulait dire que ce n'était pas fini. 


-Ils…Ils supposent qu'Elliot aurait hum…Au lycée ou…je sais plus trop…Enfin…eu des…des…enfin  avec pleins de filles…articula timidement Izuku. 


-Pffff…!! pouffa Elliot avant de traduire pour ses camarades sur le ton de l'évidence : “J’ai sauté tout le bahut.”


-AHAHAHAHAH !! s'esclaffèrent unanimement Kiri et Denki tandis qu’Elliot se mettait un doigt au fond de la bouche pour faire mine de se faire vomir. 


-Alors Monsieur K…? Vrai ou faux…? articula Izuku avant de boire une gorgée de sa bière. 


-P'tain de faux. J'suis puceau, dit Elliot après avoir sorti son doigt de sa bouche.


-Pffffffffffffft…! s'étrangla Izuku, “P-pardon…”, articula-t-il ensuite entre deux quintes de toux. 


-Ho remet toi petit ninja, dit Denki en essuyant les larmes qu'avait provoqué son fou rire, “Bon pareil celle-là on la connaissait déjà.”


-Ahahaha Elliot, frérot, t'as choqué Izuku j’crois, dit Kiri en rigolant. 


-Ha ? dit Elliot en haussant les sourcils, “Y'a quoi de choquant ?”, ajouta-t-il à l’adresse d’Izuku qui s’épongeait avec un mouchoir. 


-Heu non mais…C'est que… Je...J'ai cru comprendre que t’avais du succès, alors je…Je pensais que…bafouilla muettement Izuku.


-Jamais, dit Elliot en grimaçant. 


-Bah j'avoue t'as genre neuf mille prétendantes frérot. La logique voudrait que tu baises à volonté, dit Denki.


-Mpf…’Pas mettre ma teub dans l’premier trou qui passe….Moi j’ai bon goût, contrairement à elles, marmonna Elliot en portant son joint à sa bouche.


-Donc Izuku comme tu l'as compris c'est faux, et la vérité c'est que c'est Denki qui passe son temps à ken. Mais c'est triste, le peuple ne soupçonne pas un instant qu'il puisse avoir du succès avec les filles, expliqua Kiri à Izuku, “On se demande pourquoi…” ajouta t-il en se grattant le menton et en regardant Denki de travers.


-Vas y j’t’emmerde. On reparlera de qui à la cote auprès des meufs quand t'aura réussi à pécho ta Mina la,  s'insurgea Denki.


-Mais wsh, j'suis romantique moi, j’veux faire ça bien. J'suis pas un putain de lapin.


-Hé mais j'suis un romantique aussi frérot, un romantique qui aime le cul, mais un romantique quand même. Je pécho pas les nanas comme des vieux poissons t’es fou. D’ailleurs c’est moi le poisson la plupart du temps mdr. Un poisson qui s’est même déjà fait tej' parce que c'était un mauvais coup rappelle toi. Putain dur a encaisser le bail. Mais j'crois qu’on était pas fait pour s’entendre sur le cul…Puis bon, moi aussi ça m’est déjà arrivé de pas trouver le truc ouf...


-Pas compatibles, dit Elliot en hochant la tête.


-Ouai voila, si on veut. Ça arrive. Mais bon, ça change rien, mon amour et mon respect des femmes est resté intacte et infini, aussi infini que le champs des possibilité qu’offre le sexe. Et j’en suis qu’aux balbutiements du truc ! J’ai hâte de voir ce que l’avenir me réserve…dit Denki en se frottant les mains.


-Tu connais un mot comme “balbutiement” toi ? Au moins pour ça t’as du vocabulaire. T’sais quoi, on va proposer une rédaction au prof de Français : “La vie sexuelle de Denki, chapitre un.”,  dit Kiri en ricanant.


-Evidemment que j’ai du vocabulaire gros boloss, et en attendant c’est toi qui va balbutier le jour J, et je dis ça d'expérience. Mais t’inquiète frère (Denki posa sa main sur l'épaule de Kiri), je te passerai tous mes tips sur le corps des nanas quand ton heure sera venue. Elliot je t'oublie pas frérot, compte sur moi, dit Denki en tapant sa poitrine côté cœur.


-Dégage. J'en veux pas de tes putains de tips,  répondit Elliot en agitant la main comme s' il chassait une mouche.


-Mdr j'avoue, le mec pierce des teuch et des bites tous les week-ends, de quoi tu parles, si y'en a un qui connaît l'anatomie c'est lui. Il pourrait même t'apprendre des trucs que t'ignores sur ta teub, dit Kiri.


-Hinhin. Ça te calmerait une grosse aiguille dans le gland, ricana Elliot en imitant un geste de perçage brutal. 


-Heu non trop pas merci, mais....Putain, forme moi, supplia Denki en se mettant à genoux devant Elliot, “Bon pas les piercing de teub par contre, ça va me faire tourner de l’œil, voire dégueuler. On fait un troc, tes infos contre les miennes pour que ton dépucelage se déroule bien.”


-Laisse mon putain de pucelage et mon boulot où ils sont et continue à servir des Ricard et des verres de vin en cubi à tes ieuv là, dit Elliot en faisant basculer Denki d'un petit coup de pied.


-Oh attendez, je crois y’a un frérot qui a pass-out, mais avec les yeux ouverts genre, les coupa Kiri avant de faire un petit coucou à Izuku pour s’assurer que ce dernier était bien conscient,  ”Tu vois Denki, ça surprend tout le monde que t'arrive à mettre des filles dans ton lit.”, ajouta–t-il en montrant Izuku avec sa main. 


-Heu…Pardon…Non c’est pas…enfin…articula Izuku avant d'écrire, “Pardon j'étais juste surpris de vous voir parler de ça.”


-De quoi ? De parler d’être puceau ? De parler de cul ? dit Denki en étranglant Kiri avec son coude.


-Bah, après je suis pas idiot, je vois aussi les autres élèves en parler entre eux…A croire que c’est leur seul sujet de conversation d’ailleurs. Mais je sais pas trop, ils en parlent pas comme vous le faites. Je vous trouve plutôt, comment dire…Transparent ? écrit Izuku avant de se faire la réflexion que c'était peut être même un peu trop transparent pour lui. 


-Aaaah ouai mais je vois, genre les mecs qui ont les hormones on fire, et qui causent de film de boules en mode “j'suis un expert t'as vu” alors que leur teub n'a jamais connu que la paume de leur main, dit Kiri toujours prisonnier du coude de Denki. 


-J’aime pas la manière qu’ils ont de parler de ça et des filles comme si c'était des morceaux de viande sur un étalage. Si on parlait comme ça de ma sœur ou de ma mère ça me ferait vriller, écrit Izuku. 


-Ah ouai je vois le genre…Ca me rend ouf aussi. Un peu de respect quoi…A croire que les nana c’est des objets pour eux….Ils sont tellement pathétiques…Les mecs sont en seconde et ils essayent de se vendre en mode gros queutard mdr, rien de plus drôle. Y'a que Denki qui est genre né plus vierge, rit Kiri.


-J'ai croqué dans la pomme trot tôt et je me suis laissé emporter par ses saveurs, aaaah…Quel doux souvenir, dit Denki l’air rêveur.


-Menteur, dit Kiri les yeux plissés. 


-Ouai j'avoue la première fois, c’était pas ouf, les balbutiement tout ça…avoua Denki, “Mais on était jeune avec Kyoka, trop jeunes j’crois…Mais bon maintenant quand on se capte, on peut profiter de nos nouveaux skills.”, ajouta-t-il en faisant des mouvements imitant ceux d'un ninja.


-Mais j'ai jamais compris c’était quoi le bail avec ta Kyoka moi. Vous êtes sortis ensemble au collège, vous avez niqué, après rompu, après remit ensemble, et rerompu parce qu’elle a déménagé…Puis la vous papillonnez mais dès qu’elle revient par là vous vous captez pour la baise. Vous êtes quoi en fait, interrogea Kiri.


-Je sais pas, ça nous plaît comme ça c'est tout. Et on fait pas que baiser, on se mate un film, on se fait une bouffe…’Fin voilà c’est cool quoi. Puis arrête de me faire passer pour je sais pas quoi la, petit ninja il va penser que je suis un espèce de gros chien de talus. 


-C'est pas le cas…?  ricana Kiri avant d’être de nouveau prisonnier du coude de Denki.


-Halala...patience mes petits padawan, vous comprendrez à quel point c'est le feu le sexe quand vous passerez à la casserole, et vous pourrez plus vous en passer, dit Denki après avoir libéré Kiri.


-Voilà, donc à l'exception de Denki, la table ronde des frérot est devenue la table ronde des puceaux, conclut Kiri en se recoiffant. 


-C'est pas dit… ajouta Denki en levant le doigt et en jetant un petit regard à Izuku. 


-Toi ? demanda Elliot en adressant un petit coup de menton à Izuku qui se recroquevilla sur lui-même. 


-Vas y fais pas ton timide. Moi j'ai l'impression d’être tout nu devant toi maintenant, insista Kiri.


-Allez dit, en plus le peuple  t'as classé dans la catégorie des BG et je crois que t'as déjà des groupies au bahut, dit Denki en s’avançant sur son siège, l’air curieux. 


-Ça m’intéresse pas, écrit Izuku.


-Ha ? dit Elliot en haussant un sourcil tout en écrasant le mégot de son joint dans le cendrier.


-Quinze ans et t’y penses pas…? dit Kiri, l'air surpris. 


-On est obligé de penser à ces trucs-là…? Moi je préfère…Je sais pas…dessiner, lire…me promener…articula Izuku en se tassant un peu plus, les mains logées entre ses jambes, “...Danser…” ajouta-t-il dans un mouvement de lèvre presque imperceptible.


 En le voyant s’enfonçer dans le canapé comme pour s’y cacher, Elliot pouffa en se faisant la réflexion que le petit coté vierge effarouché d’Izuku devait lui interdire de parler sans tabou de quelque chose comme le sexe. Un sujet qui de toute évidence le mettait mal à l’aise, chose qui n’échappa pas non plus à Denki. 


-Bah, chacun son rythme, ça se commande pas ces trucs là. En tout cas moi j’suis content : je l'ai mon “To be three”. Les to be three puceaux, se réjouit Denki, “Et petit ninja, quand tu t’y interessera et que ton heure sera venue, viens voir tonton Denki. Fais pas ton relou comme Elliot.”


-Tsk ! Mais lâche moi p’tain. J'aurais jamais besoin de tes putains de conseils. Puis j'sais pas, c'est quoi ce délire de se servir de l’expérience d'un autre pour un truc comme ça ? dit Elliot en croisant les bras.


-Bah attends, moi j'avoue ça me fou l'angoisse rien que d'y penser frérot. Je refuse pas un petit coaching, avoua Kiri, “Imagine le moment venu, bim.”, ajouta t-il en baissant lentement sa main. 


-Nan mais si tu penses qu'à ça le jour ou, évidemment...Puis j'sais pas, le sexe c'est comme…Une découverte avec l'autre nan ? T'explore. Si tu fais ça comme si…comme si t'avais appris une leçon par cœur c'est claqué. Nul. Nan c’est…C’est une question d’instinct. Ouai voila. L'instinct et l’envie qui te guide, qui guide tes mains et le reste, dit Elliot en dessinant ce qui devait être une silhouette avec ses mains.  


- Putain frerot tu me surprends, c'est beau ce que tu dis. Comment t'es un poète en vrai. T'es défoncé ? dit Denki en clignant des yeux.


-Un peu, avoua Elliot.


-Un peu beaucoup, songea Izuku en se faisant la réflexion que le thc devait agir sur Elliot de la même manière que l’adrénaline : comme pour leur duel, ça le rendait plus spontané. 


-Alors, dis moi frérot, pour commencer, tes mains tu les mettrais où ? plaisanta Kiri.


-Ha ? La tout de suite, j’dirais…commença Elliot et tenant ses mains en coupe devant lui, “....Sur son visage ? Comme ça. T’sais…Un peu dans ses cheveux. Un peu sur son cou. Sa gorge. Un peu partout. Ouai que…Que mes doigts touchent un peu tout. Tout. Voilà.”


-Putain…mais c’est…c’est grave mignon, dit Kiri en cligant des yeux, se sentant étrangement attendrit par cette manière un peu maladroite qu’avait eu Elliot de s’expliquer, “...Et ensuite…?”, ajouta-t-il.


-Bah…J’laisse l'instinct et l’envie faire ? supposa Elliot en regardant ses paumes, “J’sais pas. J’y suis pas. Je peux pas savoir. Mais je saurais. Ouai. Je saurais.”, ajouta-t-il ensuite en posant ses coudes sur ses genoux.


-Bah t’sais quoi…J’avoue que…j’aime bien ta vision du truc…C’est comme…Comme un jeu vidéo. Genre si t’attaque avec tout le stuff et que tu le termines genre en 2 minutes…Bah c’est pas amusant. Y'a pas de fun si tu cherches pas, si t’explores pas…Et même, la galère ça fait partie du jeu en fait, faut galérer pour y arriver. C'est moins poétique, mais dans l'idée ça se tient, pas vrai ?


-Hé béh, quelle belle réflexion les frérots. Du coup j’ai hâte que vous me racontiez votre partie de jeu vidéo et où seront allées vos mains et votre instinct le jour j. Mais bon en attendant, on y est pas, alors jouons à “Qui va devenir quoi”, un jeu Mattel, slash Facebook. Petit ninja, je compte sur toi pour alimenter notre étude sociologique. Fais nous part des news si t’en as, que je gagne encore des clopes et des sous sur le dos de Kiri. D’ailleurs, achète-moi une cartouche frérot, ça ira plus vite, dit Denki avant de s'étirer.


-Va chier ouai, répondit Kiri.


 Elliot souffla et leva les yeux aux ciel en regardant ses camarades se chamailler de nouveau, puis il s’installa confortablement sur le canapé de sorte à faire face à Izuku. 


-Alors, dit Elliot en reposant sa tête sur sa main. 


-Alors…? Quoi…? articula Izuku. 


-Tu vas jouer aussi ? Au truc sur Facedecul la.


-Face de…répéta muettement Izuku en pouffant, “Jouer ? Parier tu veux dire ? Non, ça m’amuse pas ces trucs. Je vais décevoir Denki et Kiri, c’est pas moi qui vais leur apprendre grand chose…”  


-Bah, t’as bien appris deux trois trucs sur “Mr K le dégénéré alcoolique et drogué” pfufufu...


-Hehe…Mr K, clandestin, drogué, débauché…articula Izuku avec humour avant de poursuivre, “Non vraiment, je vais pas faire l’espion des bruits de couloirs. Disons que là…Tout ce que j’ai “entendu”...C'était exceptionnel…Tout ça parce que j’ai eu le malheur d’accompagner Ochaco qui voulait faire la connaissance de…de cette bande de dégénérés justement.


-Ha. C’est pour ça qu’elle te plait pas.


-Quoi..? Non…J’ai dis que ça m’intéressait pas c’est tout…Et toi ? Tu y joues à ça…? Les paris je veux dire. 


-Ha. Hinhin nan. Il le font très bien tout seuls, dit Elliot en mettant un petit coup de tête en direction de Denki et Kiri, “Tu veux ?”, proposa-t-il ensuite en agitant son pochon d’herbe.


-Ho bah…commença à articuler Izuku en haussant les épaules.


-Hophophop, que fais tu malheureux ! T’excite pas à en rouler un, intervint Denki, “Hé j’sais pas si vous avez vu l’heure, mais là j'allais annoncer la fermeture de l'établissement. On va grave en chier demain c’est moi qui vous le dit.”, ajouta t-il en pointant son réveil du doigt.


-Allez zou, au lit les enfants. Allons dormir pour une nouvelle journée dans la maison des secrets demain, dit Kiri en tapant dans ses mains, “Bougez, on va ouvrir le clic-clac.” ajouta t-il en agitant la main pour chasser Izuku et Elliot. 


 Peu motivé à aller se coucher, Izuku soupira en même temps qu’Elliot, puis il se leva du canapé en acquiesçant. 


-Kiri frérot, vas chercher la couette stp, dit Denki avant de s’adresser à Elliot et Izuku, “Vous voulez des fringues pour dormir ?” 


-Ouai, répondit Elliot. 


-Non merci,  articula Izuku.


-Ho. Prends. T'as pris la flotte, dit Elliot en mettant une petite tape du dos de la main sur l’épaule d’Izuku. 


-T’inquiète petit ninja, j'ai ce qu'il faut. Bon c'est des fringues péraves mais ça fait le job. Puis claque tes habits sur le radiateur, dit Denki avant de fouiller son armoire pour en sortir un tee-shirt et un short.


-Pardon, je peux te prendre un pantalon plutôt ? Désolé je suis frileux, écrit Izuku. 


-Ah bah pas de problème, tiens, prends celui-là. 


-Merci. Je peux t'emprunter ta salle de bain ? ajouta Izuku sur son portable.


-Oui, tu peux emprunter la salle de bain, mais tu me la rend après, répondit Denki en agitant le doigt.


-Han c'te blague pourrie ! Humour de daron quoi, dit Kiri en revenant avec la couette.


-Est ce que ça pose un problème à quelqu'un si j’étouffe Kiri avec un oreiller dans la nuit ? Je répète, est ce que...Wah ! dit Denki avant de se prendre la couette en pleine tête.


-P’tain ! Ho ! jura Elliot en évitant un oreiller jeté par Denki avant de commencer à retirer son tee shirt pour se changer


 Izuku évita lui aussi un oreiller, puis il s’empressa d’aller dans la salle de bain pour se changer. Chose faite, il se rinça le visage, et encore dégoulinant il s’appuya contre les rebords du lavabo pour invoquer Morphée qu’il supplia de le faire sombrer dans un sommeil sans rêves. Sa concentration fut rompue lorsqu'il remarqua quelque chose s’agiter dans le reflet du miroir, visiblement la main d’Elliot qui demandait la permission de rentrer. Après qu’Izuku lui ait ouvert, son ami fouilla un placard pour attraper une brosse à dent et du dentifrice. Comme Mila l’avait dit, Elliot avait effectivement semé de quoi se laver les dents partout ou il était susceptible de se rendre. Izuku pouffa en regardant son ami entreprendre son habituel énergique brossage de dent, chose qui n'échappa pas à Elliot.


-Quoi ? dit ce dernier au reflet d’Izuku, la bouche pleine de dentifrice.


 En guise de réponse, Izuku l'imita en en rajoutant, et il eut le droit à une tape sur l’épaule en représailles. Il fit de même à Elliot pour se venger, et dut fuir la salle de bain pour éviter de se faire attraper. De retour dans la pièce à vivre, Izuku posa ses vêtements à côté de ceux d'Elliot sur le radiateur avant de demander où il pouvait dormir, mais il n'eut pas besoin de poser la question, Kiri et Denki étaient déjà installés dans le lit. Alors Izuku salua le duo de la main pour leur souhaiter bonne nuit, et il s'installa dans le clic clac qui malgré qu'il soit ouvert, restait plutôt petit. Elliot ne tarda pas à le rejoindre, et se glissa sous la couette avant de s'allonger sur le côté en face d'Izuku, tout en s'équipant de ses écouteurs. Izuku tapota son oreille en mettant un petit coup de tête pour lui demander ce qu'il écoutait. 


 Concrete feat cartography (resonata remix) - Fort road

https://www.youtube.com/watch?v=5TbgNB6nK2U



-Noté, articula Izuku en se tapotant la tempe du doigt tout en se promettant de passer la dite musique dans sa salle de danse.


-Repeat, souffla Elliot.


-He…? “Noté”, répéta muettement Izuku en levant un sourcil.


-Bon les frérot bonne nuit j’éteins. Vas y Kiri bouge la wsh, t'as cru t’étais chez ta mère ou quoi, dit Denki. 


-Vas y saoule pas, éteints, répliqua Kiri.


-Bonne nuit, signa Elliot à l’adresse d’Izuku qui resta béat une demi seconde, touché que son ami ait appris ce petit geste.


-Bonne nuit, signa Izuku en retour avant d’être plongé dans les ténèbres. 


 Dans le noir, Izuku roula sur le dos en remontant la couette sous son nez, les yeux tournés vers le plafond qui semblait se déformer sous la lueurs des phares des quelques voitures qui passaient encore à cette heure tardive. Puis il compta les petites ampoules des guirlandes qui décoraient les poutres, attendant que ses paupières deviennent suffisamment lourdes pour sombrer dans un sommeil qu’il espérait sans cauchemars. Ce qu’Izuku craignait, c'était que son subconscient fasse céder le barrage durant son sommeil, chose qui lui était déjà arrivée dans le passé, et qui avait empêché sa famille de dormir sur ses deux oreilles à une époque. Et il était or de question de faire subir ça à Elliot, Denki et Kiri. Alors, Izuku se mit à chanter très fort dans sa tête, quelque chose de suffisamment énervé, espérant détourner son esprit du reste. Stratagème plutôt efficace, mais qui l'empêchait de trouver le sommeil. Cependant, à choisir, Izuku préférait de loin faire une nuit blanche plutôt que de s’humilier de nouveau et déranger les autres.


-...Ouvre la boîte à cervelle…celle qui s'écrase sous ta semelle…Traque mon animal, l'insecte qui m'appelle…Vers mon intestin frêle…Sans matière qui s'emmêle…! Qui macère…! Debout dans les égouts…!  Je me dégoûte…!! Perpétuelle déglutition à vide…!! Laisse-moi vomir…!! Je visite mon piège qui dort...Mon carnivore....chanta mentalement Izuku en balayant l’appartement du regard.


 Ses yeux s'arrêtèrent sur le radiateur ou était étendu ses affaires ainsi que celles d’Elliot. Si Izuku avait osé, il aurait discrètement attrapé le tee shirt de son ami pour s'en faire une écharpe afin de s’imprégner de l'odeur qui l'avait sauvé dans le métro. C’était bien simple, si un équivalent avait pu exister sous forme d'huile essentielle, Izuku s'en serait probablement fait un bain des plus relaxant. Selon lui, ce parfum devait même peut être avoir le pouvoir de transformer la zone “Mordor” de son mental en agréable lieu champêtre : l'effluve d'encens faisant reculer les pires démons, et  celle de savon et de lessive ayant le pouvoir de  rendre immaculé même les endroits les plus souillés. 



-...Nébuleux voyage…Je berce…mon naufrage…Ce souffle froid…anorexique…ravive ma peur…ma puanteur…boulimique….Elle rapporte les tombes, les mouches espionnent, abrègent, ce lent parcours en silence escortant le temps, mon compte à rebours, je suis malade, à ton image, l'eau sèche, incommuable, je suis malade comme toutes ces…continuait à chanter mentalement Izuku jusqu'à ce qu’il s'interrompt en sentant Elliot bouger. 


 Izuku jeta un coup d'œil à côté, et dans la pénombre il devina qu’Elliot s’étirait. Après quoi, ce dernier réajusta sa position, et il ne bougea plus. Izuku pouffa en se demandant si son ami arrivait encore à respirer dans cette posture. Elliot dormait sur le ventre, la tête enfoui dans son oreiller qu’il entourait de ses bras. Mais heureusement, l’endormi respirait encore au vu de son dos qui se soulevait doucement à rythme régulier. Un sommeil profond qu’Izuku lui enviait d’ailleurs, et que lui n'était pas près de trouver. Son cœur commençait à cogner bien trop fort dans sa poitrine, une tachycardie qui visiblement allait crescendo et qu’il tenta d’apaiser en respirant lentement et profondément, le plus discrètement possible. Puis, durant l’exercice, le nez d’Izuku renifla cette effluve salvatrice, un parfum tout droit venu de la peau d’Elliot. Contre toute attente, son bain salvateur, Izuku allait finalement peut-être pouvoir en profiter. Alors, il vérifia plusieurs fois qu'Elliot ne bougeait pas, et non sans se sentir coupable, il s'approcha un peu plus du milieu du lit, s'installa sur le côté, face à son ami, et il concentra toute son énergie sur ce parfum tout subtil soit-il. Comme sur le quai du métro, Izuku senti son corps se relâcher et s'alanguir petit à petit, à mesure qu’il se remplissait de l’odeur d’Elliot. Son cœur s’apaisant lui aussi, Izuku entreprit un autre exercice, avec ses yeux cette fois-ci, qui consistait à les fermer peu de temps au départ, puis progressivement plus longtemps, jusqu’à ce qu'il puisse maintenir ses paupières fermées sans craintes. Puis enfin, au bout d’une heure, sans qu’il s’en rende compte, Izuku sombra dans un sommeil profond, tandis qu’Elliot lui, n’allait pas tarder à en sortir. 


-Hm…P’tain…grommela ce dernier en se réveillant. 


 C’est un drôle de rêve qui venait de sortir Elliot du sommeil, un songe sans queue ni tête mêlant de manière décousue son imagination et des souvenirs plus ou moins récents. 

 Le rêve avait commencé dans une infinie bibliothèque aux allures de dédale où Elliot était occupé à chercher un dossier, perché sur un grand escabeau en bois. Mais sa recherche avait été compromise lorsque la proviseur du lycée, sortie de nulle part, l’avait interpellé. Soudainement, Elliot s'était alors retrouvé assis dans ce qu’il avait identifié comme étant l'amphithéâtre du lycée, mais qui toutefois n’en avait pas tout à fait la configuration. Le lieu avait comme fusionné avec l’infini bibliothèque, et dedans s’y trouvait quelques silhouettes sans visage, plutôt des ombres, qui regardaient une estrade où se trouvait Izuku. Ce dernier, dos à la salle, n’avait pas bougé jusqu’à ce qu’il quitte les lieux par une petite porte, dissimulée dans l’une des multiples bibliothèques. Elliot l’avait alors suivi et traversé un étroit couloir fait de briques humides qu’il avait parcouru à tâtons tant il était sombre et cabossé. En voir le bout n’avait pas été chose facile, car la sortie était condamnée par des racines emmêlées à la manière d’une toile d’araignée, qu’Elliot avait du arracher pour enfin rejoindre Izuku. Mais ce dernier n'était pas dans la rame dans laquelle le rêveur avait atterri, c’est Denki qui s’y trouvait, et celui-ci était occupé à cueillir des prunes sur les barres du métro devenues des arbres. Des pruniers qui répandaient leur fruits partout dans le wagon, et sur lesquels Elliot avait marché en manquant plusieurs fois de se casser la figure. Mais heureusement, Kiri était intervenu, un balais en main, pour nettoyer les lieux avant de descendre du train en compagnie de Denki. Après quoi, seulement éclairé par la lumière blafarde des néons qui clignotaient par intermittence, l’endroit était devenu désert, froid, voire glacial au vu de la buée qui était sortie de la bouche d’Elliot, et y régnait une odeur qui rappelait celle des hôpitaux. Puis à celle-ci s'était jointe celle du café, toute droit venue d’une autre rame où Izuku était réapparu, assis à une table de bistrot, une tasse en main. Elliot avait alors marché jusqu'à lui, et l’avait trouvé figé, comme une vidéo qu’on aurait gelée. Un état de tétanie dont il avait voulu le sortir en attrapant fermement le poignet gauche d’Izuku, si fort que le cadran de sa montre s'était brisé. La tasse et les aiguilles étaient alors tombées au sol, et soudainement, brutalement, Izuku se dégageait de la main qui lui tenait le poignet pour ensuite partir en courant, serpentant entre les barres de l’allée du métro, suivi de près par Elliot. Mais après une course interminable dans le train qui semblait s’allonger à l’infini, une porte séparant deux rames avait subitement surgit de nulle part, et s'était refermée sur Elliot, l'empêchant de rejoindre Izuku, qui s'était ensuite arrêté de courir. Enragé qu’on lui interdise d’aller plus loin, Elliot s'était alors mis à marteler la porte en criant, mais pas un son n’était sorti de sa bouche, ni de son poing, qui frappait le verre et le métal du barrage. Un silence de mort s'était soudainement abattu, et dans le même temps, Izuku s’était retourné, sans qu’Elliot puisse voir ce qu’il regardait à cause de la visière de sa casquette. Alors, pour attirer son attention, bien qu’il soit devenu aussi sourd que l’etait Izuku, Elliot continuait de crier en s’agitant derriere la porte, mais comme seule réponse, l’interpellé avait posé son doigt sur sa bouche avant de se retrouver plongé dans le noir. Un par un, les néons blafards du métro s'étaient éteints, engloutissant la rame où se trouvait Izuku dans les ténèbres. De la vitre de la porte, Elliot ne voyait alors plus que son reflet qui s'était ensuite mis à agir à sa guise en lui faisant des grimaces toutes plus laides les une que les autres. Agacé d’être confronté à cette laideur, Elliot avait fait pleuvoir les insultes sur son reflet, qui s'était alors esclaffé pour ensuite sourire de toutes ses dents dont quelques-unes avaient brillées d’un reflet argenté. Aussitôt, Elliot avait alors fourré ses doigts dans sa bouche pour vérifier que ses dents étaient toutes bien en place et surtout naturelles, et chose faite, de rage, il avait pulvérisé la vitre de la porte d’un coup de poing. La main ensanglantée, Elliot avait alors plongé dans des ténèbres si dense que la notion d’espace lui avait échappée : impossible de savoir où était le haut, le bas, la gauche, la droite. Malgré tout, maladroitement, Elliot s'était avancé dans ces limbes, jusqu'à ce que le sol se dérobe sous ses pieds, le précipitant dans une chute vertigineuse qui avait fini par le sortir du sommeil. 


-Mpf…souffla Elliot en se redressant pour vérifier que Denki et Kiri n'étaient pas en train de récolter quoi que ce soit, “Pf, rêve à la con…” soupira-t-il ensuite avant de se retourner pour jeter un œil à la montre d’Izuku dont les aiguilles, bien en place, continuaient à faire s'écouler le temps. 


 L’heure indiquait d’ailleurs que ce rêve stupide avait bouleversé l’horloge biologique (réglée “au poil de cul”), d’Elliot qui bailla la bouche grande ouverte, avant de se rallonger dans le lit en se tournant vers Izuku qui lui était profondément endormi, installé en chien de fusil. Elliot pouffa en le découvrant tout en boule, tellement replié sur lui-même qu’il semblait avoir rétréci. Son image d’un Izuku en plein sommeil sous une épaisse couette n'était pas si loin de la vérité si ce n’est qu’il manquait à l’endormi l’air apaisé qu’il lui avait imaginé. Ce dernier avait les sourcil froncés, et sa main droite qui cachait son nez ainsi que sa bouche était prise de petits soubresauts, tout comme les doigts de sa main gauche qui convulsaient par intermittence. Amusé, Elliot songea aussitôt aux chats qui s’agitent parfois dans leur sommeil, et il se demanda de quoi pouvait bien être fait le rêve d’Izuku en cet instant, et ce que sa main et ses doigts, toujours pris de convulsions, pouvaient bien tenter d’attraper. Pour s’amuser en attendant d’avoir de nouveau envie de dormir, Elliot inventa un petit jeu, qui consista à deviner quel doigt bougerait à quel moment, et combien de fois, le tout dans un temps imparti. Puis alors qu’il était en pleine partie, Izuku soupira et il bougea légèrement, cachant le cadran de sa montre qui servait de chronomètre à Elliot. 


-Ha, merde, souffla ce dernier avant d’attraper doucement le poignet d’Izuku pour y regarder l’heure qu’affichait sa montre, “Hinhin. Gagné.” chuchota- t-il ensuite. 


-B-ba…Ba…articula Izuku dans son sommeil, faisant légèrement sursauter Elliot qui plissa les yeux en vue de déchiffrer ce que disait l’endormi.


-Ba…? Ba-ge…? Bake…? Nono…Bagenono ? Ha. Nan. Baaake…mono. Bakemono…? chuchota Elliot avant de pouffer en voyant l’air contrarié d’Izuku qui ne bougea plus ensuite.


 Après quoi, Elliot s'étira de tout son long, puis il réajusta son coussin en vue de se rendormir une petite heure ou deux. Mais avant qu’il ne plonge la tête la première dans son oreiller, un reflet attira son attention. Il pencha la tête, avant de la poser sur son bras pour faire face à Izuku, et il arrêta son regard un instant sur le cadran de la montre en se tordant la bouche. Puis finalement, sachant qu'Izuku avait le sommeil lourd, il attrapa de nouveau son poignet sans craindre de le réveiller, et tira doucement sur les boutons pressions du bracelet. 


-Noté, dit  Elliot à voix basse en refermant le bracelet montre. 



***


-Réveille toi ! ordonna une voix inconnue.


-Bakemono ! dit une autre.


-Arrêtez…articula Izuku en agitant son pied.


-Bakemono !


-Réveille toi ! 


-Arrêtez…Arrêtez…! articula Izuku avant de sursauter.


-Ha, souffla Elliot en haussant les sourcils, satisfait d’avoir réussi à sortir Izuku de son habituel sommeil de plomb. 


 Pour ce faire, il avait fini par employer les grands moyens, c'est-à-dire titiller du doigt la plante du pied de l’endormi qu’il découvrait chatouilleux. Ce dernier surgit subitement de la couette en regardant autour de lui, l’air hagard. Izuku cligna des yeux plusieurs fois pour décoller ses paupières, et une fois la vue retrouvée il constata que Denki, Kiri, ainsi qu’Elliot qui était accroupi au pied du lit, le regardaient tous les trois. 


-Putain frérot j'ai cru que t’étais en mode blanche neige. C’est pas des dodos que tu fais toi, c’est des comas, dit Kiri en rigolant. 


-He…?? Il…Il est quelle heure..?? articula Izuku avant d’attraper son portable dont il avait de toute évidence oublié d’activer le réveil. 


-T’inquiètes, pas de panique, respire, y'a le time, le rassura Denki,“On va même avoir le temps de se taper un petit croissant. Tu peux aller te rincer avant si tu veux, on y a déjà été nous. Je t’ai laissé une serviette.”


 Aussitôt, Izuku s’inclina brièvement pour s’excuser, et il bondit du lit pour se ruer dans la salle de bain. Une fois douché, il se tapa le front en constatant qu’il avait oublié ses vêtements sur le radiateur, mais alors qu’il commençait à se rhabiller pour aller les chercher, la main d’Elliot s’agita dans l'entrebâillement de la porte. Pour lui indiquer qu’il avait été vu, Izuku lui tapota un doigt, et après un bref instant, son ami lui passa ses vêtements. Pour le remercier, Izuku leva le pouce dans l'entrebâillement de la porte puis enfin, il s’habilla rapidement. Avant de sortir de la salle de bain, il invoqua toute la sérotonine que son cerveau pouvait encore produire (c’est à dire pas grand chose aujourd’hui) pour survivre à la journée. Celle-ci promettait d'être longue, car Izuku se sentait éteint et fatigué, un état qu’il ne fallait absolument pas laisser transparaître. Alors comme un sportif qui se serait apprêté à entrer sur un terrain, il souffla en se degourdissant les bras et les jambes, et chose faite il usa d’une de ses stratégies, la meilleure et la plus efficace de son répertoire : le “poker face”. Au collège, Izuku était passé maître dans l’art de mimer les émotions pour en dissimuler d’autres, ou même simplement feindre d’en avoir quand il était en état d’apathie. Une fois équipé du masque, Izuku se joint au trio qui remettait de l’ordre dans l’appartement, puis la petite bande s’en alla prendre le petit déjeuner au bar. Cette fois-ci, celui-ci était tenu par le propriétaire, un monsieur d’origine maghrébine aux yeux rieurs dont il était impossible de déterminer l'âge, et qui les accueillit chaleureusement.


-Bonjour bonjour ! Merci pour le ménage mon p’tit. Ho t’es avec les copains ! Ça va les d’jeuns’ ? Ho mais y’a un p’tit nouveau ? Alors il veut quoi lui ? Du thé ? Du café ? Du jus d’orange…? 


 Izuku s’inclina devant le propriétaire tandis que Denki le présentait en précisant discrètement qu’il était sourd. 


-D’accord, d’accord. Tu lui parles avec la langue des signes ? Non ? Aaaah il comprend tout. C’est fou hein, moi ça m’impressionne, dit le propriétaire avant de s’adresser à Izuku, “Moi c’est Karim, alors Izuku il veut quoi ? Du café ? Et bah allez, un thé noir deux jus d’orange et un café pour la table des djeun’s ! Prenez à manger, mangez bien pour bien grandir, nourrir le cerveau, et avoir les bonnes notes. Hein Damien ? 


-M'appelle pas comme ça…bougonna Denki avant de s’emparer d’un panier remplis de viennoiseries.


 Bien qu’Izuku n'ait pas faim, il se servit, et en fin de compte il trouva un peu d'appétit en profitant de ce petit déjeuner en bonne compagnie. Encore une fois, le duo de choc Denki-Kiri (de véritables producteurs de sérotonine en masse) fut d’une incroyable efficacité, multipliant les blague au sujet de la fameuse Béatrice à qui Izuku put donner un visage (cette dernière était effectivement coiffé de gros bigoudi rose, et s’insurgeait devant la télé en caressant un petit bichon blanc comme neige). En partant du bistrot, Izuku la remercia mentalement d’avoir participé à sa toute petite bonne humeur qu’il allait falloir conserver la journée entière, et ça, ce n'était pas gagné. La bonhomie était sauve tant qu’il était avec Elliot, Denki et Kiri, mais ça allait être une autre paire de manches quand il aurait passé la grille du lycée, et encore plus quand il serait rentré chez lui. 


-Hey. T’es ok ? articula Elliot à l’adresse d’Izuku en marchant à reculons alors qu’ils arrivaient au lycée.


-Ok, articula Izuku en joignant son pouce et son index. 


-Ok, dit Elliot en souriant en coin avant de s'allumer une cigarette. 


-Une cigarette. Le temps d’une cigarette pour être en “mode lycée”... pensa Izuku en regardant le bout incandescent de la cigarette d’Elliot. 


-Ah, frérot, va falloir surveiller Facebook…dit discrètement Kiri à Denki, remarquant qu’on les observait. 


-Oh meuf…! Manon mate ! Regarde qui débarque, et avec qui…! chuchota Elise à l’adresse de son amie.


-Mais naaaaaan…! C'est vrai alors ? Ils sont inséparables maintenant ? répondit Manon en jetant un regard discret aux quatres garçons.


-Il est fou Naruto, il était déjà pas aidé avec le handicap, et maintenant il traîne avec la racaille…


-Bonjour la réput'...


-C'est pas faute de l'avoir averti. Enfin c’est plutôt André et Thomas qui s’en sont chargé… Mais apparemment les cassos ça doit lui plaire au ninja, dit Elise en repoussant une mèche de ses longs cheveux blonds.


-Nan mais en vrai, il a pas l'air méchant Naruto. Tu crois pas plutôt qu'ils l'ont attrapé dans un coin pour lui voler de la thune ou un truc du genre avant de venir au bahu ?


-Genre toi si on te rackette tu te marre avec les types qui t'ont agressé ? Mate, il vit sa meilleure vie Naruto, il a pas la tête du mec qui vient de se faire embrouiller.


-Han…Mais pourquoi tous les BG de seconde sont des cassos ? dit Manon, l'air désespéré en s’adressant au ciel. 


-Nan mais à croire que c'est mathématique, ou les beaux gosses sont des gros trous du cul, ou ils sont gay t'sais, comme Théo.


-Ouai ben balek, laisses moi te dire…Trou du cul ou pas, Elliot c'est quand il veut hihihi…minauda Manon.


-Pf ! Non mais arrête de baver sur Elliot Manon, tu te le tapera jamais, répliqua Elise l’air moqueur. 


-Pf !  Non mais écoutez la. Tu fais la meuf, mais je sais que tu dirais pas non, et je sais aussi que t'as voulu tenter ta chance en glissant ton numéro de portable dans son casier. Et oh, je crois aussi que tu t'es pris un maxi vent, rétorqua Manon. 


-Non mais calme toi meuf hein…Pour l'instant j'ai juste pas de nouvelles. Et que je sache, toi non plus, répliqua Elise, vexée par ce qu’avait dit Manon qui rougit, comprenant par là que bien qu’elle ait tout fait pour se montrer discrète, quelqu’un l’avait vu glisser un petit billet dans le casier d’Elliot. 


-Et bah on verra bien… dit Manon sur le ton du défi en regardant Elliot rentrer dans le lycée. 


 Bien évidemment, cette arrivée n'avait pas été remarquée que par Elise et Manon, mais aussi par l’ensemble des élèves présents à ce moment, y comprit Ochaco. Cette dernière avait non seulement été surprise de voir son ami arriver accompagné, mais aussi qu’il ne vienne pas du côté où il habitait. Il fallut peu de temps à Ochaco pour comprendre qu’Izuku avait découché : en arrivant en classe, elle constata qu’il était vêtu comme la veille, chose tout à fait inhabituelle. Plus étrange encore, Izuku avait les traits tirés, et horreur, il sentait la cigarette. Au vu de tous ces éléments, et inquiète que son ami se soit fait embarquer dans un quelconque soirée mal famée, Ochaco décida de mener sa petite enquête, chose qu’elle s’employa a faire à la pause déjeuner alors qu’ils attendaient dans la file d’attente de la cantine. 


-Hé au fait Izuku, hier on t'as croisé avec Arthur mais tu nous a pas vu, je me suis pris un sacré vent hihi, dit Ochaco.


-”Un sacré vent”…? répéta mentalement Arthur avant de tendre l’oreille. 


-Ah bon ? Désolé, articula Izuku en serrant les dents.


-Pas de soucis, c’est normal que tu nous ait pas vu, tu courais sous la pluie avec Elliot. 


-Ca nous a pas évité de finir trempé, plaisanta Izuku sur son portable avant de s’excuser de nouveau tout en priant le ciel de ne pas avoir droit à un nouvel interrogatoire. 


-Avec ce temps on a décidé de se faire un cinéma avec Arthur. Et vous, vous avez fait quoi ? poursuivit Ochaco.


-On s'est promenés, écrit Izuku.


 Puis après une courte réflexion, il décida de développer un peu plus, devinant qu’il y avait de grandes chances qu'Ochaco le questionne parce qu'il avait dû être vu en compagnie d’Elliot Kiri et Denki lors de son arrivée le matin au lycée. En révélant une part de vérité, Izuku espérait augmenter ses chances de contenter la curiosité bien trop envahissante d’Ochaco. C'était encore un des nombreux stratagème d’Izuku, un exercice auquel il était habitué et dont il faisait usage notamment avec sa psychologue, voire sa famille. C'était là tout l’art de mentir par omission, voire d'agrémenter un mensonge d’un soupçon de vérité, et ce afin d’obtenir la paix.  


-Puis après on a finalement passé la soirée chez Denki, ajouta Izuku sur son message.


-Denki ? demanda Ochaco avant d’ajouter par la pensée : “Bien sûr…”Promenés”...Sous la pluie…? Pf… Quitte à mentir inventes au moins des mensonges qui tiennent la route…”


-L'ami d'Elliot, le blond. Celui avec les cheveux rouges c'est Kiri, écrit Izuku.


-Ah d'accord...C’était bien ? Vous avez fait quoi ? 


-Ranhlala…soupira mentalement Izuku avant d'écrire, “On a discuté.”


-Ah ok, wah vous avez du faire tard, t’as une petite mine…C’était quoi, des… “deep conversations”…? Vous avez refait le monde ? Ahaha…répondit Ochaco avant d'être interpellée par Arthur qui pressentait que cette avalanche de questions n’était pas appréciée par Izuku. 


-Ah, on peut avancer, allez bougez, j'ai faim moi, dit-il avant d’inviter ses amis à rentrer dans le self . 


 En prenant son plateau, Izuku se retourna pour lancer un regard reconnaissant à Arthur qui serra les dents en guise de réponse. Il connaissait Ochaco sur le bout des doigts, et par conséquent, il la savait buttée et bornée une fois qu'elle se mettait une idée en tête. En vérité, il avait déjà tenté de discuter avec elle, mais c’était un sujet délicat et difficile à aborder avec Ochaco, et à chaque fois qu'il avait voulu mettre les pieds dans le plat, elle avait su habilement éluder les questions qui fâchent. Arthur soupira et attrapa un plateau repas tout en demandant au ciel d’arrêter Ochaco avant qu’elle ne vienne à bout de la patience d’Izuku qui paraissait particulièrement irritable aujourd’hui. 


-J’aimerai pas voir ce que ça donne un Izuku cocotte minute…Quelque chose me dit qu’il faut pas trop lui taper sur les nerfs…songea Arthur en arrivant dans la salle de la cantine, “La vache ! C’est blindé…”, dit-il ensuite en serrant les dents.


 Izuku balaya la cantine du regard pour trouver une table libre, et se faisant il constata qu’Elliot allait encore avoir droit à une publication Facebook, car il y déjeunait avec Denki et Kiri. Aussitôt, il culpabilisa, se doutant que si son ami mangeait au self c’était certainement parce qu'il n'avait pas pu se préparer à manger la veille.


-Oh regarde Arthur ! Ils ont une place pour nous ! Viens Izuku, dit Ochaco en tirant brièvement la manche de son ami qui la suivis avant de s'arrêter en comprenant qu’ils allaient encore manger en présence de Baggy le clown. 


 Pour s'épargner le supplice, Izuku interpella Arthur en lui tapotant le bras, et il lui signifia par le geste (en secouant sa main devant sa gorge) qu’il ne comptait pas déjeuner avec eux.


-On peut manger tous les deux si tu préfères, proposa Arthur. 


-Non t'inquiète, articula Izuku avant de montrer d’un petit coup de tête la table où se trouvaient Elliot, Denki et Kiri. 


-Ah ok. Bah…Bon appétit alors, à tout à l'heure, dit Arthur avant de rejoindre Ochaco en espérant que cette dernière ne se vexerait pas en découvrant qu’Izuku leur avait faussé compagnie. 


 Malheureusement, c’est bien ce qu'il se produit quand Ochaco remarqua l’absence d’Izuku qui se dirigeait vers une table occupée par ceux à qui il devait le récent déclin de sa réputation.   


-P’tain…jura Elliot en frottant énergiquement son oreille droite qui s'était mise à siffler, “Ha..?” souffla t-il ensuite en voyant Izuku s’approcher timidement.   


-Wah on te manque déjà ? dit Denki la bouche pleine. 


-Heu…Je…Je peux…? articula Izuku,  gêné d'imposer de nouveau sa présence.


-Tu comptes manger debout ? demanda Elliot en mettant un petit coup de tête vers la chaise vide qui se trouvait en face de lui.


-Hehe non…J’suis pas un poney, plaisanta muettement Izuku, “Merci…” ajouta t-il à l'adresse de la tablée tout en posant son plateau.


-Ola stop frerot !  l’arrêta Kiri.


 Izuku s’arrêta net, déçu de se voir refuser l'accès à la table, et il s'excusa en pensant que le trio avait dû assez le voir pour la semaine. Mais rien de tout ça, et Elliot, lui-même étonné, asséna une tape plus violente que d’ordinaire à Kiri en le regardant l’air de dire “Tu fous quoi la ?”.


-Attends frérot, me regarde pas comme ça. Si Izuku veut rejoindre la table des frérots il doit savoir, expliqua Kiri.


-Hmmm oui tout à fait…confirma Denki, l’air sérieux tout en se grattant le menton


-Savoir quoi…? articula Izuku qui se demandait ce qu'il pourrait apprendre de plus après la conversation qu'ils avaient eu la nuit passée. 


-Tu te rappelles ? Les déchets du lycée, dit Denki en montrant la tablée, “On est à la cantine frérot…”, insista t-il ensuite sur le ton de l’évidence.


-...Grand lieu d'observation du peuple, ajouta Kiri.


-Donc, à partir du moment où tu poseras ton cul sur cette chaise, à cette table...commença Denki.


-...Tu seras toi aussi considéré comme un lépreux, termina Kiri en prenant un air menaçant.


 Izuku haussa les sourcils, puis sans plus attendre, il se débarrassa de son sac et s’installa à table. Et pourtant, la cantine, ce centre d’observation des médisants, il l’avait connu au collège, mais après tout, ça n’avait plus d’importance aujourd’hui, c'était un vieux souvenir, et quoi qu’il puisse arriver, il s’en amuserait comme le faisait le trio. 


-Ok le mec a pas réfléchi, dit Kiri toutefois peu surpris, et surtout très heureux de pouvoir désormais compter Izuku comme un de ses amis.  


-Je prends le risque, yolo, articula Izuku en regardant Elliot.


 Ce dernier pouffa en soufflant du nez, puis il tendit la paume de sa main à Izuku qui y apposa sa signature du bout du doigt. 


-Bon ben bienvenue à la table ronde, enfin, rectangulaire, des lépreux, dit Denki.


-Merci, bon appétit, articula Izuku avant d'attaquer son déjeuner. 


 Sans surprise, quelques élèves tentèrent d’immortaliser le moment, sans succès, découragé par Mr K et ses sbires qui surveillaient les environs du coin de l'œil tel des miradors. Puis, assurés que les portables des paparazzi environnants étaient bien rangés, le petit groupe déjeuna en imaginant quelles rumeurs stupides allaient voir le jour prochainement. 


-Frérot, si tu fais pas un effort, ils vont pas tarder a dire qu’on t’as racketté ta bouffe, dit Denki en mettant un petit coup de menton vers le plateau d’Izuku.  


-Wah mais tu manges que ça frérot ? Tu vas pas aller loin avec une assiette de riz…Faut éponger la bière d’hier, prends dans mon assiette, dit Kiri en regardant le maigre repas qu’Izuku avait choisi.


-Non merci, ça me suffit largement. Tu sais la bière c’est hyper calorique, écrit Izuku avant de découper sa banane en petites rondelles. 


-Mais…Ahaha ! Tu fous quoi frérot ? Moi qui pench’ais que che’tais le fruit le plus prach’tique à bouffer…dit Denki la bouche pleine. 

 

-Pf, pouffa Elliot en voyant Izuku manger sa banane avec des couverts, tout en se faisant la réflexion que ce dernier était moins élégant quand il s'agissait de manger des nouilles ou des lasagnes.


 Une fois le repas terminé, le trio resta dehors pour le reste de la pause. Elle ne dura pas suffisamment longtemps au goût d’Izuku qui quitta à regret son ami et ses camarades quand vint le moment de retourner en classe. En s’y rendant, il se prépara mentalement à ce qu’Ochaco fonde sur lui pour réclamer des explications, mais fort heureusement, il ne se passa rien, d’ailleurs elle ne lui adressa plus la parole de la journée. Bien que ça ne soit pas spécialement agréable, Izuku en fut soulagé, et il pu se concentrer sur autre chose : se préparer mentalement à son retour chez lui et ce,  jusqu'à ce qu'il ouvre la porte de son appartement. 


-Poussiiiiin tu m'a manqué ! dit Irène en se jetant sur Izuku pour le prendre dans ses bras, “Tu t'es bien amusé hier ? Pas couché trop tard j’espère.”,  ajouta-t-elle après avoir libéré son fils.


-Bah heu….articula Izuku en serrant les dents et en créant un petit espace entre son pouce et son index pour avouer qu'il s’était couché tard, justifiant ainsi ses traits tirés. 


-Rohlala…Hé, je t'avais dit d’être raisonnable...dit Irène l'air faussement sévère avant d’inviter son fils à s'installer à la table de la cuisine où les attendaient déjà deux tasses. 


-Désolé. On discutait et on a pas vu le temps passer…articula Izuku en s’asseyant. 


-Tu t'es pas endormi en classe au moins ? dit la maman responsable pendant que la maman du cœur se réjouissait d'imaginer son fils en grande conversation avec des amis. 


-Non non, t'inquiète,, la rassura Izuku.


-Faites attention la prochaine fois quand même…prévint Irène en versant de l’eau bouillante dans les tasses.


-Je peux pas le promettre, Denki et Kiri sont des pipelettes, articula Izuku en ouvrant son sachet de thé, ravi que sa mère ait dit “la prochaine fois”. 


-Hahaha ! Ah oui, Denki et Kiri donc. “Electricité” et “Couper”. C'est marrant, dit Irène en rigolant.


-Je leur ai dit. Ils aiment bien. Denki à même choisit de se rebaptiser “Tazer” pour son nom de scène. 


-Son nom de scène ? 


-Oui, il mixe, articula Izuku en  mimant des platines imaginaires.


-Aaah….Je comprends que vous vous entendiez si bien. Apparemment ils aiment tous la musique, c’est super, tu t’es trouvé une bonne équipe poussin !


-Oui, et en plus ils sont tellement drôles ! Je te jure c’est un spectacle à chaque fois, articula Izuku avant de lever un sourcil en voyant sa mère lui jeter un petit regard malicieux. 


-Hé poussin, devine ce qu'on mange ce soir…dit Irène en haussant les sourcils.


-Heu…Katsudon…? tenta Izuku avec espoir.


 En guise de réponse Irène hocha la tête en rigolant, et Izuku la remercia en s’inclinant, les mains en prière. Visiblement l’instinct maternel était plus fort que tout, c’est comme si sa mère avait su deviner que son fils avait perdu l'appétit. Une faim qu’elle avait réussi à réveiller en préparant un des petits plats préférés d’Izuku qui releva la tête en affichant son plus beau sourire. Mais celui-ci s'évanouit quand il reconnut une expression qui ne lui disait rien de bon sur le visage de sa mère. Visiblement celle-ci était embarrassée, et tirait sur ses manches nerveusement en s’efforçant de sourire, la bouche pincée, comme une enfant qui se serait apprêtée à avouer une bêtise.  


-Hum…Il faut que je te dise quelque chose poussin…commença Irène tandis qu’Izuku, les mains posées sur le rebord de la table s’en éloignait inconsciemment, pressentant que la nouvelle n’allait pas être bonne, “Bon…J’espère que tu n'avais rien prévu samedi parce que...Hum…Voilà, papa va venir à la maison et on va déjeuner tous ensemble….”, poursuivit t-elle prudemment.


-He..?? Qu-Quoi…?! Mais…Je…Je voulais passer le week-end avec Elliot…Pourquoi il vient ? D’un coup comme ça…?? articula Izuku avant de soupirer, “Je suis obligé d’être là…?” ajouta-t-il sans prendre la peine de cacher son mécontentement. 


-Tu pourras voir Elliot Dimanche….Et, tu sais…ça fait un moment que papa est pas revenu…Vous devez lui manquer quand même...


-Bien sûr…Nami oui, mais pas moi…articula Izuku. 


-Oh tu sais…Avec Nami aussi c’est pas dingue depuis…Enfin bref, elle aussi aurait préféré rester avec son petit copain samedi…Mais vois ça comme une occasion de peut-être...réussir à mettre les choses à plat avec papa…Tu te rappelles de ce qu’ont dit les médecins à ce sujet…


-Oui, oui…la coupa Izuku avant de réciter muettement (et sans grande conviction) : “Faite un pas l’un vers l’autre…Si votre père est l’une des sources de votre mal être il peut aussi en devenir le meilleur remède”… “Réparer cette relation bancale vous permettra de retrouver l'équilibre…” blablabla…C’est bon…J’ai pas besoin de lui, il a pas besoin de moi, je vais bien, et mon remède je le trouve ailleurs. J’ai pas envie de le voir.”


-Oui je vois bien que ton remède, ton équilibre, sont aussi ailleurs mais…C’est ton père…Et j'espère qu’un jour vous pourrez vous entendre…Je te dis, peut être que samedi ça va être une opportunité…Tu sais, ça avait l’air important pour lui. Il souhaitait te parler poussin…Il ne m’a pas dit de quoi mais…dit Irène avant de s’interrompre en entendant Izuku soupirer.


 Ce dernier posa sa tête dans sa main en regardant ailleurs, chose qui signifiait qu’il ne voulait plus parler, et Irène comprit que pour ce soir le débat était clos. Effectivement il était inutile pour Izuku d’en dire plus ou de tenter de négocier pour échapper à ce repas de famille, de toute évidence imposé par son père qu’il était préférable de ne pas contrarier. Cette perspective et la simple idée de potentiellement rentrer en conflit avec ce dernier coupa définitivement l'appétit d’Izuku, et il dû feindre la faim pour faire honneur au plat que sa mère avait préparé sans doute pour compenser la mauvaise nouvelle. Mais ce petit réconfort, Izuku n’en profita pas, cette future confrontation avec son père n’avait fait qu’enfoncer le clou, et tarit les dernières miettes de sérotonine qui s'étaient battues la journée entière pour maintenir un semblant de bonne humeur. 

 C’est l’estomac noué qu’Izuku alla se coucher, et sans surprise, la crise tant redoutée finit par se manifester, à une heure avancée de la nuit. Par la seule force de sa volonté, Izuku parvint à se maîtriser, et c’est dans le plus grand des silences qu’il autorisa le débordement. Malheureusement, le contrôle d’Izuku avait ses limites, et cette crise d’angoisse était particulièrement coriace et douloureuse. Alors dans le noir, trempé de sueur froide, Izuku réussit à s’extraire de son lit en vu d’user du seul moyen qu’il avait a sa disposition pour étouffer efficacement son mal. Chose faite, il retourna se coucher tout en se félicitant de toujours savoir trouver des stratagèmes à toute choses. Toutefois, sachant qu’il n’était pas garanti qu’il trouve la paix et le sommeil de suite, Izuku s'équipa de ses écouteurs, et choisit une musique au hasard qu’il comptait chanter le plus fort possible dans sa tête jusqu'à ce qu’il s’endorme.  


V.I.T.R.I.O.L - Eths

https://www.youtube.com/watch?v=FT2qAKs1Jfo&list=OLAK5uy_nh10wRwKsCCbfRMsqoQm-lYgFDUFr3EPU&index=6



 -J'ai peur de tomber pour ne plus jamais me relever, j'ai peur de toujours te haïr et ma vie passe, je n'ai pas guéri tu vois, je me lasse fatigué de t'entendre me dire comment vivre, fatigué de porter ces sacs vides…chanta mentalement Izuku jusqu'à sombrer dans un sommeil mouvementé, et agrémenté de cauchemars. 


 A peine ses paupières s'étaient fermées, qu’Izuku les rouvrit sur un décor qui n’avait rien à voir avec sa chambre. C’est dans un métro qu’il avait atterri, une rame glauque, sale, couverte de graffitis grossiers, et dont la puanteur lui souleva le cœur. Un endroit suffoquant, loin d’être accueillant qu’il envisagea de quitter dès la prochaine station. Mais une fois le train arrêté, les portes s’ouvrirent sur un paysage auquel Izuku préféra de loin la rame, toute pourrie soit-elle. Or de question pour lui de mettre ne serait ce qu’un orteil dans ce parc pourtant ensoleillé et champêtre. Après un bref instant, le métro reprit sa route en pénétrant dans un tunnel jusqu'à ce qu’il s'arrête dans une station souterraine à la configuration étrange. Toute la longueur du quai était cernée par un grille qu’Izuku reconnu avant même de remarquer les chaises et les tables qui se trouvaient derrière. Un mobilier qui appartenait à de mauvais souvenirs, comme tous ces casiers qui longeaient le quai. Izuku renonça de nouveau à descendre, le métro reprit sa marche, faisant défiler à toute vitesse la grille et les porte de casiers. Alors que le train s’enfonçait de nouveau dans l’obscurité, l’un d’entre eux, le dernier, attira l’attention d’Izuku qui se jeta du coté opposé de la rame en y voyant une forme floue, pleine de couleur. Un peu étourdi, il secoua la tête, et soupira en constatant que sa montre avait été brisée dans la chute. Attristé d’avoir cassé sa montre préférée, celle qu’il portait à l’époque du collège (une petite merveille décorée du symbole de Naruto), Izuku ramassa les petits débris et les aiguilles, espérant pouvoir les recoller, puis il se redressa et arpenta l’allée du métro en serpentant entre les barres, attendant d'atteindre une destination plus agréable. 


-Fatigué d'écouter parler ces gens qui s'ennuient…Fatigué d'écouter ses gens qui envient…Fatigué d'écouter ces gens…Je devrais m’allonger…J’ai peur de dormir et ne plus jamais me réveiller, j’ai peur de chaque soir, devoir encore y croire, des pleurs de panique, visage poncé, terreur en heure creuse…chantonna Izuku avant de s’interrompre, voyant qu’enfin le train allait sortir du tunnel. 


 Le soleil baigna l’endroit d’une douce lumière tandis que le métro, devenu aérien, traversait la ville. Reconnaissant alors l’endroit où il se trouvait, Izuku s’empressa de rejoindre une porte en vue de descendre au prochain arrêt pour changer de ligne et rejoindre un lieu bien plus agréable. Mais comme si l’idée avait contrarié le métro, celui-ci bringuebala brutalement, faisant tomber Izuku qui eut ensuite l'impression de subitement se retrouver dans un roller-coster. De nouveau, le train plongea dans les ténèbres, une pente vertigineuse qui obligea Izuku à s'accrocher à une barre pour éviter de s'écraser sur des sièges. Puis enfin, le métro emprunta de nouveau un tracé normal, et le cœur battant, Izuku se redressa avant de sursauter, se sentant soudainement trempée par une eau glacée. Il réalisa avec horreur que le métro était inondé, et que le niveau de l’eau montait dangereusement. Mais impossible d’ouvrir une porte ou même de casser une fenêtre, celles- ci semblaient indestructibles. Alors Izuku se mit a courir en pataugeant, manquant de se casser la figure, tandis que l’eau changeait de couleur, comme si de l’encre noire y avait été versé.


-Calme toi..calme toi…Tu vas sortir d’ici…s’encouragea Izuku tandis que la panique s’emparait de lui, “Ah…! Ruine et couds nos coeurs déchirés, mutilés par tes soins, je n’aurais jamais, jamais, jamais pensé t’abîmer, renoncer, j’abandonne, mes bras lâchent de te voir, tellement vrai….!! Tellement toi…! Prêts à tout perdre pour garder ta chimère, son fantôme…Je me hais…chanta-t-il ensuite, la voix tremblante, dans l’espoir de canaliser une peur grandissante.


-Je me suis trompé…chanta une voix qu’Izuku reconnu, bien qu’elle soit imaginaire.


-E-Elliot…ELLIOT ! cria Izuku en se ruant vers son ami, sortit de nulle part, et dont le visage était rendu invisible par l’ombre de sa capuche, “E…E-Elliot…?”, dit-il ensuite, la voix tremblante, se sentant oppréssé par une aura pesante toute droit venue de l’encapuchonné. 


-J’irais...trouver, ma force, dans la HAINE !!! cracha soudainement ce dernier, dévoilant une bouche aux lèvres en partie retroussées, déformée par la rage. 


 Le cri eut l’effet d’un impact sur Izuku qui s'écroula dans les eaux en buvant la tasse. Trempé et hoquetant, il émergea, et il s’accrocha à une barre en refoulant un haut le cœur tant le goût de cette marée noire était répugnant. Encore haletant, Izuka balaya ensuite du regard la rame, redevenue déserte, tandis que soudainement le niveau de l’eau se mettait à baisser. Elle se retirait, formant une vague noire, immense, un tsunami qui allait s’abattre sur Izuku qui prit aussitôt ses jambes à son cou pour y échapper. Mais le cataclysme le suivait de près, et s’agrandissait, menaçant de l’engloutir dans les ténèbres. C’est alors qu’Elliot, le vrai, entouré d’une aura faite de flammes, réapparu quelques rames plus loin. Izuku fixa son regard sur ses épaules, comprenant que si il le touchait, il serait sauvé par ce feu dont la chaleur ferait s'évaporer ces eaux noires et poisseuses. Mais quand bien même Izuku courait à en perdre haleine, impossible de rejoindre son allié. Pourtant celui-ci progressait dans l’allé en marchant au ralenti, dans un métro qui semblait s’allonger à l’infini, comme le temps qui n’avait pas d’emprise dans cet effroyable endroit. 


-Stop…Stop…! Stop Elliot…J’ten prie…Elliot…A-attend moi…Arrêtes toi…supplia Izuku, à bout de souffle. 


 Puis soudainement, comme si le train avait obéit, il s’arrêta à la manière d’un film sur lequel on aurait fait “pause”, dans une station vide, austère et froide. Seule une petite bibliothèque en forme de maisonnette s’y trouvait, au beau milieu du quai. C’est là qu’Elliot allait descendre, alors Izuku rassembla ses dernières forces, et il réussit à rejoindre son allié. Mais au moment où il allait l’effleurer, la porte se referma sur lui en lui sectionnant un doigt. Sans prêter attention à sa main amputée et ensanglantée,  désespéré, Izuku martela la porte en criant, sans s’entendre, jusqu'à ce qu’enfin, Elliot se retourne. Izuku étouffa alors un cri d’horreur en se bâillonnant à l’aide de ses mains,  le découvrant dépourvu de visage, et vêtu d’une robe blanche, maculée de sang. 


-Bonjour. Bonne nuit, signa le Elliot sans visage.


 Ce dernier devint un giff animé, répétant inlassablement le même geste, tandis que le train repartait, arrachant son dernier espoir à Izuku qui se laissa tomber au sol en sanglotant. Épuisé, il renonça à lutter contre les eaux devenues aussi denses que du mazout, et il fondit en larmes dans le même temps que l’inexorable tsunami, poisseux et puant, s’abattait sur lui. Terrifié, Izuku se mit alors à crier, et dans un dernier effort, ses jambes et ses bras s'agitèrent pour se débattre, tandis que dans les ténèbres s'élevaient des voix , d'abord celle de son père, puis celle de sa mère, qui se répercuterent en échos. 


                               Echec…Echec…Echec…Echec…Echec…Echec…Echec…


                                                                                  Honte…Honte…Honte…Honte…Honte…Honte…Honte…


 Ces mots infligèrent une insoutenable douleur à Izuku qui poussa un dernier cri, étouffé par les eaux du cataclysme putride qui l’engloutissait.


-Lai…ssez moi…Laissez-moi…réussir…au moins…ça…articula Izuku avant que les eaux noires ne le fassent définitivement taire en pénétrant sa bouche, puis sa gorge et ses poumons.


 Heureusement, la noyade extirpa Izuku de ce terrifiant cauchemar, et trempé de sueur, il se redressa en repoussant brutalement sa couette. Haletant, il resta ainsi quelques instants, avant de se ceinturer le ventre dans l’espoir d'étouffer de vives brûlures d’estomac. Izuku avait terriblement envie de vomir, mais il ravala sa salive, plusieurs fois, jusqu'à ce que la bile cesse de lui brûler la gorge. Après quoi, il entreprit un exercice respiratoire tout en essuyant les larmes qui avaient véritablement coulé durant son sommeil, espérant que les cris qu’il avait poussé dans son cauchemar n'aient pas eut lieu dans la réalité. Heureusement, il ne devait en être rien, sinon Izuku aurait déjà eu la visite de sa sœur ou de sa mère. 


-J’en ai marre…Marre…J’en ai marre…articula Izuku en reniflant. 


 Sans un bruit, il sortit de sa chambre pour se rendre dans le salon où il fouilla un petit tiroir qui abritait de l’encens et de quoi l’allumer. Après quoi, il alla dans la salle de bain, plongea un doigt dans la bouteille de lessive, déposa une goutte du produit sur le col de son tee-shirt, et enfin il rejoignit sa chambre. Izuku ouvrit la fenêtre, il s’accouda à la rambarde en allumant le bâton d’encens qu’il tenait du bout des doigts, et chose faite, il fourra sa tête dans ses bras. Sans surprise, il ne retrouva pas les odeurs qu’il recherchait, mais Izuku comptait sur le pouvoir de l'auto persuasion pour que son esprit fabrique le parfum dont il aurait bien eu besoin ce soir.


-Snrfl…F-fat’i-gué…soupira Izuku en refoulant un sanglot.


 Arrivé à la moitié du bâton d’encens, Izuku l'éteignit, et il retourna au lit. Il réussit à retrouver le sommeil, sans rêve cette fois-ci, mais pas réparateur pour autant. 

 Le matin, Izuku se réveilla avant même que son portable ne vibre, l’air éteint, avec l’impression de ne pas avoir dormi. Avant de sortir de sa chambre, il observa le pas de sa porte, attendant de voir l’ombre de Nami sortir de la salle de bain. Sûr de ne croiser personne, Izuku s’y rendit en silence, et avec courage, il affronta son reflet dans le miroir pour voir l’ampleur des dégâts. En se découvrant il ne réagit pas, voir ce visage pâle, terne, fatigué, cerné, éteint et inexpressif ne lui faisait de toute façon ni chaud ni froid. En revanche, si par malheur sa mère le voyait ainsi, Izuku était à peu près sûr qu’elle ferait une syncope. Il fallait donc encore user de stratagème pour dissimuler les stigmates de la nuit passée, mais pas de problème, ça, c'était un jeu d’enfant pour Izuku. Au collège, il était passé maître dans l’art du déguisement, et pour forger son masque il avait acquis une compétence insoupçonnable : l’art du maquillage. Seulement, Izuku n’avait plus l’attirail dans lequel il avait investi au collège, alors il fouilla les trousses de Nami en veillant à ne rien déplacer, et prévoyant de tout remettre tel qu’il l’avait trouvé. 


-Gomen…articula Izuku en s’attelant à la tâche après s'être douché.


 Bien que Nami n’use plus de fond de teint ou d'anti-cernes couvrants, le talent de maquilleur d’Izuku réussit toutefois à redonner vie à son visage. L’artiste termina sa transformation en usant d’un peu de blush, et en redessinant quelque tache de rousseur, puis il contempla le résultat, si naturel qu’on y voyait que du feu. Mais même avec ça, Izuku dû admettre qu’il n’avait pas pu faire de miracle : malgré la supercherie, sa fatigue restait visible. Mais rien d’alarmant, quelques mensonges saupoudrés d’un fond de vérité suffiraient à convaincre sa mère, et tout irait bien. Avant de se confronter au regard de cette dernière, Izuku s'entraîna brièvement à mimer diverses émotions, puis enfin, il rejoignit la cuisine. 


-Bonjour mon pou…Poussin ? Tu as une petite mine, tout va bien…? dit Irène en posant une main sur l’épaule de son fils.


-Ah…Non, c’est rien…Ca va maintenant, j’ai juste mal dormi. J’ai dû trop manger hier, j’ai eu mal au ventre cette nuit, signa Izuku avant de s’installer à table.


-Oh…mon pauvre poussin…


-C’est à cause de papa ? intervint Nami en s’adressant à sa mère.


-Je…Poussin , C’est ça ? C’est la visite de papa qui t’as brassé…?


 En guise de réponse, Izuku haussa les épaules,et il plongea la tête dans son bol de thé. Il le savait, parfois laisser planer le mystère et ne donner aucune explication donnaient aux gens la possibilité de tirer leurs propres conclusions. Et si aujourd’hui pour sa famille celle-ci était qu’il avait eu un mal de ventre et une petite insomnie à cause de la future visite de son père, cela lui convenait. Encore un stratagème efficace, car par la suite, on lui épargna d’autres questions, et Izuku put s’en aller en direction du lycée, l’esprit tranquille. Sur le chemin, il déposa quelques gouttes d’huile essentielle de menthe dans son écharpe, et une fois arrivé à proximité de l'établissement, il attendit le dernier moment pour s’y rendre, ne se sentant pas encore prêt à supporter des interactions sociales. Izuku avait encore au moins besoin des premières heures de cours pour finir de se mettre en condition pour la journée, car pour le moment, il se sentait à fleur de peau. En entrant dans la salle, il salua brièvement Arthur et Ochaco, qui cette fois ci lui répondit, ce qui était plutôt une bonne nouvelle. Izuku pensa qu’avec le recul elle avait dû comprendre qu'il était inutile de bouder pour une histoire de table à la cantine, et qu’elle avait dû comprendre le message concernant le parasite Baggy le clown. Si tel était le cas, Izuku ne pouvait qu’être soulagé, car il le savait,  aujourd’hui la moindre contrariété pouvait le faire basculer.  Mais il allait être déçu, car loin d’avoir compris le message Ochaco n’avait fait que refouler ses ressentiments, et pire encore, en voyant son ami arriver en classe, l’air fatigué, c’est son côté mère poule qui se mit à sonner l’alerte. Et les yeux d'Izuku qui semblait être dans le vague pendant les cours n'arrangèrent en  rien l'inquiétude d’Ochaco qui était maintenant à son apogée. Alors à la pause, elle s’employa de nouveau à mener l’enquête.  


-Bah alors, mauvaise nuit ? dit Ochaco à Izuku sur le ton de la blague en tirant sous ses yeux.


-Bof, articula Izuku en faisant “coussi-coussa” avec sa main.


-T'as attrapé froid ? demanda Arthur en s'enfonçant lui-même dans son écharpe pour imiter Izuku qui acquiesça, content qu’on lui ai trouvé une bonne excuse.


-Ahaha, c'est ça quand on sort tard le soir Izuku, chantonna  Ochaco en faisant mine de gronder son ami.


-Hein…? articula Izuku en fronçant les sourcils.


-Toi t'es encore sorti hier soir… tenta Ochaco, toujours sur le ton de la blague.


-Quoi…? Non, articula Izuku en clignant des yeux, se sentant soudainement très agacé par les propos de sa camarade qui de toute évidence usait de sa technique du “prêcher le faux pour savoir le vrai”, probablement dans le but de lui tirer les vers du nez pour une raison quelconque.  


-Il vient de dire qu'il avait attrapé froid Ochaco, dit fermement Arthur.


-Ca va, je rigole Arthur...soupira Ochaco.


 Izuku soupira lui aussi en remerciant Arthur d’avoir arrêté Ochaco. Ce n'était clairement pas le bon moment pour jouer avec ses nerfs, et il était préférable que son petit jeu n’aille pas plus loin aujourd’hui. Malheureusement, contrairement à ce qu'espérait Izuku, et au grand désespoir d’Arthur qui le sentait bien plus irritable qu’il ne l’avait été la veille, Ochaco ne comptait pas s'arrêter là. 


-...Puis vu qu'Izuku est sorti l’autre soir, j'ai simplement pensé qu'il avait peut être remis ça vu qu'il avait l'air aussi fatigué que la veille, voilà tout….ajouta cette dernière en haussant une épaule.


-Et bien tu penses mal, voilà tout, écrit Izuku à l’adresse d’Ochaco. 


-Hé…Me regarde pas comme ça Izuku… j'ai rien fait de mal, s'indigna Ochaco, surprise par le regard noir que son ami lui adressait, et le ton de son message.


-Soit rassurée Ochaco, Izuku est juste malade. Maintenant on peut passer à autre chose non ? intervint Arthur en vue de balayer la soudaine tension qui régnait.


-“Rassurée”...?  répéta muettement Izuku en tendant l'oreille pour faire mine qu'il n'avait pas bien compris.


-Heu…Bah…Enfin non… balbutia Arthur en se mordant la joue, réalisant qu’il avait peut-être fait un mauvais choix de mot. 


-Parce que je peux savoir ce qui t'inquiète au juste ? écrit Izuku à l’adresse d’Ochaco tout en sachant pertinemment de quoi il s'agissait. 


-Roh c'est bon…Je m’inquiétais seulement que tu sortes tard le soir avec tes nouveaux copains c'est tout, dit Ochaco sans prendre la peine de cacher son agacement  qui datait de la veille.


-Ah…”Mes nouveaux copains”...articula Izuku en feignant de rire, “Ah oui, ceux qui font peur c'est ça ?” ajouta-t-il sur son portable. 


-Oui eux. Ceux dont tu parles jamais.


-J'ai pas besoin de le faire vu qu'apparemment tu les connais très bien, la provoqua Izuku par écrit.


-Pardon..? dit Ochaco en signifiant par le geste à son ami qu’il était dans l’erreur. 


-Je sais pas Ochaco, apparemment tout le monde les connaît ici, et mieux qu'eux même se connaissent visiblement. Donc vu que t'es comme tout le monde, ça doit être ton cas aussi je me trompe ? surenchérit Izuku. 


-On…On peut en discuter tous les trois ce week-end si vous voulez non…?  tenta Arthur qui sentait que le clash qu'il avait pressenti était sur le point de se produire, “...Ou…Ou pas…”, ajouta t-il, réalisant que plus personne ne prêtait attention à lui, et encore moins Ochaco qui avait été vexée, et surtout blessée par ce qu’Izuku avait dit d’elle.


-J'ai pas d'autres choix Izuku, tu parles jamais de toi ou de ce que tu fais et avec qui. Donc, je peux rien savoir à leur sujet. Et excuse moi de te le dire, ils sont pas ce qu’on appelle…approchables, aimables, sociables…Ils donnent pas envie quoi. Et ce que je sais d’eux, bah oui ça suffit à m'inquiéter.   


-Parler de moi ? De ce que je fais ? Mais qu'est ce que ça peut te foutre ?? articula Izuku qui sentait le sang lui monter à la tête de manière fulgurante avant d'écrire sur son portable, “Je crois pas t'avoir demandé de me surveiller ou quoi. Merci, j'ai déjà une maman.”


 En guise de réponse, Ochaco souffla bruyamment, elle même énervée par le ton particulièrement piquant de son ami avec qui la conversation allait être compliquée du fait qu’il ne communiquait pas comme tout le monde. Difficile d’avoir une dispute dans ses conditions, mais comme si Izuku avait lu dans les pensées d’Ochaco, il proposa une solution. Maintenant chauffé à blanc, il était prêt a crever l’abcès, avoir cette dispute, et ce quelqu’en soit l’issue. 


-Tu veux parler ? Tu veux que je parles ? Alors parlons. Message,  articula Izuku en levant son portable, ouvert sur la conversation qui avait été créée par Arthur pour faciliter les échanges d’informations et de devoirs (créée après qu’Izuku ait manqué l’information concernant l’absence du professeur d’Allemand).


 Ochaco attrapa aussitôt son téléphone, et en toute discrétion Arthur l’imita, désirant surveiller la conversation. 


-Allez, accouche Ochaco, c'est quoi ton problème. 


-Mon problème c'est que tu nous a menti.  


-???


-Oui l'autre jour. Pourquoi tu nous as menti en disant que t’allais réviser alors que tu sortais avec Elliot ? 


-Je l'ai croisé en rentrant chez moi, on a décidé de passer la journée ensemble c'est tout. 


-Donc pour  lui tu acceptes de renoncer à tes “révisions” mais pas pour nous c'est ça ? 


-Tu sais quoi, ok. Oui j'ai menti pour les révisions, et tu sais pourquoi ? Je voulais rentrer chez moi pour manger sans avoir à supporter la tronche de ton pote qui squatte tout le temps. Dommage que tu l'ai pas remarqué, mais il me GAVE. 


-Donc plutôt que de simplement en parler, tu préfères te trouver un bouche trou. Super. 


-Un bouche trou ?? Mais de quoi tu parles ?? Elliot est un ami ! 


-Et bien Théo est un ami aussi. 


-TON ami Ochaco, pas le mien. Et moi, contrairement à toi, je me permet pas de dire ce que je pense de tes fréquentations, tu fais ce que tu veux. Et pitié, si tu pouvais en faire de même pour moi, je t'en serais reconnaissant. Si t'aime pas Elliot, Denki et Kiri, grand bien te fasse, je m'en tape, et tu devrais faire pareil en principe, parce que moi, contrairement à toi, je te les impose pas.


-A la rigueur, je peux comprendre que Théo ait été un peu lourd avec toi, mais c'était rien de méchant. Et sinon au-delà de ça, il est gentil lui. 


-“Un peu lourd” ?? C'est une blague ?? “Lourd” c’est un euphémisme pour ce type ! Et pardon mais je cite : “Il est gentil LUI”, je rêve. Pas que ça me surprenne, mais en fait t'en es toujours au stade : “Elliot cuir capuche piercing ouin ouin j'ai peur.”? Et si je comprend bien, quand c'est toi qui décide de qui est méchant ou non il faut bien évidemment se fier à toi ? Je suis supposé apprécier tout les gens que tu vas traîner avec toi ? Même des bouffons comme ce type ?


-Hé t'emballe pas t'es agressif et insultant ! Puis j'ai jamais dit ça, et en ce qui concerne Elliot je me fie aussi à mon instinct.  


-Ton instinct ou tout ce que les gros cons du lycée bavent ? 


-Calme toi sérieux ! Et désolée de te l'apprendre, mais y'a pas de fumée sans feu Izuku. Et sache qu'en plus tout finit par se savoir.


-Ah vas y, apprends moi des choses que j'ignore :)


-Bah par exemple : je peux t'affirmer qu'on t'as vu tard le soir en compagnie d'Elliot et de drôle de personnes qui n'étaient clairement pas des lycéens. Et moi je vois bien que t'as changé depuis que tu le fréquentes. Puis là tu te mets à sortir en pleine semaine, t'arrive éclaté au lycée, et en plus tu sens la cigarette. Alors oui ça fait suffisamment de raison pour moi de m’inquiéter. 


-Alors de un, ce que je fais quand je sors et avec qui je suis, ça  regarde personne, et de deux, laisse moi t'apprendre une chose : oui Ochaco, si quelqu'un fume à côté de toi, il y a de grandes chance pour que tu sentes la cigarette après. Ça fait pareil quand ma mère fume des clopes. Ensuite, si toi tu préfères te fier aux ragots des autres pour te faire ton avis sur les gens, libre à toi. Mais tu sais quoi, moi ça m’intéresse pas les gens comme ça. Après tu t'étonnes que je te parle pas, mais c'est inutile Ochaco, parce que t'es arrêtée sur tes réseaux sociaux et tes rumeurs à la con. J'ai rien à t'apprendre.    

 

-Hé encore une fois calme toi ! Rien ne t’empêche de rester poli ! 


-J'ai pas envie d’être poli quand on me casse la tête Ochaco. 


-Elle est bien l'influence de ton « ami » ? Enfin brute d'ami pardon. 


-Ah oui c'est vrai, ton instinct, ou plutôt le lycée, Facebook, ou je sais pas quoi t'indique que c'est une brute. Surprise ! C'est faux, brute de décoffrage à la rigueur, mais sinon non, il distribue pas des pains gratuitement. Ton instinct Ochaco, il est éclaté, et c’est d'ailleurs dommage parce que figure toi qu’Elliot est loin d’être méchant, et encore plus d'être con. Parce que toi t’as retenu quoi de lui hein ? Les horreurs qui se disent à son sujet ? Pourtant d'après ce qu’a pu me dire Arthur, lui même et tes supers potes ont aussi dit qu'il était très intelligent. Et surprise, ça, c'est vrai.


-Ho mais ça j'en doute pas une seconde, je suis même la première à le pressentir avec mon instinct éclaté. Et c'est bien ce qui m’inquiète.


-Doux Jésus, mais alors, elle est ou ta logique ? Enfin j'aurais bien une réponse, mais je vais rester poli :)


-Oui tu fais bien avant que je perde la mienne de politesse. Et tu sais les gens intelligents, très intelligents, TROP intelligents, ils ont pas que la capacité de résoudre des équations à vitesse grand v Izuku. Ça peut aussi leur servir pour tout autre chose. 


-Oh vas y j'ai hâte de savoir. 


-Tu sais les gens trop intelligents, ils peuvent aussi bien manipuler les équations que les gens. 


-J’espère que tu réalises que c'est plutôt grave comme accusation. Puis c'est quoi encore ce truc sorti de ton chapeau magique. Ah non pardon, ça doit probablement venir de ton Facebook. 


-Ça sort de mon instinct, pas si éclaté que ça, qui me dit que ton “ami”  me donne  l'impression de vouloir chercher à obtenir quelque chose de toi. Je vois bien comment il te regarde parfois, et moi ce que je vois c’est quelqu’un d'intéressé.


-Olalalalala…souffla Arthur en voyant Izuku écrire sa réponse à une vitesse surhumaine.


-Et bien tiens moi au courant de la suite hein, que je sache ce qu'Elliot le manipulateur attend de moi. J’imagine que ça doit être du fric vu que les gens, Facebook, le traitent de clochard, et que moi j’ai, je cite : “une famille pété de thune”. Et avant que tu poses la question, oui j’ai eu l’occasion de jeter un oeil à Facebook, à ce groupe de merde ou TOI aussi t’es affichée. Mais bon bref, quelque part je comprends ton raisonnement, c'est vrai que c’était trop bizarre que j'arrive à me faire des amis tout seul, qui le voudrait de toute façon ? Un mec handicapé c'est une plaie, aucune raison d'en faire un ami si ce n'est pour obtenir quelque chose. Logique. C'est bien ça Ochaco ? 


-Quoi ?! Ça va pas !? Me fait pas dire ce que j'ai pas dit Izuku ! Tu vrilles ! Puis nous on est quoi alors ?? Tu crois qu’on est “intéressés” ??? Et je vois pas de quel groupe tu parles ???


-Pourquoi t'es venue me voir Ochaco ? Par pitié ? Pour jouer les bons samaritains ? Ose me dire le contraire. Et pardon mais dans ce cas la, oui c’est aussi “intéressé”. C’est ni plus ni moins que pour satisfaire ton ego qui te fait te sentir bien parce que t’as fais ta BA de l’année en ramassant un handicapé.


-Excuse moi de pas avoir voulu te laisser tout seul ! Et j'ai simplement trouvé que tu avais l'air sympa ! Et stop ! C’est quoi ce délire, tu vas trop loin ! Ce qui m’a motivé c’est peut être l’empathie ok, mais c’est tout ! Rien à voir avec l’ego ! Et ta psychologie de comptoir elle vaut aussi pour ton “ami” ? T’as ce discours avec lui aussi ??


-Non, et tu sais pourquoi ? Parce qu’avec lui je me sens PAS handicapé ! Il me traite comme les autres, au point que j’oublie moi-même que je suis sourdingue ! Et pour le reste, je vais t'apprendre un truc à mon sujet :  je m'en fou d’être seul. Mais à un niveau LUNAIRE. J’aime être seul, j’aime la solitude, et quand on m’en accorde pas assez J'ÉTOUFFE ! Tu m'étouffes Ochaco ! 


-Tu deviens méchant Izuku…


-Mais je suis PAS gentil Ochaco, et tu devrais le savoir si tu suis ta propre logique : Elliot, son allure, son look, son monde, ça te fout la trouille ? Mauvaise nouvelle, mon monde à moi il est pas si éloigné du sien, et on a même pas mal de points communs. Donc si lui est méchant, pas fréquentable ou que sais-je encore, moi aussi je le suis, on est de la même race en somme.  


-Ça je peux pas en juger, ton monde tu l'ouvres pas, je le connais pas. Et toi contrairement à Elliot, tu me fais pas l'impression d'être une mauvaise personne. Je SAIS que tu es un garçon gentil, même si là maintenant, tout de suite, t’es méconnaissable.


-Ah ! Tu vois ? Tu l'as dis toi même : tu peux pas juger quelque chose que tu connais pas. Alors stop en ce qui concerne Elliot, Denki ou Kiri. Et de toute façon Ochaco, mon monde il est à mille lieu du tiens. T'as pas besoin de le connaître. 


-T'en sais rien, toi non plus tu me connais pas en fin de compte, et d’ailleurs si tu me connaissais un peu mieux, peut être que tu comprendrais mon instinct et ma méfiance…Et pour ce qui est de ton “ami”, on verra bien, on en reparlera dans quelques temps. 


-Non. Et on va même plus parler du tout en fait. 


-Et moi je crois qu'au contraire, on devrait continuer. 


-Non merci. Tu me casses la tête. J’ai une migraine là.


- Hé ! Ca suffit, tu deviens insultant à force ! Tu te prends pour qui ?? 


-Izuku Midoriya.


-Je suis pas sûre d'avoir cette personne en face de moi non, je te l'ai dit, tu as changé...Je t’aurais jamais cru capable de parler comme ça…


-C’est mal me connaître. Le jour où tu comprendra enfin qu’il faut pas se fier aux apparences…Ce jour-là il va neiger au mois de juillet, écrit Izuku avant de descendre du muret où il était assit. 


  Avant de verrouiller son portable, Izuku envoya un dernier message, puis sans s’attarder plus, il récupéra son sac et s’en alla en évitant Ochaco qui avait essayé de le retenir en l’attrapant par le bras. 


-Hé on a pas fini ! Izuku reviens ! cria inutilement Ochaco avant de regarder le message, un lien Youtube sur lequel elle cliqua.  


 Louder than words - Celldweller. 

https://www.youtube.com/watch?v=JMXq-SCLxpk


-C'est bon Ochaco tu peux couper maintenant...dit Arthur avec douceur pour épargner à son amie d’entendre plus longtemps le chanteur entonner “Shut up” à répétition. 


-Non... dit Ochaco, de grosse larmes coulant déjà sur ses joues, “Snrfl…Il..il a renvoyé un message…”, ajouta-t-elle en tendant son téléphone à Arthur.


-“ UA les cassoseries” #quandtesunboloss. Bonne lecture.” lut ce dernier avant de faire une rapide recherche sur Facebook, “Oula…” souffla t-il ensuite devinant à quoi était destiné ce groupe.


 Discrètement, Arthur supprima le dernier message pour épargner à Ochaco d’être tentée de se rendre sur cette page qui, de toute évidence, allait réveiller de douloureux souvenirs pour elle. 



***



 Des larmes, Izuku aurait aussi pu en verser si il n’avait pas pris sur lui, mais en ce qui le concernait c'était des larmes de colère. Furieux, il rejoint à grande enjambées le portail du lycée, prévoyant de sécher la journée. Qu’importe, à cet instant il se fichait des cours, il dirait qu’il était malade ce qui de toute façon, ne tarderai pas à arriver. Mais avant toute chose, il fallait qu’il se calme, qu’il retrouve le contrôle, et pour ce faire, Izuku avait une destination toute trouvée. Il comptait s’y rendre dès maintenant,  le plus vite possible, si vite qu’en passant la grille du lycée, Izuku percuta quelqu’un de pleins fouet. Elliot, qui le rattrapa de justesse avant qu'il ne se casse la figure.


-Hey,  dit ce dernier en tenant toujours un Izuku de nouveau parfumé à la menthe.


-Hey. Pardon. Je t'avais pas vu. 


-Ca, j’avais bien compris, dit Elliot avec son habituel sourire en coin, “Ha…?”, souffla-t-il ensuite. 


 Son sourire s'évanouit quand il prêta attention au visage d’Izuku dont les traits étaient particulièrement tendus. Même ses yeux semblaient avoir changé de couleurs, tant qu’Elliot pensa que s' il avait fallu donner un autre nom à la colère aujourd’hui, ça aurait été “Izuku Midoriya”. 


-Bon bah…Salut. Bonne journée, articula ce dernier.


-Ça a sonné, dit Elliot en relâchant Izuku.


-Je sais. 


-Tu vas où ? 


-Ailleurs.


-Ha ? Je peux aller ailleurs aussi.


-Les cours. 


-Pf. Dit-il. Bouge pas d'ici, dit Elliot en pointant le sol du doigt avant de rentrer précipitamment dans l'enceinte du lycée afin de récupérer son sac. 


 En l’attendant, Izuku se posa lourdement contre la barrière en soupirant, à la fois soulagé d’être tombé sur Elliot, et exaspéré que ce dernier soit encore confronté à un de ses énièmes roller coaster émotionnel. A ça s’ajoutait la culpabilité, celle de faire sécher les cours à son ami, et une autre ,en fond de tâche, qui lui reprochait sa méchanceté envers Ochaco. Pour chasser cette pensée dont il s’occuperait peut-être plus tard, ou pas, Izuku agita la main devant son nez, comme pour chasser une mouche. Une fois la pensée nuisible évacuée, il se concentra sur la suite de la journée qui serait de toute évidence plus agréable que ce qu’il avait pensé. Par chance, les étoiles s'étaient alignées pour qu’Izuku soit accompagné de la bonne personne, peut-être la seule aujourd'hui capable de le canaliser. Et dieu sait qu’il allait en avoir besoin, car il se sentait prêt à exploser, au point qu’il se serait volontiers défoulé sur un sac de frappe voire n’importe quoi pour évacuer sa colère. Mais faute de quoi, il croisa les bras et fourra sa tête dans son écharpe avant de l’en ressortir, remarquant une main s’agiter sous son nez. 


-Mais merde !! Ils se sont tous donné le mot pour me foutre la rage ?!! Ca, Papa, Ochaco…Et maintenant lui ?? J’en ai marre !! Foutez moi la paix !! Foutez moi TOUS LA PAIX !” s’insurgea mentalement Izuku en jetant un regard noir à Baggy le clown.  


-Hello Izuku, bah alors qu'est ce que tu fais la ? Ça a sonné, dit ce dernier.


-Je sais. Casse-toi, articula Izuku.


-Pardon ? 


-Je-t'ai-dit-de-te-barrer.


-Si tu pouvais heu...écrire ? proposa Théo.


-Frérot, je crois qu'il veut qu'on s'en aille, dit Lya en tirant sur la manche de son ami. 


-Ah bien sûr on va y aller, mais vu que t'es là Izuku, je vais en profiter, je voulais te proposer... 


-Dégage, le coupa Izuku.


-Heu Théo… Vraiment barrons nous…dit Jyl qui voyait aux yeux d'Izuku qu'il était préférable de fuir à toute jambe. 


-On peut discuter en marchant, suggéra Théo, “Viens.”, ajouta-t-il en amenant sa main sur l’épaule d'Izuku qui la chassa d’un geste avant de le pousser brutalement. 


-MAIS PUTAIN LACHE MOI ! MERDE !!! cracha muettement Izuku avant de s’en aller en bousculant Théo au passage.


 Abasourdi et béat, ce dernier regarda Izuku s'éloigner, avant d’être bousculé de nouveau, cette fois-ci par Elliot qui le fusilla du regard en le toisant de toute sa hauteur. Quelques secondes durant lesquelles Théo fut persuadé d’être réduit en cendre. Une fois le choc passé, et après qu’Izuku et Elliot aient disparu de son champ de vision, Théo soupira bruyamment, et il s’appuya d’une main sur un genou tandis que de l’autre il se tint la poitrine. 


-Han putain frérot, il t'as tellement tej’! Ça va aller ?? s'inquiéta Jyl.


-Ho non, attends, rien à voir, répondit Théo qui fit mine de s'évanouir, “Je viens de prendre un shoot de testostérone, mais genre, concentré tu vois, et je crois que j'overdose là.”, ajouta t-il en s'éventant avec sa main. 


-Bah ça va tranquille, cœur d'artichaut va. Le mec vient de se prendre le plus violent bâche de l'histoire par son crush, et il bave déjà parce qu'un BG l'a bousculé, dit Lya en balayant l'air de sa main. 


-Oh mais…SES YEUX putain !!! s'exclama Théo en secouant une main.


-Ça y est t'es content ? T'as attiré l'attention d'Elliot une fois dans ta vie ? On peut y aller maintenant ? dit Jyl en soupirant.


-Oh non mais, hé, j'en ai déjà plusieurs fois essuyé des regards d'Elliot mais là, LA.  Là là ! LAAAA…!


-Genre il te regarde, dirent Lya et Jyl d’une même voix.


-Oui mesdames, figurez vous que le Katiev, il me regarde, affirma Théo, “Et à chaque fois qu'il à posé ses yeux assassins sur ma frêle personne, ça a été pour moi des purs moments de plaisir, mêlés d'effrois.”, ajouta t-il en frissonnant.


-Ok donc maintenant on ajoute maso à la liste de tes fetish, dit Jyl en cochant dans les airs.


-Ceci dit, c'est pas surprenant, dit Lya en haussant les épaules.


-Certes, confirma Jyl. 


-Héhéhé...ricana Théo


-Heu ça va frérot ? Vraiment tu nous inquiètes la, dirent Lya et Jyl d’une même voix.


-Oh mon dieu OUI. Je vais très bien même, se réjouit Théo, “Les meufs. Ça y est. J'ai compris…C’est LIMPIDE.” ajouta-t-il ensuite, l’air très sérieux.


-T'as compris quoi ? Qu' Izuku voulait vraiment pas de toi ? C'est pas faute de te l'avoir dit, dit Lya.


-Non pas ça. Enfin si, ça  j'avais bien compris que c’était mort, mais ça fait un moment déjà que j'ai capté. Cependant ! Il fallait que je lève le doute sur un truc, un truc que je captais PAS, et pour être franc…Qui me plaisait paaaas du tout huhuhu...Mais c'est bon, j'ai eu une révélation !!! finit par s'exclamer Théo en imitant une explosion au-dessus de sa tête.


-Vas y, nous laisse pas en chien avec tes révélations, dis nous, s'impatienta Lya.


-Venez par là…dit Théo en invitant ses amies à tendre l’oreille.


-Ok frérot, on t'emmène à l’hosto. Le bache ultra violent que tu viens de te bouffer t’as retourné le cerveau. J’y crois pas, ça serait si…si décevant…D’un côté comme de l’autre, dit Jyl. 


-J’avoue tu dis nimp’ frérot, dit Lya.


-Oh non non non rassurez vous…Le bache je l’ai pris y’a longtemps huhuhu…Je m’étais déjà fait une raison, vous me connaissez : quand c'est mort c'est mort je suis pas du genre à ramper.  Mais les filles, vous connaissez aussi très bien mon flair non ? 


-Nous sachons, confirmèrent Lya et Jyl à l'unisson.


-Bon les meufs, là c’est “Santa Barbara”, on va assister à des choses cette année…Houhouhouhou ! dit Théo en secouant la main.  


-Ouey ! s’exclamèrent Lya et Jyl avant de rentrer dans le lycée, suivies de Théo qui jeta un dernier regard derrière lui.


-Pf...Izuku Midoriya, pas si inoffensif qu’il en a l’air, voire complètement con…? Versus…Elliot Katiev, un mirage qui mène les gens par le bout du nez…? Pffufufufufu…J’ai hâte de voir tomber les masques…chuchota Théo en s’équipant d’un écouteur, “Po-po-po-po-poker face…Po-po-po-po-poker face…” chantonna t-il ensuite en claquant des doigts.


 Lady Gaga - Poker face

https://www.youtube.com/watch?v=bESGLojNYSo&list=OLAK5uy_m7Ye_jfWgXYQzD_Kg2TiF1LFwdaZD3y8g&index=4


 



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