Tu es entré dans ma vie comme si tu y avais toujours vécu
Ce matin, comme tous les autres matins, assis à la terrasse du café en bas de son petit appartement, Charles attendait son café habituel en observant l'agitation de la rue. Les livreurs qui déchargent leur camionnette à l'épicerie du coin, le libraire qui déballe ses étagères, un couple de touristes qui se fait prendre en photo avec la vue sur Montmartre en arrière-plan. Les passants, des gens qui vont au travail, d'autres qui promènent leur chien. Tout ce monde vivant et coloré qui allait et venait, parlait, riait, lui rappelait les couloirs d'une certaine école, le matin, juste avant que les élèves n'entrent dans leur classe.
Et comme chaque matin, Charles avait une conscience aiguë de sa solitude. Il avait volontairement fermé son esprit à toutes les pensées autres que les siennes.
Ses propres pensées qui suffisaient à le tourmenter.
Le plus souvent, il s'agissait de souvenirs qu'il se forçait à affronter. Ses erreurs, ce qu'il aurait dû ou n'aurait pas dû faire. Chercher, disséquer le moment où il avait perdu de vue ses valeurs. À quel moment il avait laissé tomber ceux qu'il avait juré de protéger depuis le jour où il avait découvert Raven dans sa cuisine, il y a tant d'années.
Mais l'apaisement ne venait jamais.
Au début, Hank lui donnait des nouvelles de l'école, des progrès des élèves, des nouvelles de chacun et puis petit à petit les messages s'étaient espacés, Charles mettait de plus en plus de temps à répondre, laissant la distance grandir volontairement. Cela faisait maintenant 3 mois qu'il n'avait pas de nouvelles et c'était bien comme ça.
Raven, Jean, Alex... et les noms de tous les autres tournaient dans sa tête, comme une danse macabre, une torture qu'il s'infligeait pour expier.
Il n'y avait qu'un seul nom qu'il refusait de prononcer, auquel il refusait de penser. La seule personne qui avait toujours été capable de lire en lui sans avoir aucun pouvoir télépathique.
"Tu es toujours désolé, Charles. Et il y a toujours un discours. Mais plus personne ne s'en soucie."
"Ce sera tout, monsieur ?"
La serveuse, le tirant de ses rêveries, posa son café sur la table.
"Oui, merci", répondit Charles.
"Mutant et fier de l'être".
Raven avait toujours eu raison, "Ou alors c'est seulement avec de jolies mutations ou des mutations invisibles, comme les tiennes. Mais si tu es un monstre, mieux vaut te cacher."
Mutant oui, mais fier il ne l'était plus. Il était le monstre qui devait se cacher.
Il but une gorgée de son café et se passa la main sur le visage.
Il sentit soudain senti une présence dans son dos, et un frisson le traversa au son de la voix aux inflexions si familières, "Comment la retraite te traite-t-elle, Charles ?"
Erik s'assit en face de lui et déposa à ses pieds une petite mallette contenant visiblement un jeu d'échecs. Pourquoi était-il là ? Pour le narguer ? Pour le provoquer ? Charles résista à la tentation de lire dans ses pensées. Il serra son poing sur son genou. Erik était le seul à pouvoir provoquer cette tempête d'émotions en lui. Le seul qui avait la capacité de le déstabiliser.
Alors comme toujours, Charles choisit, "Que fais-tu ici, Erik ?".
Il osa finalement croiser le regard d'Erik, et il eut presque le souffle coupé, car, dans les yeux bleu-gris, il n'y avait rien de la dureté, de la déception de leur dernière rencontre. Le regard d'Erik était gentil et ouvert alors qu'il répondait avec un léger sourire, "Je suis venu voir un vieil ami. Tu veux faire une partie ?"
Erik lui montra le jeu d'échecs à leurs pieds.
Leur partie d'échecs habituelle, le moment où leurs esprits s'affrontaient. Cet espace hors du temps, où malgré les batailles et les conflits, ils parvenaient toujours à se retrouver. Mais cette fois-ci, Charles n'était pas sûr d'avoir la force d'offrir à Erik un adversaire digne de ce nom. Il secoua donc la tête et répondit : "Non, pas aujourd'hui. Merci."
Il détourna le regard. Il ne pouvait pas regarder Erik alors que tant d'émotions le traversaient. Il avait été sûr qu'il ne reverrait jamais le seul homme qu'il avait jamais aimé, et il était là devant lui, magnifique, rendant Charles encore plus conscient de son propre état.
"Il y a longtemps, tu m'as sauvé la vie. Puis tu m'as offert un foyer. J'aimerais faire la même chose pour toi."
Charles étudia l'expression d'Erik pendant un long moment. Toujours la même ouverture et acceptation. Il était une fois de plus tenté de lire dans les pensées d'Erik.
"Tu peux, tu sais." Erik a fait le mouvement de la main que Charles faisait lorsqu'il voulait accéder à l'esprit de quelqu'un.
Comme toujours, il avait vu clair dans le jeu de Charles, mais encore une fois, aucune déception ou dégoût dans la voix et le regard.
Après avoir dégluti, Charles répondit d'une voix légèrement rauque, ayant du mal à contenir ses émotions.
"Je ne fais plus ce genre de chose."
Erik hocha simplement la tête avec un demi-sourire, mit ses mains dans ses poches, puis les sortit et les tendit devant lui les poings serrés, comme à chaque fois.
"Juste un jeu. En souvenir du bon vieux temps."
Charles céda, il n'avait plus envie de se battre, il n'avait plus envie de faire semblant. Il tendit donc sa main vers le poing droit d'Erik, qui s'ouvrit sur un pion blanc.
Erik dit avec un léger sourire taquin : "Je vais te ménager."
Charles répondit avec le même sourire, juste un peu plus hésitant, "Non, bien sûr que non."
Alors qu'ils mettaient les pièces en place, Erik ajouta : "Je pourrais te surprendre, tu sais Charles."
Charles arrêta son mouvement alors qu'il allait déplacer un cavalier, et dit avec de l'émotion dans la voix en fixant les yeux d'Erik, "Tu l'as déjà fait."
Le temps resta suspendu pendant un moment, aucun des deux ne pouvant détacher son regard de l'autre. Puis Charles continua son mouvement et le jeu reprit.
Le soleil était haut dans le ciel lorsqu'ils eurent terminé leur partie. C'était Erik qui avait gagné. Mais comme toujours, peu importe le vainqueur, aucun des deux ne s'en souciait, l'important était le duel, pas le résultat.
"Alors ?" demanda Erik en rangeant le jeu d'échecs, "As-tu eu le temps de réfléchir à mon offre ?"
"Tu le pensais vraiment ?" Charles espérait qu'Erik ne pouvait pas entendre l'empressement dans sa voix, car il voulait vraiment accepter l'offre d'Erik. Mais le méritait-il ? Avait-il le droit d'avoir ce foyer qu'Erik lui offrait ? Et que signifiait même un foyer ?
Sa main se mit à trembler légèrement, comme s'il voulait saisir quelque chose, mais n'osait pas. Il ferma les yeux pour se calmer. Il sentit une main se poser sur la sienne alors que la voix d'Erik disait doucement, "Charles...". Il ouvrit les yeux. La main d'Erik desserra son poing et entrelaça ses doigts avec les siens. Charles leva lentement les yeux vers le visage d'Erik.
L'envie de se rendre, de se laisser aller, se fit encore plus forte. Il pouvait voir tellement de choses dans les yeux d'Erik, mais il avait tellement peur d'être déçu et de décevoir... encore. Il referma ses doigts sur ceux d'Erik et essaya d'avaler la boule qui se formait dans sa gorge.
Erik continua, "Charles, il n'y pas d'exigences, pas de dettes, pas d'obligations, c'est complètement gratuit, je t'offre juste une vie simple et protégée. C'est loin d'être une vie de château, mais Genosha est une petite île isolée où nous avons créé une communauté autosuffisante. La plupart des habitants sont comme nous, des mutants "retraités" avec des blessures à guérir. Tu peux..."
Charles l'interrompit, "C'est bon Erik, pas besoin d'en dire plus, j'accepte. " et après un moment de silence, il ajouta "Merci".
Erik sourit simplement, posa son autre main sur leurs mains entrelacées et dit : "Je fais simplement preuve de la même générosité que celle dont tu as fait preuve envers moi encore et encore. Pas besoin de gratitude entre nous. Nous sommes juste deux amis et..."
Erik fit une pause, comme s'il était sur le point de dire autre chose.
"Et ?" demanda Charles, curieux de savoir ce qu'Erik s'était empêché de dire.
Pour la première fois depuis le début de cette rencontre, Erik eut l'air un peu déstabilisé avant de répondre : "Rien... du moins pas maintenant".
Charles n'insista pas, il savait qu'il y avait beaucoup de choses à éclaircir entre eux. Mais maintenant qu'il avait décidé de suivre Erik sur son île, il savait qu'ils avaient le temps.
"Alors comment on fait ?"
Erik répondit en se levant, "Je vais t'accompagner à ton appartement, tu prends ce dont tu as besoin pour quelques jours, et nous partons pour Genosha. Tu pourras te faire livrer le reste plus tard."
"Si tôt ?"
"Pourquoi attendre ? As-tu des obligations ici, des gens à qui tu dois dire au revoir ?"
"Non !" répondit sèchement Charles, furieux d'avoir été percé à jour une fois de plus.
Il a commencé à faire rouler rapidement son fauteuil roulant vers l'entrée de son immeuble. Erik le rejoignit en deux enjambées avant de poser sa main sur son épaule. Charles s'en voulut d'avoir tellement envie de contact qu'en réaction ce simple geste l'apaisa immédiatement.
"Charles, je sais ce que c'est, je suis passé par là. Ne t'énerve pas. Ce n'était pas une critique ou une moquerie." Erik lui serra l'épaule avant de laisser retomber sa main. Charles en ressentit aussitôt le manque.
"Je sais..." soupira Charles. "Viens."
Alors qu'ils franchissaient la porte du minuscule appartement de Charles, sentant qu'Erik était sur le point de dire quelque chose, Charles l'admonesta : "Pas un mot."
Erik fit un signe de la main, comme s'il fermait sa bouche sans cacher son sourire, mais il n'a finalement pas pu s'empêcher de parler.
"Mon Dieu Charles, est-ce que tu vis dans cette boîte à chaussures ? Tu me déçois ! C'est si spartiate."
Voyant le regard noir de Charles, il fit semblant de se rendre. "Ok, ok, je ne dirai plus rien."
Charles marmonna : "Menteur".
Puis ils rassemblèrent les affaires de Charles et quelques heures plus tard, ils étaient en route pour Genosha.
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Deux semaines plus tard, Charles déballait les derniers cartons qui venaient d'arriver, principalement des livres. Erik lui avait construit des étagères de fortune. Sa "résidence", comme toutes celles de Genosha, était faite de matériaux de récupération, mais cela ne dérangeait pas Charles. Bien qu'il ait toujours vécu dans une certaine opulence, il savait se débrouiller avec peu.
"Besoin d'un coup de main ?"
Erik venait de franchir le rideau qui faisait office de porte.
"Je dis pas non".
Ils n'avaient pas eu le temps de vraiment parler et de purifier l'air entre eux, mais Erik était très attentionné. Charles était un peu destabilisé, ne sachant pas où il en était. Il avait donc décidé de prendre les choses comme elles venaient. S'il était honnête avec lui-même, il savait ce qu'il ressentait pour Erik. Mais il ne voulait pas agir, il ne voulait pas risquer de briser l'amitié qu'ils étaient en train de reconstruire.
Erik ouvrit un carton de livres.
"Tu veux les ranger dans un ordre particulier ?"
"Non, mets-les sur les étagères comme ils viennent pour l'instant".
Alors Erik commença à ranger les livres, commentant certains titres.
"Oh Charles, Charlotte Brontë vraiment ? Jane Eyre ?"
"Hé Erik, ce n'est pas parce que tu m'aides que tu dois aimer ce que je lis."
"Ho Ho ! Tu as même marqué une page."
Charles se souvint de la page et des mots qu'il avait écrits dans la marge.
"Erik, s'il te plaît, range ce livre, ça n'a pas d'importance."
Mais il put voir sur le visage d'Erik qu'il n'était pas prêt de lâcher prise, alors il se résigna et ferma les yeux en attendant une réaction, de quel genre, il ne savait pas.
"Charles ?"
Charles pressa ses paupières encore plus fort.
"Oui ?"
"C'est à propos de moi ?"
Charles eut un petit rire d'autodérision avant de répondre : "Je ne connais pas d'autre Erik, alors oui c'est de toi qu'il s'agit."
"Que veux-tu dire par 'tu es parti Erik et maintenant je saigne' ?"
Charles laissa échapper un long soupir et mit sa tête dans ses mains. "C'est vraiment gênant... c'est en rapport avec le passage souligné qui est un peu plus haut si je me souviens bien."
Il connaissait la phrase par cœur, car elle résonnait d'une manière particulière depuis qu'il avait rencontré Erik, mais il ne s'attendait pas à l'émotion vive qui le traversa lorsqu'il entendit Erik lire les mots à haute voix.
"J'ai un sentiment étrange à votre égard. Comme si j'avais une ficelle quelque part sous ma côte gauche, étroitement nouée à une ficelle similaire en vous. Et si vous deviez partir, j'ai peur que ce cordon de communion ne se rompe. Et j'ai l'impression que je me mettrais à saigner intérieurement. Quant à vous, vous m'oublierez."
Charles entendit Erik poser le livre puis un bruit de pas, il ne voulait toujours pas ouvrir les yeux, il avait trop peur de ce qu'il lirait dans les yeux d'Erik. Il était conscient de sa présence tout près de lui, puis une main a serré la sienne.
"Charles, s'il te plaît, regarde-moi."
La voix d'Erik était presque suppliante, Charles ne résista pas et ouvrit les yeux, pour voir qu'Erik s'était agenouillé pour être à son niveau. Il leva ensuite les yeux vers ceux d'Erik, effrayé par ce qu'il y trouverait, et eut une nouvelle fois le souffle coupé, Erik avait l'air presque émerveillé, oui c'était ça, émerveillé.
"Charles,est-ce que tu ressens toujours cela ?" Erik lui demanda d'un ton pressant, ses yeux scrutant les siens, ne laissant aucune échappatoire à Charles.
Charles déglutit, et malgré sa gorge serrée, il essaya de répondre, "Oui".
"Mais quand... Je veux dire.. depuis quand ?"
"Quand ? Te souviens-tu du jour où tu as réussi à débloquer ton pouvoir. Le jour où tu m'as laissé accéder à cette mémoire ? Eh bien depuis ce jour, je ressens cette connexion très forte entre nous."
Erik serra sa main un peu plus et demanda : "Et ces mots inscrit de ta main dans la marge ?"
La voix de Charles n'était plus qu'un murmure : "Après les missiles et la plage, quand tu es parti."
"Oh Charles, je... je suis tellement désolé." Le regret était authentique dans les yeux d'Erik.
"Ne le sois plus, cela fait longtemps que je ne t'ai pas pardonné et depuis, je pense que j'ai eu ma part d'erreurs et de mauvaises décisions. Dont certaines ont eu plus de conséquences que de perdre mes jambes. Raven avait raison, j'avais oublié qui j'étais. Pourquoi j'ai commencé tout ça en premier lieu. J'ai perdu de vue ce qui était important, j'ai perdu... J'ai perdu tellement de choses. Et je suis désolé de ne pas l'avoir vu plus tôt, et... Je ne suis pas aussi évolué que je le pensais. Tu dis que tu es désolé Erik, mais tu ne sais pas à quel point moi je suis désolé. Pardonne-moi, je... Je dois..."
Charles devait partir, il devait sortir, le chagrin qu'il ressentait depuis qu'il avait quitté l'école, non même avant, depuis la mort de Raven, tout cela menaçait de sortir, il ne voulait pas s'effondrer, pas comme ça devant Erik.
Mais Erik l'empêchait de s'éloigner. Il était toujours à genoux et lui tenait la main.
"Erik, s'il te plaît, pousse-toi... lâche-moi, je dois sortir, je..." Les larmes commençaient à brouiller sa vision, avec sa main libre il essayait de pousser son fauteuil roulant en avant.
"Charles, arrête ! Tu n'as pas besoin de partir. Tu n'as plus besoin d'être seul. Tu n'es pas seul !"
Erik desserra la prise de l'autre main de Charles sur la roue et le prit soudainement pris dans ses bras. Charles sentit ses lèvres bouger contre sa tête et les mots lui parvinrent aux oreilles : "Charles, tu peux lâcher prise, même si je t'ai laissé tomber plusieurs fois dans le passé, cette fois-ci, je ne le ferai pas. Laisse aller. N'aie pas peur, je te rattraperai."
Parce que Charles n'avait plus la force de rester fort, parce qu'il avait besoin de quelqu'un sur qui s'appuyer, il lâcha prise. Il laissa le chagrin le submerger, parce qu'il savait qu'Erik était là et l'empêcherait de se noyer.
Erik continua de le tenir dans ses bras et lui murmura encore et encore : " C'est ça, laisse tout sortir. Je suis là, mein Liebster. Laisse aller."
Une fois les pleurs taris, Charles épuisé s'endormit dans les bras d'Erik. Il dormait si profondément qu'Erik avait pu le soulever de son fauteuil roulant sans qu'il se réveille et maintenant il était allongé, le dos contre le torse d'Erik, sa tête sous son menton et les bras d'Erik enroulés autour de lui.
Erik avait été déchiré en voyant celui qu'il aimait, accablé par le chagrin et s'était demandé depuis combien de temps Charles n'avait pas été capable d'exprimer sa douleur. Il avait toujours été attiré par le côté lumineux de Charles, il les comparait souvent aux deux faces d'une même pièce, l'un la lumière et l'autre l'ombre. Mais quand il l'avait retrouvé à Paris, il avait vu que toute cette lumière était comme ternie.
"Erik..." Charles fit une pause avant de continuer, la voix enrouée, "Merci..."
"Sshh Charles, je t'ai dit qu'aucun remerciement n'est nécessaire entre nous."
"Ouais..." Erik sentit que Charles se détendait à nouveau contre lui.
"Dors, mein Liebster."
Beaucoup plus tard, Erik qui s'était lui aussi endormi, fut réveillé par une douce sensation de frôlement sur son visage. Il ouvrit les yeux, se retrouva face à Charles, qui recula son bras comme s'il avait été surpris les mains dans le pot de confiture. Erik saisit sa main et la replaça sur sa propre joue.
"Ne t'arrête pas Charles..."
Il vit l'expression de Charles s'apaiser alors qu'il caressait doucement son visage avec des touches semblables à des plumes, traçant du bout des doigts les lignes du visage d'Erik.
Leurs visages étaient si proches qu'Erik aperçut immédiatement Charles qui déglutit alors qu'un voile de tristesse passa sur son visage.
"Qu'est-ce qui ne va pas ?"
"Je t'ai perdu tellement de fois déjà ", murmura Charles.
"Mais je suis toujours là et toi aussi. Et maintenant, nous sommes ensemble. "
Erik ne fut pas capable de résister, il franchit la distance restante entre eux et posa ses lèvres sur celles de Charles. C'était comme si tout se mettait en place dans leurs mondes à ce moment-là.
Ils restèrent un long moment, unis dans une étreinte douce et presque innocente.
Charles se recula et fixa Erik, cherchant quelque chose dans ses yeux. Il leva sa main pour brosser une mèche de cheveux de son visage.
Ses lèvres s'ouvrirent et il les pressa à nouveau contre celles d'Erik. Erik lécha le coin de sa bouche et glissa sa langue sur sa lèvre inférieure, puis l'embrassa. Charles s'ouvrit rapidement à lui, l'accueillant sans mot dire avec ses lèvres et ses mains dans ses cheveux. Sa langue imita les actions de la sienne et bientôt, chacun buvait sur les lèvres de l'autre, pris d'une soif qui ne semblait pas vouloir s'étancher.
Erik glissa ses mains jusqu'à la taille de Charles et l'attira aussi près qu'il le pouvait. La tête de Charles retomba en arrière avec un gémissement lorsque les doigts d'Erik se faufilèrent sous sa chemise et caressèrent son dos. Erik profita de sa distraction et baissa la tête encore plus pour se presser contre son cou. Charles sentit le frottement de sa langue contre sa peau, puis ses dents mordre le même endroit. Il eut un léger sursaut. Ses mains glissèrent sur les épaules d'Erik et ses doigts s'y enfoncèrent. Erik releva immédiatement relevé la tête, inquiet de sa réaction. "Pas bon ?"
"Non. C'ets bon. Vraiment bon", le rassura Charles dans un doux soupir. Erik sourit affectueusement et reporta ses attentions au cou de Charles. Mais Charles gémit et tira sur ses cheveux, tirant Erik vers lui pour qu'il puisse à nouveau prendre ses lèvres.
Bien plus tard, alors qu'ils reprenaient tous les deux leur souffle, lèvres contre lèvres, front contre front, Charles demanda à Erik : "Je ne sais pas si j'ai rêvé ou non, mais avant, tu m'as appelé 'mein liebster', 'mon cheri' si je ne me trompe pas."
Pour la première fois depuis qu'il le connaissait, Charles vit les joues d'Erik devenir légèrement roses. Cependant, la voix d'Erik était parfaitement assurée lorsqu'il répondit : "Tu n'as pas rêvé mein Liebster". Il ponctua ses mots d'un tendre baiser.
"A moins que tu ne préfères, mein Schatz, mon trésor." Un autre baiser.
"Ou mein Geliebter, mon bien-aimé." Un autre baiser.
C'était maintenant au tour de Charles d'avoir les joues légèrement rouges. Mais lui aussi regarda Erik droit dans les yeux et demanda : "Est-ce vraiment ce que je suis ?"
"Oui, mon amour et bien plus encore." Erik a souligné cela avec un autre baiser.
"Depuis quand ?"
"Je vais te montrer. En regardant dans mes pensées dans le coin le plus lumineux de ma mémoire sensorielle comme tu l'as fait cette fois-là, tu trouveras une mémoire supplémentaire au-delà de celle que tu as trouvée pour m'aider à débloquer mes pouvoirs."
Charles commença à protester, "Non Erik, je ne veux pas..."
Erik mit un doigt sur sa bouche, "Shhh, c'est moi qui te le demande".
Il prit la main de Charles et plaça ses doigts contre sa tempe, dans le geste familier qu'il faisait lorsqu'il voulait accéder aux pensées de quelqu'un.
Erik, visiblement ému, s''adressa à Charles : "Que viens-tu de me faire ?"
"J'ai accédé au coin le plus brillant de ta mémoire sensorielle. C'est un très beau souvenir, Erik. Merci".
"Je ne savais pas que je l'avais encore."
Charles posa sa main sur son épaule et dit avec de la force et de l'émotion dans la voix : "Il y a tellement plus de choses en toi que tu ne le sais. Pas seulement de la douleur et de la colère. Il y a du bon en toi, je l'ai ressenti. Et quand tu pourras accéder à tout cela, tu posséderas un pouvoir que personne ne pourra égaler. Pas même moi."
Dans le temps présent, lorsque Charles sortit de la tête d'Erik, ils étaient tous deux profondément émus par la force des émotions du souvenir partagé.
Erik appuya son front contre celui de Charles.
"Ce que tu m'as dit ce jour-là, qu'il y avait du bon en moi, que tu l'as ressenti. C'est un souvenir aussi heureux que celui de ma mère. C'est aussi ce jour-là que j'ai senti le lien entre nous. Que j'ai su que..."
Erik a fait une pause pendant un moment.
"Que tu as su que quoi ?"
"Que j'étais désespérément et éperdument amoureux de toi. Je t'aime Charles. Nous nous sommes battus ensemble, nous nous sommes affrontés, nous avons traversé de terribles épreuves, parfois ensemble, parfois l'un contre l'autre, mais ça, ce que je ressens pour toi a toujours été mon ultime vérité. Je t'aime Charles."
Charles fut à nouveau sans voix, cette fois-ci devant l'adoration ouverte qu'il lisait sur le visage d'Erik.
Il leva sa main vers son visage, en traçant le contour de celui-ci, et dit, la voix brisée, "Malgré tous les détours que j'ai pris, toutes les mauvaises décisions que toi ou moi avons prises, à chaque fois, quand ça comptait, tu étais là à mes côtés, cette présence immuable. Je ne peux pas dire où tu commences et où je finis. Je t'aime, Erik, plus que ma vie."
Là. Maintenant. Ce moment. Ce moment de communion parfaite après tout ce qu'ils avaient vécu. Le destin, les choix, les événements qui les avaient séparés, les avaient rassemblés dans une spirale qui semblait ne jamais vouloir se terminer, tout était fini. Il était temps pour eux de vivre. Ce n'était pas la fin, c'était le début. C'était leur histoire.