Le tour de la question

Chapitre 1 : Prologue

1163 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 16/02/2017 16:17

Bedford-Stuyvesant, c'est pas le meilleur endroit pour se poser, je vous le concède, mais c'est le seul que j'ai trouvé et qui me ressemblait un tant soit peu. Besoin de prendre le large avec les Avengers, avec tout ce qui s'est passé depuis de trop nombreuses années. Je ne m'appelle pas Cap', je ne possède pas une volonté en acier pour continuer une lutte qui a fini par me lasser. J'ai besoin de reprendre pied dans la société que je survole depuis trop longtemps maintenant, mais je ne délaisse pas ma place pour autant. Juste que je préfère faire partie des réservistes pendant quelques temps. 

J'ai bossé dur pour être à la place que j'ai occupé aux côtés de types comme Iron Man, comme Banner, comme Cap' et tant d'autres. Je ne suis rien qu'un orphelin élevé par des forains, je n'ai pas de pouvoirs, pas d'armure, pas de sérum ou une colère alimentée aux rayons gamma. Nan, je m'expose comme je suis, armé de flèches, d'un arc. Ça peut sembler presque obsolète, presque ridicule mais c'est cet arc, celui qui trône au dessus de mon canap' qui a conditionné toute mon existence. Grâce à lui je suis devenu le meilleur « marksman » du monde et j'ai pu rivaliser avec ceux que je voyais sur une marche plus grande que la mienne.


Ce quartier craint faut dire ce qui est mais j'y ai trouvé une place que j'affectionne particulièrement et puis le loyer n'est pas cher, c'est ça le plus important non ? Un immeuble décrépit de briques rouges qui trône en plein milieu de ce quartier pas très grand de Brooklyn mais s'avère être un digne successeur du Harlem d'il y a quelques années. Le moyen pour moi de ne pas perdre la main, de garder le nom de Hawkeye dans toutes les têtes. Bien sur, ce ne sont pas des mutants extra-terrestres, des envahisseurs d'un dieu mégalo ou des nostalgiques du fascisme que je combat presque chaque jour. Des caïds à la petite semaine, des gangs armés qui veulent se la jouer rois du monde dans les rues. Avec moi ça marche pas, j'ai l'œil partout, des petits indic' à chaque coin de rues pour me tenir au jus des affaires louches. A croire qu'en fait, je n'arrive pas vraiment à me séparer de mes armes de l'ère paléoli-machin. 

Je ne suis plus un Avenger en service, juste un citoyen qui n'aime pas qu'on vienne foutre la merde sur ses plate-bandes.


Évidemment, savoir qu'Oeil-De-Faucon habite dans le coin, un appartement miteux d'un immeuble miteux convoité depuis des mois par un conglomérat financier, ça éveille les attentions. Ce n'est plus des promoteurs vicieux et véreux qui arpentent la rue et les couloirs de la vieille bâtisse mais des malfrats armés qui se la jouent gros bras. La méthode douce pour exproprier d'honnêtes gens ne fonctionne pas alors on envoie la cavalerie, c'est d'un lamentable. Ce n'est pas la première fois que je me prend le bec avec Igor et ses sbires en jogging. Enfin, je l'appelle Igor mais j'ai aucune idée de son nom, juste qu'avec son accent du bloc de l'Est, ça s'est un peu imposé, j'ai le chic avec les surnoms parait-il. Je ne lâcherais rien face à ces rats en survet' de très grande classe, ils le savent mais je ne peux pas prendre le risque de les affronter de face sans mettre en danger les habitants de l'immeuble. 


Quand je suis arrivé pour m'installer, j'ai découvert des personnes aimables, modestes. Elles se connaissaient toutes comme une famille un peu éclectique. 

Au premier il y avait Mary, une punk au caractère de cochon. A l'étage, Claire habitait seule avec ses deux garçons d'une dizaine d'années, serveuse dans un diner pas loin. Il y avait aussi Jem, une espèce de redneck aux premiers abords simplet mais qui s'est révélé être un colocataire des plus serviable. Monsieur et Madame Keller, immigrés allemands déjà d'un certain âge qui m'amènent souvent de quoi me sortir de mes pizzas habituelles. 

Bref, je ne viens pas du quartier, ni même de la ville, on se fiche de ma « carrière », on m'accepte comme je suis, Clint Barton. Oui, j'ai évité de dire que mon prénom en vérité était Clinton et le deuxième, Francis...mes parents avaient le sens de l'humour. Chaque semaine, on se retrouve tous sur le toit autour d'une bière, on discute, on passe un bon moment et nos liens ne font que se resserrer un peu plus. C'est là que Kate, la nouvelle Hawkeye active peut me trouver la plupart du temps.


Pourquoi je raconte ça ? Juste pour vous poser le décor qui n'a rien d'épique, ni de légendaire. Ce n'est pas la tour Stark, la Sokovie, Asgard ou d'autres contrées mythiques. C'est juste le monde ordinaire, celui dans lequel je suis le plus ancré au final pour le mec ordinaire que je suis. C'est dans ce monde ordinaire que parfois on peut livrer son plus âpre combat, celui qui couve depuis des semaines et qui devra prendre fin d'une manière ou d'une autre. 

Damer le pion aux Jogging fut en réalité assez simple quand parmi nous se trouve un avocat et de l'autre, un compte en banque assez fournit auquel je n'ai presque jamais touché. J'ai acheté l'immeuble entier, je nous ai donné un peu de sursis au final car je ne m'attendais pas à ce que notre « ennemi » passe au cran supérieur et déclare une guerre ouverte avec moi, avec Kate, avec ces innocents, sans compter une apparition à laquelle je ne m'attendais pas, je ne m'attendais plus.


Toujours est-il qu'allongé dans mon fidèle canap', le regard vissé sur le plafond lézardé de mon appartement, je me perd en conjoncture, en souvenir qui vont et viennent au fil de mes pensées. Il me faut un plan, il me faut un truc solide pour palier à ce que je pressens comme quelque chose de difficile pour nous tous. 

Ne pas sortir du bâtiment que l'on connaît par cœur, laisser les gens à l'abri dans leur appartement, barricadés. Empêcher la progression, gêner la retraite, les foutre par terre une bonne fois pour toute. Igor et ses hommes sont des têtes de bois, mais je suis pire.

La peinture écaillée et laiteuse ne m'a jamais paru si hypnotisante, un soupir, puis deux, le regard vaseux qui se porte sur mon premier arc, accroché là au mur puis le néant. 

Le roi de la sieste quand il ne faut pas...le retour.

Laisser un commentaire ?