Les Vestiges d'Hydra

C'est la fraîcheur de la chambre qui me réveille. Exténués, nous n'avons pas allumé de feu hier soir après tout ce qui s'est passé. Nous nous sommes écroulés par terre et nous sommes endormis, nos corps lourds de s'être aimés, mais nos cœurs plus légers que jamais ! Sans ouvrir les yeux, je tâte autour de moi... Bucky était tout contre moi hier soir, sa tête posée sur mon bras ; mon coude replié et ma main caressant ses cheveux. La position me faisait mal au bras et me coupait légèrement la circulation, mais je m'en fichais ! C'était une de ces douleurs qui font du bien ; de celles qui accompagnent les plus grandes victoires.

J'ai beau tâter, mes mains ne rencontrent pas son corps et c'est peut-être mieux ainsi parce que... Je bande ! Mon esprit se repasse en accéléré la soirée d'hier, ses baisers, ses soupirs, ses gémissements... Sa sève répandue sur mon corps... La mienne qui... STOP !

J'ouvre les yeux, c'est la seule solution pour sortir de ce rêve éveillé qu'a été ma première fois avec Buck ! Buck... Il n'est définitivement pas dans la chambre. Je me redresse et m'assois en baillant aux corneilles tout en regardant par la fenêtre aux volets ouverts. Il fait beau dehors, un agréable soleil printanier étincelle au milieu d'un ciel bleu zébré de quelques cirrostratus. Toutefois, le soleil est encore bien frais et sans feu, la chambre a retrouvé son odeur d'humidité ; ce soir, je ferai une petite flambée pour réchauffer la pièce avant que nous ne nous couchions... Me faisant cette note mentale, je me lève et enfile un pantalon molletonné et une veste de sport zippée à même mon torse et descends ; j'entends du bruit en provenance de la cuisine !

Effectivement, depuis le haut de l'escalier, j'entends déjà la douce voix de Wade... Je trouve que Lachlan a eu bien vite fait de s'en débarrasser... L'écossais n'est pas dans la pièce quand j'y pénètre ; une douce odeur de chocolat chaud flotte dans l'air, trimballée par le mug que promène Wade et qu'il dépose devant un Peter... Fatigué... Ce dernier a les cheveux en vrac, de petits yeux et il semble à moitié endormi sur le banc.

- Tiens bébé ! Un chocolat chaud, comme tu aimes... À moins que tu préfères du whisky ? lui demande Deadpool en rigolant.

- Je... Je crois que je ne boirai plus jamais de whisky ! Ni quoi que ce soit d'autre d'alcoolisé d'ailleurs... C'est fini !

- Ouais, bien sûr... C'est ce qu'on dit tous... Jusqu'à la cuite suivante !

- Pas moi, je ne suis pas comme ça ! J'ai dit stop, c'est stop ! répond Peter avec détermination.

- Ah ouais ? Pourtant c'est pas ce que tu disais hier quand tu te baladais en faisant des chat-bite à tous les écossais que tu croisais ! Je t'ai même vu essayer de faire une olive à un mec penché sur une table, dont le kilt remontait un peu sur...

- STOP ! Wade, c'est bon, je... J'ai dit plus d'alcool, ok ? le coupe Pete, le teint cramoisi.

- Ça va aller, petit ! Ça arrive à tout le monde de faire des trucs un peu embarrassants en étant saoule... tentè-je de le consoler, en posant une main sur son épaule.

- Ah oui ? Ça vous est déjà arrivé, Nomad ? me demande-t-il, plein d'espoir.

- Non ! me contentè-je de lui répondre, en lui tapotant l'épaule avant de m'éloigner, le laissant déconfit.

Bucky apparaît soudain ; d'une main, il tient une tasse de café, de l'autre, il se replace timidement une mèche derrière l'oreille en se retrouvant face à face avec moi. L'espace d'un instant, je ne sais pas quoi faire, ni comment me comporter ! Je le connais depuis si longtemps que ce changement dans notre relation me paralyse. J'ai juste envie de l'embrasser, mais que va-t-il dire ? Et avec les gamins à côté ?

Et puis soudain, je décide que je m'en tape ! Je fais deux pas de plus et je me penche sur son visage pour l'embrasser. Le baiser ne dure pas et c'est un baiser chaste parce que j'ai peur d'avoir une haleine périmée depuis 1945... Quand je me redresse, Bucky me fixe, les joues rosies et avant qu'il ait le temps de dire quoi que ce soit, j'entends les deux autres cons applaudirent dans mon dos :

- Putain, papa ça y est ? Tu lui as mis ?

- Wade ! le reprend Peter, embarrassé.

- Wade, Wade... Tout le monde oubliera mon nom quand ils apprendront les aventures de... Captain Big Dick et Le Winter-Assoldier !

Si j'avais quelque chose dans la main, je lui enverrais dans la figure pour le faire taire, mais je n'ai rien et en plus, ça ne le ferait pas taire... Je me contente donc de lever les yeux au ciel et de reporter mon attention sur Buck :

- Bonjour Buck...

Il me sourit et me tend la petite tasse fumante à la douce odeur réconfortante de grains torréfiés :

- Je, hum... Je t'ai préparé du café et aussi... J'ai fait des ОЛАДЬИ (1) ! J'ai réussi à en sauver quelques-unes de Wilson si... Si tu as faim ?

- J'ai toujours faim, Buck, merci...

Bucky se détourne et va se planquer dans la cuisine pour aller chercher un plateau rempli de petites crêpes russes, de sirop d'érable et de scottish marmelade. Un joyeux mélange des trois cultures que nous mixons depuis notre arrivée dans les Highlands ! Nous nous asseyons l'un à côté de l'autre, en face de Wade et Peter, qui boit son chocolat du bout des lèvres...

- Vous êtes rentrés il y a longtemps ? demandè-je aux jeunes, en engloutissant une oladyi copieusement tartinée de marmelade d'oranges amères.

- Lachlan nous a reposé vers dix heures, ils ont baisé comme des chiens toute la nuit dans le camion au fait... me répond Wade, l'air faussement dégoûté.

- Et, euh... Vous avez dormi où vous deux ? demande Bucky, circonspect.

- Ben avec les poneys, dans le corral...

- Et il est où Lachlan ? demandè-je, en vidant le sirop d'érable sur une superposition de crêpes.

- Dans ton cul ! s'esclaffe le mercenaire à grande bouche.

- Wade ? demande Peter.

- Oui, bébé ?

- Mange et tais-toi... Il a ramené les animaux au pré et il s'occupe des volailles je crois ! me répond Pete, en se frottant les tempes, les yeux fermés.

C'est fou ce qu'il me fait penser à Tony quand il fait ça !

- Faudrait repartir en planque aujourd'hui quand même... Suggérè-je, en essayant de me convaincre moi-même.

- Je suis sur le coup, papa ! m'assure Wade, en levant une main.

- Quelqu'un... D'autre est motivé ?

- Moi ! répond Bucky.

- Pas moi... ajoute Peter, en mettant sa tête dans ses bras.

- Hors de question que je tienne la chandelle, ça va m'exciter ! intervient Deadpool, en baissant vivement sa main.

- Impeccable, l'affaire est réglée dans ce cas ! Bucky et moi, on s'en occupe.

- Nous, on va aller se coucher, hein Pete ? suggère salacement Wade.

- Dans tes rêves, Deadpool ! Je vais aller dans le jacuzzi... répond Peter, en se levant.

- Euh... répondè-je, les yeux ronds.

Il se peut que nous n'ayons absolument rien nettoyé hier, dans la pièce-Coulson...

- Ok, j'ai compris... Je vais aller me coucher alors... Dans notre lit... rajoute l'araignée dépitée.

*~*

Nous sommes en planque dans les ruines depuis trois bonnes heures et je commence à en avoir marre ; je m'étire une énième fois devant le regard amusé de Bucky :

- T'es pas très patient aujourd'hui !

- À vrai dire, il se pourrait que j'aie hâte qu'il soit l'heure d'aller se coucher...

- Steve, hier c'était...

- Nul ? Je t'ai fait mal ? Tu regrettes ? commencè-je à m'affoler.

- Non... C'était... Tendre ! Je n'aurais jamais cru que ça puisse être... Aussi sensuel et doux ! m'avoue-t-il.

Ouf.

- C'est comme ça que ça doit être, Buck ! Le sexe avec des sentiments...

- J'ai beaucoup aimé. Tu crois que... Ce soir, on pourrait...

- Remettre ça ? Mais Buck, je te ferai l'amour où et quand tu voudras... Toute ta vie ; tu n'as qu'un mot à dire !

- Chut ! dit-il soudain.

- Chut ? C'est... C'est le mot que tu veux dire pour faire l'amour ? C'est curieux, mais...

- La ferme, Rogers ! Y a du monde !

Je m'aplatis contre le sol humide, à l'ombre des épais fourrés dans lesquels nous nous sommes dissimulés et pointe les jumelles vers l'entrée des souterrains.

Quatre. Ils sont quatre à s'engouffrer dans le passage ; trois femmes, dont Silver Fox et Rumlow, qui clôture la marche en observant les alentours.

- Ils sont enfin de retour ! murmurè-je.

- J'ai bien crû qu'ils ne reviendraient jamais...

- Dieu seul sait combien de temps ils vont rester cette fois, nous devons faire vite !

- Nous reviendrons demain matin à la première heure ! ajoute Buck, qui se relève déjà.

- On va pouvoir congédier les jeunes...

- Ils ne seront pas d'accord !

- Peter n'est pas en état de protester et si on l'abîme, on va avoir Stark sur le dos... Donc on va pas lui laisser le choix, c'était le deal de toute façon ! ajoutè-je, en me dirigeant vers les chevaux.

*~*

Lorsque nous arrivons au domaine, la nuit tombe et mon ventre proteste bruyamment... Après nous être occupés de Mi-Dhu et Foghar, nous passons la porte du château et sommes accueillis par une odeur de friture que j'avais presque oubliée !

- On a fait des hot-dogs avec Pete ! Avec des frites et du chou à l'oignon rouge, des cornichons, de l'oignon caramélisé et tout et tout... nous explique fièrement Wade.

- C'est gentil ! Lachlan est parti ? demandè-je, en posant mes bottes.

- Ouais ! Il a dit qu'on était vraiment... Enfin bref, il est parti tôt, genre... Très tôt...

- Ok... Je meurs de faim ! m'exclamè-je joyeusement, à l'idée d'avoir juste les pieds à mettre sous la table après notre après-midi passée à battre la campagne.

Une fois attablés, je ne parle pas beaucoup, trop occupé à déguster les hot-dogs préparés à la New-Yorkaise par les jeunes. Il n'y a pas à dire, les jeunes gens sont remarquablement doués en matière de malbouffe !

- Ils sont revenus ! déclare Bucky, en constatant que je ne suis pas disposé à parler, en tout cas pas tant que mon estomac ne sera pas rempli à ras bord.

Les gamins se regardent en biais, avant de tenter un inévitable :

- Ah cool ! Alors on y va demain, c'est le plan ? suggère Peter, l'air de rien.

- Вне вопроса (2)! Vous deux, vous dégagez demain, Wade, tu vas raccompagner Pete au Complexe. Lachlan vous emmènera à l'aéroport d'Inverness. Fin de la discussion. explique Bucky, avec une autorité qui m'excite dangereusement...

- Mais qu'est-ce que je vais dire à Tony ? se lamente l'araignée.

- Ton père, ton problème ! lui répond Buck.

- Je peux lui parler moi si tu veux bébé... se propose Wade.

- Surtout pas toi ! Ce serait presque pire que Bucky... lui répond Peter, en faisant les gros yeux.

- Hey ! s'indigne l'intéressé.

- T'auras qu'à réfléfir quand vous ferez dans l'awion... ajoutè-je, la bouche pleine.

- Il va me tuer ! poursuit Peter, décidé à nous apitoyer.

- Oui... Mais tu vas survivre grâce à tes pouvoirs, c'est pas cool ça ? se moque gentiment Bucky.

Vaincu, Peter se résigne et reporte son attention sur Deadpool, qui lui mime des obscénités avec une saucisse et un trou formé dans un bout de pain et dans lequel il finit par envoyer une giclée d'american mustard Peter soupire. Nous aussi.

*~*

Nous passons la nuit à préparer notre expédition du lendemain et à veiller à ce que les jeunes bouclent leurs valises. Une fois que tout est prêt, nous hésitons entre nous coucher une heure ou deux ou nous doper à la caféine. La deuxième option l'emporte et je tire une croix définitive sur une hypothétique relation sexuelle avec Buck...

Je décide de préparer un petit déjeuner matinal que je dispose sur la table en même temps que Bucky y pose la cafetière débordante d'arabica.

- Une fois la mission achevée, vous allez nous rejoindre au Complexe ? demande innocemment Peter, en se servant.

Soudain, mon sang se glace et je peux voir, à la façon dont Bucky serre les mâchoires, que lui aussi s'angoisse sur le dénouement logique de la mission.

- Je, euh... Nous allons peut-être rester un tout petit peu plus longtemps, le temps de... De... bredouillè-je.

- Vous n'avez pas envie de rentrer, n'est-ce pas ?

- Eh bien... Ce n'est pas comme si nous avions le choix. lui répondè-je, tout en fixant Bucky qui, lui, fixe la table.

- À cause des Accords ? demande Peter, la mine soucieuse.

- Oui...

- Si seulement ces Accords pouvaient être oubliés... Je ne vous ai jamais vus aussi heureux tous les deux, ça me fait de la peine que vous soyez obligés de rentrer à New-York, l'air de l'Écosse vous réussit si bien !

- Si seulement, oui... soufflè-je, les yeux dans le vague.

*~*

Après de chaleureux au revoir pendant lesquels Bucky a longuement enlacé Peter et pendant lesquels j'ai subi d'interminables câlins de la part de Wade, nous les laissons attendre l'arrivée de Lachlan et allons préparer nos chevaux. Une fois sellés, nous grimpons sur nos hongres et jetons un dernier coup d'œil en direction des lumières chaleureuses qui scintillent depuis les fenêtres du château, comme pour nous retenir entre ses murs protecteurs...

La chevauchée me paraît encore plus longue à cette heure matinale où l'aube n'a pas encore chassé les ténèbres. Autour de nous, la nature encore ensommeillée ne laisse entendre que quelques timides hululements de chouettes qui, fatiguées par leur nuit de chasse, regagnent paisiblement granges ou cavités naturelles pour la journée. Le bruit des sabots résonne dans la lande et ne s'atténue que lorsque nous pénétrons dans la forêt inhospitalière qui borde l'immense étendue de ruines. Sans tarder, la progression des chevaux devient impossible dans l'enchevêtrement de ronces et nous devons descendre de nos montures. Pendant que je termine mon nœud d'attache par quelques chaînettes, je ne peux pas m'empêcher de me dire que même la nature nous hurle de faire demi-tour. Mi-Dhu s'agite et renâcle dès lors que je m'éloigne de lui, ce qui achève de m'inquiéter. J'essaye de me ressaisir en me disant que le malaise que je ressens vient du fait que je n'ai aucune envie que cette mission s'achève, synonyme d'un retour imminent dans notre prison dorée, à la merci de nos geôliers... Après une dernière caresse à l'encolure de mon ténébreux compagnon, je me décide à rejoindre Bucky, qui s'est déjà enfoncé dans l'épaisse végétation :

- Tu as pris les lacrymos ? me demande-t-il, d'une voix qui me parvient difficilement tant il s'est déjà éloigné.

Les lacrymos ! Je savais bien que j'avais oublié quelque chose...

- Euh... J'y retourne, continue, je te retrouve à l'endroit où nous étions hier ! assurè-je.

Je peste contre moi-même alors que je rebrousse chemin jusqu'aux chevaux pour attraper les petites bombes lacrymos que Wade nous a laissées, dans les sacoches des selles. Ma progression est lente et désagréable dans le bois, où j'ai du mal à me repérer alors même que nous avons emprunté le même chemin la veille ! Au terme d'une trentaine de minutes, je regagne notre planque d'hier, mais Bucky n'y est pas. J'ai beau regarder partout, je ne vois aucune trace de lui, à part quelques empreintes de bottes qui ont l'air fraîches, mais qui semblent se diriger droit vers l'entrée des souterrains. Je commence à paniquer sérieusement au bout d'une trentaine de minutes supplémentaire, passée à inspecter les empreintes. Il n'y a aucun doute, elles mènent à la grille qui scelle l'entrée du "Blob". Je distingue, le cœur serré, qu'il y a d'autres empreintes que celles des Rangers de Bucky... Il n'y a cependant aucune trace de lutte, les pas se suivent, bien imprimées dans la terre, un peu comme si Bucky avait suivi quelqu'un (certainement Rumlow, au vu de la pointure) volontairement. Cela me paraît hautement improbable et plus les minutes passent, plus je culpabilise de l'avoir amené dans la gueule de l'hydre.

Il est hors de question que le perde encore ; je m'approche de la grille et la dégonde sans peine à la force de ma rage et pénètre dans les sinistres profondeurs...

(1) oladis

(2) hors de question

***** Chapitre de transition ☺️. Ça se gâte pour nos amoureux... Photos sur le forum pour les intéressés !

À bientôt ❤️ *****