Les fanfiqueurs de Thiercelieux - Journal d'une modeste flûtiste
Chapitre 1 : Le flûtiste flûté
3786 mots, Catégorie: G
Dernière mise à jour 25/04/2023 00:37
Journal d'une modeste flûtiste
Cher journal,
Voilà un moment maintenant que je ne t’ai pas écrit. Si je t’adresse ces lignes aujourd’hui c’est pour te faire part d’une grande nouvelle : je chemine actuellement à travers le Gévaudan pour me rendre dans un petit village éloigné de tout. Pourquoi vouloir exiler un tel génie artistique me diras-tu ?
Pour te répondre, cher ami, saches que la capitale m’ennuie ces derniers temps. J’ai ressenti le besoin de prendre quelques vacances au calme pour affuter mon talent et cultiver l’inspiration !
Je me félicite de cette idée un peu plus à chaque étape de mon voyage. Je sens que ma virtuosité va être mis à l’épreuve au cours des prochaines semaines et je m’en réjouis d’avance !
[VENDREDI]
Cher journal,
Me voilà bien arrivée dans le petit village de Thiercelieux et, quand je dis “petit”, c’est loin d’être un euphémisme : je n’ai vu que sept habitants figures-toi. Tout à l’air si … archaïque ici, même leurs traditions : par exemple, en arrivant, la coutume m’a imposée de saluer la statue immense d’un chat noir sur lequel trônait l’inscription “PIXEL”, étrange n’est-ce pas ?
Ensuite, à quelques pas de la statue, je me suis arrêtée à l'ombre d’une étrange stèle, en mémoire des ancêtres m'a-t-on dit. La majorité de la place était occupée par les noms de “ALEC”, “LYWARE” et “DENIELLEFERVELLE”, des frères tu crois ? Ou peut-être des héros de légende ? Aussi, j’ai été interpellée par le mot “Hestha” gribouillé en dessous, visiblement plus par dépit que par réelle considération envers le défunt.
Il y avait également noté “HCY” dans un coin et je n’ai pas réussi à déterminer, cher journal, s’il s’agissait d’un prénom ou simplement de la signature du fabricant de la pierre tombale...
C’est juste après ces pérégrinations que j’ai rencontrée la mairesse Enso revenant de sa cueillette de champignons hebdomadaire. Elle m’a semblé fort sympathique, d’ailleurs il paraît qu’elle venait tout juste d’être élue le matin même (j’ai même été invitée à participer aux festivités de ce soir).
Mes nouveaux voisins n’ont pas le raffinement des gens de la bonne société, mais ils m’ont presque tous accueilli à bras ouverts (il est vrai que je craignais de tomber sur des sauvages dans ces contrées reculées, mais la plupart m’ont l’air civilisé).
La cheffe de ce hameau a entrepris de me faire visiter elle-même les lieux, son panier de morilles à la main. En passant devant un cerisier en fleur on a croisées une jolie rêveuse, se prélassant à l’ombre du grand arbre, cette dernière s’est présentée en annonçant juste “Je fais vœu d’anonymat”... Après un long silence à se regarder dans le blanc des yeux, Enso m’a finalement pris le bras pour me conduire plus loin (j’ai appris par la suite que tout le monde ici appelait la jeune fille “Baka”).
Notre route nous a conduit ensuite devant une imposante bâtisse (la plus grande de cette bourgade, sans aucun doute) abritée par un épais portail en fer forgé de très belle facture, mon accompagnatrice m’a indiquée qu’il s’agissait là de la demeure d’un certain Clorfindel. Elle a aussi prêté à ma connaissance qu’il était ni plus ni moins que son opposant politique ! (Et qu’il était sûrement en train de bouder dans son manoir suite à sa défaite cuisante) En observant l’impressionnante porte d’entrée je pus y voir ces mots, délicatement gravés dans le bois sombre : “Le bonheur, c’est un peu surestimé”. Je n’ai pu rencontrer le personnage, mais il m’a paru être quelqu’un de tout à fait singulier !
Alors que je commençais à me questionner sur l’étrangeté de mon voisinage, mes yeux furent éblouis, au détour d’un chemin, par la vision de deux êtres magnifiques. Ces deux perles d’innocence se promenaient là, main dans la main, le sourire du printemps aux lèvres. Je fus tout émue par leur accueil chaleureux : le plus grand se présenta sous le nom de Miko (il m’a aussi raconté qu’il avait grandi près de Saint-Nazaire dans la Loire, je pense que cela peut t’intéresser) il m’a ensuite présenté Marie comme étant sa sœur spirituelle ! (Ne me demande pas ce que c’est, je n’en ai pas la moindre idée) Il m’a dit que celle-ci le surveillait depuis son enfance et j’ai trouvée cela très mignon !
La rencontre avec ces deux âmes, à l’aura si pure, à de suite animée mon inspiration ; la musique de la vie coule en eux c’est certain !
Mais ma visite ne s’est pas arrêtée là, cher ami. Après quelques pas nous aperçûmes, devant une petite cahute en pierre, deux yeux suspicieux au milieu d’un visage qui semblait avoir connu bien des épreuves. Loup, de son nom, avait en effet l’air d’un prédateur. Mon accompagnatrice me glissa qu’elle revenait de la guerre, mais qu’il ne fallait pas se fier aux stéréotypes car c’était l’être le plus sensé de ce village et sûrement le plus sage aussi. Quoiqu’elle en dise, j’accélérai le pas pour fuir ce regard inquisiteur et rentrer au plus vite.
C'est en arrivant près de ma nouvelle maison que j’ai pu découvrir le dernier habitant : mon voisin le plus proche. Celui-ci a passé la tête dans l’encadrement de sa porte d’un air assommé, portant un t-shirt arborant les inscriptions “Mangez du poulet, c’est bon le poulet”. La mairesse me l’a désigné sous le nom de Fulmi. En nous apercevant, l'intéressé s’est contenté de dire “Oola” et a refermé sa porte derrière lui.
Je n’ai pas trop su comment réagir, mais l’attitude d’Enso me fit penser qu’il s’agissait de quelque chose de normal.
Voici, dans l’ensemble, le résumé de mes rencontres. J’ai promis à ma nouvelle amie adepte des moisissures champignons que je les rejoindrais pour fêter son élection. Après quoi je pense m’adonner à mon art, peut-être en le partageant avec l’un de mes concitoyens ?
Je te parlerais plus en détail de ma nouvelle demeure à l’avenir, bonne soirée !
[SAMEDI]
Cher journal,
Hier soir je suis allée charmer le petit Miko. Ce n'était pas bien difficile, c'est un petit être tellement inconscient qu'il ne ferme même pas sa porte d'entrée. J'étais un peu alcoolisée suite aux festivités (notre nouvelle mairesse a une descente extraordinaire !), mais mon talent est toujours aussi exceptionnel et ça n'a pas été un problème pour apprivoiser le jeune éphèbe.
En revanche, ce matin, j'ai eu le déplaisir de croiser Fulmi sur la place du village, tandis que je discutais de mes intentions tout à fait innocente avec cette bonne Enso, le bougre a essayé de convaincre mon cher Miko de m'emmener au bûcher ! Quel rustre ! Il ne mérite pas que je lui sorte mon instrument divin, ni même de faire partie de mon fan-club (du moins pas encore).
Sinon, cher journal, me croiras-tu si je te dis que j'ai entendu la petite Mary dire le mot "wesh" aujourd'hui ? (Je viens aussi de l'entendre ronronner par la fenêtre, quelle étrange voisinage) Ce n'est pas très distingué je te l'accorde, mais bon, comme c'était destiné à Fulmi je peux concevoir qu'un être tel que lui soit dans l'incapacité de comprendre un lexique plus évolué.
Concernant les autres villageois eh bien sache qu'en plus de ses penchants de dictateur, Clorfindel semble être tout à fait individualiste ! Il a dit à mon petit Miko que (je cite) "ce n'était pas son problème et qu'il s'en lavait les mains !". Vraiment je n'ai aucune raison de le visiter dans son domaine celui-là !
Loup est partis travailler à la ville, après la soirée arrosée d'hier, je me demande comment elle a seulement réussi à rentrer jusque chez elle !
Aussi, j'ai trouvé Baka bien plus charmante aujourd'hui, elle fait des efforts de langage et cela me plaît beaucoup. La grâce divine l'aurait-elle touchée durant la nuit ? En tout cas, je ne lui aurais pas imaginée une telle voix. Je pense, cher journal, que c'est elle que je visiterais cette nuit ! Sa douce voix s'accordera à merveille avec mon instrument !
Dans un tout autre registre mon ami, saches que mes compatriotes ont l'air (pour une raison qui m'est obscure) bien décidés à envoyer l'un des leurs au bûcher ! Peut-être est-ce là une étrange et grossière coutume de ce village ? (Sûrement les ancêtres de cette brute de Fulmi !) Cette très chère Enso m'a d'ailleurs invitée chez elle pour me demander mon avis sur le sujet, elle a vraiment à cœur le bonheur de ses sujets, contrairement à CERTAINS, elle est vraiment charmante !
Je pense me reposer quelques heures (je dois préparer ma représentation de ce soir !), je te tiendrais au courant si jamais la fête au village prend des allures de barbecue géant.
[DIMANCHE MATIN]
Cher journal,
Hier fut une journée horrible ! Figure-toi que j'ai été réveillée de ma sieste par une atroce odeur de brûlé, sur le coup j'ai pensé que c'était peut-être mon voisin Fulmi qui avait encore fait carboniser son repas (il faudra bien que quelqu'un lui avoue un jour qu'il est un piètre cuisiner) Mais j'ai commencé à entendre des hurlements à travers mes boules quiès, inquiète, je suis sortie à la hâte dans une toilette un peu légère et que n'ai-je pas vu au centre du village ?
Un bûcher immense sur lequel agonisait cette pauvre Baka, sa divine voix s'étant muée en une complainte horrible !
J'en suis encore toute bouleversée... Quand j'ai dit à cette chère Enso que je m'en remettais à elle, je ne pensais pas qu'elle sacrifierait un de ses loyaux partisans au profit d'un tel spectacle.
Je pensais que le bûcher était un concept métaphorique. Est-ce parce que les coutumes de ces roturiers me sont encore étrangères ?
Quoi qu'il en soit, en bonne croyante, je suis allée ce matin à l'autel de notre petit village j'ai prié pour l'âme de ma chère Bakkie. J'ai recommandé cet être au talent si pur à la Déesse-mère Astrée. Après quoi j'ai longuement prié la Déesse de la nuit Fahliilyol, pour qu'elle apaise les âmes torturées de ce village ! (Même s'ils auraient surtout besoin d'un exorcisme à mon avis) (en particulier Clorfindel)
Quoi te dire de plus cher journal ? La mise à mort de ma voisine a contrecarré mes plans, étant encore chamboulée par le spectacle de la chair fondant sur sa peau au gré des flammes, je me suis finalement résignée à rendre visite à Loup cette nuit, je me suis souvenue du bon moment que l'on avait passées à l'auberge le soir de l'élection. Elle a beaucoup aimée ma prestation (comment pourrait-il en être autrement ?) et mérite de faire partie du club de mes admirateurs !
En me rendant à la chapelle tout à l'heure, j'ai pu voir que le panneau du village était encore couvert de graffitis, d'un style vraiment médiocre il faut bien l'avouer.
J'ai aussi entendu Fulmi dire n'importe quoi sur la place publique, à croire qu'il le fait exprès. Il a souhaité une nuit d'insomnie à notre chère mairesse Enso et semble désirer (pour des raisons obscures) qu'elle marche sur la queue de son chat ! (J'espère qu'il ne parlait pas de Marie, certes elle miaule de temps en temps, mais elle est adorable et mes pauvres yeux ne supporteraient pas de voir Enso lui marcher dessus !)
Concernant le petit Miko, saches cher journal, que celui-ci a avoué être violoniste ! (Décidément je l'apprécie chaque jour un peu plus) Et sais-tu d'ailleurs qu'il a cité la Déesse-mère Astrée dans l'un de nos échanges ? Heureusement qu'il est là pour illuminer mes journées.
Sinon je n'ai pas trop vu mes autres concitoyens ce matin, je pense rester tranquillement chez moi aujourd'hui pour me consacrer à mon art.
Mon cher journal, je t'écrirais si je ressors avant la nuit.
[DIMANCHE APRES-MIDI]
Cher journal,
Des conversations animées au dehors m'ont poussé à sortir de chez moi un peu plus tôt. Notre maire Enso a repris la chasse aux sorcières (notre défunte Baka en était une, paraît-il, mais qui suis-je pour juger les hobbys de mes voisins ?) en haranguant tout le monde depuis la place du village. Décidément, les week-ends ici ne manquent pas de mésaventures !
Si seulement je pouvais dès ce soir charmer tout le monde pour qu'ils vivent enfin tous en harmonie ...
En parlant d'harmonie, cher journal, je n'ai pas trop vu Fulmi cet après-midi. Je crois qu'il a compris que son argot était inintelligible et il a préféré ne pas l'imposer aux autres. (À raison)
Aussi les chiens de Miko ont tous sautés sur les clôtures quand je suis passée proche de sa maison tout à l'heure. Je n'ai rien de spécial contre eux ... mais j'aimerais autant que Miko évite de se rouler aussi souvent dans le jardin en leur compagnie …
J'ai surpris la petite Marie parler d'un certain Bowser à notre mairesse, serait-ce un amant ? Aucune idée cher journal, en revanche elle a parlé de chanter au piano et pour le coup cela m'intéresse franchement ! Je savais bien que c'était une perle (peut-être pourrais-je l'apprivoiser avec de la pâtée pour chat ? Mmh ...)
Mis à part ces petites altercations, il ne s'est pas passé grand-chose. La campagne n'offre que peu de distraction, je me suis alors laissé aller en conjectures sur mes nouveaux voisins :
Clorfindel, par exemple. Au vu des nombreuses heures qu'il passe seul dans son domaine, je pense qu'il doit posséder une certaine fibre artistique et qu'il est un genre d'auteur. Ou bien c'est un sociopathe (je n'écarte aucune théorie)
Quant à Loup elle semble savoir beaucoup de choses ... En tout cas si c'est elle qui est à l'origine de ces immondes graffitis sur le panneau du village, je n'hésiterais pas à lui dire que c'est tout à fait dégradant pour nos belles infrastructures ! (Payées grassement avec nos impôts ! je le rappelle)
Enso est bien trop obnubilée par ses romans à l'eau de rose pour voir vraiment les défauts de ses concitoyens, pourtant, elle n'hésite pas à les envoyer au bûcher s'il font quoi que ce soit de suspect.
Mon voisin Fulmi semble déterminer à ne protéger que sa personne. Je vient parfois à me demander si, à part les pizzas surgelées, il aime autre chose que lui-même ? (Bien que je crois l'avoir surpris dévorer Clorfindel du regard tout à l'heure, à creuser)
Les tendres Miko et Marie semblent plus proches des animaux que des habitants du village (quand on voit lesdits habitants, il y a matière à les comprendre !). On peut parfois les apercevoir courir l'un après l'autre dans le village, c'est tout à fait charmant.
Bon je te laisse, j'ai mon dîner sur le feu. Je dois me dépêcher car Enso nous a enjoint à participer à la prière de 20h pour la déesse Fahliilyol!
[DIMANCHE SOIR]
Cher journal,
Je croyais que l'on ne pouvait faire pire que le meurtre de Baka, je me suis lourdement trompée.
Mon petit Miko, paix à son âme, s'est vu trainer au bûcher par ces rustres de villageois. Lui qui était si pur, si innocent ...
Il n'avait rien fait de mal, je te l'assure, il était juste différent. C'est vrai qu'il sentait souvent le chien mouillé, mais bon, ce n'était pas une raison pour l'immoler comme ils l'ont fait. Notre mairesse a même jetée sa meute de cabots dans les flammes par "volonté farouche de protéger les villageois" qu'elle a dit. Je suis bouleversée, en plus il y avait des poils partout dans l'air, je crois que je suis malade ...
Cette tragédie mis à part, j'ai essayé de trouver en moi la force de passer par la demeure de Clorfindel dans la nuit, la musique apaise les mœurs paraît-il ...
J'ai eu du mal à trouver mon chemin dans ce labyrinthe de pièces et salons en tout genre mais saches, cher journal, que j'ai découvert qu'il vouait un véritable culte à la Déesse Fahliilyol ! C'était tellement ostentatoire que c'en était presque effrayant. Même si, d'un autre côté, je dois t'avouer que ça me rassure qu'il croie en autre chose que lui-même !
Je me demande si j'ai encore le temps de déménager de ce maudit village, en attendant je vais aller pleurer dans mon lit : peut-être réussirais-je à trouver le sommeil.
[LUNDI]
Cher journal,
Il semblerait que le mot tragédie est le seul qui me vienne à l'esprit ce matin. Ma chère Loup a été retrouvée à moitié dévorée pendant la nuit. C'est réellement horrible, et son absence pèse beaucoup sur le village. Certes, elle n'avait aucun talent particulier, mais ses conseils m'étaient précieux ... (d'ailleurs j'ai appris que les graffitis sur le panneau étaient bel et bien d'elle, maintenant ils vont terriblement me manquer)
Franchement, cher journal, qui a bien pu faire ça ? Tu vois, c'est ce dévoreur de gentil villageois qu'il faudrait envoyer au bûcher, pas mes amis !
En parlant de cela, Enso commence vraiment à m'inquiéter. Je n'arrive pas à croire qu'elle ait oubliée notre amitié si vite, moi qui lui avais cuisinée de délicieux petits fours, il semble que c'est moi qu'elle a envie d'envoyer au four maintenant !
Aussi, je commence à regretter d'être allée charmer Clorfindel cette nuit, je pense qu'il a un amant et qu'il se moque totalement de la musique (quel drame) ! Il ne méritait peut-être pas de faire partie de mon club de mélomanes tout compte fait. J'aurais dû réserver mon meilleur concerto à Enso tiens, peut-être qu'elle m'aurait mieux compris ...
Même Fulmi semble remonté contre moi, alors que je commençais tout juste à l'apprécier. Ça m'apprendra à fricoter avec les gens de basse condition tiens !
Moi qui ai renoncée à une grande carrière de musicienne internationale pour offrir la culture à ces paysans, voilà comment ils me remercient !
Pendant ce temps la gentille petite Marie est absente, elle doit sûrement faire une grosse sieste au soleil après avoir fait un copieux repas ! Quel ange, je me dis au moins que j'emmène son doux souvenir avec moi.
Mon très cher journal, cela ressemble à des adieux. Veille sur mon âme et pris pour que je rejoigne la Déesse-mère Astrée, là où vont tous les virtuoses.
[MARDI]
Cher journal,
Quelle joie de pouvoir réécrire ces mots ! J’ai vraiment cru que c’en était terminé pour moi hier, mais j’ai finalement réussi à me faire innocenter auprès de mes dangereux concitoyens !
Figure-toi qu’ils ont finis par traîner la petite Marie hors de sa maison, dont le sol était encore recouvert de morceaux de mon amie Loup. (Elle a un goût singulier en matière de décoration, c’est le moins que l’on puisse dire) Qui aurait pu le croire cher ami ?
Elles devaient avoir un différend de taille pour que l'adorable Marie en arrive à cette extrémité ! Quelle tragédie ...
Néanmoins, le pire spectacle qui me fut imposé durant mon séjour fut celui de Fulmi et Clo se rendant ensemble à l’autel. (Ce qui me fait retirer ce que j’ai pu dire plus tôt, Clorfindel n’est point un homme de goût !). Ils se sont mariés ce matin-même, sous les yeux attendris d’Enso (c’est elle qui, paraît-il, les a mis en relation) décidément, je ne la comprendrais jamais.
Le calme règne à nouveau dans le village, l’atmosphère pleine, non pas d’une douce quiétude, mais plutôt d’un silence de mort. On peut parfois entendre des gloussements en provenance du manoir des deux amoureux, parfois des sifflotements insouciants d’Enso remplissant ses tâches au village, mais point de musique.
Même lors de l’enterrement de mes amis (les restes de la plupart tenaient dans de petites boîtes), je n’ai pas eu le cœur à sortir mon instrument. Partout où mes yeux se posent, je distingue les fantômes des habitants. Je pris chaque jour devant la sainte relique d’Astrée, je me recueille même devant la statue de Pixel, mais rien n’y fait et les cauchemars reviennent sans cesse (je n’ai pas eu le choix que d’être leur témoin de mariage, rends-toi compte !!).
Cher journal, je pense sincèrement à déménager. À part cueillir des morilles avec Enso, rien ne m’attend plus ici. Peut-être ma prochaine destination m’apportera-t-elle l’inspiration tant recherchée ?
Je te promets de te raconter la suite de mes aventures bientôt,
Je t’embrasse.
La joueuse de flûte.