Parenthèse enneigée

Chapitre 1 : Parenthèse enneigée

Chapitre final

1734 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 24/12/2020 11:19

Cette fanfiction participe aux Défis d’écriture du forum Fanfictions . fr : Houston, on a un tas de neige (décembre 2020 - janvier 2021).


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La forêt immobile nous entoure, figée dans un écrin de glace, blanche et scintillante, uniquement éclairée par la lumière d'argent de la pleine lune. Il marche dans la neige épaisse, qui craque bruyamment sous ses pas. Un nuage de buée s'échappe à chacune de ses respirations, venant m’envelopper délicatement et laissant tomber sur moi de minuscules fleurs de givre. Son cœur bat comme à son habitude, lent et puissant. Il profite d’un moment de tranquillité comme on en a rarement. En général, les choses ne tardent pas à dégénérer. D'ailleurs je me mets à vibrer. Voilà les ennuis qui arrivent, encore. 


Ou pas. Un halo bleu fait miroiter la neige et la glace autour de nous. Les arbres et les fougères prennent l’allure de bijoux, projetant des éclats scintillants aux reflets colorés. Elle traverse le portail pour nous rejoindre. Je sens son cœur qui accélère imperceptiblement. Il est heureux, comme chaque fois qu’il la voit. Son parfum de lilas et de groseilles à maquereau la précède. Elle est vêtue d'une robe de velours noir, d'un long manteau de cuir doublé d'hermine et d’une toque assortie. Les bottes à ses pieds, chaudement fourrées elles aussi, arborent avec élégance ses deux couleurs fétiches. Ses cheveux aux reflets plumes de paon étalent leur boucles autour de son visage délicat, mettant en valeur l’écarlate de ses lèvres et le violet profond de son regard bordé de long cils noirs. 


Elle fait cesser, d’un geste gracieux, la magie qui lui a permis de le rejoindre. Je cesse de vibrer. Son air sérieux laisse place à un sourire en coin, qui s’élargit jusqu’à dévoiler ses petites dents blanches parfaites. Son regard s'illumine. Dans un mouvement de gaieté, qui lui est peu habituel, elle s'élance vers lui pour l'embrasser avant de se blottir dans ses bras. Sa joue se pose juste à côté de moi, je sens son souffle qui me caresse, m’enveloppant d’un doux nuage blanc qui me réchauffe agréablement. J’ai alors une vue imprenable sur ses lèvres parfaitement dessinées qui laissent échapper des mots dans un souffle : 


– Le conseil des mages est reporté pour quelques jours. Cette neige imprévue a mis à l’arrêt tout le continent, obligeant mes consoeurs et confrères à aller proposer leurs services aux souverains et aux pauvres gens.

– Ça veut dire que tu vas devoir y aller, toi aussi ? 

– Non, ma seule mission c’est toi. Je dois m’assurer que tu sois de nouveau complètement sur pied quand le Conseil voudra de nouveau faire appel à toi.

– Ils ne savent donc pas que je suis parfaitement rétabli ?

– Non, je ne le leur dirai qu’une fois que je m’en serais personnellement assurée. affirme-t-elle en se hissant sur la pointe des pieds pour l’embrasser passionnément, faisant accélérer un peu plus encore le cœur de mon porteur. Allez, emmène-moi au chaud, j’ai toute une batterie d’examens à te faire passer !


Je sais qu’il sourit à cette perspective. Il relâche son étreinte, la laissant saisir son bras pour reprendre la marche. Ils font demi-tour. Galamment, il la laisse marcher dans les empreintes profondes qu’il a laissées sur son passage. Ses pieds disparaissent dedans, minuscules. Elle est obligée d’allonger démesurément le pas, se tenant fermement à lui pour ne pas perdre l’équilibre. Cela la fait rire. Il rit avec elle. J’aime cette sensation vibrante et rebondissante. Le paysage tout autour de nous est féérique et elle s’en enthousiasme comme une enfant. Cela le rend heureux. 


Ils arrivent en vue du petit chalet de bois. Rien d'autre à l'horizon, uniquement la nature sauvage. Nous sommes en retrait de l'humanité, dans un havre de paix où nous reprenions des forces avant de retourner faire ce que nous savons si bien faire : tuer les monstres. Une lettre était arrivée ce matin, portée par un oiseau noir. Je comprends mieux maintenant pourquoi il est sorti en pleine nuit. Une épaisse couche de neige couvre le toit de notre refuge. La cheminée fumante en dépasse à peine. La lueur des flammes danse derrière les fenêtres. Le froid se fait de plus en plus mordant et ils se hâtent de se mettre au chaud. 


Quel contraste en entrant. La chaleur nous enveloppe, presque insoutenable. Ça sent le bois, le feu et le parfum alléchant de ce qu'il a cuisiné. Ils se hâtent de se défaire de leur vêtement d’hiver et de se déchausser pour s’installer auprès de la cheminée. Deux fauteuils confortables ont été disposés de part et d’autre de l’âtre, avec à leurs pieds une douce et moelleuse fourrure d’ours. C’est sur cette dernière qu’ils choisissent de s’installer. Ils sont restés trop longtemps séparés pour garder quelques distances. Elle se blottit contre lui mais son ventre grogne. Il rit, lui embrasse la tempe, me faisant léviter vers son visage, en suspend au-dessus de son magnifique décolleté où son étoile d’obsidienne semble scintiller à mon égard. Quelle chance ! 


Cela ne dure pas. Il se lève et se dirige vers la cuisinière en fonte. Il a préparé le fruit de sa chasse : une perdrix qu’il a soigneusement parfumée de miel et d’herbes aromatiques, accompagnée de tubercules colorés. Il n'y a guère que pour elle qu’il se donne tant de mal. Il prélève, avec habileté, les morceaux les plus tendres et les plus juteux, les dispose joliment dans l’assiette et l’apporte à sa belle. Elle proteste sur la quantité mais se laisse donner la becquée. C’est joli à voir cette bouche sensuelle qui s’ouvre pour accueillir les aliments. Sa langue est d'un rouge délicat, elle se tend malgré elle et passe sur ses lèvres ourlées quand il tarde à apporter la bouchée préparée. Elle ferme les yeux de plaisir, dégustant chaque saveur. 


La voilà rassasiée. Elle s’empare de l’assiette et le nourrit à son tour. Agenouillée devant nous, elle y met beaucoup de tendresse. Elle joue à le faire languir, reculant la fourchette au moment où il croit déguster. Ça fait réagir son cœur. Il la laisse mener le jeu, pour le moment. Elle comme moi le savons. D’ailleurs ça y est ! Il vient de saisir son poignet pour l’attirer à lui. Elle rit et fait mine de résister. Il la débarrasse de l’assiette qu’il pose un peu plus loin et l’attire à nouveau. Il s’empare de ses lèvres et ses mains commencent à explorer son visage. Elle fait de même. Je la sens faire glisser ses doigts le long des maillons de ma chaîne puis tracer mon contour sur sa poitrine. Sa bouche suit le même trajet et ses cheveux me chatouillent délicieusement. Son parfum nous enivre.


Il l’arrête, l’invite à s’allonger et reprend son exploration du bout des lèvres. Je la survole au gré de ses mouvements. Je vois ses grandes mains calleuses défaire lentement les attaches, révélant la peau laiteuse, parfaitement lisse. La dentelle noire offre un magnifique contraste. Que de beautés tandis qu'il l'effeuille lentement, jusqu'à libérer chaque centimètre de peau qui prend des reflets dorés à la lueur du feu. Elle glousse sous les chatouilles. Il reprend ses petits baisers, me faisant délicatement glisser entre ses collines jusqu'à sa plus intime vallée. C'est un paysage dont je ne me lasse pas. 


Ses jambes forment deux ponts jumeaux, entre lesquels je reste en suspend, oscillant légèrement tandis qu'il observe lui aussi la beauté du delta sacré. Me voilà subitement enfoui dans la douceur de la fourrure au sol. Elle soupire et gémit avec retenue. Cela dure quelques minutes pendant lesquels je ne vois que la forêt de poils. Toujours des soupirs de bien-être puis un cri plus puissant, émouvant.


Il se redresse en douceur, me sortant de mon nid douillet pour me faire de nouveau voyager au-dessus de sa peau. Mieux, il s'arrange pour me laisser glisser tout le long du voyage, je la sens frissonner sur mon passage. Il me niche entre ses deux merveilleuses collines, auprès de son étoile noire, puis m'y enferme de son corps. Sa peau est délicieusement douce et ce parfum... 


Je sens son cœur qui bat léger et rapide, tellement différent. Et sa voix aiguë me chatouille chaque fois que la lumière disparaît. Elle ne fait que ça apparaître, disparaître, apparaître, disparaître… Le rythme s'accélère progressivement, je vois de moins en moins la lumière tellement leurs corps semblent emmêlés, fusionnés. Je perçois leur bonheur à travers leurs soupirs et leurs râles. Il fait de plus en plus chaud niché ici. Leurs peaux se couvrent de perles humides au parfum délicatement musqué. Leurs cœurs battent de plus en plus fort. Leurs soupirs et leurs gémissements prennent de l'ampleur tandis que le rythme de leur danse immobile s’emballe, jusqu'au bouquet final. 


Le temps s'étire. Il se relève délicatement, mais elle le retient. Il bascule sur le côté et je me retrouve de nouveau contre la fourrure. Posé sur ma tranche, je vois son corps gracieux blotti tout près. Son étoile me fait de l'œil, complice. Une couverture se dispose jusqu'à nous. 


Moment d'éternité. Leurs deux cœurs satisfaits ralentissent en douceur après s'être emballés. Les respiration sont profondes. Je n'entend que ça et le doux crépitement de la flambée dans la cheminée. Moment d'éternité. Profitons, profitons, ça arrive peu souvent et ça ne dure jamais.


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