Un Peuple Oublié

Chapitre 8 : Chapitre 7 _ Caras Galadhon

3027 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 10/06/2020 15:18

Accablée par la fatigue et le chagrin, la compagnie se dirigeait vers les bois de la Lothlorien, espérant y trouver refuge avant la nuit. Ils avaient couru presque toute la journée, depuis la sortie des mines, et les hobbits avaient du mal à suivre depuis un bon moment maintenant.

Ils arrivèrent enfin en vue de la lisière d'un bois, et Aragorn leur autorisa une courte pause. Les hobbits se laissèrent tomber sur le sol, tandis que Naé sortit les quelques pommes qu'ils n'avaient pas encore dévorées du fond d'un sac, les distribuant aux semi-hommes, ainsi qu'a Boromir et à Gimli.

Lorsque tous se sentirent capable de continuer, ils reprirent leur route, pénétrant dans la forêt qui leur faisait face.


L'air parut tout à coup oppressant à la jeune elfe, et une boule se tordait un un peu plus dans son ventre à chaque pas.

-Ne vous éloignez pas jeunes hobbits, on raconte qu'une jeune ensorceleuse vit dans ces bois, une sorcière elfe, aux terribles pouvoirs. Tous ceux qui l'ont regardé sont tombés sous son charme, et on ne les a jamais revu !

L'intention de Gimli n'avait sans doute pas été de faire peur aux hobbits, et pourtant ils regardèrent Aragorn les yeux effrayés, cherchant une parole rassurante.

-Et bien voici un nain qu'elle n'envoûtera pas si aisément ! J'ai l'œil du faucon et les oreilles du renard.

Un frisson parcourut le dos de l'elleth. Elle sortit immédiatement son arc en encochant une flèche. Elle s'apprêtait à dire aux autres d'être vigilants, quand un groupe d'elfes Celestes sortit de l'ombre, leurs flèches pointées dans leur direction.


Leur chef, un beau spécimen aux cheveux blonds, s'approcha.

-Le Nain respire si fort, que nous aurions pu le tuer dans le noir.

Malgré la situation qui semblait leur échapper, cette remarque fit rire Naé, et il la regarda alors, intensément. Puis, recentra son attention sur le prince.

- Mae govannen, Legolas Thranduilion. (Bienvenu Legolas, fils de Thranduil.)

-Govannas vîn gwennen le. ( Notre communauté vous est redevable.)

-Aragorn des Dunedains, nous vous connaissons.

-Merci.

-Voici donc la légendaire courtoisie des elfes! Ils parlent une langue qui nous est inconnue.

-Nous n'avons pas eu de rapports avec les Nains depuis les jours sombres.

-Et vous savez ce que le nain répond à cela ?

Il prononça alors des mots dans sa langue natale que personne ne comprit, mais qui sonnèrent comme des injures.

-Cela non plus n'est pas très courtois, le calma Aragorn.

-Il ne me semble pas vous connaître. Reprit Haldir en s'adressant à Naé.

-Naé. Répondit-elle simplement et sur ses gardes.

-L'elfe Noire, je suppose.

Elle ne répondit rien, mais évita de baisser le regard devant son ton accusateur. Elle s'attendait à une réaction violente, similaire à celle de Legolas, aussi fut-elle surprise par l'absence de répercussions qui suivit cette phrase..

-Vous apportez un grand danger avec vous, vous ne pouvez aller plus avant.

-Bae ammen veriad lin ! Andelu i ven. Merin le telim. Henio adiron bae ammen i dulû lîn !(Nous avons besoin d'un endroit protégé, la route est dangereuse. J'aurai espéré que nous pourrions dépendre de vous. Comprenez, nous avons besoin de votre aide ! )

Naé fut impressionnée de voir avec quelle habilité, Aragorn savait manier la langue elfique, et se promit de lui en toucher deux mots en temps voulu.

-Veuillez me suivre.


Ils marchèrent donc derrière leur guide, sur les chemins étroits et escarpés de la forêt, s'y enfonçant de plus en plus, jusqu'à apercevoir un endroit qui se démarquait du reste de ce qu'il avaient vu. Des lumières éclairaient le lieu, et la voix d'Haldir sembla emplie de fierté.

-Caras Galadhon, le coeur du monde elfique sur terre. Royaume du seigneur Celeborn et de Galadriel, Dame de Lorien.

Pas après pas, ils se rapprochèrent et entrèrent dans le cœur de ce royaume.

C'était évidemment magnifique. Les arbres semblaient couverts de longues guirlandes argentées, comme si des gouttes d'eau figées dans le temps pendaient sur leurs branches. Le bruit de la vie de la forêt engourdissait tous les autres, et c'était comme mille chants d'oiseaux qui s'accordaient à la perfection. L'air y était pur, et apaisant. Il y avait comme une aura autour d'eux, à la fois réconfortante, et protectrice. La lumière de la lune semblait se refléter sur les feuilles des arbres comme sur un miroir, dégageant un halo argenté partout autours d'eux.

Sam, fasciné par cette beauté, et encore à fleur de peau après les émotions de la journée, sentit des larmes naître au coin de ses yeux. Et comme engourdi par tant de beauté et de magie, ne put les retenir.


Ils continuèrent leur route, puis finirent par arriver face aux maîtres des lieux, qui avaient sans doute demandé à voir les intrus. De blancs vêtus, ils rayonnaient sous la lumière de la lune, leurs expressions étaient figées, comme des statuts de glace d'un autre âge. La voix imposante de Celeborn les sortit de leur torpeur.


-L'ennemi sait que vous êtes entré ici, tout espoir de passer inaperçus à désormais disparut. Dites moi où est Gandalf car j'aimerais vivement m'entretenir avec lui. Et je ne puis le voir de loin.

-Gandalf le gris n'a pas franchi les frontières de ce pays. Il a basculé dans l'ombre.

-En effet, il a été prit par l'ombre et la flamme, un Balrog de Morgoth. Car nous nous rendions sans nécessité dans les mines de la Moria.

Legolas avait prononcé ces mots naturellement, sans penser à l'interprétation qu'ils pourraient s'en faire et Naé lui en voulut car elle savait que Gimli se sentait déjà assez coupable.

-Votre quête ne tient malheureusement qu'à un fil, écartez vous en un temps soit peu et ce sera l'échec entraînant la ruine de tous. Mais l'espoir perdure tant que la compagnie existe. Ne laissez pas votre coeur se troubler.

Elle se tourna ensuite vers l'elleth.

- Les elfes Noirs n'ont jamais compté parmi nos alliés. Néanmoins, aucun des actes de Gandalf ne fut jamais inutiles. C'est pourquoi je vous souhaite la bienvenue, Naé.

Naé baissa la tête, et mit une main sur son cœur, démontrant ainsi son respect et sa reconnaissance.

-A présent, allez prendre un peu de repos car vous êtes accablés par le chagrin et le labeur. Cette nuit, vous dormirez en paix.


L'elleth fut alors guidée à l'écart de ses compagnons, par une elfe, dans ce qui lui sembla être un espace d'eau. Puis, sans un mot et sans même relever la tête pour la regarder, elle la laissa seule. Naé prit connaissance des lieux.

C'était un endroit magnifique, sans aucun mur, mais qui se trouvait suffisamment excentré pour qu'elle n'eut pas peur d'être vue. Comme creusées directement dans la pierre, quelques marches avaient été taillées pour amener à un bassin, dans lequel on aurait facilement pu tenir à quatre. Un immense miroir avait été déposé dans un coin, et Naé ne put s'empêcher de sourire en imaginant à quel point ces elfes Celestes pouvaient accorder du temps et du soin à leur personne.

L'elfe revint vite et versa dans le bassin une eau qui semblait bouillante. Sans retenir un sourire d'impatience, l'elleth entreprit alors de quitter son amure, qui lui collait à la peau depuis des jours. Elle s'enfonça dans l'eau brûlante, savourant une chaleur qui lui fit le plus grand bien. Elle s'allongea et défit sa tresse, puis, passa sa tête sous l'eau. Elle eut l'impression de reprendre vie. Sa peau rougit dans la chaleur de l'eau, tandis qu'elle ne put retenir un soupir de bien être. Cette chaleur lui avait tellement manqué... Ses muscles se détendirent, puis elle prit le savon, afin de faire disparaître la moindre trace de crasse qui la recouvrait.

Et il y en avait beaucoup.

L'elfe revint une dernière fois, apportant un tissu blanc léger, puis elle ramassa les affaires, jetées négligemment au sol.

-Que faites vous ?

-Dame Galadriel tient à ce que vos vêtements soient lavés.

Le méprit perlait dans sa voix, et Naé faillit être désagréable, quand elle prit conscience que cela n'en valait pas la peine. Elle finit de se laver en silence, puis sortit de l'eau, à contrecœur lorsque celle ci fut froide. Elle enfila la robe délicate qui avait été posée devant elle, avant de se mettre devant le miroir. Elle eut du mal à se reconnaître.

Elle était mal à l'aise, cette robe était superbe de par sa simplicité. D'un blanc uni, de fines bretelles, décolleté, quoique loin d'en être provoquant, elle collait sa peau jusqu'à ses hanches, puis tombait de façon naturelle jusqu'à ses pieds. Elle essaya de se souvenir de la dernière fois où elle avait porter une robe, sans succès.

Elle entreprit alors de se coiffer, en démêlant sa chevelure qui bouclait lorsqu'elle ne l'attachait pas. Elle fit quatre tresses plaquées de chaque coté, puis en tressa une autre plus épaisse sur le haut de son crane, qu'elle laissa en cheveux détachés à partir du vertex. Satisfaite, elle décida de rejoindre ses camarades qui assistaient au banquet.


Elle les trouva sans peine, et vit le regard de Legolas se relever vers elle. Il la regarda, étonné, et pour une fois, n'en détourna pas les yeux. Lui aussi, bien sur, s'était changé, et ses traits étaient froids, et durs, ne laissant déborder aucune émotion, comme à chaque fois qu'il posait les yeux sur elle. Malgré le dédain évident qu'il lui portait, et la haine qu'elle lui renvoyait, elle ne put s'empêcher de le trouver magnifique.

Et de s'insulter intérieurement pour cela.


Elle fut sortie de ses pensées lorsqu'elle s'approcha suffisamment pour que les autres remarquent sa présence,

-Naé ! Vous êtes superbe ! Dit Sam, d'une voix douce.

Elle le remercia d'un signe de tête, puis fut surprise qu'Aragorn prenne la suite, voulant sans doute détendre une atmosphère déjà tendue.

-Il est vrai que cette robe vous va à merveille, n'est-ce pas Legolas ? L'encouragea-t-il à se montrer poli.

-Vu votre état ces derniers jours, j'avais presque oublié que vous étiez une femme, lui dit-il, ponctué d'un sourire ironique.

-Et rien ne pourrait me faire oublier que vous êtes un abruti, dénué d'intérêt. Répondit-elle avec le même air sarcastique.

Gimli éclata de rire, et Aragorn essaya de rattraper les choses.

-Naé, ne le prenez pas pour vous, depuis que je le connais, cet elfe a toujours été avare en compliment.

-Sans doute est-ce parce que personne ne s'en montre digne. Dit-elle sarcastiquement en levant les yeux au ciel.

-Et certainement pas vous.

-Arretez ! Je ne suis pas sur que nos hôtes soient enclins à supporter vos chamailleries.

La voix du dunedain était dure, et ne laissait pas de place à une quelconque réponse ou même à la moindre excuse, et Naé prit donc place au banquet, aux cotés de la compagnie.


Les plats qui leurs étaient présentés semblaient plus appétissants les uns que les autres, quoiqu'un peu trop dénués de viande au goût de tous. Merry et Pippin avaient retrouvé leur humeur joyeuse et enfantine, et à voir le sourire sur tous les visages, elle paraissait contagieuse. Naé sourit à son tour en voyant la quantité de nourriture que les hobbits pouvaient ingurgiter.

Gimli avait des étoiles dans les yeux, et son visage semblait plus apaisé qu'il ne l'avait jamais été. Etait-il réellement tombé sous le charme de la Dame de Lorien, ou l'avait-elle envoûté d'une quelconque façon ? Quelle importance après tout, du moment qu'il souriait.

Un nombre incroyable de jeunes elleths s'étaient présentées à Legolas au cours de la soirée, toutes plus ridicules les unes que les autres, espérant sans doute s'attirer les faveurs d'un prince. Mais celui ci ne daignait pas leur accorder la moindre attention, se restreignant à la politesse froide qu'il maîtrisait si bien. Il était placé à coté d'Haldir, et ils passèrent leur soirée à parler, comme s'ils se connaissaient depuis toujours, et avaient un siècle à rattraper. Ils ricanaient entre eux, puis Aragorn finit par les rejoindre.

L'elfe Noire croisa le regard d'Haldir plusieurs fois, et ses yeux bleus lui parurent beaucoup moins glacials que ceux de son voisin.

Elle ne put s'empêcher néanmoins de sentir son ventre se serrer, en voyant à quel point Legolas semblait doux et attentif lorsqu'il s'adressait à d'autre qu'elle.

Les trois compères paraissaient discuter simplement, et elle vit le prince faire rire ses voisins. Elle eut besoin que cela se reproduise plusieurs fois avant d'être sur que ses yeux ne lui jouaient pas des tours.

Boromir quant à lui semblait pensif, il restait seul, buvait, beaucoup, voir un peu trop pour un Homme. Son visage était tiré, traduisant la tristesse qui régnait en lui. Lorsqu'Aragorn s'apprêta à se rapprocher de lui, il s'en alla rapidement, sans bruit.

Après un nombre certains de verres de vin, qui était d'ailleurs absolument délicieux, Naé ressentit le besoin de s'isoler un peu, loin de toute cette agitation. Elle s'éclipsa donc discrètement, et alla marcher dans la forêt. L'air du soir était doux, et la fraîcheur du vent était agréable. Sans trop réfléchir, ses pieds se mirent à courir et la guidèrent jusqu'à ce qu'ils ne le puissent plus et qu'elle tombe à genoux sur le sol. Le chagrin sembla finalement l'avoir rattrapé.

Elle ferma les yeux, prenant une grande inspiration, puis entama un chant, pour honorer à sa façon, celui qui lui était cher et qui était tombé. C'était une ancienne coutume elfique, chanter la force et le courage d'un homme qui avait donné sa vie, afin que les Valars le différencient des autres, adoucissant ainsi son passage dans les cavernes de Mandos.

Elle sentit des larmes couler au fur et à mesure que sa voix s'élevait.

Après avoir laissé ses émotions la contrôler, elle baissa la tête, en silence, attendant de reprendre possession de ses sentiments.


Quelques minutes passèrent, quand tout à coup, elle entendit alors un bruit dans son dos.

Elle ouvrit les yeux, réfléchissant à toute allure. Elle n'avait pas prit ses armes, et se retourna d'un bond, élançant son poing pour donner une bonne droite à son agresseur. Son geste fut contenu par la main de l'homme qui la regardait.

-Je vois que vous êtes toujours sur vos gardes, commença Haldir avec un sourire alors qu'il retenait toujours sa main.

-Vous faire connaître nous aurait évité ce genre de désagrément, repondit-elle en brisant le contact.

-Si j'avais été un orc, vous seriez morte.

-Vous n'avez pas vraiment le profil.

Il rit de sa remarque et ses yeux se mirent à pétiller.

-Je suis navré d'avoir troublé votre recueillement, je venais simplement m'assurer que vous alliez bien.

-Que risquerais-je ici ? Lui demanda-t-elle en haussant un sourcil, Si ce n'est que Legolas vienne m'assassiner. Se dit-elle plus à elle même en chuchotant.

Cette fois ci, il éclata d'un rire cristallin.

-Que lui avez vous dont fait pour mériter sa haine ?

-Vous feriez sans doute mieux de lui demander, vous avez l'air si proche. Dit-elle de façon amère.

Il ne répondit rien, et elle vit dans son attitude qu'il était réellement curieux de sa réponse.

-Il semblerait que le Prince éprouve une certaine animosité à l'égard de mon peuple.

Il fronça les sourcils, comme s'il était surprit.

-Votre compagnie ne l'a pas fait changer d'avis ?

-Je n'ai pas la faculté de me montrer courtoise avec les abrutis orgueilleux, que voulez vous ...

Son rire perça la nuit, et eut la faculté de la détendre instantanément. Ils avaient commencé à marcher en direction du Coeur, pour rejoindre les autres. Cet elfe semblait différent de ses semblables, il paraissait si ... simple, elle commençait à apprécier sa compagnie.

-Legolas a su gagner toute mon estime et mon respect, mais il est vrai qu'il peut se montrer têtu. Ce doit être de famille lui dit-il avec un clin d'oeil.

-Est-ce dame Galadriel qui vous a demandé de me ramener ? N'aurait-elle pas confiance en moi ? Demanda-t-elle, désireuse de vouloir changer de sujet.

-Vous faites fausse route, je suis ici de mon propre fait. Ne serait-ce pas vous qui manquez de confiance pour la soupçonner de la sorte ?

Le son de sa voix était dénué de reproche, c'était une simple constatation.

-Je crois que je vous apprécie, lui repondit-elle avec son plus beau sourire.

-Alors acceptez que je vous raccompagne.

-Acceptez de tenir votre langue sur ce que vous avez vu ce soir.

-Il n'y a rien à dire sur la perte de quelqu'un. Vous m'en voyez désolé, je ne savais pas que vous étiez si proche.. Mithrandir a toujours su se faire apprécier de tous, et ...


D'un coup, Haldir se raidit, relevant la tête et s'écartant légèrement.

-Prince Legolas.

-Mon ami je vous cherchais. Je ne vous savais pas en si charmante compagnie, dit-il ironique.

De nouveau, Naé ne l'avait pas entendu arriver, et elle se mordit la langue pour ne pas lui crier de partir. Elle aurait voulu partager un moment plus long avec le Celeste, qui semblait comprendre sa peine, et ne pas l'en juger...

-Puisque vous êtes là, je ne veux plus y être. Haldir, Prince. Dit-elle toute aussi ironique.

Après tout peu être que lui aussi avait envie de pleurer son ami.

Chacun s'était comporté étrangement depuis la sortie des mines. Comme si personne ne semblait réaliser complètement, attendant le moment où chacun craquerait à sa manière pour libérer sa peine...


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