AINULINDALE La Musique des Ainur

Chapitre 2 : AINULINDALE SECOND MOUVEMENT

1260 mots, Catégorie: K+

Dernière mise à jour il y a presque 9 ans

Les Ainur furent pris de peur

Sans comprendre encor les mots

Qui leur étaient adressés par leur créateur,

Et rempli de déshonneur fut Melko,

En même temps que d'un courroux blasphémateur.


Puis Ilùvatar se leva

Dans toute sa splendeur et s'avança

Hors des régions de démesure

Qu'il avait fait naître pour les Ainur

Et ceux-ci le suivirent en cet endroit.


Quand ils arrivèrent dans le Vide,

Eru dit : «Voyez votre musique !»

Et il leur livra une vision magique,

Leur donnant une vision limpide,

Alors qu'ils n'avaient que l'ouïe archaïque.


Ils virent un Monde différent

Se manifester devant eux,

Une sphère au milieu du Néant.


à mesure qu'ils regardaient et s'étonnaient,

Ce Monde dévoilait son histoire

Et le voir vivre il leur semblait

Et se développer sans qu'ils pussent y croire.


Quand les Ainur eurent fixé, aphasiques,

Pendant un temps, Ilùvatar leur dit

Encore : «Voyez votre Musique !

Ceci vient de votre art

Et chacun de vous trouvera,

Dans ce, qu'à vos yeux, je déploie,

Les créations dont il ne fut pas avare,

Qu'il croit avoir inspirées ou imagina.

Toi Melko, tu verras tes pensées

Les plus secrètes, tu comprendras

Qu'elles ne sont qu'un grain de la totalité,

Tributaires de son glorieux apparat.»


Ainsi que de la musique

Que chacun d'eux créa,

Les Ainur savent une part astronomique

De ce qui fut, de ce qui est, et qui sera,

Et leur échappent peu de choses sur Arda.


Pourtant, il en est qu'ils ne peuvent voir,

Même rassemblés en conseil,

Car Eru n'a instruit aucune oreille

De ce qu'il conserve en sa mémoire,

Et chaque époque peut apercevoir

Des nouveautés sans pareille

Qui ne sont dans aucune prédiction, car

Non issues du passé d'avant le Soleil.


Or donc, comme cette vision

D'un Monde nouveau se déroulait devant eux,

Les Ainur virent qu'il renfermait des choses dont

Ils tombèrent tous amoureux.


Ils assistèrent avec stupéfaction

A la naissance des Enfants d'Ilùvatar

Dans le monde qui était leur maison,

Et s'aperçurent qu'eux-mêmes, sans le savoir,

Tandis qu'ils élaboraient leur chanson,

Avaient participé à la création

De cette demeure sans y avoir

D'autre dessein que sa propre gloire.


Les Enfants d'Ilùvatar ne furent conçus

Que par Lui, ils vinrent avec le troisième chant,

Du premier thème ils étaient absents,

Et aucun des Ainur ne le sut

Ni ne prit part à leur venue.


Quand ils les virent, ils les aimèrent plus encor

D'être différents d'eux-mêmes,

Etres étranges et libres au-dehors,

Où ils voyaient l'esprit d'Eru le suprême

Dans une lumière d'un éclat bien trop fort,

Où ils apprenaient à sentir par eux-mêmes

Une part de sa sagesse, un trésor,

Qui, alors, restait occultée en lui-même,

Même aux Ainur, qui pourtant l'adorent


Les Enfants d'Ilùvatar, le Grand Créateur,

Sont les Elfes éternels et les Humains mortels,

Les Premiers-Nés et les Successeurs.


Dans toutes les splendeurs de ce monde inouï,

Ses vastes régions, ses espaces nouveaux,

Ses orbes flamboyants, Ilùvatar choisit

L'endroit de leur maison dans les fonds abyssaux

Et parmi les astres au nombre infini.


Cette maison pourrait sembler peu de chose

A ceux qui ne considèrent

Que la majesté des Ainur qu'elle expose,

Sans voir leur acuité légendaire,

Eux qui peuvent avoir s'ils le proposent

La plaine d'Arda entière

Pour les bases d'une colonne qui ose

Se soulever si haut que sa tête altière

En est plus acérée qu'une aiguille de fer ;

Ou qui ne verraient dans cette fleur éclose,

Que les Ainur édifient encor dans les airs,

Qu'une immensité sans mesure et grandiose,

Resteraient trompés par l'adresse première

Qu'ils donnent à toutes les choses en cet univers.


Quand les Ainur eurent contemplé la vision

De ce lieu et qu'ils virent les Enfants d'Eru,

Plusieurs d'entre eux parmi les plus bons

Tendirent tous leurs désirs éperdus

Et leur esprit vers ce lieu d'admiration.


Melko fut le premier de ceux-là,

Comme il fut, dès le début, le plus grand,

A tenir sa partie dans le grand Chant.


Il sembla, et lui-même le croyait,

Qu'il voulait se rendre dans cette demeure

Et y ordonner tous ces nouveaux faits

Pour le bien des Enfants d'Eru le Créateur,

Et contrôler les tourbillons de chaleur

Et de glace mortelle qui le traversaient,

Alors que plutôt Melko désirait

Soumettre à son caprice exterminateur

Les Elfes et les Humains dans leur malheur :

Leurs dons uniques, il les enviait

Ceux qu'Ilùvatar-Roi leur promettait ;

Il désirait pour lui-même des serviteurs

Et des esclaves, s'entendre appeler Seigneur,

Se sentir maître d'âmes qui l'acclameraient.


Cependant, les autres Ainur étaient fascinés

Par ce monde enchassé dans les espaces

Du Monde, ce que les Elfes ont appelés,

Arda, la Terre, le Royaume de grâces ;

Leurs coeurs étaient remplis de gaieté

Et de lumière, leurs yeux émerveillés

Etaient noyés de couleurs vivaces,

Mais le grondement de la mer en surface

Leur donnait une grande anxiété.


Ils observaient l'air et le vent,

Et tous les objets dont Arda était dotée,

Le fer et la pierre et l'or et l'argent

Et beaucoup d'autres matières inexploitées ,

Mais c'est l'eau qu'ils admiraient cependant.


Les Eldar disent que l'eau recèle encore

L'écho de la musique de chaque Ainu

Plus que toute autre élément de ce corps ;

Et beaucoup parmi les Enfants d'Eru

Ne se lassent pas d'ouïr les prodonds accords

De la Mer, sans savoir dans ce soupir têtu

Ce qu'ils cherchent à entendre alors.


C'est donc vers cet élément cristallin

Que celui des Ainur que les Eldar

Appellent Ulmo tourna ses desseins,

Lui qu'avait pénétrer le plus en art

Le Grand Chant d'Eru, le Très Saint.


A l'air et au vent surtout s'attacha

Manwë, le plus grand et le plus auguste Ainu ;

Sur la base de la Terre Aulë médita,

Lui qui n'avait pas beaucoup moins reçu

Que Melko en savoir et en talent adroit,

Mais Aulë trouva sa plus grande joie

Dans l'acte de créer des choses pour Eru

Et dans la joie exprimée par Eru,

Pas dans la possession de ces biens en soi ;

C'est ainsi qu'il donne sans retenue,

Ne garde pas pour lui, bien que se soit son droit,

Qu'il est libre de tout embarras malvenu,

Et passe sans cesse à une autre oeuvre de choix.


Ilùvatar s'adressa à Ulmo

Et lui dit : «Ne vois-tu pas comment,

Dans ce petit royaume au plus profond des Temps,

Melko a entrepris des heurts brutaux

Contre tes domaines si fascinants ?

Il a imaginé un froid mordant

Sans avoir pu encor détruire

La beauté de tes doux étangs,

La limpidité de tes lacs que j'admire.

Prends garde à la neige et au gel rusé ;

Melko a prévu chaleurs et brasiers ardents,

Sans pourtant éteindre ta volonté

Ni dévorer la musique de l'Océan.

Vois plutôt la haute splandeur des airs

Des nuages et des nuées, toujours changeants,

Ecoute la pluie tomber sur la Terre !

Ces nuages te rapprochent gracieusement

De Manwë que tu aimes, ton ami si cher.»


Et Ulmo répondit : «En vérité,

L'eau est devenue plus belle

Que n'imaginait mes plus secrètes pensées,

Je n'avais pas évoqué le flocon de gel

Et mon chant créateur tout entier

Ignorait le bruit de la pluie et de l'ondée.

Je vais rejoindre mon frère Manwë

Afin de jouer avec lui des cantiques

Qui te réjouiront pour l'éternité !»


Et Manwë et Ulmo, grâce à leur art,

Sont des alliés, et en toutes choses

Ils ont fidèlement servi les buts d'Ilùvatar... 

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