Étrangère
-Devant sur la gauche, un titan de 10 mètres !
Hanji cria cette phrase pour nous invertir de la présence d'un de nos ennemies. Tandis que nous galopions toujours à l'intérieur des murs, je sentais ma tension s'élever. En observant le visage de mes camarades autour de moi, je remarquai que cette même peur était présente chez chacun d'entre nous.
-Nous ne reculons pas, laissez faire l'assistance et avancez ! ordonna un de nos chefs.
Les escouades d'assistances avaient pour objectif de nous protéger jusqu'à notre ancienne métropole. Ensuite, le vrai domaine des titans sera sous nos pieds.
-Est-ce que mes camarades pourront vaincre les titans ? demanda Eren.
-Écoute, une sortie extra-muros repose sur ses capacités à éviter les combats avec les t.., commença Auruo avant de se mordre la langue.
J'étais aussi perturbée que Eren. Je ne pouvais seulement pas me laisser abattre aussi rapidement. Je ne devais pas oublier que mon réel objectif était de prouver mon utilité à Erwin. De plus, je voulais découvrir et comprendre le destin tragique qu'avait vécu ma famille.
-Formation traque de l'ennemi, cria Erwin, en position !
Ce signal signifiait que la formation devait se séparer. Malheureusement, je ne connaissais aucun membre de mon équipe.
-À plus tard Hana, me lança Jean avant de partir avec Armin.
Je lâchai un dernier regard à mes autres compagnons. Je fixai ensuite Livaï, qui me rendit mon regard. Le sien se traduisait comme un adieu. Il pensait certainement que j'étais déjà destinée à mourir. Je secouai la tête de droite à gauche, reprenant mes esprits. Je lui prouverai à lui aussi que je n'étais pas une bonne à rien.
J'étais assignée à la première ligne droite, celle qui était chargée de détecter les titans. L'avant de la formation formait un demi cercle sur une longue distance mais les soldat étaient positionnés de manière à voir dans toutes les directions. Mikasa était en troisième ligne de communication, elle était chargée de transmettre les fumigènes. Eren était avec l'escouade de Livaï au centre de la cinquième ligne. Jean et Armin en troisième et deuxième en tant que communicateurs. Il fallait à tout prix élargir le plus possible les champs de traque de l'ennemi.
En selle sur mon cheval, je me retrouvai complètement isolée des autres. Je n'étais pas très rassurée et le moindre bruit me faisait peur. Le craquement d'une branche, la respiration de mon cheval ou encore le lancement d'un fumigène, toutes ces choses accumulées jouaient avec les battements de mon cœur.
Quelques secondes plus tard, un fumigène rouge éclata dans le ciel. Ceux qui s'approchaient le plus des titans étaient les soldats des premières lignes, c'est-à-dire moi. Quelqu'un avait dû détecter un titan. Je m'exécutai aussitôt, sortant mon lanceur pour laisser apparaître au dessus de moi une traînée de fumée rouge. Les soldats qui verront ce fumigène pourront transmettre le message. Notre major qui est en seconde ligne centrale, connaîtra la position des titans et tirera un fumigène vert. Il déterminera alors l'orientation de la formation entière. De cette façon, le camp entier pourra éviter tout contact avec les titans et chercher à atteindre sa destination.
Je galopais toujours lorsque j'aperçus un titan courir dans ma direction. Il était à quatre pattes et incroyablement rapide. Je n'avais pas le temps de tirer mon fumigène. Je devais tout d'abord le distancer. J'accélérai dans une autre direction tout en jetant quelques coups d'œil derrière moi. Il me suivait toujours à la trace. Soudain, le titan trébucha et s'écrasa contre le sol. J'ordonnai à mon cheval de s'arrêter avant de reconnaître l'homme qui m'avait sauvé. Il était celui qui m'avait présenté mon cheval.
-Plus personne ne tirent de fumigènes depuis un moment, me cria-t-il, est-ce qu'il y a un problème ?
L'apparition d'un nouveau titan ne me laissa pas le temps de lui répondre. L'homme tira aussitôt un fumigène noir. Cette couleur signifiait qu'un titan s'approchait du centre sans se soucier des soldats. Je décidai de prendre les choses en main. Je m'accroupis sur la selle de mon cheval avant de viser avec mes grappins la cheville du titan. Je lui sectionnai le tendon en un seul coup de lame. Il chuta et l'autre soldat termina le travail en lui tranchant la nuque.
-Bien joué nouvelle recrue, me félicita-t-il.
Je lui répondis d'un sourire gêné. J'étais soulagée et fière d'avoir réussi à abattre mon premier titan. Je remontai sur mon cheval, pensant être sans danger pendant un moment. Cependant, quelque chose nous alarma soudainement. Le sol tremblait, plus que d'habitude.
-Encore un ? râla-t-il. Quelle poisse..
De notre position, nous pouvions apercevoir un autre titan courir dans notre direction. L'homme tira à nouveau un fumigène noir pour avertir les autres soldats. Ce titan devait mesurer au moins quatorze mètres. Plus il approchait et plus j'observais son apparence anormalement féminine.
-Nous n'avons pas le choix, il faut l'éliminer.
Je hochai la tête, sortant rapidement mes lames. Mon supérieur lança ses grappins vers la nuque du titan. Celui-ci l'esquiva et attrapa le fil de sa manœuvre tridimensionnelle. Violemment, le corps du soldat s'écrasa au sol. J'en étais pratiquement certaine, il était mort. Il était impossible de survivre à une chute pareille. Comment ce titan avait-il deviné ses mouvements aussi rapidement ?
Prise entre la colère et la peur, mes mains tremblèrent. Je n'étais pas capable de venir à bout de ce titan. Il courrait si hâtivement dans ma direction que je pensais déjà au pire. Ce titan était différent, il était intelligent.
Je soupirai, laissant tomber mes lames à mes pieds. J'étais prête. Une fois à ma hauteur, le titan posa son pied à quelques centimètres de moi. Pendant quelques secondes, mes yeux rencontrèrent les siens. Je me retrouvai étrangement perdue dans son regard si bleu. L'élan de sa course nous projeta subitement mon cheval et moi quelques mètres plus loin. Je roulai un moment avant de m'arrêter.
À plat ventre, je me redressai difficilement sur mes genoux. Je regardai dans la direction de mon cheval. Il ne bougeait plus, ne faisait plus aucun bruit. Sa robe blanche était à présent tachetée de rouge. En réalité, il lui manquait la moitié de son corps. Je fermai immédiatement les yeux, m'avançant vers la trace gigantesque de pied du titan. Je ne ressemblais qu'à un vulgaire insecte à côté d'elle.
Un nombre incalculable de fumigènes rouges volèrent soudainement dans le ciel. La formation était en danger. Je me relevai tant bien que mal, tirant un fumigène à mon tour. Je devais rejoindre quelqu'un au plus vite.
Pendant une vingtaine de minutes, j'essayai de trouver de l'aide. Je n'étais pas loin des autres équipes. Je soupirai de soulagement lorsque je remarquai au loin des chevaux. Sans plus attendre, j'agitai mes bras en l'air tout en criant.
-Merci infiniment, dis-je une fois devant les nouveaux arrivés.
-Hana ! m'appela Armin accompagné de Jean et Reiner. Est-ce que ça va ?
-Oui merci, et vous ?
Reiner hocha la tête tandis que Jean m'assura qu'il n'avait rien de cassé. Le brun m'invita à monter sur son cheval pour éviter de perdre du temps.
-Vous avez vu ce titan ? leur demandai-je paniquée.
-Il a l'air différent, affirma Armin sérieux.
-Moi aussi j'ai l'impression. Tout à l'heure il a clairement montré qu'il attaquait non pour dévorer mais pour éliminer, affirmai-je.
-C'est comme si il savait quel était son point vital, supposa à nouveau le blond.
-Je l'ai vu retirer la capuche de Armin, enchérit Jean.
-Se pourrait-il qu'il soit à la recherche de quelqu'un ? proposai-je douteuse.
-Eren ? prononça Armin.
Cette idée était plus que plausible. Le pouvoir de Eren avait été rendu public, tout le monde était au courant. Je ne serai pas étonnée si quelqu'un essayait de le capturer.
-Il est avec l'escouade de Livaï, expliquai-je, c'est à dire du côté droit.
-Sur ma feuille ils se situaient à l'arrière gauche, rétorqua Jean.
-Et moi à l'avant droit, continua Armin.
Je haussai un sourcil. Où était réellement cette escouade ? Pourquoi nos feuilles n'étaient pas similaires ? J'avais l'impression qu'un tout autre plan se dissimulait derrière nos dos. Armin me coupa dans mes pensées lorsqu'il supposa que Eren devait se trouver à l'endroit le plus sûr de la formation. Si c'était réellement le cas, elle devait être à l'arrière centre.
-Ce n'est pas le moment de penser à ça ! nous interrompit Jean. Il faut retrouver ce titan et attirer son attention pour éviter qu'il écrase l'escouade de devant.
La soudaine motivation de Jean me perturba légèrement. Il ne pensait jamais aux autres habituellement. Prenant un air sérieux, il nous répéta qu'il fallait gagner du temps en attendant les renforts. Armin resta bouche bée, pensant certainement la même chose que moi. Face à notre silence, Jean arbora une mine plus sombre et triste.
-C'est juste que je ne veux pas décevoir mes camarades.. Après tout, c'est le travail qu'on a choisi, pas vrai ? cria-t-il plus que déterminé. Alors aidez-moi !
Je hochai simultanément la tête avec les autres. Armin décida immédiatement d'émettre une stratégie. Il nous demanda d'enfoncer nos têtes au fond de nos capuches. Le titan femelle ne pourra ainsi pas voir nos visages. Il avait raison. Ce titan ne pouvait pas tuer quelqu'un susceptible d'être Eren. Mettant bien ma tête au creux de ma capuche, je demandai à Jean accélérer. Nous devions retrouver ce titan au plus vite.
Surprise, je pouvais apercevoir le titan femelle quelques minutes plus tard. Certainement à cause de la fatigue, il se déplaçait moins rapidement. C'était notre seule et unique chance.
Jean se prépara à sauter en s'accroupissant sur son cheval. Il visa la cheville du titan mais celui-ci l'esquiva. Notre cible se retourna subitement avant de taper dans notre cheval. À nouveau, je basculai en avant. Malheureusement, en tombant je me cognai le crâne. Armin essaya ensuite de viser ses yeux. Pas plus efficace que Jean, le titan projeta le blond contre un arbre. J'avais l'impression que quelqu'un tapait sur mon crâne avec un marteau. Le sang longeait mon visage, ma vision était floue. Sans pouvoir me contrôler, je perdis connaissance.
J'ouvris à nouveau les yeux à l'entente répétitive de mon prénom. Je sursautai de peur en tombant nez à nez avec le visage du titan femelle. Il me tenait dans sa main. J'en étais tellement proche, je pouvais sentir la respiration sortir de son nez. Je n'avais plus ma capuche, j'étais foutue. Toujours assommée, je tournai lentement la tête. Jean, Armin et Reiner étaient entrain de s'enfuir.
-Il faut l'aider ! cria Jean.
-Il n'y a plus d'avenir pour elle, rétorqua-t-il, les titans sont pratiquement déjà entrain de la bouffer !
Quelques mètres plus loin j'aperçus une horde de titans, ceux que le titan femelle avait attiré tout à l'heure. Je compris rapidement que je n'avais aucune échappatoire. Si il ne me tuait pas maintenant, les autres me dévoreront. Je n'étais définitivement pas faîte pour l'extérieur des murs. Je me rappelai soudainement du dernier regard de Livaï. Il savait depuis le début que je n'étais pas une survivante. Pour cette raison, je devais me battre.
Puisant dans mes dernières forces, j'essayai d'atteindre mes lames. J'actionnai le mécanisme pour les recharger avant de trancher rapidement les doigts du titan femelle. Je tombai brusquement sur le dos. J'avais senti à l'intérieur de mon corps un craquement douloureux. Le titan femelle resta inerte, me regardant toujours de haut.
Soudain, un des titans de la horde m'attrapa puis me dirigea directement vers sa bouche. Il broya une partie de mon ventre. Un second arriva et lui assena un coup de poing pour me récupérer. Un étrange goût amer traversa ma gorge en apercevant mon ventre totalement déchiqueté. Ils étaient entrain de se bagarrer pour me dévorer. Le plus grand d'entre eux lâcha un atroce hurlement. Par peur, celui qui me tenait dans sa main me lâcha. Le géant me rattrapa tout en me tenant par la veste avec ses deux doigts. Ouvrant la bouche, il me plaça au dessus de celle-ci. Si il me lâchait, j'atterrissais directement dans sa gorge. Toutes ses dents étaient couvertes de sang. Quelques goutes du mien atterrissaient déjà sur sa langue.
Je repensai subitement à ma vie. J'avais au moins pu connaître mon nom de famille et ce qu'était devenu mon père. J'avais rencontré de brave personnes. Je repensai étrangement au visage de mon caporal, ce visage sur lequel j'aurais tant voulu une fois apercevoir un sourire. Le titan femelle était toujours stoïque. Il me fixait, comme s'il souhaitait assister à ma mort. Je tournai la tête dans sa direction. Tout en souriant, je laissai couler ma première larme en tant que soldat du bataillon d'exploration.
-J'espère que tu auras des regrets de nous avoir trahi.
Le visage du titan femelle se décomposa légèrement. Mon imagination me jouait certainement des tours. Le titan qui me tenait me lâcha subitement. Tandis que mon corps devenait aussi léger qu'une plume, ma vision se transforma en un océan de vert et de rouge.
***
[Chapitre relu et corrigé]