Le destin des Ackerman - Tome 1
Chapitre 35 : Chapitre 34 - La reconquête, partie 3
7118 mots, Catégorie: M
Dernière mise à jour 26/06/2020 17:23
Le bataillon d'exploration se retrouve encore une fois dans une situation critique. A l'intérieur du district de Shiganshina, les escouades Livaï et Hanji ont essuyé le puissant souffle provoqué par l'apparition du titan colossal.
Aux dernières nouvelles le capitaine et ses hommes ont été balayés dans cette explosion gigantesque et ont été tués sur le coup.
L'escouade tactique doit donc faire face à Bertolt sous sa forme titanesque, seule. Coupés de tout ravitaillement, non informés sur la situation de leurs camarades près de la porte intérieure, le petit groupe mené par Armin observe silencieusement et tristement ce titan à la taille ahurissante.
Le blondinet est perdu, incapable de réfléchir efficacement jusqu'à manquer de la moindre idée pour se sortir de ce guêpier. Comment vaincre une monstruosité pareille ? Il semble invincible...
Eren ne peut sûrement rien faire contre un titan qui mesure soixante mètres de haut et si Bertolt décide d'expulser de la vapeur comme il l'avait fait avant qu'ils ne capturent Eren, ce sera impossible de l'approcher avec l'équipement tridimensionnel.
— C'est pas vrai... Il nous bombarde avec des baraques. Dit Conny. Si ça se trouve celle d'Eren est... Aussi dans le tas !
Il se marre tout d'un coup, un rire aux éclats trop étrange pour être naturel, montrant à quel point il est nerveux et apeuré.
— Sasha, mets-lui une taloche. Demande Jean qui aimerait que chacun garde son sérieux et sa concentration.
Madame patate s'exécute et donne un coup de crosse sur le crâne du nabot au crâne rasé. La douleur le calme tout de suite.
Mikasa fixe les débris enflammés qui retombent, le gigantisme de leur ennemi, cette large zone pulvérisée par la transformation... Elle essuie ses yeux humides du revers de sa manche et s'éclaircit la voix.
— Il n'a pas l'air de nous avoir repérés. Remarque-t-elle.
— Non, mais en jetant des débris embrasés il va plonger tout Shiganshina dans les flammes... Souligne Armin, dépité.
Jean serre les dents, exaspéré par le fait que tous ses camarades ont l'air d'abandonner l'espoir de vaincre.
— Armin, on fait quoi là, on attend de se faire aplatir ? Lance-t-il.
Mais le soldat Arlelt ne répond pas, paralysé par cette sensation d'impuissance, par le sentiment que ce qui devait être une victoire éclatante s'est transformée en un instant en une défaite cuisante.
— Armin... Appelle Mikasa qui pose sa main sur l'épaule de son ami d'enfance.
Le jeune homme sursaute et se tourne vers la brune dont les yeux sont rougis.
— ...C'est toi le chef des opérations maintenant. Ajoute-t-elle.
Il observe Mikasa en fixant ses yeux sombres. Oui, elle aussi elle a peur, elle aussi est dépassée par les évènements, elle aussi est incapable de savoir comment mettre à bas ce titan colossal mais malgré les marques de tristesse lisibles dans son regard, elle reste impassible, déterminée et prête à se battre.
C'est suffisant pour qu'il se ressaisisse.
— On va se replier et rejoindre le Major pour avoir ses ordres. Propose le chef par intérim. Il faudra vaincre le colossal à l'usure, comme c'était prévu.
Jean soupire.
— Nan, attends, Armin... Il ne faut surtout pas qu'il approche du mur. S'il répand l'incendie de l'autre côté, le Major et le reste du bataillon seront pris en tenaille. Précise-t-il.
— Ça veut dire que... Qu'on va devoir terrasser Bertolt, là maintenant, à nous seuls ? Redoute Sasha qui se sent soudainement nauséeuse à cette idée suicidaire.
Quelques débris s'écrasent à plusieurs mètres des membres de l'escouade tactique, ils couvrent leurs têtes pas réflexe.
— Armin ça urge, décide-toi ! Hurle Conny.
— Et vite ! Ajoute Sasha.
Mais Armin en est incapable. Il y a trop d'émotions, trop de carnage, trop de désillusion et trop d'inconnu pour si peu d'espoir. Il se tourne vers ses camarades.
— Jean, tu veux bien me remplacer ? Je suis perdu, je ne sais plus quoi faire. J'ai mal jaugé Bertolt et regarde le résultat... Avoue le soldat Arlelt. Tu y vois plus clair que moi.
Monsieur Kirschtein dévisage son ami pendant un instant, le temps de mesurer les responsabilités qu'il s'apprête à accepter de porter.
Il finit par acquiescer.
— Alors direction la rivière. Grimpez tous sur Eren, il faut économiser du gaz. Ordonne-t-il.
Tous s'exécutent pendant que le nouveau chef des opérations se tourne vers le titan allié.
— Eren, il faudra attirer Bertolt à nous mais pour l'instant reste discret.
Le titan de quinze mètres acquiesce. Jean se tourne de nouveau vers le blondinet.
— Armin. Je peux analyser la situation mais je n'ai aucune idée de comment nous tirer de là alors... Je compte sur toi pour en trouver une.
Le blond originaire de ce district acquiesce lentement, pas certain de pouvoir y arriver mais déterminé à ne pas plus décevoir ses compagnons.
Sur ce, Eren se met en mouvement et se faufile dans les ruelles. Les minutes passent et le colossal s'arrête soudainement de jeter des débris tout autour de lui pour se diriger vers la porte intérieure.
Jean le remarque et ça confirme ses craintes.
— Vas-y Eren, hurle, il ne doit pas s'approcher du mur !
Le titan pousse sur ses cordes vocales autant qu'il le peut pour attirer l'attention de Bertolt. Celui-ci s'arrête de marcher, se tourne vers eux, les observe pendant un court moment puis reprend son chemin, indifférent.
— Quoi ?! Mais ce salopard nous ignore !
— Qu'est-ce qu'on fait, Jean ? Si on le laisse... Commence Conny.
— Oui, je sais ! Interrompt le leader.
Il réfléchit intensément à en faire surchauffer son cerveau, cherchant le moyen de stopper l'avancée de leur ennemi.
— Eren, il faut stopper cette grande perche !
— Mais comment tu veux qu'on abatte ce monstre ? Demande monsieur Springer.
— Impossible de s'ancrer à lui avec nos grappins à cause de la vapeur, tu t'en souviens ? Précise Sasha.
— Ouais, je m'en souviens. C'est pour ça qu'on doit tout tenter pour découvrir son point faible. Répond Jean, déterminé.
— Je porterai le coup fatal, attirez son attention. Propose Mikasa, avec son sang-froid à toute épreuve, avant de se tourner vers le nabot. Conny, passe-moi tes lances.
— Tiens !
Il se dépêche de les détacher de ses poignées et les tend au meilleur élément du groupe.
— Armin tiens-toi à l'écart et observe-le bien. Plus de pleurnicherie, tu dois nous trouver une ouverture. Requiert le soldat Kirschtein.
Monsieur Arlelt acquiesce sans ajouter un mot.
— Maintenant, dispersion !
Ils se séparent en deux groupes. Le premier composé de Sasha, Conny et Jean vont s'occuper d'attirer l'attention du titan colossal pendant que Mikasa le contourne pour l'abattre à l'aide des lances foudroyantes.
Eren se jette sur le pied gauche de l'immense démon pour essayer de l'arrêter et, à la surprise de tout le monde, semble réussir à le faire reculer.
— Il le repousse..? Demande Sasha, qui n'en perd pas une miette, abasourdie par la force que peut déployer Eren.
— Vas-y Eren, fous-le par terre ! Hurle Conny pour encourager son camarade.
Armin ouvre grand ses yeux, comprenant ce qui va arriver d'un instant à l'autre : ce n'est pas la force du titan allié qui fait reculer cette jambe, Bertolt s'apprête à...
Le colossal donne un grand coup de pied qui éjecte Eren à une vitesse faramineuse. Il s'écrase l'instant suivant contre le mur en un son semblable au tonnerre qui résonne à des kilomètres à la ronde tellement le choc est violent.
Tous se figent. Mikasa est bouche-bée, choquée et inquiète, en fixant Eren qui gît, inerte, au sommet du rempart.
— Eren ! Crie-t-elle.
Les secondes passent et le jeune Jäger ne donne aucun signe de vie.
— Il... Il ne bouge plus... Souffle-t-elle.
— Il ne mourra pas pour si peu, concentre-toi sur l'ennemi ! Reprend Jean.
Un dernier coup d’œil en direction de Eren puis il se tourne vers Bertolt.
— On n'aurait pas dû foncer tête baissée, impossible d'abattre ce monstre sans plan. Si on ne trouve pas le moyen de renverser la donne cette opération, mais aussi nos vies et l'avenir de l'humanité, seront perdus... Mais on ne va pas se laisser buter les bras croisés pour autant !
Il se redresse.
— On passe à l'attaque !
L'escouade tactique s'élance avec l'objectif de gagner de précieuses secondes.
— Il n'a pas encore goûté aux lances. Sasha, Conny avec moi. Mikasa tu l'embroches !
— Compris ! Répondent en chœur ses camarades.
Ils se propulsent jusqu’à hauteur du visage du titan.
— Hé gros tas, on vient te crever les yeux ! Lance Jean.
— Pauvre abruti ! Ajoute Conny.
— Espèce d'ignoble pervers ! Renchérit Sasha.
Bertolt s'est arrêté, le regard fixé sur ses anciens amis. Mikasa en profite pour faire irruption dans son dos, près de sa nuque. Malheureusement, Bertolt n'est pas né de la dernière pluie et il a tout de suite compris leur stratagème.
Au moment où la jeune Ackerman tire ses lances foudroyantes, le titan colossal expulse de la vapeur brûlante qui, en plus de les empêcher de rester près de lui, repousse les armes explosives auxquelles Mikasa est toujours attachée.
Elle est obligée de les lâcher avant qu'elles ne se retournent contre elle. Les lances vont tout de même exploser sans que Mikasa n'ait pu s'éloigner assez et reçoit de plein fouet le souffle.
Les soldats se réceptionnent comme ils le peuvent plus bas. La jeune femme atterrit près d'Armin, couverte de brûlures superficielles et le bras droit en sang à cause des débris de lances qui ont tailladé sa chair.
— Mikasa ! Hurle Armin, affolé.
Elle serre les dents pour étouffer ses gémissements de douleur mais tient bon.
— Tu es blessée ?!
— C'est rien, juste quelques débris. Dis-moi plutôt...
Armin rate un battement en voyant l'expression désespérée qu'affiche la brune, ça faisait longtemps qu'il n'avait pas vu ça — pour na pas dire jamais.
— ...Tu as trouvé un moyen de faire face ?
— Non... Avoue le blond.
L'instant suivant des pas lourds se font entendre, près d'eux. Ils font volte-face et découvrent le titan cuirassé, debout et en état de se battre.
C'est un cauchemar.
— Cet enfoiré s'est vraiment relevé... C'est dingue, il est increvable ! S'énerve Jean en regardant Reiner approcher. Comment espérer vaincre des monstres pareils ? Bon, Armin, faut trouver un moyen pour qu'Eren puisse se tirer d'ici.
— Il a maigri. Lance Armin, le regard fixé sur le colosse de soixante mètres.
Jean et Mikasa ne comprennent pas sur le moment.
— Le titan colossal est plus fin qu'avant ! Ajoute le blond. Hanji avait raison, on peut l'avoir à l'usure ! La vapeur qu'il dégage doit l'obliger à consumer la chair qui recouvre sa carcasse !
— D'accord et alors ? Demande le leader.
— Armin... Prononce Mikasa qui ne voit pas trop où il veut en venir non plus.
— Alors j'ai un plan. Détournez l'attention de Reiner, Eren et moi on se charge de Bertolt. Dit le soldat Arlelt. Je vous jure qu'à nous deux on l'aura !
Mikasa acquiesce.
— Très bien. On s'occupe de Reiner. Approuve Mikasa.
— Il était temps, abruti, j'ai vraiment failli perdre espoir... Commente Jean.
Conny, Sasha, Jean et Mikasa se regroupent pour préparer leur attaque sur le cuirassé.
— On laisse Armin et Eren se charger du gros ! De notre côté on essaiera de tenir Reiner éloigné d'eux. Harcelez-le sans vous faire choper !
— Compris !
Reiner se met à courir.
— Il nous snobe ?
— Fumier ! Il n'a d'yeux que pour Eren... Dit Jean.
Ces mots suffisent à faire réagir Mikasa et la faire partir en vrille.
— Alors il faut l'abattre ! S'écrie-t-elle avec férocité en faisant demi-tour pour poursuivre le cuirassé.
— Mikasa ! L'appelle Jean pour tenter de la retenir, en vain.
La jeune femme virevolte vers lui à toute vitesse et vise le creux de son genou gauche avec sa lance. Coup de chance ou précision surprenante, elle parvient à l'atteindre exactement là où elle le voulait. L'explosion retentit et le titan s'effondre après une cinquantaine de mètres à tituber.
— Attends ! Appelle encore Jean qui a rattrapé la jeune femme.
— Puisque la diversion a échoué il faut l'éliminer pour de bon ! Dit-elle avant de se tourner vers son camarade. On doit couvrir Eren et Armin !
— Mais on n'a plus que trois lances ! Remarque Conny.
— Pas le choix, de toute façon sans combat pas de victoire ! Répond Sasha.
Il y a deux minutes de flottement avant que Eren s'effondre du mur. Les quatre membres de l'escouade tactique qui observent ce qu'ils se passent ne savent pas vraiment quoi en penser, d'autant plus quand il croient apercevoir Armin foncer vers le titan colossal qui déclenche ensuite une nouvelle onde de chaleur intense.
Mikasa observe cette scène qui se déroule sous ses yeux, ne sachant pas si c'est normal, s'ils peuvent s'en sortir ou pas.
— Eren, Armin... Non je... Il faut leur faire confiance. Pense-t-elle en détournant les yeux.
Il leur manque une lueur d'espoir, que quelque chose joue en leur faveur après toutes ces déconvenues et ces échecs en si peu de temps.
Elle regarde furieusement Reiner, prête à lui faire payer tout ce qu'ils ont perdu aujourd'hui.
Leur plan est d'ouvrir la bouche du titan cuirassé pour le faire exploser de l'intérieur ensuite. Pour cela Jean fait l'appât en visant sa nuque puis Conny et Sasha doivent viser la jointure de ses mâchoires avec leurs lances.
Ils s'élancent et pour se défendre, Reiner racle les toits environnants pour créer des débris qui gênent les manœuvres tridimensionnelles. Sasha se rate mais Conny parvient à atteindre sa cible. Quand il relève la tête la jeune femme est inconsciente et du sang gicle depuis l'une de ses épaules.
Conny se précipite pour la récupérer. Elle saigne depuis son crâne et un débris est planté dans son épaule.
— Jean ! Hurle Conny.
Mikasa observe la scène et c'est partiellement un échec. Elle ne sait pas quoi faire. Elle pourrait tenter quand même puisque la bouche est entrouverte mais c'est risqué et la moindre erreur lui coûterait la vie en plus de gâcher leur dernière cartouche.
La jeune femme est perdue, désespérée.
— Je dois tenter quand même... Pense-t-elle en fixant son ennemi et sa bouche.
Conny comprend son intention.
— Arrête Mikasa, c'est du suicide ! Hurle-t-il.
— Non, vous avez assuré ! Répond une voix qui vient de derrière lui et qui lui est familière.
Il se retourne : Hanji est vivante et elle tire une lance en direction du second côté de la bouche de Reiner.
— Hanji ! S'écrie Mikasa qui a l'impression que son vœu a été exaucé, un miracle arrive.
— A toi, Mikasa ! Répond la capitaine qui s'extirpe de là.
La jeune femme se propulse vers cette gueule béante, esquive la tentative du titan de l'attraper en tournoyant sur elle-même puis atterrit sur sa langue.
— Reiner... Sors de là ! Lance-t-elle avec sa voix éraillée mais pleine de colère alors qu'elle tire son arme explosive, qui se loge dans la gorge du démon en armure.
Elle s'en décroche puis sort de là pour ne pas subir le souffle de l'explosion. Le souffle est si puissant et si concentré à l'intérieur de ce corps géant que Reiner est propulsé hors de celui-ci.
De l'autre côté de la ville le titan colossal s'effondre : Eren et Armin ont réussi eux aussi.
Julia se pose dans une ruelle jonchée de débris qui brûlent encore, certaines maisons alentours sont en ruines. Elle couvre sa bouche et son nez dans son coude en avançant rapidement vers une silhouette humaine. Mademoiselle Smith n'a pas l'air de souffrir de la moindre blessure et son uniforme est quasiment intacte sinon quelques trous causés par de petites braises.
La jeune femme s'agenouille et pose sa main libre sur l'épaule du soldat assit par terre, adossé à cette façade, entouré de morceaux de poutres et autres pierres plus ou moins lourdes, couvert de poussière.
— Thomas. Appelle-t-elle de sa voix douce pour ramener à lui son camarade.
Vu son état elle n'ose pas le secouer. Toute la partie gauche de son visage est couverte de sang — signe que son crâne a été ouvert, sa veste et sa chemise sont déchirées et brûlées à de multiples endroits qui laissent apparaître coupures et contusions, son épaule gauche est profondément écorchée.
Le brun ouvre plus grand les yeux mais sa vision est un peu floue, il ne distingue que grossièrement les traits du visage de Julia.
— Thomas ! S'écrie-t-elle.
— T'es sûre, j'peux pas faire une petite sieste..? Lâche-t-il d'une voix faible avant de rire brièvement.
Parce que la pression retombe un peu, qu'elle est nerveuse et que ce rire est communicatif, Julia ne peut pas s'empêcher de glousser.
— Tu penses pouvoir décoller ? S'inquiète-t-elle après avoir repris son sérieux.
Il sent que de multiples zones de son corps sont douloureuses et il n'arrive pas à bouger son bras gauche. Sans parler de cette fatigue assommante mais il doit se reprendre.
— Je crois que mon épaule est déboîtée... Tu veux bien..? Demande le brun.
La jeune femme hésite. Faire des bandages, des points, des massages thérapeutiques d'accord, mais remettre en place une épaule...
— Je, euh... Je vais essayer.
Elle pose ses mains tremblantes sur lui, cherche intensément dans ses souvenirs si elle a déjà vu un médecin ou un infirmier faire ça mais rien ne lui vient.
Julia prend la main du soldat Ralle.
— Je vais tirer sur ton bras jusqu'à ce que ça se remettre en place.
Thomas acquiesce.
Après avoir pris une grande inspiration, mademoiselle Smith commence à lever ce bras. Le jeune homme essaye de rester fier et fort mais il est rapidement incapable de retenir ses gémissements de douleur. Une fois que le bras est à l'horizontale, elle tire d'un coup sec et un craquement sonore se fait entendre.
— Ah putain ! S'écrie Thomas.
— Pardon, désolée, j'étais obligée sinon... Prononce précipitamment la jeune femme qui se confond en excuses.
Le rire du soldat Ralle résonne, il rit de bon cœur.
— Putain de merde, fallait bien que j'me pète un truc... Merci.
Elle soupire et observe ses blessures sanguinolentes.
— Je devrai aussi m'occuper de ça. Suggère-t-elle en désignant les entailles du doigt.
— On n'a pas le temps pour ça, il faut qu'on aille voir s'il y a d'autres survivants. Refuse Thomas qui s'aide du mur contre lequel il est affalé pour se dresser sur ses jambes.
Julia s'empresse de l'aide à se lever.
— Thomas je ne rigole pas avec ça ! Répond-elle avec fermeté, les nerfs à fleur de peau parce qu'elle est totalement dépassée par les évènements mais aussi parce qu'elle connait sa tendance à se surmener et sous-estimer la gravité de ses blessures.
Il sourit.
— T'es pas possible... Souffle-t-elle en voyant maintenant que toute la surface de son dos est ensanglantée et parsemée de coupures.
La vision de Bertolt qui s'élève dans les airs puis de cet éclair qui a surgit de nulle part, fendant les airs jusqu'à ce que le colossal s'apparaisse... Elle se voyait déjà morte. Une fraction de secondes plus tard elle a pourtant vu une ombre surgir de nulle part puis s'en sentie être attrapée avant de se faire emmener plus loin.
C'est dans les bras de Thomas qu'elle se trouvait, il voltigeait à une vitesse incroyable pour remonter la rue, voulant s'éloigner le plus possible de l'onde de choc avant que le souffle ne les atteigne.
— J'espère que tout va bien pour le reste du bataillon... Murmure-t-elle.
Les membres de l'escouade tactique sont dans une ruelle. Conny s'occupe de Sasha qui est toujours inconsciente, Mikasa fait un bandage à Jean.
Ce dernier frissonne, nerveux et euphorique à la fois que la brune s'occupe de lui, que ses doigts effleurent son épaule meurtrie. Il ne peut s'empêcher de se demander si sa conduite du jour a été remarquée et remarquable aux yeux de la jeune Ackerman. Est-ce qu'elle le regardera avec ces yeux brillants comme elle le faisait avec ce foutu Thomas Ralle ?
Il n'a pas fait tout ça pour l'impressionner bien sûr mais ce serait une juste récompense à ses yeux.
Plus loin, Hanji interroge Reiner dont les membres ont été coupés.
— Reiner, que contient cette boîte métallique qu'on a trouvé dans ta poche ? Juste avant qu'on te tranche les membres, ton dernier geste a été de t'en saisir. C'est un poison pour te suicider ou alors un explosif ?
Mikasa est attentive à ce qu'il se dit en terminant de nouer le bandage, trop concentrée même au point de serrer un peu fort.
— Aïe ! Se plaint Jean.
— Pardon... Dit-elle avant de se relever.
Son regard sombre se pose tristement sur la capitaine et sait pertinemment qu'elle ne serait pas revenue seule s'il y avait d'autres survivants parmi son escouade. Un miracle est sûrement suffisant...
— C'est une lettre. Répond le traître.
— Une lettre ? Mais encore ?
— Un message d'Ymir, pour Christa... Il faut que vous le lui remettiez... Prononce lentement Reiner qui est très faible.
— On verra une fois qu'on aura vérifié. Dit Hanji en rangeant cette boîte dans l'une de ses poches.
Elle dégaine une lame.
— Bon, sur ce, on aurait bien des questions à te poser. Mais tu m'as l'air aussi causant que sous ta forme titanesque. A moins que tu ne sois disposé à nous donner les réponses que l'on cherche ?
— Pas du tout. Répond Reiner.
— Merci, ta fermeté me facilite la tâche.
Sur ce elle s'approche rapidement de lui et appuie le tranchant de sa lame contre la carotide du traître, en appuyant de ses deux mains. Le métal pénètre la chair et du sang s'écoule, faisant cracher le blond à la carrure imposante.
— Non, attendez ! S'interpose Jean. Vous voulez le tuer ? On pourrait s'emparer de son pouvoir !
Hanji se tourne vers lui pour l'observer un instant.
— Je ne pense pas que l'on soit dans les bonnes conditions. Dit-elle finalement. On ignore tout de la situation des autres et on n'a pas le loisir d'aller voir ce qu'il en est, vu que nos adversaires ont encore des cartes insoupçonnées à jouer. Même le décapiter ne nous garantit rien du tout !
Jean soupire.
— Ça ne vous ressemble pas, Hanji... Si on laisse l'inconnu nous paralyser, comment pourrait-on espérer venir à bout des titans ?
— Jean. Appelle Mikasa pour qu'il se taise.
— Quand sera-t-on en mesure de percer les mystères de l'ennemi ? Ajoute le soldat Kirschtein.
C'est au tour de Hanji de soupirer.
— Mikasa. Appelle-t-elle.
— Oui ?
— Il te reste encore du gaz ?
— Non, pratiquement plus. Mais j'ai tout juste de quoi rejoindre Eren et Armin. Répond la jeune femme.
— C'est toujours mieux que moi... Bon, tu vas aller voir quelle est leur situation. Fais le plein de gaz, trouve Livaï et rapporte-moi la seringue. Si c'est impossible pour une raison ou une autre, tire un fumigène. J'exécuterai Reiner aussitôt.
— Entendu.
Elle part sur le champ pour rejoindre son frère adoptif et son ami d'enfance, appréhendant le moment où elle les retrouvera, par peur que l'un d'eux soit gravement blessé.
Lorsqu'elle atterrit près d'eux, elle voit Eren et le Caporal sains et saufs, Bertolt amputé de tous ses membres et près de lui et un corps calciné qu'elle reconnait : c'est Armin.
Mikasa est soudainement prise de panique et sent toutes les émotions qu'elle a contenu pendant la bataille faire surface sans qu'elle ne puisse rien y faire.
— Armin respire ! Hurle Eren avant de se pencher au dessus de son ami. Tiens bon, continue, accroche-toi ! Caporal, l'injection, vite !
Livaï plonge sa main dans une poche et sort cette boîte qui contient l'injection permettant de transformer quelqu'un en titan.
— On va transformer Armin en titan et lui faire bouffer Bertolt ! Donnez-moi la seringue ! S'impatiente le jeune Jäger.
— Tiens...
Mikasa était bloquée sur le corps calciné de son ami d'enfance, entre la vie et la mort, mais revient à elle en se souvenant soudain qu'elle doit prévenir Hanji. Elle se saisit de son pistolet, le charge puis tire.
Au moment où Eren effleure l'étui métallique qui contient de quoi sauver la vie d'Armin, quelqu'un grimpe sur le toit où ils se trouvent : Frock apparaît avec Erwin sur le dos.
— Caporal-Chef ! Je vous retrouve enfin... Le Major Erwin est très mal en point, il a l'abdomen déchiré, ses organes vitaux sont touchés, il perd tout son sang ! J'ai pensé qu'on pourrait se servir de l'injection pour le sauver, non ?
Livaï fixe Frock avec de grands yeux. Mikasa et Eren restent suspendus à la main tendue de Livaï en attendant sa décision finale et surtout en espérant qu'il ne change pas d'avis.
Après une seconde de flottement il ramène la seringue à lui, la mettant hors de portée d'Eren.
— Caporal ? S'étonne Eren.
Frock dépose doucement le Major contre les tuiles. Livaï s'approche et met sa main devant la bouche de son vieil ami.
— Il respire encore, il est encore en vie... C'est à Erwin que nous ferons la piqûre.
Eren se redresse d'un bond et s'approche de l'officier, presque à coller son front contre le sien.
— Vous étiez d'accord pour la faire à Armin ! S'énerve-t-il.
Livaï toise son subordonné pendant un court instant.
— Je dois sauver celui qui libèrera l'humanité. Répond froidement Livaï.
Mikasa sent sa colère exploser. Elle tire une lame en fixant méchamment le membre de sa famille, toute tremblante, une expression à la fois désespérée et sinistre sur le visage.
— Attendez... Est-ce que vous réalisez seulement ? Erwin est le chef de notre bataillon. Rappelle à l'ordre Livaï.
Mikasa sent les larmes qui lui montent, son esprit confus et dévasté ne peut pas produire la moindre pensée raisonnable. Elle ne pensait pas que cette journée pouvait être pire mais perdre Armin serait un drame. Perdre deux des trois personnes à qui elle tient vraiment en quelques heures serait une douleur insupportable.
— Vous le laisseriez crever ? Le temps presse, dégagez de mon chemin. Lance l'officier avec autorité.
Eren reste figé, planté là sans savoir quoi faire. Quand Livaï se met en mouvement il essaye d'attraper la boîte. Le Caporal reste calme parce qu'il comprend ce qu'ils doivent ressentir mais en tant que soldats ils doivent faire passer le devoir avant tout.
— Eren, ne laisse pas tes sentiments t'aveugler.
— Mes sentiments m'aveugler hein ? Alors pourquoi vous ne m'avez pas passé la seringue tout de suite ?
— Parce que, quelque part, je me disais qu'Erwin pouvait être vivant.
— Ben voyons... Jusqu'à ce que Frock ne le ramène agonisant, on n'aurait même pas pu l'imaginer !
— Peut-être... Mais maintenant qu'Erwin est là, la priorité lui revient. Statue Livaï avec fermeté.
Eren essaye de s'approprier la boîte mais l'officier réagit en lui mettant un puissant coup de pied en plein visage, l'envoyant valser plus bas. C'est ce qui décide Mikasa à agir, c'est la goutte d'eau qui fait déborder le base qu'il lève la main sur Eren. Elle serre ses doigts autour de sa poignée et se rue sur le Caporal qu'elle fait tomber au sol avant de le menacer en lui mettant sa lame sous la gorge.
Son visage et ses yeux montrent des émotions contradictoires. Férocité, peur, désespoir, colère... Son souffle est court.
— Vous savez aussi bien que moi que l'humanité ne vaincra jamais les titans sans Erwin. Dit Livaï qui fait preuve d'un grand sang-froid et essaye de les raisonner.
Mikasa tremble toute entière, hésitante. Elle pleure à cause de ce trop plein d'émotions.
— Il a raison, Mikasa. Calme-toi, arrête cette folie. Intervient Frock.
Elle lance au roux un regard noir qui lui glace le sang, il fait un pas en arrière.
— C'est... C'est plutôt sans Armin qu'on est foutus... Dit Eren, face contre le toit, un bras pendant dans le vide.
— Eren ! S’exclame Mikasa.
— Réfléchissez, vous avez oublié ? L'idée de combler la faille de Trost avec un rocher, le plan pour démasquer Annie, le principe de se déplacer de nuit... Tout vient d'Armin ! Et comment on a pu débusquer Reiner ou venir à bout de Bertolt ? Grâce à Armin ! Ce n'est ni moi ni le Major qui sauveront l'humanité, c'est Armin ! Pas vrai Mikasa ?!
Ces mots suffisent pour que la brune se ressaisisse. Elle attrape le poignet du Caporal pour frapper sur le sol cette main qui tient la boîte, afin qu'il lâche prise.
— Donnez-moi ça...
— Il n'y a que le Major qui peut sauver l'humanité... Dit le roux.
— La ferme ! Hurle Mikasa, en furie.
— Non, je ne me tairai pas ! Vous croyez être les seuls à avoir morflé ? Vous n'en savez rien mais de l'autre côté il n'y a plus un seul survivant. Le bestial les a pulvérisés à coup de pierres...
Mikasa ne l'écoute pas, son discours sonnera de toute façon creux pour elle malgré tout le bon sens à vouloir sauver le Major. Elle sacrifierai tous les survivants du bataillon pour sauver Eren et Armin, voilà ce que Frock ne saisit pas.
Le roux se rue vers Mikasa pour l'écarter du caporal. Dans un éclair de rage, elle se tourne vers lui et s'apprête à lui asséner un coup de sabre mais Hanji surgit de nulle part et se jette sur la jeune femme pour retenir son coup.
— Hanji ! Prononce Livaï, surpris.
La capitaine tire Mikasa en arrière et la serre contre elle pour l'immobiliser. La brune essaye de se débattre mais la prise de Hanji est solide.
Le Caporal ouvre la boîte, commence à assembler les pièces de la seringue et ça encourage d'autant plus Mikasa à se défaire de l'emprise de sa supérieure. Elle rugit de colère et de désespoir, des larmes coulant à flot sur ses joues endolories.
— Mikasa, écoute-moi ! Nous avons plus que jamais besoin d'Erwin, on ne peut pas laisser s'éteindre la lueur d'espoir des murs ! Déclare Hanji.
— Mais Armin a prouvé qu'il est tout aussi capable ! Répond la jeune Ackerman dont la voix est teintée de ses sanglots déchirants.
— Armin est assurément exceptionnel mais il n'a pas l'expérience ni le charisme fédérateur d'Erwin ! Ajoute Hanji.
Son discours n'a aucun effet, Mikasa continue de se débattre.
Hanji raffermit son emprise.
— Moi aussi il y a des gens que j'aimerai ressusciter, des centaines... A commencer par ceux de mon escouade qui y sont restés aujourd'hui.
A ces mots qui font allusion à Thomas, Mikasa laisse aller ses pleurs et n'oppose plus la moindre résistance, abattue. Elle s'accroche au bras du capitaine, souhaitant de toute ses forces qu'en rouvrant les yeux ce bras soit celui de Thomas, bien vivant. La sensation de son cœur qui bat la chamade, résonnant contre sa poitrine, est tout ce que désire son esprit noyé par la tristesse.
— Depuis mon entrée au bataillon j'ai perdu tant d'amis... Mais... Au fond de toi, tu le sais... Le jour fatidique vient pour chacun d'entre nous. C'est horriblement dur à accepter, c'est si douloureux qu'on en perd la tête... C'est un déchirement, un vrai supplice, je comprends...
Elle pose sa tête sur l'épaule de Mikasa et l'enlace. La brune se laisse complètement aller, ses sanglots sonores éclatent et un flot de larmes ruisselle sur son visage crispé par la douleur. Toute son histoire résonne, échos lointains qui lui rappellent comme la vie n'est qu'un enchaînement de drames pendant laquelle il est impossible de garder bien longtemps ceux que l'on aime près de soi.
— Mais pourtant, il faut continuer à aller de l'avant... Termine Hanji.
L'instant suivant un appareil tridimensionnel se fait entendre et quelqu'un se pose près d'eux.
Thomas se pose sur le toit et découvre avec horreur cette scène surréaliste. Un corps calciné qu'il reconnait, Bertolt inconscient et ayant les membres tranchés, Livaï à l'air perdu tenant une seringue dans la main, Eren au sol dont la bouche saigne et enfin Mikasa en pleurs dans les bras de Hanji.
Cette dernière lève les yeux vers le membre de son escouade, incroyablement soulagée et ravie de voir un visage familier. Mikasa l'imite ensuite et écarquille les yeux en reconnaissant ces deux billes bleues posées sur elle. Elle ne sait pas si c'est une hallucination — parce qu'elle a plus que jamais besoin du réconfort de ses bras pour affronter la mort d'Armin — ou s'il est vraiment là. Elle a l'impression de voir un fantôme.
Son regard dévie sur son corps et découvre tout ce sang, ces déchirures dans ses vêtements...
Hanji est observatrice et comprend très bien qu'il est temps qu'elle passe le relais, sachant que Thomas sera plus à même de garder la jeune Ackerman sous contrôle. Elle lui fait signe d'approcher en relâchant Mikasa.
Thomas s'agenouille près d'elle et la jeune femme se jette tout de suite dans ses bras. Là, prostrée contre lui, elle peut sentir son cœur battre, la chaleur de son corps l'entourer lentement et agréablement. Ses pleurs reprennent de plus belle et elle s'accroche au torse de son ancien amant qui l'entoure délicatement de ses bras.
Peu importe qu'il soit réel ou non, qu'elle hallucine ou non. Dans la perception qu'elle a actuellement de la réalité il est en chair et en os, c'est plus que suffisant pour l'instant. Le réconfort d'être contre lui est inespéré. Son esprit est assailli de regrets.
Pourquoi a-t-elle été si idiote ? Pourquoi est-ce qu'elle ne s'est pas battue pour qu'ils restent proches l'un de l'autre ?
Comment a-t-elle pu rester autant de temps sans pouvoir apprécier une simple étreinte à se laisser bercer par la tendresse...
Elle revoit ce moment où Thomas a foncé tête baissée vers une mort certaine. Comment a-t-il survécu ?
Eren rampe sur le toit puis attrape la cheville de Livaï.
— Caporal... La mer, ça vous dit quelque chose..? Elle s'étend jusqu'à l'horizon, à perte de vue, comme un lac sans fin... Armin il...
— Ça suffit. Coupe l'officier en se levant.
Thomas comprend que les frangins essayent de plaider en la faveur d'Armin mais voit le Caporal se diriger vers Erwin. Il resserre alors ses bras autour de la jeune femme. Ses sanglots étouffés résonnent contre sa poitrine, inconsolable et anéantie.
— Boucle-la maintenant ! Dit Frock qui choppe Eren pour l'emmener plus loin.
— Elle existe quelque part au delà des murs et on s'était promis d'aller la voir ensemble... Mais moi j'avais complètement oublié ces rêves qu'on avait gamins ! Ajoute Eren qui ne veut résolument pas laisser tomber.
Il pleure, lui aussi, incapable de se faire à l'idée de perdre son meilleur ami aujourd'hui.
— Je ne pensais qu'à venger ma mère et exterminer les titans... J'étais obnubilé par la haine ! Mais pas lui, pas Armin... Il ne pense pas qu'à combattre, il continue de rêver !
Livaï semble souffrir des mots qu'il entend et ça ne l'aide absolument pas à être objectif dans sa prise de décision.
— Éloignez-vous tous ! Je vais donner Bertolt en pâture à Erwin, point ! S'écrie-t-il soudainement pour chasser tous les doutes qui l'assaillent en ce moment et ainsi s'arrêter sur une décision.
Thomas se sent impuissant alors qu'il aimerait faire quelque chose pour persuader Livaï de sauver Armin parce qu'il pense sincèrement que ces trois-là, ensemble, sont la clé pour que l'humanité se relève un jour, parce qu'il est persuadé qu'Armin est plus à même d'offrir aux habitants des murs d'autres perspectives et opportunités que les massacres et la guerre.
Monsieur Ralle se redresse et emmène la brune dans le mouvement.
— Viens... L'implore-t-il alors qu'elle regarde une nouvelle fois le corps calciné de son ami mourant dont la respiration difficile leur parvient.
Elle finit par acquiescer. Frock emmène Eren plus loin, Thomas s'occupe de Mikasa, Conny a toujours Sasha inconsciente sur le dos.
Depuis le toit d'une maison qui se situe à trente mètres de là, tous observent les mouvements de Livaï qui s'approche d'Erwin, seringue à la main.
Les soldats constatent que Livaï hésite, il tarde à faire l'injection à Erwin.
Le soldat Ralle pose ses yeux sur Mikasa qui s'est agrippée au bras de son frère adoptif. Ils ont frôlé le désastre, presque deux cents membres du bataillon d'exploration sont morts mais la victoire est leur. Peuvent-ils s'en satisfaire ? Certainement pas, elle est amère.
Hanji s'approche de Thomas et pose sa main sur son épaule.
— Ça va ? Demande-t-elle.
Il acquiesce.
— Capitaine, Julia et Judith sont là-haut, je les rejoins. Annonce le jeune homme.
Les yeux et les commissures des lèvres du capitaine s'agrandissent.
— Elles sont vivantes ? Comment vont-elles ?
— Julia n'a rien de cassé mais Judith est dans un sale état. On a juste réussi à la stabiliser... Comment avez-vous survécu au souffle ?
— Moblit m'a poussée dans un puits.
Thomas ne répond pas sinon par un lent acquiescement avec une mine triste. Il tourne les talons et s'envole en direction du sommet du rempart pour retrouver ses deux camarades.
[ Quatre heures plus tard - Sommet de la porte intérieure ]
Sasha, Armin et Judith sont allongés là, plongés dans un profond sommeil. Pour aucun d'entre eux le pronostic vital n'est engagé mais pour la membre de l'escouade Hanji plusieurs semaines de convalescence devraient être nécessaires.
Les soldats valides quadrillent la zone au sol pour retrouver d'éventuels survivants. Soudainement un fumigène vert est tiré du sommet du mur par le Caporal-Chef. Tout le monde rejoint rapidement le sommet du mur où Armin s'est réveillé. Lorsqu'ils atterrissent Eren est en train de lui raconter tout ce dont il ne se souvient pas.
Conny s'agenouille près de Sasha pour voir comment elle va, Julia et Thomas font de même avec Judith.
— Alors... Nous sommes les douze survivants du bataillon d'exploration, c'est ça ? Demande Armin.
— Jusque-là on dirait bien. Répond Jean. Ça fait quatre heures qu'on cherche mais pour l'instant on n'a trouvé aucun rescapé.
— Nous avons malgré tout réussi à combler la brèche du mur de Shiganshina mais Reiner, le bestial et un autre ont pu s'enfuir...
Mikasa est juste aux côtés d'Armin et elle a le regard tristement baissé en l'écoutant faire le bilan de la situation.
— Mais nous avons capturé Bertolt. Ensuite face au major Erwin et moi gravement blessés, vous vous êtes disputé l'injection et c'est moi que... Je me suis transformé en titan et j'ai dévoré Bertolt... Conclut Armin avec un regard plein d'effroi et de dégoût. Il a un violent haut-le-cœur.
Jean lui passe une outre d'eau pour qu'il puisse se désaltérer.
— Pourquoi avoir opté pour moi ? La logique aurait pourtant dicté de sauver le major en priorité, non ? Demande encore le blond. Caporal-Chef, pourquoi m'avoir choisi moi ?
Livaï soupire puis donne un petit coup de pied dans le bas du dos d'Eren.
— Je t'avais dit de ne rien omettre. Puis se tourne vers Armin. Pour commencer, tes deux compères ne partageaient pas ce point de vue. Ils s'y sont même opposés au point d'en venir aux armes.
Mikasa et Eren baissent la tête, sachant qu'ils vont le payer. Sur le moment avec toutes les émotions fortes qu'ils ressentaient et la suite d'évènements tragiques tout au long de la journée ils n'ont pas réfléchi mais après coup ils se rendent compte que c'était idiot même s'ils ne peuvent pas nier qu'ils sont heureux qu'en définitive, ce soit Armin qui ait survécu.
— On acceptera notre sanction sans broncher. Dit Eren, résigné.
— Ça, votre insubordination ne restera pas impunie mais l'accepter légitime-t-il l'indiscipline ? Dit Hanji qui lance un regard en direction de Thomas qui les observaient déjà.
— Non, bien sûr... Répond Eren.
— Enfin... Au final c'est moi qui ai opté pour toi. J'ai estimé que le moment était venu pour Erwin. Explique Livaï.
— Ça m'échappe complètement. Avoue Armin. Le major nous était indispensable... Sans lui pour nous guider, comment va-t-on faire désormais ?
— J'étais aussi d'avis de sauver Erwin, pour être honnête. Enfin, mon échec est surtout de ne pas avoir su prévenir ce désastre. Elle prend une pause d'une seconde. De toute façon, c'est à Livaï qu'Erwin avait confié la seringue et la décision. C'est toi qu'il a choisi, je n'ai pas mon mot à dire. C'est à toi qu'ont échu l'esprit d'Erwin et le pouvoir d'un titan, quoi que les autres en pensent tu es maintenant quelqu'un de spécial, Armin. Ajoute Hanji.
— Moi ? Prendre la place du major ? C'est absolument impossible...
— Te fais pas d'illusions, tu ne remplaceras jamais Erwin. Mais... Tu as de toute évidence certaines qualités hors du commun. Je ne compte pas regretter mon choix alors... Il pose ses mains sur la tête de Mikasa et Eren. Ne leur fait pas regretter le leur. Ne déçois personne et surtout pas toi-même. Voilà ta mission, maintenant.
Thomas ne peut pas s'empêcher de sourire en détaillant l'expression du soldat Arlelt : les discours de Livaï sont rares mais inspirants.
Sasha semble se réveiller et gémit de douleur.
— Bouclez-la... Finit-elle par dire, faisant sourire tout le monde.
Hanji se marre.
— Sacrée Sasha... Enfin, de mon côté je succède à Erwin à la tête du bataillon tu sais. Notre situation est assez proche : il va falloir donner le meilleur de nous-mêmes.
— Oui... Répond Armin.
— Bon, puisque Armin va bien, mettons-nous en route. Livaï, Eren, Mikasa et moi partons inspecter cette cave. Les autres vous ferez le guet, surveillez bien tous les côtés.
— Compris.