L'Ode à la liberté [Livre I]
D’après la légende, les dieux n’appréciaient pas la prétention des humains, êtres mortels, dont leur existence n’est éphémère à leurs yeux. Un couple des plus banals en somme, avait osé nommer leurs enfants Sól et Máni, comme les deux astres créés pas ces divinités dotés de puissants pouvoirs incommensurable. Pour les punir de leur affront, ils obligèrent le frère et la sœur à devenir les conducteurs de ces deux corps célestes pour maintenir un équilibre. La sœur poursuivait encore sa course pour échapper à Skoll. L’auteur de ce récit possédait une imagination hors du commun, pensait la blondinette en contemplant le soleil qui s’évadait doucement, où les ombres disparaissent un à un sous le paysage urbain. Un jour, l’être humain ne sera plus que l’ombre de lui-même avant de renaître dans un nouveau monde.
Alors qu’elle admirait le soleil rêveuse, son camarade se complaisait dans des chimères songeant à faire d’elles une réalité absolu. Le brun n’assimilait pas encore l’entièreté de ses sentiments à son égard, mais forcer d’admettre qu’il éprouvait d'une satisfaction incontrôlable depuis quelques heures. Égoïste, peut-être, mais il avait accepté de rester en retraite depuis le début, s’interdisant de marcher dans les plates-bandes du mentor et de de sa fidèle adepte. Le maître ayant renié son élève, il pouvait s’engager dans le jeu sans difficulté maintenant.
La demoiselle s’étira, baillant la bouche grande ouverte, fatiguée et tourmentée par le lacis de cette journée à procrastiner, mais pas des plus ordinaires.
— Je me demande ce qu’on va trouver là-bas, souffla-t-elle - songeant aux prochains jours qu’ils l'attendaient.
Le damoiseau s’approcha de quelques centimètres de sa collègue pour poser ses doigts sur son épaule, collant la paume de sa main sur l’omoplate.
— Arrête de te tracasser autant, au moins tu pourras profiter de tes parents, sourit Eren.
La commissure de ses lèvres s’abaissa progressivement pendant qu'elle observait son homologue masculin, avant de détourner les yeux vers le courant d’eau qui traversait le district. Elle aimerait lui dire non, mais elle répudia ses propres sentiments néfastes, par peur de le décevoir. Si elle ne pouvait pas être plus proche de lui, elle se devait au moins conserver cette amitié quelconque… Puis, elle ne souhaitait pas se replonger dans certaines vagues de réminiscences, encore flou et hors de portée. À chaque fois, qu’elle y pensait, la migraine pointait le bout de son nez et les maux de têtes étaient de plus en plus violents, depuis… Depuis quand ? La cave peut-être ? Elle ne se souvenait toujours pas de ce laps de temps entre Hanji qui commençait à enlever un ongle du soldat Sanes et de l’apparition du caporal. « Ce n’était pas ta première fois, non ? ». Cette question venait de nouveau la troubler. Et d’où ce nabot connaissait sa mère ?
Remarquant, mais ne comprenant pas ce changement d’humeur soudaine, le moineau ne trouva rien de mieux à faire que de bousculer le passereau d’un petit coup d’épaule, pour attirer son intention.
— J’aurais bien voulu t’accompagner, mais le caporal nous a déjà concocté un programme pour les prochains jours.
La blondinette examina le Titan, qui idolâtrait toujours autant ce nain de jardin de pacotille.
— À croire qu’il apprécie ta compagnie, tout autant que toi qui apprécie la sienne. Je me demande ce que pense Mikasa de tout ça, répondit Æsma.
Eren se décala d’un pas, comme pour esquiver une attaque au corps-à-corps. À travers ces paroles, il dénota un brin de jalousie sur cette petite frimousse encore pure. Bien des choses lui échappaient encore, cherchant à comprendre sa haine contre cet homme qui forçait le respect. Et pourquoi diable, lui parlait-elle de sa sœur adoptive ? Que sous entendait-elle ? Il plissa ses deux billes émeraude pour sonder l’esprit de l’exploratrice.
— Je ne pense pas réussir la solidification du premier coup. Connaissant un peu le caractère de nos supérieurs, tout doit être parfait avant la reconquête du mur. Puis le temps qu’on s’arme correctement, au cas où l’ennemi serait encore dans les parages… Le jeune Titan se tut un instant pour ravaler sa haine et reprit la parole - une intonation plus douce, Je pense qu’on aura le droit à quelques jours de congés durant les prochains mois.
Le soldat rattacha ses yeux à ceux de Traum. Pendant qu’il se mettait en quête de trouver un autre prétexte pour grappiller un peu de son temps, la blonde inspecta ses bottes, supputant la dernière formule.
— Ça serait bien. Ça signifierait qu’on pourra veiller tard la nuit, répondit-elle malicieusement.
Le Brun - quelque peu pantois - fronça les sourcils, incertains à quoi elle faisait allusion. Du moins, il ne voulait pas faire fausse route, comme cette fois-là. Une expression ne passant pas inaperçu, déstabilisant la jeune femme. Incertaine, elle pensait avoir commis une bourde et devait se rattraper aux branches.
— C'est le printemps. Une saison idéal pour aller admirer les étoiles filantes, s'exclama l’exploratrice.
— Oh ! S’exprima le jeune Titan, presque déçu. Euh, ouais, c’est un truc qui plairait sûrement à Armin ça…
Mais on s’en fou d'Armin, pensa-t-elle. Un message un peu plus clair, il s’en foutait royalement de passer du temps à deux. Amis pour la vie, hein, continua-t-elle de penser, avant de réaliser qu'elle exprimait le fond de sa pensée à voix haute. Une mélodie disgracieuse et hargneuse rythma la cadence de l'organe vital de la jeune fille. Une stimulation interne des plus déplaisantes. Si elle poursuivait sur cette voie-là, elle finirait par détruire ce qu’elle avait de plus précieux. Comment rattraper sa bourde ?
Pour Eren, ces paroles lui insufflaient de prendre son courage à deux mains et se faufiler dans cette brèche, avant… Qu’il ne soit trop tard. Un apollon avait fait irruption dans cette bulle qui ne leur appartenait qu’à eux. L’archer démoniaque enroula de son bras athlétique les petites ailes de cet adorable papillon et y déposa un baiser sur sa délicate joue, ne manquant pas de surprendre la bête ailée. Voir l’être - dont il se passionnait tant - dans les mains de l’incube suffisait à le faire entrer dans une rage noire.— Alors petite cachottière, tu ne me présente pas ? S’exprima gaiement le vil tentateur.
— Al !
— Je voulais te faire un petit coucou aujourd’hui, mais tu n’étais pas là. Le dieu de la beauté masculine adressa un beau sourire et un regard plein de malice à l’aspirant. Qui est donc ce charmant jeune homme ?
— Qu’est-ce que tu fous là ?! S’indigna Æsma - détestant être pris de court, surtout de cette façon. Devant Eren. Qu’allait-il penser d’elle maintenant ?
— Bonjour l’accueil… Laisse tomber. Salut toi, s’adressa-t-il à nouveau au brun. Je m’appelle Aloysius, je suis le fiancé d’Æsma.
Une fissure se créa dans la montagne de glace, grimpant à une vitesse incroyable jusqu’au pic, provoquant les pires cataclysmes pour tout annihiler sur son passage. Voilà donc ce que sous-entendait le grand frère…
Si Jäger rentrait dans une colère noire, elle n'en était rien à côté de la petite Traum qui frappa la gueule d’ange de toutes ses forces, surprenant les deux rivaux. Néanmoins, ça ne restait qu'une petite chatouille pour le beau blond et un événement inattendu et quelque peu plaisant pour le brun.
— N’écoute pas cette andouille, s’énerva la rebelle - écrasant le pied de son ami d’enfance.
— Oh pourtant, quand t’étais petite, tu ne cessais de crier à tout le monde que j’étais ton amoureux, dit-il faussement vexé.
— Justement, j’étais qu'une enfant ! Eren ! S’écria la blondinette en panique. C’est lui dont je te parlais cet après-midi.
Le jeune Titan quantifiait toutes les données qu'il avait rassemblé.Combien de volatiles de mauvais augure allait encore virevolter autour d’elle et dévoiler leur plumage ? Il avait accepter de ne pas s’interposer entre le mentor et sa protégée, avant de découvrir le pot au rose. Beau, charmant, avenant, proche d’Æsma, Eren ne supportait pas la façon dont Aloysius se dandinait, excessivement coller à elle - encore moins ce sourire complice… Il songeait sérieusement à éliminer ce concurrent, refusant de céder sa place à cet apollon de bas étage.
Le coq bomba son torse migrant vers le parasite pour montrer patte blanche, que ce dernier accepta volontiers. Ils échangeaient des sourires et des regards des plus amicaux, saupoudrés d’une bienveillance sans nom. Une poignée de main anormalement longue aux yeux de la poulette. Les deux tétras se broyaient mutuellement les rémiges, refusant obstinément de partager le terrain pour chasser et apprivoiser l’animal sauvage, possédant une robe fabuleuse et des cristaux verts, que l’on rencontrait que très rarement, voir jamais.
— Æsma, on devrait vite retrouver les autres. On a e une réunion qui nous attend.
— Ah bon ? S’exclama la personne visée.
Elle ne se rappelait pas le Major ou leur chef avoir évoqué un quelconque symposium. C'était jour de repos !
— Ouais, j’ai appris ça ce matin.
— Mais je croyais que…
— J’ai oublié de te le dire. Tu étais encore avec Delroy au moment des faits.
Ne supportant plus la présence de ce mâle alpha, encore moins l’insouciance de sa camarade, le jaloux se saisit du poignet de sa collègue pour l'entraîner loin de son ennemi.
— Allé viens ! On va être en retard.
Un changement de comportement des plus soudain, déclenchant une vague de stress chez la demoiselle pensant être fautive de sa colère. À l’évidence, elle s’était montré insultante envers ses deux meilleurs amis, qui étaient présent depuis bien plus longtemps qu’elle.
Eren lâcha enfin son emprise, réalisant qu’il s’était un peu - trop - emporter tout à l'heure et ni elle, ni lui, n'avaient moufter mots pendant le trajet. Était-elle fâchée contre lui ?
Æsma observait le garçon, attendant patiemment de se prendre une remontrance. Rien. Bon… Ils n’allaient pas rester là éternellement, surtout pas s’il y avait un briefing…
— On devrait rejoindre les autres, s’exprima-t-elle d'une toute petite voix.
— Hein ? Réagis le brun étonné.
— La réunion.
— Quel réunion ?
— Et bah la réunion !
— Mais y'a pas de réunion, s’étonna Eren.
— Comment ça, il n'y a pas réunion ?
— Mais de quoi tu parles ?
— Mais bordel, de la réunion que tu as évoqué tout à l’heure, dit la blondinette - anxieuse
— Mais y’a pas de réunion ! Clama le garçon - un peu à cran.
La bouche légèrement entrouverte, elle se massa la nuque, continuant à regarder son camarade d'un air crédule.
— Je ne suis pas certaine de comprendre là… Y'a réunion ou pas réunion ?
Le garçon leva les yeux au ciel, fulminant intérieurement. Quel con, mais quel con, se répéta-t-il en boucle. Comment allait-il se justifier maintenant ? Au moins, il ne s’en était pas pris verbalement ou physiquement à ce vautour… se dit-il, en passant ses doigts dans sa crinière, se remémorant certains évènement fâcheux. Un jour, il arrêtera de s’enflammer pour un oui ou pour un non. D’abord, il devait analyser les situations et garder un contrôle absolu sur tout. Tout. Il devait tâtonner le terrain dans le plus grand des respects et attendre son consentement, mais il désespérait un peu plus depuis sa rencontre avec l’apollon. Un claquement de doigts le força à revenir dans la réalité. La blondinette tapait du pied, attendant une réponse.
— Eren ! Tu veux bien me dire ce qu'il se passe à la fin ? S’impatienta-t-elle.
Des matières grises quasiment inexistantes, où les neurones se désagrégèrent au fil des pensées - le jouvenceau dans une mauvaise posture, ne parvenait pas à trouver un faux prétexte pour justifier ses méfaits.
Sur le perron du quartier général, trois zozos les regardaient. Le premier, en bas des marches et le bas du dos contre la rambarde, avait les bras croisés arborant un petit air emplit d’animosité. Le deuxième - le plus petit de la bande - se grattait le haut du crâne, découragé, contrairement au troisième, penché sur la rambarde, un petit sourire en coin non dissimulé, dévorant la scène des yeux.
— On pari combien qu’il va se dégonfler ? s’exprima le petit soldat.
— Depuis quand tu fais des paris aussi absurde ? Bien sûr que non, il ne va pas se dégonfler ! Rétorqua le plus grand - affirmatif.
— En ce moment même, il cherche comment à contourner le problème, sourit le troisième - une furieuse envie de taquiner son rival. Hé Eren, c’est pour aujourd’hui ou pour demain ?!
Pourquoi avoir besoin d’un faux prétexte quand une cloche vient sonner à votre porte pour chercher des noises ? Eren faussa compagnie à la blondinette pour rabattre le caquet de celui-ci.
— Un problème tête de cheval ?
Jean employa son air arrogant habituel, se remettant à la vertical pour mieux regarder de haut son collègue. Un traditionnel face à face se déroulait entre ces deux débiles.
Le soldat Arlelt observait son ami Henchman, presque satisfait. Il s’approcha discrètement de lui pour lui murmurer.
— Tu disais ?
— Rien n’est encore joué. Reste à savoir ce qu’il s’est passé pendant leur rencard.
— Ce n’était pas un rencard et je t’assure qu’il ne s’est rien passé entre ces deux là, avança le blondinet.
— On pari quoi ?
Pendant que les deux camarades misaient sur le dessert de ce soir, écoutant à peine la querelle sans importance, une jeune femme plongée dans la confusion la plus totale, monta sur ses grands chevaux, percutant approximativement ce qui se tramait dans la tête de l’idiot sans cervelle. Elle se rappelait de ce bout de papier froissé sur son bureau. Rien que d’y penser, elle frissonna, écœurée, grimaçant de dégoût, abhorrant de tout son être encore cet oiseau de malheur. Sauf que là, elle ne captait pas ce qui pouvait mettre le crétin impulsif dans cet état. Aloysius n’avait rien de semblable à l’autre. Se déplaçant derrière la personne qui causait du tort à son cœur - à bonne distance, elle utilisa son pied pour toucher sur le segment d’appui de ce dernier et forcer le barrage, réussissant à lui faire perdre l’équilibre.
Le malheureux, le cul par-terre, dévisagea sa camarade complètement éberlué, mandant des explications. La peste se contenta de le toiser, mais ses lèvres bougeait - de façon très imperceptible. Il semblerait qu’elle le traite d’imbécile ou quelque chose dans le genre.
Un rictus se dessina sur le visage de Jean - comme un léger goût de victoire lorsqu’il avala sa salive - se délectant de voir son ennemi se faire rabrouer ainsi, et ce de manière gratuite. C’est tout ce que le jeune Titan méritait.
Armin - tout comme Delroy - serait bien venu en aide, mais son envie de connaître le fin mot de l’histoire l’intéressait davantage. Et pour ça, ils devaient attendre que la blondinette décide de les abandonner pour interroger l’idiot suicidaire. Ou bien d’un petit rebondissement dans l’histoire. Le lieutenant des Brigades Spéciales qui avait eu un entretien avec le Major plus tôt dans la journée, se présenta de nouveau à eux - tout joyeux. Arlelt donna un coup de coude à Henchman, en voyant Traum réagir face à lui, semblant bien le connaître. Quant à Jäger, il se mis aussitôt sur ses deux pattes, donnant l’impression de vouloir en découdre.
— Votre gentil caporal à interrompu notre petit entretien, continua le soldat Rovdyr. Il s’est gentiment donné en spectacle ceci-dit. Allé savoir pourquoi… Enfin, si tu demandes encore pourquoi je suis là, c’est parce que je vous accompagne demain gros bêta.
Cette petite annonce ne manquait à faire lâcher un petit cri qu’essayait d’étouffer irrémédiablement son meilleur ami, tentant de ne pas démarrer au quart de tour lorsqu’il observait avec envie Aloysius caressant la chevelure soyeuse d’Æsma.
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Isolé dans un labyrinthe désertique, étendu dans la noirceur des ténèbres, Æsma ne ruminait plus sur les états d’âme d’Eren. Ni lui, ni Hanji envahissaient le fil de ses pensées. Non, elle ne suivait qu’une corde d’acier qui le menait à Livaï Ackerman. Mille et une question se bousculaient dans sa tête. Le capitaine aurait perdu son sang-froid. Avant ou après son apparition ? Se mettant en tailleur sur son matelas, la gamine s’ébouriffa la crinière et se retint de ne pas crier. Il était tard et elle ne voulait pas réveiller Nifa. Nifa… Elle regarda en direction du lit vide. Quelques semaines, maintenant, que sa colocataire était absente et visiblement elle n’était pas encore habituée…. Dire que ses dernières paroles n’auront pas été les plus tendres. Elle s’en voulait terriblement.
Ruminant encore pendant de sempiternelles minutes, la jeune fille opta pour aller prendre une tasse de thé. Elle dégagea la couverture qui entravait le moindre de ses mouvements et se glissa jusqu’au bureau pour enfiler une large chemise sur ses épaules, tombant au-dessus de ses genoux dénudés.
Elle ouvrit la porte de sa chambre et n’y sortit que le bout de son nez, vérifiant qu’Hypnos était bel et bien présent à l'étage. Pas un chat. Elle referma doucement derrière elle, et à pas de loup, se dirigea vers les escaliers en bois. Au bas des marches, elle atterrissait sur un sol froid, sobrement rugueux, parfois lisse sur certaines dalles - elle trotta le plus discrètement possible jusqu’à la cuisine, prenant soin de tourner délicatement la poignée et refermer doucement derrière - enfin jusqu’à ce qu’elle découvre la présence d’un individu dans la pièce, en position de pilier. Bon sang ! Souffla-t-elle dans sa barbe, prise d’un léger sursaut. La gamine, les mains derrière le dos, collant celui-ci contre la cloison.
Le maniaque de la propreté sirotait tranquillement son breuvage favori, observant circonspect la recrue - qui prenait, semble-t-il, toujours un malin plaisir à braver les interdits. Était-ce le hasard ou avait-elle flairé sa présence pour l’interroger ? Tout le long du repas, il avait senti le regard insistant de la morveuse à son égard. Or, ce soir, il n’avait ni la force, ni l'envie de se confronter à cette boule de nerf.
La gamine non plus. Elle ne bougeait toujours pas d’un iota - absolument perplexe - hésitant à allé prendre sa boisson chaude ou repartir comme si de rien n’était. Elle n’avait pas pris ce paramètre en compte… À quel point ce bougre était-il insomniaque ? Ceci dit, c’était l’occasion pour elle d’obtenir des réponses à ses questions. Elle se ravisa aussitôt - bien trop et plus perturbée que lui.
Le calme qui régnait dans cette pièce était pour le moins des plus étranges. Pas de plaisanterie de mauvais goût, ni d’injure. Étrange contexte que voilà. La blondinette vogua vers les étagères à condiments, s’apprêtant à pêché une boîte au hasard, le capitaine s’exprima enfin.
— Il en reste, dit-il - désignant la théière sur la gazinière.
Dans une énième lampée, le nabot guettait du coin de l’œil la morveuse, ne s’attardant pas plus longtemps sur sa tenue affriolante, préférant se concentrer ses « nobles » intentions. Allait-elle le questionner oui ou non ? Elle paraissait nerveuse. Elle était nerveuse. Elle était incapable de tenir correctement ce foutu récipient à couvercle et ne pas renverser une goutte. Livaï avala une autre gorgée, fermant les yeux pour calmer son envie de meurtre.
La tasse entre les mains, Æsma profita de la chaleur de celle-ci pour apaiser son anxiété. Tout en regardant le fond du gobelet en céramique, elle se mordit la lèvre inférieure pour contenir son besoin irrépressible d’obtenir des réponses. Elle resta longtemps plantée comme ça, laissant le temps au caporal de terminer sa boisson, laver soigneusement la tasse et la ranger.
À deux doigts de quitter les lieux, la blondinette déposa la tasse sur le plan de travail et se retourna pour rattraper le caporal, qui avait deviné sa démarche. Ses yeux irisés se plantèrent dans ce regard, où un méli-mélo de désir, de trouble et de chaos s’entrecoupait.
— Non, dit-il sèchement - quittant les lieux.