Les Highlanders : la dernière génération
Cela faisait une demi-heure qu’ils marchaient dans la forêt. Ils débouchèrent enfin sur la maison de Rose.
- Ca y est, on est arrivés ! annonça Rose en devançant Steven.
Soudain, les deux s’arrêtèrent brutalement.
- Eh, mais c’est ma voiture !
- Je t’avais dit qu’on la récupèrerait.
Elle commença à s’avancer, mais il l’arrêta en saisissant son bras.
- Tu ne trouves pas ça bizarre, toi ?
- Si, mais ce n’est pas en restant là qu’on comprendra.
Elle se dégagea de sa main et avança. Soudain, il comprit, ou plutôt sentit ce qui se passait.
- On est pas seuls, Rose !
- Quoi ? Mais qu’est-ce que tu racontes ?
Tout à coup, ils entendirent des pas approcher. Steven rejoignit Rose immédiatement la plaçant derrière lui, pour la protéger. Cependant, ce geste était vain : quelques minutes plus tard, ils étaient encerclés.
- Oh, non, c’est pas vrai ! s’exclama Rose.
- Quoi ? Qu’est-ce qu’il y a ?
Rose n’eut pas le temps de lui répondre car l’un des hommes s’avança et dit :
- Rosa, omni quaesivimus te. (Rose, nous t’avons cherchée partout).
- Quod ? (Pourquoi ?)
- Scit. (Tu le sais.)
- Non.
- C’est quoi, ce délire, Rose, tu connais ces gens ?
Steven était tout sauf rassuré par ces hommes habillés d’une longue cape noire qui formaient un cercle autour d’eux. Vraiment flippant. Et puis, c’était quoi cette langue qu’ils parlaient ?
- C’est compliqué, Steven.
- Ah vraiment ? Et c’est quoi, cette langue ? On dirait du latin.
- Parce que c’est du latin.
- Tu parles couramment latin ?
- Il vaut mieux quand on fait des études d’archéologie.
- Non ! Quand on fait des études d’archéologie, on maîtrise le latin, on ne le parle pas !
Les hommes les regardaient patiemment, les mettant rapidement mal à l’aise alors qu’ils attendaient le silence pour pouvoir continuer.
L’homme déjà avancé s’avança à nouveau, arrivant jusqu’à Rose. Il lui caressa la joue.
- Tandem nos invenit te. (Nous t’avons enfin trouvée).
- Non ! Non ! s’écria-t-elle en reculant. Non quod quaesivitis sum. (Je ne suis pas ce que vous cherchez.)
Steven commençait sérieusement à s’impatienter devant ce dialogue qu’il ne comprenait pas. Rose cachait quelque chose, il le savait.
- Qu’est-ce qu’ils disent ? demanda-t-il.
- Que je suis ce qu’ils cherchent.
- Et qu’est-ce qu’ils cherchent ?
L’homme qui s’était avancé reprit :
- Turbamus te, videmus, sacerdos. Deinde luna redibimus.
Ils partirent comme ils étaient venus, laissant Rose et Steven seuls devant l’immeuble.
Une fois entrés dans l’appartement, Rose proposa à Steven de s’asseoir pendant qu’elle préparait à manger. Elle n’arrivait pas à se concentrer deux secondes, la rencontre qu’elle venait d’avoir la tourmentait trop pour cela.
- Eh ! Mais qu’est-ce que tu fais ?!
Rose sursauta, et se rendit compte que du sang coulait de sa main.
- Mais qu’est-ce que… réussit-elle à prononcer, sans comprendre.
- Tu viens de te couper, tu es trop distraite pour cuisiner.
Il prit un sopalin et le pressa contre la main de Rose.
- Où tu ranges les pansements ?
- Dans la salle de bains.
- Ok, je vais en chercher. Tu as du désinfectant ?
- Oui, regarde dans le placard au-dessus du miroir.
Quelques minutes plus tard, il revint avec de quoi soigner la jeune fille.
- Tu sais, je peux me soigner toute seule, lui dit-elle.
- C’est ta main que tu viens de couper. A moins que tu possèdes une troisième main, quelqu’un doit te soigner. Et il n’y a que toi et moi ici.
Il enleva le sopalin et appliqua le désinfectant sur la coupure avant de mettre le pansement.
- Et voilà, c’est soigné !
- Merci ! Tu devrais faire médecine !
- On va dire que j’aide les gens à ma manière. C’est plus intéressant que médecine. Bon, c’est moi qui vais faire la cuisine.
Steven commença à s’affairer dans la cuisine, alors que Rose était assise au comptoir.
- Alors, tu vas enfin me dire ton grand secret ?
- Si tu penses que j’ai des pouvoirs, c’est non. Je n’ai pas de pouvoirs, et je ne sais pas d’où me vient cette intuition surdéveloppée.
- Alors tu ne sais vraiment pas d’où ça te vient ?
- Non, j’ai toujours été comme ça.
- Et ces gens ? Tu les connaissais, n’est-ce pas ?
- Oui. En fait, je ne viens pas de San Francisco. J’ai été élevée dans un village dans la Sierra Nevada.
- Ah ok. Mais je ne comprends pas le rapport avec ces hommes…
- Le village dans lequel je vivais était un peu spécial. C’était perdu dans le mont Withney. Personne ne connaît ce village à part ses habitants, et maintenant toi. Ce sont eux qui gèrent le village.
- Tient, ça y est, c’est près, l’interrompit Steven en déposant deux assiettes sur le comptoir.
Il s’installa à côté d’elle.
- Qu’est-ce qu’il a de si spécial, ce village ? D’ailleurs, comment il s’appelle ?
- Innominabilis. C’est ce qu’on ne peut pas nommer, en français. Ce sont ces hommes qui m’ont retrouvée dans la forêt quand j’étais bébé. J’étais la seule comme ça. Les autres sont orphelins aussi, mais ils se sont eux qui sont allés les chercher dans les orphelinats.
- Alors tu es orpheline ?
- J’aimerais pouvoir te répondre, mais je ne sais pas. Je ne sais pas d’où je viens.