Le Corbeau. Saison 1

Chapitre 9 : IX Bran

2085 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 10/11/2016 02:00

CHAPITRE IX : BRAN

 

Chun était allé cherché de quoi manger au village que l’on apercevait en contrebas. Elle en profita pour essayer de découvrir où ils se trouvaient. Ils s’étaient matérialisés à peine deux heures plus tôt dans le parc d’une grande maison, presque un manoir. La propriété était entourée d’un grand mur lui-même encerclé de montagnes couvertes de neiges. Le nom du village, Tal-les-Cimes, ne lui apprit rien et elle ne vit aucune voiture pour lui dire dans quel département elle se trouvait. Elle n’osa pas demander plus de renseignement aux habitants qui déjà la regardaient étrangement. Il ne devait jamais avoir vu d’asiatique de leur vie ! L’épicière lui posa des questions sur quand elle était arrivée et d’où elle venait. Chun fit comme lui avait dit Pierrick et resta vague. « Il y a peu de temps » et « de loin » furent ses seules réponses. Le plus étranges fut la devise utilisée dans ce village : des pièces de bronze, d’argent et d’or. Pierrick lui en avait fourni une pleine bourse en lui demandant de ne pas tout dépenser. Même en se forçant, elle n’aurait jamais pu.

           La remonté vers le manoir fut difficile avec les sacs de courses. Lorsqu’elle arriva à la grille du parc, elle eut l’étrange sensation que les sacs ne pesaient plus rien. Et effectivement, ils flottaient seules dans l’air. Elle n’osa pas les lâcher, ébahie par le phénomène. Elle regarda autour d’elle et vit sur le perron du manoir, Pierrick qui tendait sa baguette vers elle. Elle eut un léger sourire et lâcha les sacs. Ceux-ci flottèrent jusqu’à lui, suivit par Chun.

« C’est vraiment pratique la magie, dit-elle en arrivant à sa hauteur.

-Parfois oui. »

Il fit un geste en désignant la fenêtre de la cuisine et les sacs s’y engouffrèrent.

« Les courses sont entrain de se ranger, dit-il. J’ai nettoyé les quelques pièces dont on se servira. Vous pouvez prendre une douche si vous le désirez. Si vous avez faim, je peux vous préparez quelque chose.

-Je souhaiterais plutôt avoir des réponses.

-Je comprends. Venez. Je vais faire du café et je répondrai à vos questions. »

           Pierrick servit une tasse de café à Chun. Ils étaient assis face à face dans le salon. Pierrick attendait la première question. Pour la première fois depuis des années, il ressentait de l’appréhension.

« Où sommes-nous ?

-A Tal-les-Cimes, c’est dans la Savoie. Mais ne cherchez pas de route carrossable ou même le village sur une carte, il n’y est pas. C’est un village de sorciers. Il existe depuis que certains d’entre nous ont fui l’Inquisition il y a de cela un peu plus de quatre siècles.

-Ce qui explique cette drôle de monnaie.

-C’est l’argent des sorciers.

-Et ce manoir ?

-Il appartient à la famille de ma mère. Il n’y a plus que mon cousin qui vit en Australie. Mais il m’a toujours dit que je pouvais m’y installé quand je veux. Jusqu’à maintenant, je n’y étais venu qu’une fois. Personne ne connaît cet endroit.

-Vous dîtes ça comme-ci vous vouliez rester pour toujours. »

Pierrick resta silencieux. Chun savait qu’elle avait touché un point fatidique.

« Allons-nous rester longtemps ici ?

-Je peux vous ramener à Paris quand vous voulez.

-Et vous ?

-Je ne sais pas. Je dois réfléchir.

-Vous avez un métier, une mission.

-Je ne suis pas le seul chasseur, ils peuvent se débrouiller sans moi. Je ne sais plus si je veux encore me battre.

-Qu’allez-vous faire alors ?

-Je ne sais pas. Excusez-moi, je vais prendre l’air. Quand je reviendrai, je vous ramènerai à Paris. »

           Pierrick sortit, laissant Chun seule. Les pensées se bousculaient dans sa tête. Elle avait pas mal de chose à remettre en ordre dans son esprit. En l’espace de même pas quatre heures, elle avait appris l’existence des sorciers et rencontré un homme au passé plus terrible qu’elle n’aurait pu l’imaginer. Elle ne comprenait pas encore tout mais elle était bien décidée à ne pas l’abandonner. Malgré sa carapace, elle savait que Pierrick avait besoin de quelqu’un à ses côtés. Qu’il avait besoin d’une amie. Elle le connaissait à peine mais se sentait irrémédiablement attiré par l’aura qui entourait cet homme. La brigade criminelle et Jacques se passeraient d’elle quelques temps. Elle ne laisserait pas Pierrick seule dans un moment aussi important. Chun souria. Elle pensait comme-ci ils se connaissaient depuis des années. Et bizarrement, elle en avait l’impression tellement elle se sentait proche du sombre sorcier.

           Le vent glacial fouettait son visage. Une sensation violente et douce à la fois. Il aimait ça. Il ne savait plus quoi faire. Si Chun souhaitait rentrer à Paris, il la ramènerait. Mais ensuite, que ferait-il ? Il avait besoin d’elle. Durant les dernières années, depuis la mort de ses parents et de Su, il s’était convaincu du contraire. Qu’il n’avait besoin de personne. Il se trompait. Mais pourquoi elle ? Pourquoi cette moldue qui n’aurait jamais dû découvrir l’existence du monde des sorciers ? Est-ce parce qu’elle lui ressemblait tellement ? Non, leurs âmes sont différentes. Il ne comprenait pas. Trop de questions, mais pas de réponses. Il avait toujours pensé qu’être dans les Chasseurs lui simplifierait la vie. Des ennemis à arrêter ou éliminer. Simple, et pourtant si complexe. Tout n’était pas noir ou blanc, tout était gris. Certains étaient plus sombres que d’autres. Lui-même était plus sombre que beaucoup de mangemorts. Etait-il pire qu’eux ? Plus proche de l’Enfer ? Mais alors pourquoi se battre contre eux et pas avec ? Non. Ses parents, Su, ils étaient morts à cause des mangemorts. S’ils n’avaient pas existé, ils vivraient encore, heureux. Il serait marié avec sa perle de porcelaine et peut-être même aurait-il un enfant. Mais à cause des mangemorts, il perdit ce futur. A cause des mangemorts, il avait tué les soldats moldus. A cause des mangemorts, il voulait se battre et tous les mettre hors d’état de nuire. Mais maintenant, il n’en était plus sûr.

 

           Franck chercha durant plusieurs heures, presque une journée sans se reposer. Le soleil était déjà couché depuis longtemps. Il sentait ses yeux se fermer et devait lutter pour les maintenir ouvert. Cela faisait plus de vingt-quatre heures qu’il n’avait pas dormi plus d’une heure et qu’il travaillait intensément. Il avait consulté de nombreux ouvrages sans rien trouver sur ce Grimoire de Malchauzen. Il en était arrivé à se demander s’il existait vraiment. Etait-ce bien ça que recherchait Malgéus ? Ou n’était-ce qu’une fausse piste ? Franck avait bien sûr pensé à la possibilité que Malgéus avait donné de fausses informations à Zifon pour les dérouter au cas où il serait capturé.

           Il ne trouverai rien dans ce livre. Il le referma et alla le reposer à sa place dans les rayonnages de la bibliothèque ministérielle. Il regarda attentivement la tranche de plusieurs livres et en prit un dont le titre était : « Les pouvoirs des Ténèbres ». Il s’assit à sa table. Quelqu’un déposa une tasse de café devant lui. Franck releva la tête et vit Jonas.

« Tu devrais te reposer, dit Jonas.

-Il faut que je trouve de quoi traite ce grimoire.

-Si tu ne peux même plus réfléchir, tu ne vas pas nous servir à grand-chose.

-Ne t’en fait pas, je suis encore plus capable que toi d’analyser une situation aussi complexe.

-Je n’en doute pas.

-Des nouvelles ?

-J’ai fouiné, rien. Je n’ai rien trouvé sur ce grimoire. A croire qu’il n’a jamais existé.

-Et Pierrick ?

-Pas de nouvelles. Mais je ne m’inquiète pas pour lui. Il a dû recevoir mon message et sait donc ce qu’ils cherchent.

-Et cette moldue ?

-Je ne sais pas. Je ne comprends pas et connaissant Pierrick, il ne nous donnera aucune explication.

-Tu devrais rentrer, ta femme t’attend sûrement.

-Je l’ais appelé pour lui dire que je ne rentrais pas ce soir. Je vais t’aider. Ce n’est pas ma spé mais je sais tourner de pages et lire.

-Je n’en doute pas, ria Franck. Prend un livre dans le rayon magie noire à la lettre B.

-T’es rendu que là ?

-Il y a beaucoup d’ouvrages et ils sont énormes.

-Je vois. Au boulot. »

           Aux alentour de deux heures du matin, vaincu par la fatigue, les deux chasseurs décidèrent d’aller dormir. Mais à six heures à peine, ils se remirent au travail. Pour les aider, Fabre avait désigné trois autres membres de la section IRIA. Ils passèrent des heures à feuilleter des tonnes de pages jaunis par le temps. Ils devaient trouver, la survie du monde des sorciers et sûrement celle de celui des moldus en dépendait.

           Et Pierrick n’était toujours pas réapparut…

 

           Chun et Pierrick passèrent la journée à se promener dans la campagne blanche autour du manoir. Ils ne parlaient plus de rentrer. Pierrick expliquait à Chun le monde des sorciers. Et elle, lui racontait quelques épisodes de sa vie. Elle réussit même l’exploit de faire apparaître un léger sourire sur son visage. Cela le surprit, depuis des années il n’avait pas souri. Quel étrange pouvoir cette jeune femme possédait ? Etait-elle sorcière pour réussir à apaiser son cœur ?

           Ils ne rentrèrent qu’en fin d’après-midi. Un croassement attira l’attention des deux jeunes gens. Pierrick leva le bras et le corbeau vint se poser dessus. Chun eut un mouvement de recul mais Pierrick la rassura.

« Il s’appelle Bran. Il a été ma seule compagnie depuis mon retour en France.

-Vous l’avez appelé Bran. Est-ce que ce nom signifie quelque chose ?

-Je ne l’ai pas appelé ainsi. »

Chun pensa que quelqu’un avait donné l’oiseau à Pierrick mais ne demanda pas. Le corbeau tenait un rouleau de parchemin. Pierrick le prit et l’oiseau alla se poser sur la branche d’un arbre du parc.

           Pierrick déroula le parchemin. Il reconnut l’écriture de Jonas. Le message disait qu’ils avaient découvert ce que recherchait Malgéus : le Grimoire de Malchauzen. Il disait également que Janis souhaitait vivement des explications concernant la policière moldue et avoir des nouvelles au plus vite.

« Bonnes nouvelles ? questionna Chun. »

Pierrick ne répondit pas. Il ne savait pas ce qu’il devait faire. Il rangea le parchemin dans sa poche et prétextant qu’il allait préparer le dîner, disparut dans la cuisine. Chun resta quelques minutes dans le parc. Elle regarda Bran qui la regardait également. Elle sentait que le regard du corbeau la sonder. Cet oiseau n’était pas normal. Mais depuis hier, elle avait appris à ne plus s’en étonner. Elle rentra pour prendre une douche afin de se réchauffer et se décrasser avant le dîner.

 

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