Promesse de sang

Chapitre 91

1126 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 03/01/2023 20:35

Severus déglutit nerveusement et il dut se faire violence pour ne pas prendre la fuite et esquiver la question posée par Drago.

Il pinça les lèvres, trop déstabilisé pour masquer complètement sa peine. Il se tourna à demi pour ne pas faire face aux deux adolescents, laissant son regard se perdre dans le vide, plongeant dans un passé bien trop douloureux.

— Avant d'arriver à Poudlard, j'avais une amie. Ma toute première amie. Nous nous étions juré que rien ne pourrait nous séparer, même pas nos maisons.

Severus haussa les épaules, comme si son récit n'était pas si important. Il reprit, d'un ton neutre et froid, dénué de sentiments.

— J'ai été réparti à Serpentard et mon amie… Elle était une Gryffondor.

Il nota la tension soudaine dans la posture de Harry, mais il ne tourna pas le regard vers lui. Il se demandait à quel instant le jeune homme comprendrait réellement ce qu'il était en train de dire. À quel moment il relierait les points entre chaque élément.

Il reprit doucement.

— Au début, nous y avons cru. Je n'avais pas d'amis dans ma propre maison, parce que j'étais un sang-mêlé et parce que j'étais pauvre. Serpentard, malgré ses qualités indéniables, a toujours été une maison très élitiste. Beaucoup pensaient que je ne méritais pas l'honneur d'être chez les verts et argent, malgré mes notes excellentes. J'avoue que je m'en moquais un peu. Je restais avec ma… mon amie. Certains Gryffondor n'étaient pas ravis de notre proximité et ils ont fait en sorte de me le faire payer.

Severus déglutit, alors que tant de souvenirs revenaient à son esprit. Il reprit, essayant d'oublier l'amertume familière pour se concentrer sur le présent, en se rappelant qu'ils étaient tous morts.

— Notre amitié a tenu quelques années, mais ces… mais tout a été gâché. Après une énième humiliation, j'ai prononcé des paroles… des paroles ignobles, que je regretterai toute ma vie et je l'ai perdue.

Harry murmura, d'une voix rauque, l'interrompant presque sèchement.

— Si elle était vraiment votre amie, elle aurait compris. Elle vous aurait pardonné.

Severus se tendit, écarquilla les yeux sous le choc des mots durs de Harry, puis il secoua la tête.

— Ce… Ce n'était pas sa faute. Vraiment. J'ai…

Harry intervint une fois encore, haussant les épaules, refusant de céder.

— Entre amis, on se pardonne. J'ai pardonné à Ron quand il s'est montré stupide, lors du tournoi des trois sorciers. Parce qu'il est mon ami, et que je savais qu'il ne pensait pas réellement toutes les choses blessantes qu'il a pu me dire. Si elle était votre amie, elle aurait su, elle aussi. Elle aurait attendu vos excuses et tout serait redevenu comme avant.

Drago attrapa l'épaule de Harry et la serra légèrement, son regard naviguant de Severus à Harry. Le maître des potions ferma les yeux, comprenant que Drago avait deviné ce qu'il essayait d'avouer. Il reprit d'une voix étranglée, ignorant les commentaires de Harry. Les commentaires du fils de Lily.

— Peu importe. J'étais seul alors j'ai imaginé que rejoindre les Mangemorts me permettrait de… m'intégrer. Je pensais que je pourrais me venger. Tuer mon père a été… moins libérateur que je le pensais. Cependant, j'ai compris mon erreur à l'instant où j'ai découvert que… la jeune femme que j'aimais le plus au monde était une cible.

Harry haleta et il se pencha vers Severus, à peine retenu par Drago. Le visage contracté du Serpentard était une bonne indication de son état d'esprit, alors qu'il attendait le moment où son compagnon prendrait conscience de ce que leur professeur était en train de réellement leur dire.

— Elle a été blessée ?

Severus soupira.

— Elle a été tuée. Par ma faute. De tous mes péchés, c'est probablement le pire…

Il y eut un long silence. Harry se mordillait la lèvre, un peu nerveusement. Il soupira et secoua la tête.

— Donc vous me détestez parce que vous pensez que sans mon père et ses amis vous auriez pu rester ami avec cette femme ? Elle ne serait pas morte ?

Severus blêmit et vacilla. Il avait pensé être suffisamment explicite pour ne pas avoir à donner plus de détails, mais visiblement, Harry avait fait fausse route. Il cherchait frénétiquement ce qu'il pourrait dire pour s'expliquer. Il secoua la tête, mais Drago intervint avec un ton colérique, fusillant leur professeur du regard.

— Oh par pitié, Potter ! Ne me dis pas que tu n'as pas compris ! Tu ne peux pas être aussi aveugle !

Severus recula d'un pas, blême. Harry fronça les sourcils et son regard passa de son professeur à Drago. Ce dernier serra les poings et grogna.

— Ce n'était pas que les humiliations, n'est-ce pas professeur ? Le véritable problème avec le père de Harry, c'est qu'il vous a volé la femme que vous convoitiez ?

Harry cligna des yeux, surpris.

— L'amie dont vous parlez…

Severus l'interrompit brutalement, le visage fermé. Il s'attendait au rejet et au dégout, le pire étant qu'il comprendrait parfaitement le garçon s'il le repoussait violemment.

— Elle s'appelait Lily Evans. Oui.

Harry se perdit dans ses pensées, longuement. Son visage habituellement si ouvert était fermé et dépourvu de la moindre émotion, cachant ce qu'il ressentait. Drago fusilla Rogue du regard, les poings serrés, tandis que ce dernier détournait les yeux, se sentant terriblement faible et vulnérable face aux deux adolescents.

Après quelques instants, Harry soupira tristement.

— Je comprends pourquoi vous en voulez tant à mon père…

Drago hoqueta et attira Harry dans une étreinte féroce. Ce dernier s'agrippa à lui et l'enlaça, plongeant son visage dans son cou. Lorsque Severus le vit murmurer quelques mots à l'oreille de Drago, il se détourna, le cœur au bord des lèvres, comprenant qu'il était de trop. Les deux jeunes hommes n'avaient pas besoin de lui, ils étaient présents l'un pour l'autre.

Déglutissant, il avança vers la porte d'entrée, les oreilles bourdonnant, avec la désagréable sensation d'étouffer. Une fois encore, il avait échoué et il avait brisé la promesse qu'il avait faite à sa chère Lily une fois de plus. Il abandonnait son fils.

Alors qu'il posait la main sur la poignée de la porte, Harry le rappela.

— Professeur ? Vous partez ?

Severus ferma les yeux, troublé, puis il secoua la tête.

— Je pensais que vous préféreriez que je parte. Je n'ai pas besoin d'être dans vos pattes, il me suffit de savoir que vous serez prudents.

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