Secrets de Serpentard : La noble famille Black

Chapitre 12 : Une rentrée mémorable

4594 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 02/07/2022 10:57

Les premières heures que Narcissa passa à Poudlard se passèrent tout à fait normalement. Dans le Poudlard Express, elle ne vit pas le temps passer, émerveillée par l'effervescence qui y régnait, par les banquettes moelleuses et confortables, et par la vendeuse de bonbons attentionnée qui leur offrit quelques friandises. Daisy Goyle et elle s'installèrent ensemble dans un compartiment, et rattrapèrent le temps perdu en se racontant les deux années qu'elles avaient vécues séparément. Narcissa fut surprise – et, malgré elle, quelque peu soulagée – d'entendre qu'après leur départ, Daisy s'était beaucoup ennuyée sur la Colline d'Émeraude. Elle restait parfois avec Carla, mais sa compagnie était nettement moins agréable que celle de Narcissa ; elle passait donc le plus clair de son temps avec ses parents, à s'occuper des animaux magiques qui peuplaient leur jardin, et même si cette activité n'était pas désagréable, Narcissa lui avait tout de même beaucoup manqué.

Les deux amis se remémorèrent en riant les aventures qu'elles avaient vécues ensemble dans le fabuleux jardin des Goyle – la fois où Daisy était tombée dans un des trois étangs en voulant nourrir les Ronflaks, celle où une licorne avait confondu les cheveux de Narcissa avec de la paille comestible... Puis, Narcissa raconta à Daisy la méchanceté de la tante Walburga, fit l'éloge de son cousin Sirius, imita Arantius avec sa voix bizarre, et plus elle parlait de ce qu'elle avait vécu au 12, square Grimmaurd, plus elle se sentait soulagée d'avoir abandonné cette horrible maison.

À leur arrivée, Andromeda les guida jusqu'à Ogg, le garde-chasse, qui les emmena avec les autres première année au bord du lac. Là, vêtues de leurs robes de sorcière flambant neuves, Narcissa et Daisy montèrent dans une petite barque, avec deux autres élèves à qui elles n'accordèrent pas un regard, toutes à leur joie de se retrouver. Lorsque la barque quitta le rivage, Narcissa et Daisy se serrèrent l'une contre l'autre en poussant des gloussements d'excitation, et lorsque le château de Poudlard se découpa dans le ciel nocturne, dressé au-dessus de la colline, Narcissa se sentit libérée d'un énorme poids, enveloppée par une euphorie inexprimable. Le château était exactement comme elle l'avait imaginé lorsque sa sœur Andromeda le lui avait décrit : superbe, chaleureux, accueillant. Dans ce château aux innombrables fenêtres, aucun malheur ne pourrait lui arriver, Narcissa en était persuadée.

La cérémonie de répartition se déroula également sans encombre : le Choixpeau avait à peine effleuré ses cheveux blonds que le nom de Serpentard résonna dans toute la Grande Salle. Narcissa alla donc joyeusement s'asseoir à la table de sa nouvelle maison, accueillie par un tonnerre d'applaudissements.

Elle s'installa à côté d'Andromeda, et Daisy les rejoignit quelques minutes plus tard. Le banquet fut somptueux, et le Baron Sanglant – le fantôme attitré des Serpentard – vint la féliciter en personne, ravi de compter une Black de plus dans sa maison. La seule chose qui contraria Narcissa fut la présence de Carla Avery en face d'elle, ainsi que celle d'une de ses anciennes connaissances, Juliet Selwyn – une jolie petite fille blonde qui habitait une maison en forme de harpe sur la Colline d'Émeraude, mais qui, à l'époque, ne voulait jamais jouer avec Daisy et Narcissa car elle trouvait leurs jeux trop enfantins, les animaux trop répugnants, et préférait prendre le thé avec les adultes. Carla et Juliet avaient l'air de s'entendre à merveille, et faisaient de nombreuses réflexions dégoûtées à propos de la nourriture, que Narcissa essayait d'ignorer tant bien que mal.

En regardant autour d'elle, Narcissa réalisa avec soulagement qu'elle reconnaissait la majorité des élèves présents à la table des Serpentard. La petite bande de Bellatrix en occupait une bonne partie : elle reconnut Corban Yaxley, un grand blond au sourire mauvais, dont les traits grossiers semblaient taillés dans un bloc de pierre ; Rabastan et Rodolphus Lestrange, deux frères trapus aux cheveux noirs comme du charbon ; Amycus Carrow, un garçon massif au regard oblique, et sa sœur Alecto Carrow, qui lui ressemblait de façon terrifiante, avec des cheveux filasses qui lui tombaient devant les yeux ; Thorfinn Rowle, un autre blond à la gigantesque carrure ; et encore d'autres élèves, à l'allure tout aussi peu recommandable. Ensemble, ils faisaient plus de bruit que le reste de la salle, et Bellatrix n'y était pas pour rien : elle parlait bien plus fort que d'habitude, et riait de façon exagérée.

Plus près d'elle, Narcissa reconnut Edgar Goyle, le grand frère de Daisy, qui s'empiffrait de tarte à la mélasse. En face de lui, siégeaient les deux jumeaux Crabbe, Hector et Rascus, encore plus imposants et patibulaires que dans son souvenir. Tous deux encadraient un garçon pâle, au menton pointu et aux yeux gris clair, dont les cheveux étaient d'un blond presque translucide. Narcissa s'attarda un peu sur lui : c'était un des seuls qu'elle ne connaissait pas. Il lui parut bien plus distingué que ses voisins, et malgré son jeune âge, il dégageait une assurance étonnante. En effet, alors que l'écrasante majorité des élèves assis à la table des Serpentard huaient et sifflaient tous ceux qui étaient répartis dans les autres maisons, et plus particulièrement à Gryffondor, le garçon blond se contentait de les suivre du regard avec le plus grand mépris, sans bouger le petit doigt. L'autre chose qui intriguait Narcissa était l'attitude des jumeaux Crabbe à son égard : tous les deux lui obéissaient sagement, remplissaient son verre et le servaient maladroitement en nourriture, ce qui ne concordait pas vraiment avec leurs habitudes de brutes épaisses.

– Qui est-ce ? demanda-t-elle à Andromeda en désignant le garçon aussi discrètement que possible.

– Il s'appelle Lucius Malefoy, répondit Andromeda à voix basse. Il est en deuxième année, et...

– Il est très intelligent, la coupa Carla Avery. Apparemment, c'est grâce à lui que Serpentard a gagné la Coupe des Quatre Maisons l'an dernier. Il paraît qu'il a raflé un nombre de points considérable.

– Oui, je crois que tous les professeurs l'adorent, renchérit Juliet en entortillant une mèche de ses cheveux blonds autour de son doigt. Mes parents disent que c'est un bon parti...

– À part ça, il prend tout le monde de haut, répliqua Andromeda, un peu pincée. Et il n'est pas très sympathique.

– Moi, je le trouve plutôt mignon, roucoula Daisy en parlant légèrement trop fort. Il paraît aussi qu'il est très riche...

– Qui te l'a dit ? demanda Narcissa, un peu trop vivement.

– Mes parents. D'après eux, son père, Abraxas Malefoy, est sans aucun doute l'homme le plus puissant du monde sorcier... Même Nobby Leach, le Ministre, en aurait peur !

Lucius Malefoy, qui observait l'ensemble des élèves avec flegme, posa son regard sur elles, et les cinq filles piquèrent du nez dans leur assiette.

– Cissy, il t'a regardée ! pouffa Daisy.

– N'importe quoi, bougonna Juliet Selwyn en face d'elles.

Narcissa sentit que ses joues prenaient une couleur cerise, et fut prise d'une passion soudaine pour le gâteau de riz qui se trouvait devant elle.

Les choses commencèrent à aller de travers alors que Dumbledore s'apprêtait à faire son discours de bienvenue. Un petit homme vêtu de noir, aux jambes anormalement courtes, fit irruption dans la salle par la porte latérale, et trottina jusqu'à Dumbledore. Il lui parla longuement à l'oreille, et le visage de Dumbledore s'assombrit au fur et à mesure de leur échange.

– Nous ferons ce qui est nécessaire, assura Dumbledore lorsque l'homme eut terminé.

Dumbledore murmura quelques mots à sa voisine, Minerva McGonagall, dont les traits joyeux se transformèrent brutalement. Avec une mine soucieuse et consternée, elle posa son regard sur l'extrémité de la table de Serpentard, où Bellatrix et ses amis s'amusaient à lancer des bouts de nourriture sur les première année des autres maisons.

Narcissa, inquiète, vit le professeur McGonagall se lever, et marcher droit vers leur table. Elle passa à côté de Narcissa, Daisy et Andromeda, sans leur accorder le moindre regard, et s'arrêta au niveau de Bellatrix et de sa petite bande.

– Miss Bellatrix Black, veuillez me suivre, dit le professeur McGonagall d'une voix glaciale.

Dans la Grande Salle, le silence s'installa progressivement.

– Pourquoi ? rétorqua Bellatrix.

– À moins que vous ne souhaitiez que je vous fasse l'annonce devant tout le monde ?

– Quelle annonce ? demanda Bellatrix avec un air de défi.

– Ouais, quelle annonce ? renchérit Corban Yaxley à côté d'elle.

– Bellatrix reste avec nous, déclara Rodolphus Lestrange en mettant sa main sur l'épaule de celle-ci. Si vous avez quelque chose à lui dire, dites-le-lui maintenant.

Mc Gonagall fixa un par un les comparses de Bellatrix, qui se massaient autour d'elle en signe de soutien.

– Je vois que votre impertinence ne s'est pas améliorée avec la saison estivale, jeunes gens. Il en coûtera cinq points à Serpentard, pour chacun de vous. Et surveillez vos manières, si vous voulez finir l'année entre ces murs. Me suis-je bien fait comprendre ?

Sans attendre de réponse, elle reporta son attention sur Bellatrix.

– Quant à vous, miss Black, je vous informe que vous avez été aperçue par un Auror, le 10 août dernier, seule dans l'Allée des Embrumes. Après une enquête du Ministère, il semblerait que vous ayez vendu un objet d'une rare dangerosité à une certaine boutique, déjà connue pour ses activités illicites. Nous allons donc procéder à une fouille complète de vos bagages, et je vais vous demander de me remettre votre baguette, afin que nous puissions l'étudier et y rechercher des traces de magie noire.

Narcissa et Andromeda échangèrent un regard catastrophé. Bellatrix avait passé l'été à essayer des sortilèges de magie noire dans leur chambre, se croyant abritée de la surveillance du Ministère par les sortilèges de Protection installés par Orion. Et pour arranger le tout, sa valise contenait deux amulettes ensorcelées, qu'elle avait piquées à leur oncle pour frimer auprès de ses amis. Elle ne comptait pas s'en servir, mais Dumbledore ne ferait certainement aucune différence.

McGonagall tendit la main, afin de récupérer la baguette de Bellatrix.

– Combien... Combien de temps... articula Bellatrix, qui avait le plus grand mal à se séparer de sa baguette.

– Le temps qu'il faudra, déclara McGonagall en lui arrachant des mains. Bien entendu, il est évident que, le temps de cette enquête, vous ne pourrez pas continuer à assurer le poste de préfète.

McGonagall pointa sa baguette sur la poitrine de Bellatrix. Le superbe insigne brillant en forme de P se détacha de son uniforme de Poudlard, et atterrit docilement dans la main du professeur McGonagall.

– Vous pourrez assister aux cours, mais votre baguette ne vous sera rendue que lorsque l'analyse sera terminée. Et estimez-vous heureuse que le Ministère n'engage pas de poursuites à votre encontre... Il semblerait d'ailleurs que votre père y soit pour quelque chose.

Un concert de protestations accueillit toutes ces nouvelles. Sans s'en soucier, McGonagall tourna les talons et s'éloigna.

– Vieille chouette, marmonna Corban Yaxley.

McGonagall se retourna pour lui lancer un regard cuisant.

– Yaxley, vous viendrez en retenue demain matin, dans mon bureau, huit heures. Je trouverai bien une corvée pour vous. À demain, donc.

À la fin du banquet, les autres préfets de Serpentard eurent le plus grand mal à acheminer les élèves de leur maison vers les dortoirs, car la bande de Bellatrix ne faisait qu'à sa tête, et les autres élèves n'étaient absolument pas d'humeur à aller se coucher.

Au bout d'un moment, les préfets décidèrent d'accompagner rapidement les plus jeunes qui sommeillaient dans leur coin, pour revenir ensuite chercher les autres élèves de leur maison, moins disciplinés. Dès que les préfets furent partis, Bellatrix se leva, pâle comme un linge, et sortit de la Grande Salle à grands pas.

– Bellatrix, où vas-tu ?

– Reste avec nous, Bella ! la suppliaient ses amis.

Tous la suivirent, et ses deux sœurs les imitèrent, un peu inquiètes.

Bellatrix errait dans les couloirs, sans but, pâle comme un linge. Elle tremblait de tous ses membres. Ses amis et ses sœurs la talonnaient et tentaient de la rassurer, de diverses manières.

– On va pas les laisser faire, t'en fais pas, lui assura Rodolphus Lestrange.

– Papa saura sûrement faire quelque chose, renchérit Andromeda. Je suis sûre que tout va s'arranger.

Un bruit de conversation attira l'attention de Narcissa. Au bout du couloir, une fille et un garçon, probablement en sixième ou septième année, discutaient joyeusement.

– Ce petit Macmillan me rendra fou, riait le garçon, un grand dadais à lunettes, aux cheveux roux flamboyants.

Son amie, bien plus petite que lui, mais avec des cheveux de la même couleur carotte, acquiesça avec entrain.

– Tous les ans, il se perd dans les couloirs !

– Heureusement qu'on l'a retrouvé avant qu'il ne se fasse attraper par Picott...

– C'est toi qui l'a retrouvé, Arthur, roucoula la fille.

Narcissa tira la manche d'Andromeda.

– Qui est-ce ?

Andromeda se retourna, et fronça les sourcils.

– Ce sont des amis de Bellatrix ?

– Oh non, certainement pas, dit Andromeda. Ce sont deux préfets de Gryffondor, Molly Prewett et Arthur Weasley...

Narcissa continua de les observer, intriguée, et constata que tous les deux avaient l'air parfaitement heureux d'être ensemble, et formaient un couple très harmonieux. Elle songea, avec un léger malaise, que ses parents ne s'étaient jamais parlé avec une telle chaleur, et n'avaient jamais manifesté une telle attirance mutuelle.

– Heureusement que tu étais là, dit Arthur Weasley à Molly Prewett. Je ne me souviens jamais si le mot de passe est Canari boiteux ou Patate sauteuse. Les Moldus doivent avoir des astuces pour se souvenir de ces choses-là, je vais me renseigner...

Lorsqu'ils s'approchèrent de Narcissa, la dénommée Molly la salua gentiment, et Narcissa réalisa que le petit groupe qui suivait Bellatrix s'était un peu éloigné, et qu'elle se trouvait seule au milieu du couloir.

– Eh bien, tu t'es perdue ? Je m'appelle Molly. Dans quelle maison es-tu ?

Sans répondre, Narcissa se tourna vers le petit groupe de Serpentard, qui était à quelques dizaines de mètres.

– Tu ne devrais pas suivre ces gens-là, ils ne sont pas...

– ÉLOIGNE-TOI DE MA SŒUR, LA ROUQUINE !

Molly sursauta, et s'écarta de Narcissa. Un peu plus loin, Bellatrix était sortie de sa torpeur, et venait de rugir sur Molly Prewett, écartant ses amis pour fondre sur elle à grands pas.

– Viens, Molly, partons, dit Arthur Weasley, soudain inquiet.

Et soudain, tout s'accéléra. Bellatrix pris la baguette de son voisin, Thorfinn Rowle, et la pointa sur Molly Prewett, qui leva les mains en signe d'apaisement.

– Du calme, dit celle-ci, tandis qu'Arthur Weasley s'interposait. Je ne voulais pas...

– TAIS-TOI !

– Bella, on s'en va, supplia Narcissa en essayant de lui prendre la main.

Bellatrix était dans un état de grande détresse. Sa poitrine se soulevait et s'abaissait à toute vitesse, et ses yeux exorbités allaient d'Arthur Weasley à Molly Prewett, comme si elle réfléchissait auquel des deux elle allait tuer en premier.

– Bella...

CORPUS FATALIA ! hurla Bellatrix en direction de Molly Prewett.

Une boule noire jaillit à l'extrémité de sa baguette, et atteignit Molly Prewett en pleine poitrine. Il y eut un moment de flottement, pendant lequel tout le monde eut les yeux rivés sur Molly. À l'endroit où le sortilège l'avait touchée, une tache noire venait de naître, et s'élargissait sur sa peau à une vitesse invraisemblable. Molly Prewett s'effondra sur le sol, et Arthur Weasley se mit à crier :

– Molly ! MOLLY ! AU SECOURS !

Plusieurs professeurs accoururent en même temps. Le Professeur McGonagall se pencha sur Molly Prewett, et prononça plusieurs formulent qui stoppèrent la progression de la tache obscure.

– Il faut l'emmener à Sainte-Mangouste, de toute urgence, dit-elle d'une voix sourde.

Arthur Weasley semblait sur le point de défaillir, et McGonagall l'autorisa à les accompagner à Sainte-Mangouste. Dumbledore décida de s'entretenir immédiatement avec Bellatrix, et au vu des frémissements de colère qui parcouraient sa barbe argentée, ça n'était certainement pas une bonne nouvelle. Le reste des professeurs encercla le petit groupe de Serpentard, et les somma de regagner immédiatement leur dortoir.

Les élèves, encore sous le choc, regardèrent Bellatrix s'éloigner avec un mélange de crainte et d'admiration.

– Elle a appris ça où ? demanda Rodolphus Lestrange à Andromeda, visiblement envieux.

– Balèze, dis donc, renchérit Rabastan Lestrange, son petit frère.

– Elle l'a bien calmée, la rouquine !

– Tais-toi, Yaxley, on va t'entendre !

Ils regagnèrent leur salle commune, escortés par le professeur Slughorn, qui conseilla vivement aux jeunes Serpentard de rester dans leurs dortoirs – contrairement à leurs habitudes. Ils franchirent une porte de pierre découpée dans un mur nu et humide, et pénétrèrent dans une longue pièce souterraine aux murs et aux plafonds de pierre brute. Des lampes rondes et verdâtres étaient suspendues à des chaînes et un feu brûlait dans une cheminée au manteau gravé de figures compliquées.

Narcissa et Andromeda se séparèrent du reste du groupe pour rejoindre le dortoir des filles. Elles montèrent un petit escalier en colimaçon, étroit et glissant, et entrèrent dans une grande pièce confortable, remplie de lits à baldaquins tendus de velours vert émeraude. Sur l'un d'eux, Carla Avery et Juliet Selwyn étaient lancées dans une grande discussion dans laquelle il était question de Lucius Malefoy et du fait qu'il avait presque souri à Juliet Selwyn au moment où elle faisait semblant de tomber dans les escaliers pour attirer son attention.

À côté d'elles, Daisy essayait de participer à la conversation, mais Carla et Juliet ne lui laissaient jamais le temps de dire quelque chose.

– Cissy ! s'exclama joyeusement Daisy en les voyant arriver, ravie de se soustraire aux discussions futiles de Carla et Juliet.

Mais son sourire se figea dès qu'elle aperçut les mines défaites d'Andromeda et de Narcissa.

– Oh... Tout va bien, les filles ? Où est Bellatrix ?

Au bord des larmes, Narcissa lui raconta ce qu'il venait de se passer. Daisy et Andromeda aidèrent Narcissa à ranger ses affaires, et elles s'installèrent autour d'elle sur son lit, en déployant des efforts considérables pour la rassurer. Elles veillèrent jusque tard dans la nuit pour attendre Bellatrix, qui rentra dans le dortoir vers deux heures du matin. Elle ressemblait à un fantôme, complètement abattue.

– Cette fois, c'est fichu, dit Bellatrix en s'asseyant mécaniquement entre ses deux sœurs. Je suis renvoyée. C'est fini.

Le lendemain, Dumbledore réunit tous les élèves dans la Grande Salle, afin de les informer de sa décision. Il commença par annoncer que Molly Prewett était tirée d'affaire, ce qui provoqua des soupirs de soulagement bien au-delà de la table des Gryffondor, puis il déclara avec gravité :

– Poudlard est une école de tolérance et de savoir-vivre, dans laquelle tous les élèves doivent se sentir en sécurité. Hier, Bellatrix Black a gravement agressé une autre élève, mettant les jours de celle-ci en danger. Ce comportement n'a pas sa place entre ses murs. C'est donc le cœur lourd que j'ordonne son renvoi définitif de Poudlard, ainsi que la destruction de sa baguette.

Il était rare qu'une année à Poudlard commence de façon aussi sinistre. Même Arthur Weasley ne montrait aucune satisfaction de ce qu'il se passait.

Ceux qui souhaitaient dire au revoir à Bellatrix la suivirent jusqu'à la sortie, où Dumbledore lui remit les deux morceaux de sa baguette. Lorsque Bellatrix regarda les deux morceaux de bois, devenus inutiles, des larmes brillèrent aux coins de ses yeux. Narcissa se sentait écrasée par la culpabilité : c'était pour elle que Bellatrix s'était mise en danger, en allant dans l'Allée des Embrumes. C'était à cause d'elle que Bellatrix avait agressé Molly Prewett. C'était à cause d'elle que tout ça arrivait.

– La maison de Serpentard va te regretter, lui souffla Antonin Dolohov, l'un des préfets, un garçon au visage tordu et à la réputation douteuse. On te vengera, un de ces quatre, c'est promis.

Andromeda et Narcissa l'embrassèrent avec effusion, les larmes aux yeux, en la priant de prendre soin d'elle. Mais rien de tout ça ne rendit le sourire à Bellatrix. Elle ne réagit ni aux embrassades, ni aux encouragements, ni aux recommandations, et se contenta de traîner sa valise vers la sortie, comme si elle marchait vers l'échafaud.

Alors qu'elle regardait Bellatrix s'éloigner, Narcissa aperçut Dumbledore se mettre un peu en retrait pour empêcher quelqu'un de rentrer dans l'école.

L'interlocuteur de Dumbledore était un homme que Narcissa n'avait jamais vu, qui devait avoir à peine quarante ans, vêtu élégamment, assez séduisant. Ils étaient loin, mais le silence total qui régnait permettait à Narcissa de distinguer quelques-unes des phrases qu'ils s'échangeaient.

– Tom, tu vois bien que ce n'est pas le moment ! grondait Dumbledore. Tu n'as absolument pas le droit de rentrer dans le château !

– Professeur, je voulais simplement retourner sur les lieux de mon enfance... Rencontrer quelques élèves...

L'inconnu parlait d'une voix doucereuse, que Narcissa trouva assez désagréable.

– Non, Tom. Tu sais pertinemment que les personnes extérieures ne peuvent pas rentrer dans l'école... Et surtout par un jour comme celui-ci.

Dumbledore était très calme, mais dégageait pourtant une autorité impressionnante.

– Je ne vous pensais pas aussi ingrat, professeur... Après tout ce que j'ai fait pour cette école... Je n'en ai pas pour très longtemps, je serai de retour dans un instant...

– Combien de fois devrais-je te le répéter, Tom ? Si tu veux que nous discutions, je t'invite à m'adresser un courrier. Tu ne peux pas te présenter ici, à l'improviste... Et changer de visage n'y remédiera pas. Maintenant, va-t’en, s'il te plaît. Je ne voudrais pas avoir à demander à Picott de te raccompagner vers la sortie.

Narcissa fut distraite de leur querelle par Andromeda qui la tirait par la manche.

– Narcissa, regarde, le professeur Slughorn ! Allons le voir, il pourra sûrement faire quelque chose pour Bellatrix !

– Andromeda, c'est trop tard...

Mais déjà, elle s'élançait avec candeur au-devant du professeur, qui observait la scène avec accablement, assis sur un muret.

– Professeur Slughorn !

Ce dernier leur accorda à peine un regard, dévasté.

– Oui, mademoiselle... Vous êtes ?

– Andromeda Black, mais...

– Ah, oui... Mais malheureusement, vous n'êtes pas aussi douée que votre sœur, ce serait trop beau... Comment vais-je retrouver une prodige pareille ?

Andromeda fit mine de ne pas être vexée.

– Non, justement, je...

– Quel malheur, ce renvoi ! Les élèves comme votre sœur se font rares, vous savez ?

– Justement ! bondit Andromeda. Vous ne pouvez rien faire pour éviter ça ?

– Si seulement ! pesta Slughorn. Ma pauvre petite, si vous saviez comme j'ai plaidé sa cause auprès des autres professeurs ! Une petite entourloupe comme celle-là, ça arrive à tout le monde, non ? Bellatrix a toujours été fragile, ils auraient pu faire preuve de compréhension ! Enfin, il semblerait que la parole de Minerva ait eu plus de poids que la mienne dans cette histoire...

Alors qu'Andromeda s'apprêtait à insister, l'inconnu qui se disputait avec Dumbledore quelques instants plus tôt se présenta devant le professeur Slughorn et éclipsa les deux sœurs Black à sa vue.

– Professeur Slughorn, il faut que vous m'aidiez, déclara-t-il d'une voix rauque.

– Tom ! Quelle bonne surprise ! Tu es dans une forme éblouissante, par rapport à la dernière fois ! Alors, j'ai appris que tu ne travaillais plus chez Barjow et Beurk ? J'en suis ravi, c'était une idée saugrenue... Ah, te voir me console un peu, en ce triste jour...

– Professeur...

– Mais qu'avez-vous tous, aujourd'hui, à venir quémander mon aide ? s'exclama Slughorn, soudain enjoué. Je sais que je suis un professeur influent, mais tout de même...

– Je dois rentrer dans le château, dit l'inconnu. Je dois... Je dois vérifier quelque chose.

En effet, l'homme avait le teint pâle et semblait anxieux.

– J'ai bien peur que ce ne soit pas possible, Tom, dit le professeur Slughorn, embarrassé. Tu sais bien que Dumbledore...

Le dénommé Tom serra les dents, exaspéré.

– J'aurais espéré un peu plus de volonté de votre part, professeur.

– Oh, allons, Tom, tu sais très bien que j'ai tout fait pour convaincre Armando, à l'époque ! Je sais à quel point les élèves de Poudlard auraient profité de ton enseignement. Malheureusement, Dumbledore n'apprécie pas les fortes têtes... Regarde, celle qui s'en va, c'est une de mes meilleures élèves... Quel gâchis...

Tom regarda par-dessus son épaule, et fixa Bellatrix qui traînait rageusement sa valise derrière elle.

– Tiens, mais je l'ai déjà rencontrée... Oui, c'est bien cela, il y a à peine quelques jours, dans l'Allée des Embrumes... Qu'a-t-elle fait ?

– Elle s'est battue avec une autre élève... Avec le sortilège Corpus Fatalia... Sa pauvre adversaire a failli y passer ! Comme c'est malheureux... Tu en connais, toi, des élèves de cinquième année qui maîtrisent des sortilèges d'une telle puissance ? Oh, ma pauvre Bellatrix, elle aurait pu faire des choses fabuleuses... Je ne sais pas pour quel motif elles se sont disputées, mais elle a lancé le sortilège avec tellement de hargne que même le professeur McGonagall a eu du mal à y remédier, et la petite a dû être transportée à Sainte-Mangouste de toute urgence...

– Intéressant, commenta l'inconnu à voix basse. Comment s'appelle-t-elle ?

– Bellatrix Black. Oh, vraiment, cela me désespère de la voir partir. Si vive, si brillante ! J'étais le seul à avoir vraiment conscience de son génie ! Elle me ferait presque penser à toi. Elle t'aurait plu, tu sais, quand tu avais son âge.

L'inconnu continuait de fixer Bellatrix, pensif, jusqu'à ce que Slughorn l'interrompe dans sa réflexion.

– Oh, tiens, Picott arrive par ici... Tu ferais mieux de déguerpir, Tom. Bon courage mon garçon, les temps sont durs pour les sorciers talentueux ! N'hésite pas à me tenir au courant de tes affaires, d'accord ?

Les deux hommes échangèrent une poignée de main furtive, et le dénommé Tom s'éloigna à grandes enjambées. Tout en se dirigeant vers la sortie, il gardait son regard fixé sur Bellatrix qui s'éloignait, la tête basse.

Narcissa et Andromeda avaient écouté toute leur conversation sans qu'ils ne leur accordent la moindre attention.

– Qui est-ce, professeur ? demanda timidement Andromeda, lorsque l'inconnu fut hors de portée de voix.

– Le meilleur élève que j'aie jamais eu, répondit rêveusement le professeur Slughorn. Il s'appelle – oh, il déteste ce nom, mais comment l'appeler autrement ? Il s'appelle Tom Jedusor.


***


J'espère que ce chapitre vous a plu.

Vous devinez peut-être ce qu'il va se passer au prochain chapitre...

Sans surprise, il s'appellera : Tom Jedusor.


À très bientôt pour la suite !

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