Les Amours de Radimir Vynoque

Chapitre 1 : L'arrivée tonitruante d'un affreux jojo en forme de lune

3136 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 09/08/2020 15:53

Mr et Mme Lucard, qui habitaient au 4 rue des Poissons, avaient toujours affirmés avec la plus grande fierté qu’ils étaient parfaitement normaux, merci pour eux. Ils aimaient passionnément leur petite vie bien tranquille, leur calme routine et n’avaient pas de temps à perdre avec des sornettes. Mr Lucard, était professeur d’Histoire à l’université de Lyon. Tous les matins, il partait en chantonnant donner ses cours, pendant que sa femme passait ses journées dans le doux cocon de leur foyer. Oui, les Lucard auraient pu être parfaitement heureux, s’ils avaient habité dans un autre quartier. Ou plutôt, s’ils avaient emménagé à coté d’un autre voisin.


En effet, la seule chose indésirable que les Lucard possédaient, était leur voisin : un certain Radimir Vynoque. Mr Vynoque était un homme imposant, au ventre plus rond que la lune, mais d’assez petite taille. Il portait fièrement une moustache touffue, assortie à ses fins cheveux blancs. La mince paire de lunette qu’il portait constamment, donnait à ses yeux bleus un regard légèrement vitreux, bien qu’intense. Dur d’oreille et très vaniteux, Mr Vynoque avait habitué ses voisins à ses bougonneries quotidiennes depuis de nombreuses années. Mais tout avait changé il y a quelque mois. 


Un beau matin, Mr Lucard avait retrouvé le jardin de son voisin envahi de chouettes et de hiboux. Les rapaces portaient tous une lettre étrange dans leur bec et Radimir Vynoque en avait ouvert une. Il s’était alors mis à danser au milieu de son jardin, faisant fuir les chouettes, comme si le contenu du message contenait une merveilleuse nouvelle. Depuis ce jour, le comportement du vieil homme avait changé du tout au tout. De vieillard grognon, il était devenu un homme joyeux et même excentrique, causant la honte de ses voisins à chaque fois qu’ils le croisaient. Mr Lucard d’abord avait noté avec dépit les changements vestimentaires de son voisin qui ne s’habillait plus qu’avec de longues robes de couleurs bariolées. De son côté, Mme Lucard n’en finissait plus de se plaindre de ce « foutu Vynoque » qui passait des soirées entières à agiter un bout de bois en récitant des incantations saugrenues en latin, comme s’il essayait de jeter des sorts. Comble de la chose, hier, elle avait aperçu le vieil homme rentrer chez lui avec une cage à oiseau immense, contenant un gigantesque hibou. S’en était définitivement trop pour les Lucard qui n’osaient plus inviter leurs amis chez eux. Heureusement, Mr Lucard pouvait se rassurer. Le calvaire était bientôt fini. En effet, la rumeur disait que Radimir Vynoque avait été embauché pour un poste étrange dans une lointaine université en Angleterre. « La rentrée des classes c’est demain. Le Vynoque sera parti demain », se dit Mr Lucard en s’endormant ce soir là, avec un grand sourire aux lèvres.


Dans la maison voisine, malgré l’heure tardive, l’ébullition était à son comble. Radimir, était en train de boucler sa valise après avoir mis sa maison sans dessus-dessous. Il grognait fortement, appuyant son gros ventre de tout son poids sur son sac afin de réussir à le fermer. Une fois cela fait, Vynoque tomba assis sur son lit en poussant un soupir de satisfaction. Il jeta un regard circulaire sur les murs de sa chambre qu’il ne comptait pas revoir de si tôt. Fébrile, il sortit une nouvelle fois de sa poche la lettre dont le papier était tout froissé à force d’être consulté quotidiennement. Radimir relus de nouveau le contenu du message, toujours rempli d’une vive émotion :


« Cher Monsieur Vynoque,

J’ai le plaisir de vous annoncer que vous êtes engagé en tant que Directeur en chef du gouvernement de la maisonnée des Archives et du fonds antiques de l’Ecole de Sorcellerie de Poudlard.

Nous vous invitons à venir rejoindre notre établissement dès la rentrée prochaine.

Nous nous engageons à vous fournir le logis et le repas durant toute la durée de votre séjour, qui je l’espère sera long.

Dans l’attente de votre réponse, je me languis de faire votre connaissance.

Bien à vous,

Albus Dumbledore, Directeur de l’Ecole de Sorcellerie Poudlard »


Radimir rangea la lettre dans la poche de sa veste, le ventre gonflé d’orgueil et de joie. Lui, Radimir Vynoque, avait été admis à un poste prestigieux dans une école de Sorcellerie. Lui qui ne se savait même pas sorcier ! Il empoigna d’ailleurs sa baguette magique fabriquée maison, (parce que figurez-vous que cet incapable d’Ollivander avait refusé de lui en vendre une lui-même !), et entama ses exercices quotidien. Il se contorsionnait en gesticulant pour mieux amplifier le geste de sa main alors qu’il récitait des formules magiques. Il continua son étrange activité pendant de longues minutes, sans s’étonner qu’aucun de ses sorts n’aient d’effets concrets sur la réalité : « Ca c’est à cause de ma baguette défectueuse ! Satané Ollivander ! ». Quand minuit sonna sur sa montre à gousset, Vynoque se laissa retomber une nouvelle fois sur son lit, complètement épuisé cette fois. Il régla son réveil une dernière fois, vérifia l’heure de ses billets de train, embrassa son hiboux (qu’il avait nommé Jacques), enleva sa robe de sorcier violette, et se mis en pyjama. Alors qu’il s’endormait, rempli d’excitation, Radimir ne put s’empêcher de penser une dernière fois : « Directeur en chef du gouvernement de la maisonnée des Archives et du fonds antiques de l’Ecole de Sorcellerie de Poudlard…. Quelle chance ! Si près de la retraite… Et moi qui ne me savait même pas sorcier… ». 



C’est à 9h45 précise que Radimir posa un pied en gare de King Cross. Il poussait vivement devant lui sa chariotte remplie de livres et de ses bagages, bien obligé de constater qu’il était très en retard. Sa robe de sorcier rouge cramoisie, surmontée d’une belle cravate, était déjà trempée de transpiration alors que le Vynoque grognait plus que jamais sous l’effort. Tandis qu’il traversait la gare de son petit pas dandinant, il attirait les regards surpris de tous les londoniens présents. Mais notre cher bonhomme n’en avait cure. Il se trouvait à présent au beau milieu du quai 9 de la gare, et devait bien se rendre à l’évidence : il n’y avait pas de quai 9 ¾. Il tourna un long moment en rond dans la gare, grognant en anglais contre ces incapables de contrôleurs et marmonnant des formules magiques en latin dans sa moustache. Il était bientôt 9h55 quand Vynoque, las, se laissa tomber à même le sol de la gare, toujours fermement accroché à sa chariotte. « Tout est perdu… Je ne trouverais jamais ce satané train ! ».


C’est alors que le regard de Vynoque fut happé par une silhouette masculine qui marchait vivement dos à lui. Il ne savait pas si c’était le dos musclé de l’homme, sa chevelure blonde vénitienne, où alors la chouette en cage qu’il tenait à la main qui avait attiré son attention. Il le suivit des yeux, alors que l’homme se dirigea résolument vers un mur en pierre, fonça dedans au pas de course, et, alors que Radimir s’apprêtait à grogner, disparu dans le mur. Vynoque ouvrit grand la bouche de surprise. Les yeux ronds, il se releva, et s’approcha du mur dans lequel l’homme étrange venait de disparaître. Tout s’éclaira alors dans l’esprit du vieil homme « Mais c’est bien sûr ! C’est un portail magique ! ». Requinqué, il consulta sa montre à gousset. Il était 9h57. Il lui fallait faire vite. Il courut attraper sa chariotte, et la dirigea vers la paroi du quai. Il essuya la sueur qui ruisselait de son front d’un coup de mouchoir, prit une profonde respiration, prit son élan… et se mit à courir. Enfin, courir était un grand mot, son poids l’empêchant de faire autre chose que de petits pas précipités. Alors qu’il se rapprochait terriblement du mur, Vynoque ferma les yeux et continua à avancer, quand….


BAAAAAAAAAM !!!!


Il fallut quelques secondes à Radimir pour reprendre ses esprits. Les yeux toujours fermés, il sentait sa joue reposer sur la pierre froide de ce qui devait être le sol de la gare. La tête lui tournait un peu à cause du choc. Il se sentait étrangement léger. Un courant d’air froid lui frôlait le nombril, et il ne sentait plus sa main droite. Quelque chose n’allait pas. Ce fut quand le cri d’une passagère d’un train accosté au quai 9 parvint aux oreilles de notre Vynoque, que ce dernier ouvrit les yeux et en resta muet d’horreur : il était coincé entre les deux quais. Il semblait en effet que l’imposant ventre de Radimir ainsi que sa chariotte tenue par sa main droite avaient traversé le mur et se trouvaient sur le quai 9 3/4, alors que son autre main, ses jambes et surtout sa tête était toujours dans le monde moldu. Pris de panique, il essaya de se dégager du mur en tirant sur ses jambes. Mais il avait beau tirer, se débattre et grogner, rien n’y faisait.


Alors qu’il commençait à perdre espoir, il sentit deux mains fermes empoigner son ventre. Surpris, il se laissa agripper par ces mains qui le tiraient hors du mur. Il déboucha alors enfin à l’air libre, sur le quai 9 ¾. Ravi de retrouver la totalité de son corps, Radimir se caressa le ventre de contentement. Il leva alors les yeux sur son sauveur, qui n’était personne d’autre que l’homme qu’il avait vu traverser le portail quelque temps plus tôt. Il était, il fallait l’avouer, d’une grande beauté. Ses yeux bleus le regardaient intensément, et si Vynoque n’avait pas été aussi secoué par sa mésaventure, il aurait remarqué le grand trouble dans le regard de ce bel étranger. Celui-ci pris d’ailleurs la parole :


« - Radimir ?, dit-il avec émotion ».


« Ohlala ! Je suis déjà célèbre ! », pensa Radimir absolument ravis ! « Le tout est de lui faire une forte impression dès maintenant ! ».


« - Qu’est-ce que c’est que cette façon de m’appeler par mon prénom monsieur ? scanda Vynoque d’un ton faussement outré. Je ne vous connais ni d’Eve ni d’Adam, et je suis un éminent professeur de cette école ! Je vous prierais donc de vous présentez avant d’oser me parler avec tant de familiarité ! »


L’homme fut si stupéfait par cette intervention qu’il resta silencieux. Vynoque, complètement satisfait de sa prestation, attrapa sa chariotte et se dirigea d’un pas digne vers le Poudlard Express qui était sur le point de partir. Il ne vit pas l’homme le suivre du regard avec émotion dans son dos.

 

« C’est tout bonnement un scandale ! Attendez un peu qu’on arrive à Poudlard ! Ils vont m’entendre ! », marmonnait le Vynoque en poussant sa chariotte dans le train en marche, cherchant désespérément une place libre pour l’accueillir. Il fulminait tant qu’il était incapable de contrôler sa chariotte qui allait taper constamment contre les parois des compartiments, faisant sursauter les élèves. D’ailleurs, un groupe d’élèves s’approcha de Radimir avec des pièces entre les mains :


« - Débarrassez moi le plancher ! leur aboya Vynoque, C’est pas moi qui vend les bonbons ! »


Il passa au travers du groupe d’élèves effrayés et continua son chemin. Il n’arrivait pas à se remettre de l’affront qu’il avait subi. En effet, lorsqu’il s’était présenté à l’entrée du wagon des professeurs de Poudlard, on lui avait tout simplement refusé l’accès sous prétexte qu’il n’était pas inscrit sur la liste des professeurs de l’établissement. « Quelle indignité ! Moi ! Le Directeur en chef du gouvernement de la maisonnée des Archives et du fonds antiques de l’Ecole de Sorcellerie de Poudlard, je ne serais pas inscrit sur cette foutue liste ? Mensonges éhontés ! Ils sont tout simplement jaloux. Je suis persécuté ! Mais ça ne se passera pas comme ça ! Attendez un peu qu’on arrive, ils vont voir ces pignoufs ! ». Il était encore plus furieux qu’il avait aperçu dans le wagon des professeurs, le bel étranger qui l’avait sauvé un peu plus tôt. Il avait décidément beaucoup de mal à sauvegarder sa dignité aujourd’hui.


Il continua à avancer péniblement jusqu’au fond du train, où il trouva enfin une place dans un compartiment déjà occupée par deux jeunes filles, portant toutes deux un collier en forme de papillon. Après s’être faufilé par la porte étroite du compartiment, il déposa sa chariotte prêt de lui, et s’installa devant les deux étudiantes avec forces de gémissements.


« - Oooooooh ! Regardez moi ce brouillard ! constata le Vynoque voulant lancer la conversation avec ses voisines de train. Une vraie purée de pois hein ? »


Les deux jeunes filles, interdites, gardèrent le silence, mais affichèrent un sourire poli. Après quelques temps, Radimir, bercé par les cahotements du train en marche, sombra lentement dans le sommeil. 

           

Lorsque Radimir se réveilla, il faisait complètement nuit. Il émergea lentement de son sommeil, tout confus, en constatant qu’il était lui-même plongé dans le noir. Il se redressa vivement, en remarquant que le train était à l’arrêt et totalement vide. Il n’y avait plus que lui. On l’avait oublié dans le Poudlard Express. Personne ne l’avait réveillé. Il regarda sa montre à gousset et découvrit avec horreur qu’il était déjà presque l’heure du banquet de début d’année. Il se releva alors aussi vite que son ventre le lui permettait, attrapa une nouvelle fois sa chariotte, et s’extirpa comme il put du train. Il poussa ensuite sa chariotte jusqu’au lac, en suivant les traces de pas laissé par les premières années. Arrivé au bord de l’eau, il aperçut au loin les barques remplies d’élèves qui était en train d’accoster aux portes du château qui se dressait fièrement sur la rive en face. Paniqué à l’idée d’arriver en retard, Vynoque remarqua néanmoins qu’une barque était restée à quai, juste en face de lui. Avec peine, il installa son chariot sur l’embarcation, y monta lui-même, se saisit des rames, et commença à avancer en direction du château. L’effort était si grand, qu’il se mit à pousser des grognements monstrueux qui résonnèrent jusqu’au château, à tel point que les premières années crurent entendre les cris d’un monstre terrible dans l’eau. Après de longues minutes, Radimir arriva enfin, lui aussi, aux portes de l’Ecole. Aussi vite qu’il le pu et dégoulinant de sueur, il se précipita dans le hall d’entrée. Celui-ci était une nouvelle fois complètement vide. Ne sachant où se rendre dans cet immense bâtiment, Vynoque commença à sombrer dans le désespoir le plus profond.


Soudain, il entendit des pas descendre d’un immense escalier en colimaçon. Vynoque tourna la tête et aperçut un vieil homme arriver vers lui. Il était grand, portait une longue barbe blanche et des lunettes demi-lune qui laissait passer un regard très bleu et amusé. L’homme écarta les bras et déclara avec chaleur :


« - Mon cher Monsieur Vynoque ! Vous voilà enfin arrivé ! Je n’en pouvais plus d’impatience de vous rencontrer enfin.


Arrivé à la hauteur du Vynoque, l’homme l’encercla de ses bras dans une longue étreinte.


« -Vous sentez bon, déclara le vieil homme en s’éloignant enfin d’un Vynoque tout gêné. Mais je ne me suis pas présenté ! Je suis Albus Dumbledore, directeur de Poudlard. Mais vous pouvez m’appeler Albus. Puis-je vous appelez Radimir ?


Vynoque acquiesça lentement de la tête, alors que Dumbledore passait son bras autour de sa taille. « Les sorciers ont des mœurs bien chaleureuses dites moi » pensa notre bonhomme au ventre rond. Décontenancé par les manières si familières du directeur, il se laissa conduire par celui-ci sans un mot dans les dédales du château.


-Vous devez avoir envie de prendre un bon repas et d’aller ensuite vous reposer mon très cher ami, poursuivit Dumbledore aux anges. Néanmoins, il me faut vous annoncer qu’il y a eu une terrible méprise dans l’attribution des appartements du personnel cette année, et vous ne pourrez accéder à votre logis ce soir. Oh ! ne vous inquiétez pas ! Je vous ai déjà fait une place dans ma chambre ! Vous verrez je prendrais bien soin de vous… Mais regardez, nous voilà déjà arrivés à la salle du banquet ! La répartition des élèves va commencer, hâtons nous ! ».


Dumbledore entraîna alors Vynoque sur une estrade où était installée une longue table sur laquelle étaient déjà attablés tous les professeurs qui l’avaient rejeté du wagon plus tôt dans la journée. Reprenant alors ses esprits, Radimir afficha son air le plus satisfait devant les mines déconfites de ses futures collègues. L’homme du quai était là lui aussi, et ne lâchait pas Vynoque du regard. Il s’installa alors à sa place, rayonnant, à la droite du directeur. Dumbledore était lui resté debout, et demandait le silence dans la salle. Il commença alors son discours d’accueil des élèves. Radimir écoutait à peine, soulagé et heureux d’être enfin arrivé à destination. Il jeta alors un œil tout autour de cette magnifique salle à manger et aussi, plus discrètement vers ses nouveaux collègues assis le long de la table. C’est alors que l’impensable se produisit. Son œil fut attiré par un sombre personnage, calme, vêtu de noir, aux cheveux longs, installé tout au bout de la table. Alors que Vynoque le regardait, fasciné par l'étrange charme qui se dégageait de ce mystérieux personnage, ce dernier se tourna dans sa direction. Leurs regards se croisèrent. Et Radimir comprit que sa vie venait de changer à tout jamais.


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