Histoires d'Avant la Fournaise

Chapitre 4 : L'Histoire d'Annastasia

1074 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 09/09/2023 08:55

Anastatsia


Je m’appelle Anastatsia Indoril. J’ai vingt-huit ans.

Ma mère était une paysanne d’Ascalon, elle travaillait dans les vignobles de l’Abbaye d’Ashford. Mon père était un soldat de fortune, venant d’un pays lointain. Il a connu ma mère à Ashford, l’a épousée, et m’a donné la vie. Puis il est reparti à son métier de soldat, et a rencontré la mort sur le champ de bataille.

Ne pouvant m’élever seule, ma mère m’a placée auprès des moines et des nonnes de l’Abbaye, afin que je reçoive une bonne éducation.


J’ai vécu de nombreuses années à Ashford, non loin de ma mère, dans la Lumière de Dwayna, et dans l’Ombre de Grenth. J’ai appris les Mots qui soulagent et qui réparent et les Gestes qui soignent et qui apaisent.

J’ai aussi appris à regarder l’Ombre dans les yeux et à ne pas craindre Ses Maléfices.

J’ai appris que l’Ombre avait besoin de la Lumière, et j’ai appris à porter et garder cette Lumière en moi afin de dissiper l’Ombre lorsqu’elle gagne les cœurs des gens.

J’ai aussi appris que la Mort faisait partie de la Vie, et que Grenth tout comme Dwayna, avait Son Mot à dire sur nos existences…


Au cours de mon apprentissage à l’Abbaye, nous avons souvent eu la visite d’une jeune femme, un peu sauvage, un peu bandit aussi, certainement.

Elle arrivait toujours à moitié morte de faim et d’épuisement, souvent blessée. Et repartait toujours aussi subitement qu’elle était arrivée sitôt ses blessures soignées. Et à chaque fois, elle nous dérobait quelque chose, très souvent de quoi manger, avant de disparaître durant de long mois.

Les moines disaient qu’elle s’appelait Emma, et ma mère m’apprit qu’elle était certainement ma cousine…


À dix-huit ans, j’ai quitté l’Abbaye, pour parfaire mon apprentissage.

J’ai vagabondé quelques années dans tout Ascalon, visitant les autres sanctuaires, me recueillant en leur sein, et mettant mon savoir au service des gens que je rencontrais.

Je soulageais les maux et les peines de tous, sans faire de distinction entre les hommes, car tous les hommes petits ou grands sont égaux devant Grenth et Dwayna…


Au bout de quelques années, mes amis et ma mère me manquant, je décidais de retourner à Ashford.

Ces années passées dans le monde m’avaient changée. Je n’étais plus la gamine un peu naïve qui avait quitté son abbaye, sac au dos, pour découvrir le monde. J’avais grandi, mûri… La vie dans le monde m’avait endurcie, j’étais désormais prête à affronter toutes les épreuves qui se dresseraient devant moi…


Comme je me trompais…


J’étais encore bien loin d’Ashford, lorsque le ciel se couvrit de nuées sanglantes et qu’une pluie de feu s’abattit sur Ascalon.

Je trouvais un abri précaire près de la rivière, et m’y terrais en attendant que cesse ce déluge de pierre et de feu…

Lorsque j’émergeais de mon trou, le monde avait définitivement changé. Tout était saccagé, détruit, brûlé…

Sans perdre un instant, je me hâtais vers Ashford, l’angoisse au ventre, certain de ne retrouver que des cendres…


Encore une fois, je me trompais… Dwayna en soit loué ! Les alentours et le village d’Ashford étaient presque totalement détruits, mais l’Abbaye avait été miraculeusement épargnée. Bien que les victimes se comptaient par dizaines.

Lorsque j’arrivais, ma première tâche fut de m’inquiéter du sort de ma mère et de mes amis. Beaucoup de gens avaient disparu dans la tourmente de feu, et ma mère n’avait hélas ! pas été épargnée…

Cette nouvelle m’affecta profondément. Mais je ne pris pas le temps de me lamenter sur mon sort, car il y avait fort à faire : soigner, soulager, réconforter, reconstruire…

La tache était immense et nos moyens dérisoires, mais notre foi nous soutenait.


Les Charrs…

Je n’en avais jamais vu vraiment, mais je connaissais ces créatures au travers des récits des soldats qui protégeaient le Grand Rempart Nord, et par les histoires que l’on nous racontait le soir, enfants, avant de nous endormir…

Malheureusement, toutes ces histoires étaient bien en deçà de la réalité…

Des bandes entières de ces créatures s’étaient faufilées au travers du Grand Rempart, qui les avait si longtemps tenues à l’écart, et semaient désormais la terreur dans la contrée, pillant ce qui pouvait encore avoir un intérêt, détruisant et tuant le reste.

Nous nous retranchâmes dans l’Abbaye avec nos blessés, nous préparant à devoir affronter les Charrs à plus ou moins brève échéance…

Ce fut alors de longues journées d’attente, ponctuées par l’arrivée constante de nouveaux réfugiés, plus ou moins blessés.

Des nouvelles nous parvenaient, le Roi était toujours vivant et luttait pied à pied pour repousser les Charrs derrière le Rempart ! Cette nouvelle remonta le moral des réfugiés, et soulagea bien des peines !

Puis l’assaut, tant redouté, des Charrs contre notre Abbaye, eu finalement lieu… Et grâce à notre résistance acharnée, il échoua, et les Charrs furent mis en déroute.

Néanmoins, les pertes en vie, de part et d’autre, étaient conséquentes… Est-ce que tout cela en valait bien la peine ? Était-il vraiment utile de continuer à s’entre-tuer pour une terre désormais stérile ?

Si ce qu’on racontait était exact, les Charrs étaient responsables de la Fournaise, comme on appelait désormais, la tempête de feu qui s’était abattue sur nous… Auquel cas, ils avaient gagnés, mais leur victoire avait elle un sens ?

C’était cela leur victoire ? Un pays brûlé, brisé, stérile, en proie aux incendies ? Est-ce que ce pays valait encore la peine que l’on s’entre-tue ?


Cette idée, ainsi que la perspective d’une autre attaque Charrs, acheva de nous décider : il fallait partir, quitter Ascalon !



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