Sans perdre de temps

Chapitre 15 : Des fleurs pour 48

3404 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 10/07/2020 18:35

La porte de la cellule s'ouvrit dans un souffle d'air comprimé. La faim avait poussé Liv dans ses derniers retranchements, de telle façon qu'elle aurait pu foncer sur les deux soldats qui se tenaient sur le seuil, pour arracher leur casque et dévorer le contenu de leur boîte crânienne. Seul le fait que cela contrarierait le plan qu'elle avait mis au point l'en empêcha. Elle ne pouvait se permettre de se retrouver sous l'influence d'un cerveau inconnu tant que les premières étapes ne s'étaient pas déroulées sans encombre.


Entre les deux gorilles surarmés, émergea Barry. Il portait autour du cou un badge de consultant et à l'épaule, un énorme sac en bandoulière. Il s'écrasait entre les deux hommes, exagérant sa fragilité apparente. C'était une bonne chose : personne ne soupçonnerait un maigrichon incapable de soutenir un regard plus de trois secondes d'être le supersonique de Central City.


— Mademoiselle Moore ? Je viens effectuer quelques tests médicaux.


Ils échangèrent un regard et elle alla s'asseoir sur son lit, sans un mot. Elle releva sa manche et tendit son bras, qui semblait encore plus blanc à la lumière artificielle de la cellule.


— Eh bien allez-y, Docteur, prenez ce que vous voulez, lança-t-elle avec un clin d'œil.

— Je ne suis pas médecin, répliqua-t-il avec un sourire. Et je n'aurais sans doute pas besoin de vous faire une prise de sang.


Il sortit une lampe torche de son sac et s'agenouilla devant Liv. Les deux soldats restèrent plantés à la porte de la cellule, arme à la main, prêts à tirer.


— Comment ça va ? chuchota Barry tandis qu'il balayait le faisceau de la lampe devant les pupilles de Liv, qui ne réagissaient pas le moins du monde.

— J'ai connu mieux.

— Ravi m'a donné quelque chose pour toi.

— Ravi est ici ?


Barry hocha la tête et sortit de sa poche la barre protéinée que Ravi lui avait confiée.


— Hé ! s'exclama un des deux gardes à la porte. Qu'est-ce que vous lui donnez ?

— Ce n'est qu'une barre de céréales. On m'a autorisé à donner du sucre à mademoiselle Moore si elle présentait des symptômes d'hypoglycémie.


Joignant le geste à la parole, il tira une feuille de papier de sa poche. Il avait pensé à faire signer cette dérogation à Lyla, sachant qu'on ne le laisserait pas faire aussi facilement. Elle n'avait sans doute pas cru l'excuse qu'il avait improvisée pour se justifier, mais l'important, c'était d'avoir ce papier.


— Bon, faites ce que vous voulez, c'est vous le médecin, déclara l'un des gardes après avoir déchiffré le document.


Barry revint vers Liv et lui redonna la barre.


— C'était une petite grand-mère, à la vie tranquille, murmura-t-il, de telle façon que les gardes ne pouvaient l'entendre. Il s'est dit que tu apprécierais après des… dîners plus mouvementés.


Il avait cru, après ce que lui avait expliqué Ravi, qu'elle se jetterait dessus comme une hyène sur un steak, mais elle n'en fit rien. Tandis qu'il sortait le tensiomètre de son sac, elle la posa sur ses genoux et l'observa d'un air dépité.


— Un problème ?

— Tu es sûr de vouloir que je mange ça ? demanda-t-elle, la gorge serrée.

— Bien sûr, tu dois avoir faim après tout ce temps.


Il marqua un temps de pause tandis qu'il enfilait le bracelet autour du bras de Liv.


— Qu'est-ce qui se passe ? Qu'est-ce que tu ne me dis pas ?

— Barry, si je mange ça, le cerveau de cette vieille femme prendra la place de celui de Len. Toutes ses pensées, ses sentiments, tout ça, ce sera parti. Disparu pour toujours. Je peux tenir encore une dizaine d'heures sans me nourrir, mais à partir du moment où j'aurais absorbé un autre cerveau, alors je ne pourrais plus être en contact avec lui. Plus jamais.


Elle retint une exclamation de soulagement quand elle vit dans les yeux de Barry qu'elle avait réussi à planter les graines du doute dans son esprit. La première étape de son plan avait réussi.


Barry ne répondit pas tout de suite. Pendant de longues secondes, il sonda le regard de Liv à la recherche d'elle-ne-savait-quoi, mais qu'il sembla y trouver. Elle inspira profondément, pour se redonner une contenance. Malgré sa détermination à mener son projet à bien, elle n'était pas un monstre et ne prenait aucun plaisir à faire souffrir autrui. Elle aurait choisi une autre solution, si cette autre solution avait existé.


Barry prit la barre protéinée et, après l'avoir longtemps observée, la plaça sur le lit, à côté de Liv.


— Je te la laisse. Fais comme tu le sens. C'est ton esprit, cette décision t'appartient. Lyla tâchera de te faire sortir au plus vite, dès que j'aurais confirmé que tu ne présentes aucun danger immédiat.


Les mots sortaient de sa bouche avec difficulté, comme s'il se forçait à les prononcer.


— Bien, j'ai terminé, déclara-t-il en se levant. Nous pouvons y aller.


Sans un mot, il sortit de la cellule, en compagnie des deux gardes. La porte se referma derrière eux.


Liv attendit cinq minutes, les yeux fixés sur la barre emballée dans son papier brillant. Rien ne l'empêchait de la manger maintenant, la partie du plan qui demandait de garder la tête froide venait de se terminer avec succès. Dorénavant, il suffirait de pousser Barry à comprendre que remonter le temps pour sauver Leonard Snart et empêcher tous les événements de ces derniers jours de se produire. Et qui de plus persuasif qu'une adorable petite mamie ? Avec ce nouvel élément, elle pourrait poursuivre et profiter de la confiance qu'on lui accorderait en la croyant inoffensive. Restait à espérer que sa gentillesse ne se mettrait pas en travers de sa route. Elle ne pouvait se permettre d'avoir des remords.


***


Quand Barry revint à STAR Labs, après avoir enfilé son costume de Flash, il trouva Caitlin, Cisco et Ravi penchés au-dessus d'un erlenmeyer rempli d'un liquide rouge bouillonnant. Près de la console, Babineaux discutait avec Wells et Oliver, observant les autres comme s'ils étaient sur le point de donner naissance à la créature de Frankenstein.


— Qu'est-ce que vous faites ? demanda Barry.

— Ah ! Tu tombes bien ! s'exclama Cisco en se dirigeant vers lui d'un pas sautillant. On avait presque fini.


Ravi retira ses lunettes de protection et se tourna lui aussi vers le nouvel arrivant.


— Comment va Liv ?

— Ça va. J'ai pu parler à Lyla, elle est de notre côté. Elle va tenter de la faire libérer au plus vite.


Ravi soupira de soulagement.


— Regarde ça, poursuivit Cisco. On a suivi les instructions qui se trouvaient sur la clé que Liv nous a donnée. Apparemment, les laboratoires Max Rager ont eu accès à ton ADN et s'en sont servis pour créer une formule qui rendrait le consommateur plus rapide. De toute évidence, ça n'a pas marché et le projet a été abandonné, mais…


Il marqua une pause dramatique, sourcils relevés, tout sourire.


—… on s'est dit que ça pourrait fonctionner sur toi, compléta Caitlin. Pour l'instant, on est arrivé à un mélange ultra-concentré qu'on pourra t'injecter. Si ça fonctionne bien sûr.

— Et vous n'avez pas peur que ça ait des complications, comme le Velocity ? Ça pourrait me faire perdre ma vitesse encore une fois…

— Figure-toi qu'on y a pensé, répliqua Cisco. C'est pour ça qu'on va d'abord le tester sur un cobaye.

— Un cobaye ? répéta Barry.


Cisco plongea sous la table et en ressortit une cage de verre contenant deux minuscules souris blanches.


— Tadah ! Je te présente Flash 47 et Flash 48, les rongeurs les plus rapides du monde. Deux souris génétiquement modifiées à l'aide de ton ADN et d'un touuut petit peu de matière noire. Je leur aurais bien trouvé des noms plus stylés, mais elles mourront dans deux jours tout au plus. Le surplus d'énergie apporté par la force véloce est trop difficile à supporter pour de si petites choses.


Bien que la question lui vint à l'esprit, Barry n'eut pas le temps de demander pas ce qui était arrivé aux quarante-six autres souris supersoniques. Quand le liquide rouge se stabilisa enfin, Ravi en ponctionna quelques gouttes à l'aide d'une seringue.


— Ça devrait suffire. Alors, à qui l'honneur ?


Cisco extirpa une souris de la cage et la présenta à Ravi.


— Allez, ma petite 48. Aujourd'hui, tu vas rentrer dans l'histoire.


Alors que Ravi était sur le point d'injecter le produit, Barry sentit une main se poser sur son épaule. Il se tourna et vit Arrow, debout à côté de lui, un air grave au visage.


— Est-ce que je peux te parler une minute ? En privé. C'est important.


Faute de mieux, ils s'étaient installés dans les vestiaires, seule pièce sans caméra de tout STAR Labs – à l'exception des toilettes et de la pièce secrète de Wells, évidemment. Barry ne savait pas à quel point cette conversation devait rester confidentielle et avait préféré parier sur la sécurité.


Se retrouver avec lui, dans cet endroit, un an après tout ce qui s'était passé, se révélait plus difficile que ce qu'il avait imaginé. Il ferma les yeux tandis qu'Oliver cherchait ses mots, faussement absorbé par les posters sur les dangers de l'exposition à la matière noire que Caitlin avait mis en place quelques semaines auparavant.


— Cisco m'a pris à part quand je suis arrivé ce matin, déclara-t-il sans regarder Barry. Je ne m'étais pas pris un savon pareil depuis le lycée.


Il fut secoué d'un rire nerveux qui ne fut pas partagé. Puis, en l'espace d'une seconde, il retrouva son sérieux.


— Mais il a raison. J'ai merdé. Je pensais agir pour ton bien et celui de toute ton équipe, mais je n'ai pas pris le temps de me demander ce que tu pouvais ressentir. J'ai pris une décision à ta place et j'espère que tu pourras me le pardonner un jour.

— Écoute, Oliver, ce n'est absolument pas contre toi, mais je suis pas d'humeur à entendre tes excuses pour le moment.

— Il ne s'agit pas que de ça.


Barry était déjà sur le point de partir, mais cette phrase retint son attention. Alors qu'il s'apprêtait à franchir le seuil, il s'arrêta, soupira et tourna les talons pour faire de nouveau face à Oliver. Ce n'était pas comme s'il avait à faire ailleurs : le sort de Liv reposait entre les mains de Lyla et la préparation de la formule trouvée sur la clé n'entrait pas dans la liste de ses compétences. S'il retournait au labo, il ne pourrait rien faire d'autre que regarder les autres travailler en attendant que le temps passe.


— C'est bon, je t'écoute.

— Je suis inquiet, vraiment inquiet. Tu m'as l'air plus bas que terre.


Barry laissa échapper un ricanement.


— Oui, en général, c'est ce qui se passe quand on perd quelqu'un à qui on tenait. Je pense que je ne t'apprends rien.

— Tu sais très bien que ce n'est pas ce que je veux dire.

— Qu'est-ce que tu veux dire, alors ?


Son ton était acerbe. Pourtant, il ne haïssait pas Oliver, loin de là. Il lui en avait voulu pendant de long mois, et lui en voulait toujours, mais cela n'entachait en rien l'estime qu'il avait pour lui en tant que justicier, ou en tant qu'ami. Il avait commis une erreur, une énorme erreur, guidée par une vision trop restreinte du bien et du mal il s'était laissé emporter par la peur.


— J'ai peur que tu fasses une bêtise. Et je ne suis pas le seul.


Ça, Barry le savait. Cisco aussi lui avait fait part de ses inquiétudes. Après le fiasco de son dernier voyage dans le temps, cela ne l'étonnait pas que ses amis se fassent du souci à son sujet.


— Tu y as pensé, n'est-ce pas ?

— À quoi ? Au suicide ou à utiliser mes pouvoirs pour que ça ne se produise jamais ?


Oliver lui lança un regard interdit, essayant sans doute de déterminer s'il était sérieux ou s'il cherchait à le provoquer. Barry n'en était pas certain lui-même.


— Mais si tu veux savoir, oui, bien sûr que j'y ai pensé. Mais je ne le ferai pas.


Il le détailla de haut en bas, attendant une réponse qui ne venait pas.


— Barry, écoute… On tient tous énormément à toi. Je tiens énormément à toi. Et je sais très bien ce que ça fait de perdre quelqu'un à qui on tenait à ce point-là. Crois-moi, si j'avais eu des capacités comme les tiennes quand ma mère est morte, personne n'aurait pu me faire entendre raison. Et même si je sais que tu es plus réfléchi que moi sur ce plan-là, j'espère que tu comprends les conséquences qu'auraient un tel…

— J'ai bien retenu la leçon la dernière fois, répliqua Barry, sec. Pas la peine de me faire la morale.


Oliver avança de quelques pas et posa sa main sur l'épaule de Barry.


— Je te fais confiance. N'oublie pas que quoi que tu traverses, on sera toujours là pour toi. Chacun d'entre nous.


Il entendit à peine le « Merci... » que murmura Barry sur le chemin de la sortie.


***


— Attends, je viens de la voir passer par là ! s'écria Cisco en se jetant au sol.

— Non, par là ! répliqua Ravi tandis qu'un minuscule éclair rouge traversait la pièce.


Caitlin se tenait près de la console, le plus loin possible de toute cette agitation. Au moins, ils avaient la preuve que le produit fonctionnait, se disait-elle pour se rassurer. Il avait commencé à agir dès l'injection. Au moment-même où Ravi avait retiré l'aiguille, la souris avait commencé à briller, parcourue d'éclairs écarlates. Puis, et ce fut à ce moment que les choses commencèrent à dérailler, elle l'avait mordu jusqu'au sang et s'était carapatée sans demander son reste.


Caitlin consulta sa montre. Deux minutes s'étaient écoulées depuis l'escapade du cobaye. Mesurer la période d'efficacité du produit se révélerait précieux pour les tests suivants. En tout cas, pas question d'exposer Barry à une telle substance avant de l'avoir étudiée en long, en large et en travers. Elle frissonna en repensant aux effets désastreux du Velocity. Ils ne pouvaient pas se permettre d'expérimenter à l'aveuglette alors que Savitar était encore dans la nature. Dès que le risque de se faire attaquer par un rongeur en furie serait dissipé, elle mettrait le reste du liquide dans des injecteurs sécurisés et les rangeraient hors de portée de Barry. Elle le savait raisonnable, et loin de tout désir de puissance, mais que pourrait-il tenter pour sauver Iris des griffes de leur ennemi ? Elle ne pouvait pas prendre ce risque.


Perdue dans ses pensées, elle entendit à peine le claquement des talons hauts qui résonna derrière elle.


— Qu'est-ce qu'ils font ? demanda une voix féminine.

— Oh, ils ont perdu une souris supersonique et ultra-agressive, expliqua-t-elle en désignant les deux compères qui avaient abandonné l'approche poursuite et tentaient désormais d'appâter l'animal avec ses friandises préférées. La routine…


Ce ne fut qu'à la fin de sa phrase qu'elle se rendit compte que la voix dans son dos n'était ni celle d'Iris, ni celle de Felicity, ni même celle de Jesse. Pourtant, elle la connaissait, elle l'avait déjà entendue. Et ce parfum ambré qui couvrait à peine une odeur étrange de métal brûlé… non, d'or en fusion… Cela ne pouvait être que…


Caitlin laissa échapper une exclamation de surprise quand elle se retourna et tomba nez à nez avec Lisa Snart. Elle arborait son habituel blouson de cuir noir et une expression amusée au visage.


— Eh bien, je ne pensais pas que je te ferais un tel effet.


Le cri avait attiré l'attention de Ravi et Cisco, qui se relevèrent d'un bond.


— Lisa ! s'exclama Cisco. Qu'est-ce que… que… qu'est-ce que tu viens faire ici ? C'est pas encore pour une bombe, j'espère ?

— Pas cette fois, non, répondit-elle. Je viens voir Barry, j'ai quelque chose à lui remettre.


Cisco tenta tant bien que mal de cacher sa déception de ne pas être celui que la cadette Snart recherchait, mais il ne trompait personne.


— Dommage, tu l'as manqué de peu, il vient de partir.

— Dans ce cas…


Elle sortit de la poche de sa veste un trousseau de clés qu'elle lui tendit.


— Tu les lui donneras dès qu'il reviendra. Dis-lui que j'ai bien réfléchi et que j'ai peut-être été injuste avec lui. Et pardon pour lui avoir cassé la gueule, aussi.

— Ça marche… articula tant bien que mal un Cisco interloqué.

— Je vais partir pendant quelque temps. Si à tout hasard, vous avez besoin de me contacter, passez par Gideon, elle me transmettra le message.


Elle s'était déjà éloignée dans les couloirs quand Cisco reprit le contrôle de ses facultés mentales.


— Hein ? Quoi ? Attends, qu'est-ce que ça veut dire ? Tu vas où ?


***


La porte s'ouvrit de nouveau quelques heures après la visite de Barry. La barre de céréales à base d'adorable grand-mère semblait ne pas encore faire effet, mais au moins, la sensation de faim avait disparu et, quand Lyla entra en compagnie de deux gardes armés jusqu'aux dents, Liv n'eut aucune envie de se jeter sur eux pour dévorer leur cervelle. On pouvait sans doute parler de progrès.


— Vous pouvez sortir, vous êtes libre.


Liv hocha la tête et ne se fit pas prier pour sortir au plus vite. On lui tendit tous ses effets personnels dans une boîte en carton. Tandis qu'elle remettait ses lacets sur ses chaussures, Lyla s'approcha d'elle. Il émanait d'elle l'aura de confiance et d'autorité que Liv lui avait vue en salle d'interrogatoire, mais elle semblait plus craintive, comme un dresseur s'approchant doucement d'un tigre endormi.


— Barry m'a assuré de votre bonne foi. Ne le faites pas mentir.

— Ne vous en faites pas. Vous n'avez rien à craindre.


Un taxi l'attendait devant le bâtiment. Elle s'étira longuement avant d'y entrer. Jamais elle n'aurait cru que l'air frais pourrait autant lui manquer. L'air de cette fin d'après-midi était lourd, à la limite de l'étouffant, mais cela valait mieux que l'air recyclé de sa cellule.


Tout en ouvrant la portière, elle jeta un coup d'œil aux alentours. C'était le bon moment pour déclencher une vision et apprendre à mieux connaître son nouveau cerveau. Elle observa un moment les quelques civils qui allaient et venaient sur le trottoir d'en face. Un vieil homme tenant sous le bras un journal froissé, une jeune mère avec sa poussette, une famille nombreuse… Rien ne lui venait.


— Bon, vous montez ou non ? s'impatienta le chauffeur.


Après un soupir excédé, elle prit place à l'arrière du véhicule et baissa la vitre pour laisser passer un peu d'air. Un homme d'une quarantaine d'années, costume cravate et cheveux coupés en brosse, adressa un signe de main au chauffeur, lequel répondit de la même façon. Sans doute se connaissaient-ils.


Liv l'aurait à peine remarqué si, au moment où l'homme passa devant elle pour rejoindre le bâtiment, elle n'avait pas ressenti ce picotement typique de la vision sur le point d'arriver.


Il fait nuit, mais encore chaud. Elle est assise dans la voiture, à l'arrière, côté conducteur. Un homme passe tout près. Au début, il ne la voit pas, mais quand il se tourne vers elle, il a un mouvement de recul, entre la surprise et la terreur. Trop tard, elle a déjà sorti son arme. Elle tire deux fois. L'homme s'effondre. Les pneus crissent tandis qu'elle remonte la vitre.


Le retour à la réalité fut brutal. Liv resta silencieuse pendant tout le reste du trajet. Elle pensait être sous l'influence d'une grand-mère modèle dont les principales passions étaient les gâteaux et ses petits-enfants. Quel genre de cerveau Ravi lui avait-il donné ?


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