Nan tassë.
Chapitre 0 : Nan tassë.
3082 mots, Catégorie: T
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D’énormes boucliers lui barrait la vue, en ligne droite, serrés les uns sur les autres. Les hommes à côté d’elle respiraient fortement, certainement pour se donner de la volonté, beaucoup d’entre eux étaient déjà épuisés, certain étaient en sang, leurs armures jonchaient le sol crasseux à quelques mètres d’eux, seul cette ligne de protection les abritaient encore un peu.
Un silence lugubre avait frappé de plein fouet la zone de combat, tranchant d’un coup sec les hurlements et le fracas des armes quelques minutes plus tôt. Seuls les souffles de ses alliés étaient perceptibles, se préparant à la prochaine attaque.
La jeune femme risquât un regard par dessus le mur de fortune, se hissant sur la pointe des pieds, son arc tendu à l’extrême pour repousser l’ennemie. Elle cadra sa vision floue comme elle le pue, et observât le carnage qui s’y était produit.
Des centaines de soldats étaient éparpillés ici et là. Certains encore en vie, essayaient tant bien que mal de rejoindre leur rang, rampant sur les morts sans aucun état d’âme, hurlant de douleur, d’autres criant au désespoir pour les secourir sans que personne ne viennent pour les aider. Le silence noyait la complainte de ces guerriers, comme imperturbable.
La jeune Elfe laissât une larme perler sa peau laiteuse, comme pour se faire pardonner de l’Oracle cette folie meurtrière dont elle était complice, tout en continuant à fixer les cadavres encore frais de cette boucherie sans nom. Juste une larme avant de se reprendre. Les barbares devaient mourir, tous, sans exception.
Elle se remit en place instinctivement en entendant un chant elfique, celui que son camp murmurait à chaque début de combat pour se donner force et courage. Murmures qui devinrent de plus en plus distinct par les ennemis qui se mirent eux aussi en position d’attaque, se préparant à l’assaut. Son pied droit, comme ceux de ses collègues de fortune, tapaient le sol sec en cadence pour donner forme à l’hymne de guerre, la poussière flottait autour d’eux traduisant leur haine viscérale pour ce peuple qui avait outrageusement foulé leurs terres sainte en semant mort et destruction.
Le concert se stoppa net, leurs jambes s’enfoncèrent dans le sable pour se donner stabilité, les lames des épées transpercèrent les boucliers d’un seul tintement et les haches se surélevèrent au dessus des têtes dans un hurlement effroyable.
Ambroisine se replaçât à quelques mètres derrière eux avec le reste de la ligne des archers et des magiciens, donnât une flèche au mage près d’elle qui se chargeât de l’enflammer d’un seul sort et se mit en position. L’attente était insoutenable.
Le chef de sa garnison s’autorisât un coup d’œil furtif à l’ensemble de ses troupes avant de tonner son ordre :
« Manwa ! I óren ! Ronda ar vórima ! Yanna i Alima ar i Alcar mittanyar ! »
Un grondement à l’unisson cassât la fin de la complainte du général et l’armée elfe martelât la terre souillée en rythme vers d’adversaire qui eux aussi s’étaient mit en marche d’un pas brutal.
Ces sauvages n’avaient aucune stratégie ni tactique, seulement nourrit par le sadisme et l’envie de tuer, ils se ruaient vers eux comme une bande de monstres affamés près à les déchiqueter sans aucune raisons valables, juste l’envie de mort.
Au bout de quelques mètres, l’ordre de ce stopper grondât. Le régiment reprit la position défensive, puis un autre cris s’élevât quand les opposants furent assez prêt pour la première attaque aérienne.
La lignes de front s’écartât dans son milieu en y laissant un trou béant, Ambre arquât son arc de sa flèche de feu et proférât de sa voix douce mais ferme sa demande en espaçant les ordres :
« Dírnaith ! - Peng ! »
Les carreaux enflammés s’écrasèrent sur les crânes des premiers assaillants, leur tranchant le visage dans un cris de douleur intense et les flammes se propagèrent sur ceux qui n’avaient pas été touchés dans le premier assaut.
L’elfe rousse continuât les attaques de longues portées avec ses comparses jusqu’à ce que l’ennemi soit trop près pour continuer. Ils se ruèrent donc d’un seul bloc vers la zone de conflit, toujours derrière les boucliers pour se protéger.
Tout se passait à une vitesse folle, les haches fauchaient les corps des ennemis avec une facilité déconcertante, l’éclaboussant de sang et d’entrailles chaud, les épées perforaient les têtes et les membres, si bien que le sable fût submergé de bras et de jambes coupés net dans la bataille. Beaucoup tentèrent de faire de même avec elle mais Ambroisine esquivait les coups avec une fluidité hors du commun, sa chevelure couleur de feu virevoltant avec grâce autour d’elle, avant d’affliger une attaque létale à son adversaire, rien ne pouvait la tuer tant que son royaume ne serait pas en sûreté.
Comme en trans, à chaque coups qu’elle portait, des souvenirs de sa vie s’immiscèrent dans son cerveau sans qu’elle ne puisse rien y faire. Des images de ses entraînements avec sa mère. Cette génitrice qu’elle aimait plus que tout mais qui était aussi sa plus grande rivale, celle qu’elle s’évertuait à combattre des jours durant sans jamais l’atteindre et ce qui l’a poussait à devenir plus forte.
Puis son compagnon de toujours, son frère de lait Anar qui était si doux et prévenant avec elle sans qu’elle ne le mérite vraiment, Ambre étant une âme solitaire elle eu du mal à lui faire confiance au début, l’ignorant parfois, le massacrant les autres fois pendant leurs exercices. Il n’en avait jamais tenu rigueur, n’avait jamais été en colère contre elle, se contentant d’attendre qu’elle s’ouvre enfin à lui et elle en était reconnaissante tous les jours d’avoir quelqu’un d’aussi précieux à ses côtés.
Ses plus grandes peurs faisaient surface, comment ferait-elle sans eux si aujourd’hui ils mourraient ?
Elle se risquât un moment de faiblesse en essayant de les repérer dans cette boucherie mais tout n’était qu’horreur et anarchie. Prise d’une panique qu’elle n’arrivait pas à assouvir, la jeune femme s’enfonçât au cœur de la confrontation, enjambant les cadavres et évitant rapidement les attaques de son regard affûté, aiguisant sa vue pour repérer ceux qui lui étaient cher. Ses pas étaient tantôt frénétiques aux voix de son cœur, tantôt calme, sa rationalité prenant le dessus sur ses sentiments. Son cerveau était en ébullition, des sueurs froides glissaient le longs de son visage blanc, recouvrant ses tâches de rousseurs et ses marques vertes émeraude de ses tourments imperceptibles, son souffle saccadé résonnait dans ses longues oreilles fines, faisant barrage aux sons de la guerre, ne laissant que son intuition inébranlable pour se défendre contre la mort.
Elle ne vit pas la lance arriver pourtant et son épaules fût perforée de part en part, lui arrachant un hurlement de douleur à son entrée et à sa sortie, elle se retournât à une vitesse folle et assénât la pointe de son arc dans la poitrine de son tortionnaire qui s’effondrât instantanément.
Le choc l’a fît reculer et elle tombât maladroitement contre un rocher, la souffrance déformant une fois encore son visage si pur. Osant poser sa main sur sa blessure, laissant tomber son arme sur ses jambes recroquevillés contre son corps pour se protéger, elle y sentit un trou tellement énorme qu’elle pouvait y mettre son poing. Elle déchirât un bout de sa tunique pour en faire un pansement compressif tout en gémissant et essayât de se lever mais n’y parvint pas, l’Elfe perdait beaucoup trop de sang et la journée avait été éprouvante, elle était épuisée.
Son cerveau, toujours en proie au doute, le maudissait d’avoir été aussi futile en cet instant, ses cheveux roux indisciplinés recouvraient sa face crispée, elle avait de plus en plus de mal a garder ses yeux ouverts, jusqu’à ce que la noirceur de l’inconscience inonde son esprit.
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« Ambre, tu dors ? »
« Hm.. »
« Réveille toi ! Je vais me baigner, rejoins moi ! »
La jeune elfe ouvrit d’abord un œil puis l’autre, essayant tant bien que mal de s’habituer à la lumière du soleil. Anar l’avait supplier de faire une promenade après leur entraînement quotidien et elle s’était laissée tenter, enfourchant Ivir, son fidèle Alsha. Ils avaient galopé de longues heures jusqu’à arriver près de ce lac, où ils laissèrent leur montures reprendre des forces et à l’ombre d’un grand chêne, ils s’étaient tout deux endormit contre son tronc.
Une heure avait dû s’écouler depuis, son frère s’était réveillé bien vite à son goût et il pataugeait maintenant dans l’eau, lui faisant de grands signes pour aller le rejoindre. Un sourire tendre s’affichât sur son visage pâle, elle se leva lentement, s’étirât et fît quelques pas en direction de l’étendue d’eau, Ambre ne remarquât qu’à ce moment que les vêtements de son comparse étaient éparpillés sur l’herbe fraîche, signe qu’il était en sous vêtements, pas que ça l’a dérangeait, elle avait vu de nombreuses fois son meilleur ami dans son plus simple appareil étant plus jeune, mais les années avaient tracées sur son corps d’adolescente de nombreuses cicatrices dû aux batailles et aux exercices, preuves de ses faiblesses et de ce but qu’elle n’arrivait pas à atteindre. Elle avait honte de se montrer ainsi et encore plus devant son frère d’adoption.
Son regard pétillant de bonheur changeât subitement et une ombre voilât ses grand yeux de biche. Son ami le remarquât aussitôt et s’approchât de la rousse, toujours au bord de l’eau. Il voulait la rassurer, lui dire que toutes ses marques n’avaient rien d’hideux, que c’était le symbole de sa force et de sa volonté, que la femme qu’il avait en face de lui représentait la puissance et la vie. Mais il n’en fît rien, sachant parfaitement qu’elle ne l’écouterait pas.
Prit d’un regains de malice, il se reculât légèrement et, dans un geste précis, aspergeât son amie de la tête au bassin. Ambroisine ne pût empêcher un cris strident de s’échapper de ses lèvres et sa peau de se tendre sous l’effet de l’eau froide. Les ricanements moqueur de son acolyte lui transperçât les oreilles et après ce moment de stupeur, un air carnassier peignât son visage si taciturne habituellement.
Elle fondît sur lui, toute griffes dehors pour lui faire mordre la poussière, essayant de le noyer sous son poids et de l’éclabousser à son tour, bientôt, les cris se transformèrent en exclamations de joie et de rires francs.
Fatigués de leur assauts, le duo se dirigeât vers le bord de l’eau. L’homme ramassât ses affaires et dans un élan de bonté, lançât sa chemise vers l’adolescente. Reconnaissante, elle se cachât tout de même derrière le chêne pour se changer. Une fois fini, elle s’allongeât une seconde fois près de l’arbre, remerciant silencieusement le soleil d’être présent pour sécher son pantalon encore humide contre sa peau. Anar l’a rejoignît très vite et imita sa position, son visage tourné vers le sien pendant qu’elle regardait les rayons du soleils à travers les feuilles du centenaire imposant.
Ils n’avaient jamais eu besoin de mots pour se comprendre, l’elfe connaissant sa comparse sur le bout des doigts et inversement. Il connaissait ses tourments et ses peurs et savait comment réagir face à ses doutes et ça le gonflait de vanité d’être le seul à connaître tout d’elle.
Prit d’une fugace envie de contact, le frère empoignât doucement la main de sa sœur et d’un souffle lui murmurât :
« Pour toujours et à jamais. Nan tassë Ambre. »
La rousse, d’abord surprise par le geste, se laissât submerger par le bonheur. Fermant les yeux, elle s’abandonnât une seconde fois au sommeil, sa main toujours contre la sienne.
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« Ambroisine.»
« Hn.. »
« Ambre ! »
Son épaule lui faisait atrocement mal, elle avait beau se plaindre, rien y faisait, on continuait de la secouer, de plus en plus fort.
« Ouvre les yeux Ambre ! »
Mais pourquoi lui criait-il dessus ? Ils étaient pourtant bien là, tous les deux, le soleil frappant leur visage de bienveillance.
Elle ouvrit difficilement les yeux, toujours embrumé de son sommeil pendant que lui, continuait toujours de la balancer d’avant en arrière pour accélérer le processus de réveil.
« Tu me fais mal. » murmurât-elle dans un souffle douloureux.
Il arrêtât net ses actions voyant qu’elle réagissait enfin. Il avait eu si peur pour elle quand il l’avait aperçût contre ce rocher, comme morte. Il s’était précipité sur elle, tuant tous les hommes sur son passage à coups d’épée, vérifiant si elle était toujours en vie, effrayé par cette idée.
En sentant son pouls sous ses doigts il s’était calmé instantanément, soupirant de soulagement, mais voyant le trou béant dans son épaule il fallait qu’il la réveille sans quoi elle passerait de vie à trépas dans peu de temps.
Quand Anar pu enfin apercevoir les iris de son ami, il soupira de nouveau et respirât un bon coup, elle était en vie. Sans un mot, il fît signe à un mage non loin d’eux de s’approcher pour constater l’étendue de sa blessure et après quelques incantations faites par le magicien, la jeune elfe pu enfin se lever sans douleur.
« J’ai simplement arrêté le saignement et limité la douleur, il va vous falloir des soins plus important Ambroisine. » annonçât-il à la concernée.
« Pas besoin. » répondît-elle sans aucuns remerciements.
Le magicien reprit sa route en quête de nouveaux blessés, sans se formaliser de la réponse de la jeune femme, ça n’avait rien d’étonnant venant d’elle.
La rousse qui fixait son ami depuis son réveil déplaçât son regard autour d’elle, toujours hypnotisée par son rêve qui s’évaporât peu à peu, retrouvant la vraie réalité de se jour maudit.
La nuit était tombée, sûrement depuis un moment au vu de l’emplacement de la Lune et les nombreuses torches allumées un peu partout. Elle y découvrît les nombreux corps, démembrés, éviscérés, brûlés, égorgés. Peu de monde avaient survécus. Mais le soulagement fût grand quand elle comprit que presque tous les cadavres venaient des ennemis. Nous avions vaincu.
D’abord soulagée par ce constat, sa colère prit très vite le pas sur elle. Comment avait-elle pu dormir dans un moment aussi fatidique ! Elle n’avait servit à rien, s’était écroulée comme une faiblarde ignorante, avait faillit se faire tuer pour des futilités ! Sa faiblesse était encore plus grande qu’elle n’y croyait. Elle avait bêtement pensé que ceux qu’elle aimait se feraient tuer et avait baissé sa garde. Elle se maudissait.
Toujours aveuglée par sa colère intérieure, elle en avait oublié son ami d’enfance, toujours près d’elle, son regard protecteur sondant son esprit.
D’un geste tendre, les doigts de l’homme allèrent rejoindre ceux de son amie, et s’entrecroisèrent fermement. Cela eu pour effet de la sortir de ses démons, son regard s’accrochant au sien, elle comprit enfin qu’il était là, avec elle, pour toujours et à jamais.
« Nan tassë. » chuchotât-il, finissant sa pensée, un sourire infiniment doux sur son visage.
Les mains toujours liés de cette amitié si forte, le duo s’engageât en sens inverse du conflit, vers les plaines elfique, soulagés par la fin combat et bien heureux de se retrouver enfin.
La bataille s’était fini sans elle, mais à la lumière des torches et aux ombres des morts, elle savait maintenant que la guerre n’était pas que sang et violence. Elle était permanente, en chacun de nous et le but n’était pas d’être le plus fort, mais de ce battre pour ceux qu’on aime, pour tous les jours de notre vie, jusqu’à la sentence finale. Peut importait les cicatrices car elles traduisaient ces efforts et sa volonté d’être meilleure. Sa honte sera son courage, ses faiblesses seront sa force. Pour toujours et à jamais.
« Nan tassë. »
Fin.
Manwa ! « Près ! »
I óren ! « Pour l’honneur ! »
Ronda ar vórima ! « Tenace et fidèle ! »
Yanna i Alima ar i Alcar mittanyar ! « Où le Juste et la Gloire mènent ! »
Dírnaith ! Expression de « formation militaire : Lancé sur une courte distance contre un groupe d’ennemis »
Peng ! « Archer ! »
Nan tassë. « Je suis là »