La petite voleuse de cookies
Chapitre 5 : C5 : Le Docteur rencontre "Sherlock"
4511 mots, Catégorie: T
Dernière mise à jour 08/11/2016 18:43
CHAPITRE V
LE DOCTEUR
Se sentant un peu mieux, le Docteur décida de se mettre à la recherche de la petite voleuse. Tout à l'heure, la réaction qu'il avait eue lui avait fait peur pour elle. Il ne la connaissait pas, mais se sentait plutôt à l'aise en sa présence. Elle le rendait curieux.
Helen aussi lui permettait d'oublier un peu ses idées noires. Il voulait descendre sur Terre pour la revoir. Et rencontrer ses associés.Ceux-ci étaient abasourdis par les meurtres sauvages qui avaient eu lieu. Elle lui avait avoué qu'ils s'étaient décidés à tout faire pour essayer de savoir la vérité, et particulièrement le dénommé Watson, car après examen des corps des victimes, il était apparu que le meurtrier possédait des connaissances médicales. Il pouvait comprendre : en quelque sorte leur corporation avait été attaquée et bafouée.
Et inutile de mentionner qu'il avait hâte de discuter avec celui qui était notoirement le plus intelligent du groupe… Il voulait vraiment être en mesure de le faire avant de ressortir à la nuit tombée car ce même soir, il avait prévu de retrouver plus tard Vastra et Strax pour patrouiller dans les quartiers pauvres de l'East End. Vastra était très enthousiaste à cette idée. Il y avait des jours qu'elle n'avait rien eu à se mettre sous la dent.
Pourtant dans ce contexte, il n'était pas sûr de savoir quoi faire de l'intruse. Fallait-il l'inviter à le suivre ? Elle avait dit qu'ils « enquêtaient » tous les deux dans le futur… Elle avait l'air d'insinuer qu'ils étaient sur un pied d'égalité. C'était probablement ce qu'elle souhaitait, plutôt que ce qui était… Le meilleur moyen d'en avoir les cœurs nets, c'était de passer un peu de temps avec elle. Peut-être pas pour chasser le meurtrier de Whitechapel toutefois, mais pour aller rencontrer les amis d'Helen, pourquoi pas ?
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Il finit par la retrouver dans la Grande Bibliothèque. Si cela n'avait pas été évident par bien d'autres indices, la façon dont elle se tenait assise, les jambes repliées sous elle, pelotonnée dans une ottomane avec un livre sur les genoux, était révélatrice car bien peu typique de cette époque. Trop souple pour une femme qui aurait dû porter un corset mais qui manifestement ne s'en embarrassait pas.
― Quel livre m'avez-vous « emprunté » ? s'enquit-il en s'avançant vers elle.
― Conan Doyle, répondit-elle sans le regarder. « Sherlock Holmes contre Jack l'éventreur ». La première édition qui date de… l'année prochaine.
― Doyle n'a jamais écrit ce livre. C'est un pastiche ultérieur. Quoi qu'il en soit vous n'allez pas trouver grand-chose là-dedans : c'est un roman fabriqué pour plaire au public et l'intriguer. Les choses se sont passées certainement très différemment… L'Histoire et les romans sont deux choses très différentes.
Elle referma le livre en leva les yeux sur lui pour lui répondre, mais il la vit ouvrir la bouche avec stupéfaction. Quelqu'un se tenait bien devant elle, mais elle ne voyait que les vêtements et pas les mains ni le visage.
― Euh… Vous vous êtes vu récemment ?… Après le remake de Dracula, ne me joueriez-vous pas celui de l'Homme Invisible ?
Il se sentit brusquement très mal à l'aise à l'idée qu'elle ait pu deviner, Dieu savait comment, contre quoi il se battait tout à l'heure... La maîtrise des Seigneurs du Temps sur une grosse part de leur physiologie lui permit de ne rougir que très modérément. Et en pure perte, si on ne pouvait pas voir son visage… S'il n'avait pas été sous influence, il serait resté aussi pâle que d'ordinaire et aurait pu feindre l'étonnement… Pour chasser son embarras, il alla contempler son reflet dans le miroir le plus proche et dit plutôt :
― C'est carrément génial ! Je suis l'Homme Invisible !
― N'ayez pas l'air aussi content, je trouve ça très angoissant.
― Pas si vous devez exécuter une filature discrète. Je sors justement ce soir avec Vastra. Je pourrai donc voir sans être vu, ce timing est parfait ! Vous ne viendrez pas, ajouta-t-il préventivement en revenant vers elle.
― Et si ça durait toujours ?
Impulsivement, il porta la main de Clara à sa bouche invisible et effleura des lèvres le bout de ses doigts. Elle réagit en se troublant légèrement. Ce qui acheva de lui prouver que seule la vue était trompée par une forme quelconque d'inflexion de la lumière…
― Voyons ma chère, vous savez bien que ça n'est pas le cas puisque dans le futur, je ne suis pas ainsi, n'est-ce pas ?
― Non, vous n'êtes pas ainsi, répondit-elle en reprenant sa main et en baissant les yeux. Dans le futur vous m'auriez parlé de cette affaire et vous m'auriez expliqué pourquoi vous aviez besoin de faire ces expériences insensées sur vous !
― Est-ce que je vais vous rencontrer bientôt ? demanda-t-il avec une certaine impatience perceptible dans la voix.
― Est-ce que vous attendez vraiment une réponse à cette question ?
― Est-ce que vous m'accompagnez chez Watson ?
― Parce que vous comptez sortir dans cette tenue ?
― Vous avez raison. Il me faut un chapeau !… Si je mets un grand haut-de-forme, ça compensera l'absence de visage, non ?
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CLARA OSWALD
Clara ne s'attendait pas à ce que le corps de la dernière victime reposât directement dans l'amphithéâtre plutôt que dans une morgue. Elle fut choquée malgré elle de voir ce qui restait de la prostituée, exposé ainsi à la vue de nombreux hommes dont les visages étaient, cependant, tendus et préoccupés. L'autopsie semblait terminée ou sur le point de se terminer. Au centre du groupe, un homme grand et brun, aux yeux sombres et perçants qui dégageait une impression de calme et de maîtrise, parlait à voix basse avec les autres personnes présentes. Il semblait que ce fut lui qui ait officié comme légiste principal car il portait des gants et un grand tablier maculé qu'il était en train de retirer.
Helen Magnus qui se tenait jusque-là en retrait près de la porte de la salle, vint les accueillir avec un charmant sourire et un bref coup d'œil surpris, mais trop poli pour être insistant, en apercevant Clara aux côtés du Docteur. Elle s'étonna de le revoir si tôt mais s'arrêta de parler quand il souleva très légèrement son chapeau et baissa un peu son foulard.
― …si « revoir » est bien le terme adéquat, finit-elle avec une touche d'esprit pour faire passer sa surprise véritable. Attendez là une minute que les autres soient sortis. James ne s'étonnera de rien mais pas les autres praticiens…
Puis elle se tourna vers Clara et ajouta :
― Mademoiselle, je tiens à vous prévenir que le spectacle est difficilement soutenable. Puis-je vous suggérer de ne pas approcher de la table d'autopsie ?…
Clara inclina tête, tout à fait convaincue du bien-fondé de sa remarque.
― Etes-vous une amie du Docteur ? poursuivit-elle.
― Plutôt sa garde-malade, répondit Clara. Pour le cas où il aurait besoin de m'envoyer pour requérir votre aide, je suppose…
Le Docteur avait probablement la tête tournée vers les médecins, vu la posture générale de son corps et il répondit à mi-voix :
― Je vous ai dit que tout se passerait probablement bien…
Magnus acquiesça.
― Et bien, je suis soulagée que vous soyez là dans cette éventualité. Auriez-vous une formation médicale, Miss… ?
Miss quoi ? Sa question restait clairement en suspens. Clara sourit en comprenant que la femme en face d'elle attendait en fait d'être présentée. D'ordinaire, tout le monde se fichait complètement de qui elle était quand elle était en compagnie du Docteur… Mais de fait, Helen Magnus n'était pas une femme « ordinaire ».
― Oh, oui pardon, dit-elle en lui tendant la main. Je suis Miss Moneypenny. Jane.
Le Docteur se mit à rire sous cape en l'entendant se présenter ainsi mais il s'interrompit bientôt car James Watson s'approchait d'eux.L'homme les fixa avec intérêt quelques secondes sans sourire, mais sans aucune hostilité non plus. Il les jaugeait, pour autant que ça soit possible dans le cas du Docteur.
― Helen ? Je suis ravi que vous et vos amis me fassiez la surprise d'une petite visite inopinée…
La doctoresse blonde parut interloquée un instant et se reprit pour dire en souriant.
― Nigel a dû oublier de vous prévenir… Je vous présente le Docteur et Miss Moneypenny. Le Docteur souhaitait vivement nous aider sur les assassinats.
― A quel titre ?
― A plus d'un titre, répondit le Seigneur du Temps, en montrant discrètement son absence de visage. Mais peut-être pouvons-nous en discuter dans votre bureau ?
Watson arqua un sourcil et se fendit d'un léger sourire qui anima le coin de son bouc soigneusement taillé, il tendit le bras vers la sortie en les invitant à le suivre sans tergiverser.
Lorsqu'ils prirent place dans le bureau universitaire de Watson, Clara se plaça spontanément en retrait des autres sans piper mot. L'atmosphère était légèrement tendue et tout le monde resta spontanément debout.
D'une certaine façon, l'incapacité où elle était de « voir » le Docteur sous son ancienne forme, lui permettait d'éviter de se laisser séduire à nouveau par ses manières extravagantes et décalées. C'était sans doute donc une très bonne chose vu ce qu'elle avait ressenti en le découvrant si attirant tout à l'heure, dans ce costume d'époque.
Le docteur Watson regardait pensivement dans la direction du Docteur Invisible avec une sorte de distance amusée, comme s'il n'était pas réellement persuadé que cet enfant de cinq ans dans un corps d'adulte pouvait réellement faire quoi que ce soit pour eux. Ses yeux attentifs allaient et venaient de leur invité mystère à Helen, et d'Helen à l'invité mystère. Clara supposa qu'il se demandait ce qui avait bien pu passer par la tête à son amie et collègue pour avoir autorisé « ça », mais il semblait trop poli pour l'énoncer en des termes aussi directs. Pour l'instant.
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JAMES WATSON
Il observa un moment la jeune femme pendant qu'il écoutait le Docteur et trouva très intéressant le regard qu'elle posait sur lui. Ou cette absence de lui. Il avait déjà épuisé tous les jeux de mots possibles avec son ami Nigel depuis plusieurs semaines. Elle éprouvait des sentiments pour le nouvel Homme Invisible. Non réciproques. Enfin, il aurait fallu pouvoir lire les expressions de ce dernier pour en être sûr. Ou il était suffisamment bon acteur pour n'en rien laisser paraître – ce qui en soi était une autre information intéressante – ou sa posture et sa voix ne trahissaient rien du tout.
― Que pensez-vous pouvoir nous révéler de plus sur l'affaire qui nous occupe ? Je suis probablement très capable d'arriver assez vite à des conclusions définitives sur l'identité du meurtrier. Je me demande s'il était bien prudent de vous administrer une dose de ce produit sanguin, même à faible densité, alors que les effets sur nous sont déjà particulièrement imprédictibles…
Et au grand intérêt de l'accompagnatrice (qui se posait elle-même la question), il ajouta :
― …de plus je ne vois pas pourquoi vous liez le Sang et les meurtres.
La posture du Docteur changea en un instant. Il se tenait plus droit mais paraissait pourtant plus à l'aise et plus sûr de lui. Watson ne put qu'enregistrer la façon dont cela l'incitait lui-même à le prendre plus au sérieux, alors même qu'il n'était pas dupe. Un acteur ou un manipulateur consommé, assurément. Trop facile. Trop naturel.
― Helen m'a révélé qu'un autre de vos collègues était intéressé et avait essayé d'obtenir de vous cette inoculation. Je serais enclin à le soupçonner.
― Helen ! Pourquoi lui avez-vous parlé d'Adam ? demanda Watson avec un regard un peu sévère à qui de droit.
Elle se croisa les bras sous la poitrine et rétorqua aussitôt assez froidement :
― C'est vous qui venez de le faire. Moi je n'avais rien dit de précis…
Watson capta le sourire en coin de la belle silencieuse et l'air furieux de Magnus. Il soupira et répondit :
― Soit. Worth ne veut pas le Sang pour lui-même mais pour sa fille qui est gravement malade. Elle se meurt d'un cancer du sang. Il est prêt à tout pour la sauver, mais pas nous. Nous ne saurions administrer un « remède » aussi terrible à une enfant. Aussi cruelle que soit cette perte, elle est pleinement naturelle et je suis particulièrement d'avis qu'il faut l'accepter plutôt que de risquer d'engendrer un nouveau monstre de foire…
― Mon ami, intervint Helen avec un rien de contrariété. N'avions-nous pas dit que nous nous devions de trouver un terme plus compatissant ?
― Laissez Helen, répondit le Docteur. Je ne me sens nullement offusqué.
A ce moment, le visage du Docteur redevint visible et Watson le découvrit en haussant un sourcil vaguement impressionné, ce qui lui arrivait fort rarement ces derniers temps.
― Vous contrôlez le gêne mutant de l'invisibilité !
Le Docteur s'abstint de répondre directement.
― J'ai proposé à Helen de me livrer à mes propres recherches pour vous aider et de comparer nos résultats. Le seul problème, c'est que j'ai très peu de temps devant moi, avant que mon organisme ne se débarrasse naturellement de la partie animale du sérum qui m'a été injecté. Pour l'heure, je ne connais bien sûr pas tous vos symptômes. Celui-ci est presque le plus « visible ». Celui d'Helen est pour l'instant le plus discret.
― Que savez-vous du mien ? demanda-t-elle avec un rien d'anxiété impatiente. Nous n'avons pas encore réellement pu déterminer en quoi j'ai été affectée… Je suis en excellente santé et je ne ressens aucun changement particulier.
― Disons que vos deux « capacités additionnelles » sont déjà innées dans ma propre physiologie naturelle… dit-il avec un sourire qui s'effaça quand il vit le regard goguenard de la jolie voleuse. Je suis donc plus intéressé par ce qui se passe pour les deux autres membres de votre société que je ne connais pas encore.
― Vous ne m'avez pas répondu, insista James Watson. Est-ce que vous contrôlez le gène mutant qui permet de vous rendre invisible ?
― Oui.
― Comment ?
― Comment n'est pas réellement le propos.
Les mâchoires de Watson saillirent de colère quand il serra les dents.
― Docteur, vous les offensez, intervint l'inconnue.
Il jeta un petit coup d'œil penaud sur elle et inclina la tête comme pour la remercier.
― Je craignais d'être bien plus offensant en développant directement pourquoi je croyais les deux affaires liées, étant donné la proximité et les liens d'amitié que je devine dans votre groupe…
Helen se sentait choquée parce qu'elle croyait comprendre.
― Etes-vous en train de suggérer que c'est l'un d'entre nous qui commet ces meurtres ? chercha-t-elle à savoir d'un ton beaucoup plus froid et effectivement blessé.
― Rattrapez ça maintenant, petit malin, souffla la petite brune entre ses dents.
― Je conçois que ce n'est pas forcément facile à entendre… répondit-il avec un sourire un peu flou.
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Clara s'approcha pour se mêler de la conversation car elle trouvait qu'il se débrouillait mal.
― Docteur Magnus, considérez seulement que le Docteur n'a pas de preuves de ce qu'il avance. Je suppose qu'il cherche plutôt à vous éliminer tous de l'équation car son expérience personnelle le pousse systématiquement à envisager que presque toutes les hybridations sont problématiques à gérer. Le fait qu'il cherche à savoir si quelqu'un d'autre a pu recevoir de ce mystérieux produit dont vous parlez, est son moyen le plus élégant de vous rayer de la liste de ses suspects.
Tous trois la regardèrent d'un air interloqué, chacun pour des raisons différentes. Le Docteur parce qu'il était étonné de voir qu'elle prenait sa défense, Watson et Magnus parce qu'ils découvraient que la jeune personne avait manifestement suivi et compris leur conversation…
― C'est incorrect de supposer que les hybridations sont forcément problématiques, réfuta Watson. Que ce soit dans le règne végétal et animal, nombre de croisements sont parfaitement stables et assez viables, pour autant qu'il s'agisse d'espèces proches…
― Pleinement d'accord avec la fin de votre phrase : pour autant qu'il s'agisse d'espèces proches. Ce qui vous manque pour suivre mon raisonnement, mon cher Watson, c'est que le produit sanguin, du moins celui que j'ai reçu, n'est pas un sang « pur » contrairement à ce que vous croyez. Il n'existe rien qui s'apparente réellement de près ou de loin à une race de vampires « purs ». D'ailleurs il n'a pas de « race » de vampires du tout, ou du moins pas telle que vous la concevez.
Helen secoua la tête en se croisant les bras. Elle ne pouvait qu'objecter.
― Mon père a été amené à faire beaucoup de recherches sur eux. Ils ont tous été éliminés aujourd'hui, mais au lu des trop nombreux témoignages accumulés au fil des siècles, leur existence ne peut être mise en doute… Nous ne pouvons pas être assez arrogants pour considérer que tout ce qui est antérieur à notre époque est forcément marqué du sceau de l'obscurantisme et de la superstition…
Clara commençait à se dire qu'elle adorait positivement cette femme. Bien sûr que son époque considérait que tout ce qui était antérieur comme nul et non avenu, et entaché de superstitions religieuses. Et c'était encore le cas au vingtième siècle.
― Je ne remets pas en doute l'existence de vos vampires, tempéra le Docteur. Je dis juste qu'ils ne sont pas ce que vous croyez. De plus, il y a un autre souci avec l'échantillon de sang que vous avez récupéré par votre père mais, là encore, je préférerais disposer de tous les éléments de preuve qui me permettraient de vous convaincre scientifiquement avant de vous en parler. C'est une simple question de temps.
Watson pausa en prenant appui sur l'une de ses jambes, la main au côté. Il n'était pas décidé à lâcher l'affaire.
― Pourtant, nous avons tous reçu une mutation génétique caractéristique des vampires, insista-t-il lentement et un peu sarcastiquement. Lorsqu'on peut mesurer à ce point des effets attendus, ne faut-il pas conclure que la race existe bel et bien ? Ce sont des chasseurs retors, rapides, forts et ils peuvent se fondre dans la nuit. Nous voyons bien comment avec le don d'invisibilité.
― Oui, acquiesça le Docteur. Impressionnez-moi en me disant aussi pourquoi vous ne les avez pas reçues toutes en même temps ? Et qui a hérité de l'appétit de sang, et de l'exacerbation des instincts violents de prédation ?
― Nous avons manipulé l'échantillon de Sang, expliqua Helen. Et j'avoue que j'ai encore du mal à saisir si c'est pour cette raison que nous ne sommes pas tous devenus purement et simplement vampires nous-mêmes. Mais c'était notre objectif, je veux dire bien sûr : isoler et extraire certains principes utiles pour faire progresser la médecine…
― Et je suis impressionné par vos recherches, mais ce qui m'importe en priorité à l'heure actuelle, c'est que les attaques cessent. Nous avons affaire à un tueur intelligent, éduqué mais pourtant capable d'une extrême sauvagerie. Je sors patrouiller ce soir avec des amis dans l'espoir de le perturber dans sa chasse, ou de l'arrêter si possible. J'espère avoir la chance de recueillir plus d'indices et sans que quelqu'un d'autre ne soit blessé. Je vous suggérerais de vous rassembler pendant ce temps.
Watson le considéra d'un air impénétrable.
― Vous avez l'air vraiment persuadé de ce que vous avancez à défaut d'être réellement persuasif. Quelle est votre motivation ?
― Je vis ici régulièrement. Londres est un peu comme une ville d'adoption pour moi.
― Un étranger ? Mais… ce n'est pas la seule raison, paria James Watson.
― Non en effet, reconnut le Docteur. Je suis considéré comme un hyperactif et j'ai une fâcheuse tendance à mettre mon nez dans les affaires des autres.
― Probablement maniaco-dépressif, ajouta Helen.
― Maniaco-dépressif ? En tant que médecin je pencherais pour la kaliémie. Vous souffrez d'un manque de potassium probablement à cause d'une malformation ou insuffisance cardiaque. Savez-vous que le battement de votre cœur est plus qu'anormal ?
Le Docteur souleva son haut de forme et tendit son bras à Clara. Il adressa un clin d'œil à Helen Magnus et répondit avant de sortir :
― Pour un humain, oui ! J'aurai grand plaisir à vous revoir tous deux, mais nous devons nous retirer car je suis attendu.
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James Watson le regarda partir sans dire un mot et secoua la tête d'un air incrédule avant de se tourner vers son amie.
― D'où sortez-vous cet original ?
― Vous le détestez, n'est-ce pas ? demanda Helen avec un peu de déception fataliste.
― Attendez voir que je fasse le compte… Il est insupportable. Condescendant. Evasif. Il ne justifie aucun de ses propos et se complait dans des poses énigmatiques… Essayez de lui présenter Nikola ! S'ils ne s'étripent pas dans l'instant, ils s'enticheront l'un de l'autre à tel point que vos querelles domestiques avec Druitt seront réglées illico !
Elle lui renvoya à cette boutade un léger sourire triste.
― Pourquoi les hommes sont-ils toujours perpétuellement englués dans la rivalité ? Vous n'avez pas aimé qu'il vous remette en question.
― Vous vous trompez. Je ne me suis pas ennuyé une seule seconde. Et son amie est remarquable.
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