Qui me sauvera si ce n'est moi ?
"Les Fraternels sont tous gentils les uns, avec les autres. Alors soit gentille avec moi!". Cette phrase, aux allures innocentes à été, est et sera toujours, ma peur la plus terrible.
Je m'appelle Carméllie, j'ai vingt ans et je suis une Fraternelle. Non pas par choix mais par naissance. Il y a quatre ans je n'ai pas pu passer le test car j’étais à l'hôpital, inconsciente. La veille du jour qui allait me libérer, un sac de céréale est tombé sur le sommet de mon crâne et comme le stipule les règles, je passerai mon test lorsque j'aurai vingt ans. Mais si par malheur je ne pouvais pas aller à ce test pour cause de maladie ou blessure, je resterai dans ma faction d'origine et ça, il en était hors de question. Le soleil commence à se coucher, et il me reste encore un cageot à trier et ranger. Lorsque mon travail fut totalement terminé, je sortis dans la nuit noire. J'avais décidé de rester éveillée toute la nuit et de ne pas rentrer chez moi mais Tédis Brass en avait décidé autrement. Tédis Brass est un Fraternel âgé de quarante-trois ans. Il n'a ni femme, ni enfant. C'est pourquoi il a accepté de prendre soins de moi quand mes parents sont morts lorsque j'avais dix ans. Les Altruistes ont pensé que c'était une bonne idée surtout, après qu'il ait soutenu que de cette manière, il se sentirait moins seul. Tédis m'attendait les bras croisés, le sourire aux lèvres avec son affreux pull jaune moutarde, sont pantalon de daim orange et ses vielles tongs jaunes. Il faut dire que les Fraternels n'aimaient pas les couleurs tristes alors ils ne mettent que du vert claire, jaune, orange et parfois rouge. Moi, je ne portais jamais autre chose qu'une jupe longe et un chemisier vert et je faisais en sorte que ce vert soit le plus terne possible. Tédis s'avance vers moi, empoigne mon bras fermement et me pousse vers la maison. Une fois arrivé, il me tend mon bol de soupe sans un mot. J'avale le breuvage, lave le bol et baille ostensiblement. Je lui souhaite une bonne nuit et pars dans ma chambre pour aller me coucher. Seulement à peine fus-je dans mon lit que Tédis frappa à la porte puis entra. Il avait un foulard et des cordages dans la main droite et un grand couteau dans la gauche.
-Les Fraternels sont tous gentils les uns, avec les autres. Alors soit gentille avec moi! me dit-il.
Le lendemain fut une journée des plus belles, le soleil brillait, la chaleur était parmi nous mais il m'était impossible de mettre un vêtement court si je voulais rester discrète. La nuit dernière n'avait pas été aussi terrible que je l'aurai cru. Je me mis dans la file qui indiquait ma faction et attendis sagement le commencement. Je fermais les yeux et commençais à méditer sur le choix de ma future faction. Évidement j'avais une idée déjà où je voulais aller mais j’hésitais encore un peu. L'heure de rentrer dans le grand bâtiment des testes arrive enfin et nous nous mîmes en petit tas de même factions. Une femme blonde aux cheveux ondulés nous expliquait calmement ce qui allait suivre.
-Vous êtes ici pour passer un test qui définira, selon votre personnalité, quelle faction est faite pour vous. Cependant demain vous serez seul à choisir. Bien que le test vous ait donné une faction vous pouvez en choisir une autre. Même si généralement le test ne se trompe pas et qu'il est préférable de lui faire confiance, la volonté peut aussi donner des résultats. Bon test !
Elle nous tourna le dos et une porte s’ouvrit. Nous y allâmes et de grands écrans affichaient nos noms avec un numéro. Je fus la première. Carméllie Brass 18. Je me dirige donc vers la porte blanche au chiffre d'agent dix huit. J'ouvre la porte et me retrouve face à une Audacieuse. Elle me montre le siège et je m'y assoie sans un mot, les mains sagement sur les genoux.
-Tu es drôlement calme pour une Fraternelle, dit-elle. Je m'appelle Tori.
-Carméllie, dis-je simplement.
Elle me demande de mettre ma tête entre deux étaux et me fait avaler un liquide transparent bleu. Je le bois et avant de sombrer dans le mirage, elle me souhaita bonne chance. Lorsque je ré-ouvre les yeux la salle est vide, il ne restait que les miroirs et le siège. Je descends et me retourne. Le siège avait disparu. Soudain un grognement féroce se fait entendre. Je me retourne et vois un chien enragé. Mon reflet me dit de choisir avant qu'il ne soit trop tard. Je lui demande de quoi elle parlait. Elle me montre des plateaux ou il y avait plusieurs choses. Seulement je n'en vis que trois, un couteau, un morceau de viande et un jouet pour canin. Je ne sais pas quoi prendre, je regarde de-nouveau le chien puis les plateaux seulement maintenant ils sont vides. Je fronce les sourcilles, mais ne panique pas encore. Il me grogne dessus mais je ne recule pas. Soudain une petite fille arrive en courant en disant que le chien est superbe. Cette fille c'est moi quand j’étais petite. Le chien sauvage s'est transformé en mignon chiot. Ce chiot adorable court vers la petite fille mais plus il avance vers elle plus il redevient l’horrible bête qu'il était tantôt. Ni une, ni deux je cours après le chien et l'attrape par le cou. Il se retourne et me me mord. Je ne crie pas, ne pleure pas, je ne ressens rien. Je le frappe puis fus aspirée vers la réalité. Lorsque je me retrouve de-nouveau sur le siège je suis atlante, j'ai le souffle court et Tori semble encore plus affoler que moi.
-Qu'elle est mon résultat ? lui demandai-je.
-C'est extrêmement rare. Tu es Altruiste...
J’allais lui dire que les Fraternels qui allaient chez les Altruistes étaient nombreux mais elle n'avait visiblement pas terminé.
-... Sincère, Érudit et Audacieuse. Tu es ce qu'on appelle une divergente. C'est rare et dangereux. Si on le sait tu seras assassinée. J'ai entré dans l'ordinateur que tu étais une Altruiste. Pars maintenant mais n'oublie pas. Ne le dit à personne. Ni a tes amis, ni à tes parents. Personne. Tu ne peux faire confiance à personne.
-Pourquoi m'aidez-vous, alors ? demandais-je soucieuse.
-Parce que mon frère à été tué alors qu'il était comme toi.
Je n'ai pas le temps de dire quoi que ce soit qu'elle me jette littéralement dehors. Je me met en chemin pour rentrer chez moi. Je décide de faire le chemin à pied, je n'étais pas vraiment pressée de rentrer. Évidement j'avais déjà songé à ne pas rentrer mais si quelqu’un ne se trouvait pas dans le quartier de sa faction il était aussitôt considéré comme sans faction. Et une fois sans faction, on ne revient pas en arrière. Je marche donc vers la ferme et les champs des Fraternels pour la dernière fois. Je dirais à Tédis que le test avait dit que j’étais Altruiste. Mais demain que devrai-je faire ? J'avais hésité entre Érudit et Audacieuse. Mais plus j’approchais de chez moi et plus mon ventre se tordait de peur. Lorsque le soir fut venu et que Tédis avait appris que le test avait dit Altruiste, il avait enlevé sa ceinture, allumé une bougie et m'avait entraînée dans sa chambre. Il me jette sur son bureau, ma tête frappe le tiroir et mon arcade sourcilière s'ouvre. Je saigne mais il sourit.
-Tu es encore une Fraternelle! Et les Fraternels sont tous gentils les uns, avec les autres. Alors sois gentille avec moi! crache t-il dans un souffle remplis d'alcool.
Lorsqu'il fut enfin endormi, je me lève et vais dans la salle de bain, je nettoie le sang sec sur mon visage, ainsi que sur mes cuisses et mon buste. Je regarde mon dos et suis soulagée qu'il n'ait pas frappé trop fort. Il y avait bien quelques lignes rouges de sang, mais si petites que si je restais sans bouger de la nuit, elles seraient refermées demain matin. J'attendis avec impatience que le soleil se lève enfin pour que je puisse quitter cet enfer. Je m'habille et prend mon petit déjeuner. Tédis se lève et me dit bonjour. Comme si de rien n'était. Comme à chaque fois. Évidement je ne dis rien, il prend sont petit déjeuner et m'accompagne pour aller voir mon choix. Il ne me lâche pas la main de tout le trajet. Tantôt en la caressant tendrement, tantôt en la serrant à me casser les os. Durant la nuit j'avais réfléchi et je savais quel choix je ferai. Nous nous installâmes dans un grand amphi théâtre et nous nous mîmes au premier rang des Fraternels. Tédis jouait la comédie à la perfection, pour les autres il était le Fraternel parfait. Si seulement ils savaient qui il était véritablement... Le choix commença et plus les noms étaient énoncés plus j'avais des sueurs froides. Pour bousculer un peu les choses, ils avaient décidé de nommer les gens en partant de la fin de l’alpha. Je serai donc la dernière à être appelée.
-Bien, plus qu'une personne. Mademoiselle Carméllie Brass!
Je me lève et pars vers l'autel ou je devais me couper et faire couler mon sang dans les récipients représentant les factions. Je me coupe et tends mon bras vers les Audacieux. Je sers ma main et attends sagement qu'une goutte de sang tombe sur les braises chaudes.
-Au... Audacieuse.
Personne ne disait rien. Je fusille du regard la personne qui m'avait élevée pendant dix ans et lui fait un doigt d'honneur. Là, les Audacieux hurlent de joie et les plus anciens me félicitent de mon choix, pendant que les Fraternels s'indignent. Nous partîmes en courant et je n'avais aucun problème à suivre contrairement aux sept Sincères, les quatre Erudits et les deux Altruistes. Nous montâmes sur les poteaux qui nous menaient au train, quinze mètres au-dessus du sol. Lorsque le train arrive je vois les autres courir après lui pour ouvrir les portières et entrer en marche dans le train. Je ne parviens pas à ouvrir la porte mais j'arrive à monter dans le wagon sans problème. Le véritable problème c'est que je suis la seule Fraternelle à aller cher les Audacieux cette année. Cela n'était jamais arrivé avant. Tous me regardent comme si j'avais la galle et après un trajet que je trouve interminable, nous sautâmes du train en marche. Nous atterrîmes tant bien que mal sur un toit d'immeuble où nous attendaient plusieurs audacieux.
-Je m'appelle Eric et je suis l'un des chefs des Audacieux. Tout d'abord félicitation pour avoir choisi notre faction mais c'est là que les choses vont vraiment commencer. Si vous voulez véritablement faire partie des Audacieux il va falloir sauter de ce toit jusque dans le trou que vous voyez là, 26 mètres au dessous. Ceux qui ne sautent pas se retrouveront sans faction. Alors ? Qui veux commencer ?
Tout le monde se regarde, choqué. Il y eu quelques questions, est-ce qu'il y avait de l'eau ? Peut-être. Es-ce que c'était un trompe l’œil ? on n'avait qu'à sauter pour savoir. Vu que personne ne semblait se décider et que je ne voyais pas vraiment ce qu'il y avait d'effrayant dans cette épreuve, je m'avance jusqu'à lui et lui dit que moi, je sauterai. Il me regarde de haut en bas et se met à hurler de rire.
-Une Fraternelle chez les Audacieux ? rit-il. C'est bien la première fois qu'un Fraternel arrive jusqu'ici. C'est n'importe quoi! Que fais-tu ici ?
-Je ne suis pas gentille, dis-je froidement en montant sur le rebord et en sautant sans hésitation.