Devil May Cry x Bayonetta - Abbadon
Le bureau plongé dans les ténèbres était secoué par le passage du métro qui daignait ébranler l’ennui de Dante, perdu dans ses pensées, et accessoirement dans son magazine dont les moeurs seraient grandement discutables. Sans même un regard, l’homme prit une cigarette dans le paquet posé sur le bureau qui lui servait davantage de repose pied que d’outil de travail.
Des morceaux de papiers accrochés sur les murs représentaient des croquis de créatures qui défieraient l’entendement d’une personne raisonnable. Mais pour Dante, ce menu fretin posé sur papier par ses « talents » de dessinateur du dimanche lui servait davantage de pense bête au cas où il devait faire face à ces engeances maléfiques, une nouvelle fois. Ses cheveux blancs réfléchissaient le peu de lumière rouge du crépuscule, et son manteau écarlate tombait en cascade sur sa chaise.
Se remémorant les souvenirs de ses récentes batailles, l’homme referma le magazine, le jeta nonchalamment dans le tiroir ouvert et souffla une fumée légère qui s’étiola dans l’air en s’élevant vers le faux-plafond blanc cru.
La sonnette tinta.
L’homme posa ses yeux bleus sur l’entrée et se replongea dans ses pensées.
On sonna à nouveau.
Irrité, Dante fit claquer sa langue.
— Y’a personne ! grommela-t-il.
Une silhouette traversa le mur. Doté de réflexe surhumains, l’homme se releva et dégaina Ivory, l’un de ses deux pistolets qui l’accompagnait depuis quelques années maintenant. Il posa son regard sur le démon fou qui avait osé venir le voir au Devil May Cry, SON territoire.
L’entité prit alors une forme plus tangible, jusqu’à arborer les traits d’un gogloth à la peau sombre, les yeux cachés par des lunettes de soleil. Dante pu discerner, par dessous le verre teinté, des yeux rouges luisant de malice et de pouvoir.
— Voilà une tête que je n’ai pas revu depuis… longtemps, Rodin, salua Dante en baissant son arme.
— Et en voilà une que j’ai vu alors qu’il cherchait désespérément des joujoux pour se battre contre son frangin, répliqua Rodin sur le ton de la taquinerie.
— C’est ça… grommela Dante en lui tendant la main.
Rodin la serra et observa les alentours, constatant à quel point Dante n’avait aucun sens de l’hospitalité ou de conscience professionnelle.
— Généralement, chez les humains, un bureau est censé être accueillant et parfumé, pas sentir la cigarette et l’alcool.
— On va mettre ça sur le compte du côté démoniaque que je tiens de mon paternel. Tu veux boire un truc ? Proposa Dante.
— Proposer à boire à un barman offrant de la qualité est assez risqué.
— D’accord, donc je suppose que tu diras non à un whisky de cent ans.
— Oublie ce que je viens de dire, d’accord ?
— Voilà.
Dante sorti deux verres qu’il servit généreusement. Ils trinquèrent et trempèrent leur lèvres pour apprécier le liquide chaleureux. Le chasseur posa son verre sur son bureau et décida d’aller au fond du sujet.
— Voir une huile des enfers se pointer dans mon humble cabinet, ça annonce rien de bon, je me trompe ? s’enquit Dante.
— Pas vraiment, non.
L’homme soupira, et s’appuya sur le bord de son bureau et focalisa son attention sur Rodin.
— Alors, dis moi, convia Dante d’une voix peu enclin à écouter des histoires
— Abbadon l’Ancien s’est réveillé de sa sieste.
Dante fronça les sourcils, sentant un très mauvais pressentiment poindre.
— Laisses moi deviner… Virgil y est pour quelques chose ?
— Pas cette fois-ci. Le vieux a tout simplement finit de roupiller, rectifia Rodin.
— Donc, l’objectif serait de le ramener dans son lit pour qu’il dorme quelques dizaines de milliers d’années de plus… Mais j’ai du mal à comprendre, pourquoi les démons voudraient la faire à l’envers à leur semblables ? Généralement, vous me faite suer avec votre… Solidarité, grommela Dante après avoir repris une gorgée dans son verre.
— Abbadon est un destructeur dans sa forme la plus brute, c’est un Primordial, une sorte de créature mi-ange, mi-démon. Quand il décide de se mettre au boulot, il ne fait aucune distinction, même si ça implique de se retrouver seul dans le néant pour l’éternité, renseigna Rodin.
— Je vois, mais il m’a l’air costaud votre « Ancien », je ne sais pas si mes petits bébé pourraient le faire roupiller… Et puis, pour le côté démon, je gère, mais je n’y connais rien sur les anges, répliqua l’homme en tenant Ivory et Ebonny dans ses mains.
— À vrai dire, je connais quelqu’un qui compenserait ton ignorance.
— Qui ça ?
— Une sorcière d’Umbra.
Dante leva un sourcil et prit une autre gorgée.
— Elles existent encore ?
Rodin claqua des doigts, faisant apparaitre une porte écarlate sur le mur du fond de la pièce. Elle s’ouvrit doucement, laissant passer une main fine et manucurée. Une longue jambe ferme et habillée d’un pantalon au tissu étrange passa l’entrebâillement. Dante fronça discrètement les sourcils face à l’entrée quelques peu énigmatique de ladite sorcière d’Umbra.
Le corps de l’élégante inconnue aux longs cheveux noirs passa le pas de la porte. Les yeux du chasseur de démon parcoururent plusieurs fois le corps svelte de la brune au regard enflammé. Elle fit jouer sa langue sur la sucette rouge qu’elle avait dans la bouche et redressa ses lunettes pendant sa marche
L’homme déglutit face à la nonchalance de la connaissance de Rodin. Elle papillonna du regard et posa sa main fine sur le bureau où était appuyé le maître des lieux. Sans même prendre la peine de se cacher, la sorcière fit parcourir ses yeux sur le corps de Dante. Elle sortit la sucette de sa bouche dans un bruit de succion.
— Dante, Bayonetta… Bayonetta, Dante, présenta Rodin.
— Tu ne m’avais pas dit que j’allais faire équipe avec un mec comme… ça… dit elle sans lâcher Dante du regard.
— C’est ça… vous voulez que je vous laisse seuls peut être ? grommela Rodin.
Dante brisa le contact visuel entre lui et Bayonetta puis se concentra (comme il pouvait) sur le reste de l’histoire du démon.
— Je disais donc, Abbadon l’Ancien… Abbadon l’Ancien… merde, j’ai perdu le fil. Quoi qu’il en soit, il y a une relique gardée par des fanatiques illuminés qui vouent un culte en l’honneur de ce vieux crouton à Fortae, la capitale du continent Sud. Je vous conseille de ne pas tarder à y aller. Ces cinglés prévoient de faire une procession pour déplacer une relique qui pourrait vous intéresser.
— En quoi serait elle interessante, Rodin ? S’enquit Bayonetta.
— C’est un calice, j’ai des contacts qui m’ont affirmés qu’il a recueilli le sang de l’Ancien lors de la Grande Guerre des enfers. Les pouvoirs octroyés par le sang d’Abbadon vous permettra de lui infliger des blessures à lui, et ses disciples. Je n'aurait qu'à la fondre et l'incorporer à vos armes...
— Tu vas nous faire une ristourne ? S’enquit Dante.
— Non.
La réponse simple et concise du démon arrachèrent un sourire aux deux compagnons. Dante s’étira et tendit la main à Bayonetta.
— Eh bien, c’est un plaisir de travailler avec toi.
— Un plaisir partagé, chéri, répondit elle en serrant affectueusement la paume de son partenaire.