Le journal d'Anna
Chapitre 4 : 19 juillet 2017: une mauvaise surprise
1899 mots, Catégorie: G
Dernière mise à jour 26/04/2020 14:08
19 juillet, 10h45
Je suis déjà réveillée depuis au moins deux bonnes heures. Je suis dans la cuisine avec ma sœur où l’on prépare le repas pour le midi. Nous faisons des lasagnes au bœuf mais aussi des lasagnes végan pour Margot, qui suit ce régime alimentaire depuis près de deux ans. D’ailleurs, j’aimerais écrire un article sur cette cause lorsque je me sentirais prête à créer mon propre site. Nous discutons toutes les deux de tout et n’importe quoi, on a tellement de choses à se raconter.
En tout cas, elle cuisine toujours aussi bien et c’est un plaisir de l’aider. Grâce à elle, je vais peut-être m’améliorer en cuisine. Je suis vraiment très nulle.
Quand vient l’après-midi, nous partons toutes les deux à l’hôtel où j’étais la veille, pour aller chercher mes quelques affaires. Je les range ensuite dans sa voiture puis nous décidons de nous balader le long du canal.
Moi : ça me fait tellement du bien de revenir ici.
Chloé : c’est vrai que c’est très agréable, on est bien ici. C’est bien pour cela que je ne suis jamais partie.
Moi : j’avais oublié le plaisir que ça procurait. D’ailleurs, hier j’ai été déçue de voir que la jolie boutique que nous aimions beaucoup a été remplacée.
Chloé : oui, elle ne marchait plus beaucoup, je n’y suis plus allée quand tu es partie.
Anna : c’est dommage.
Chloé : oui c’est dommage.
Au bout de quelques minutes de marche et silence, je me rappelle de quelque chose que m’a dit Maxime au Spoon hier et qui me tracasse. Je décide d’en parler à ma sœur en espérant qu’elle ne s’énerve pas.
Moi : dis Chloé, j’ai une question mais je ne veux pas t’énerver.
Chloé : vas-y, ne t’inquiète pas.
Moi : hier quand j’ai rencontré ton fils au Spoon et que je lui ai avoué mon identité, il m’a dit que…
Chloé, finissant ma phrase : que je ne lui avais jamais dit que j’avais une sœur.
Moi : exact.
Chloé : je ne leur ai jamais parlé de toi, c’est vrai, je vais pas te mentir. Tu sais quand tu es partie, enfin que maman t’as virée de la maison, j’ai eu beaucoup de mal à m’en remettre, je lui en ai beaucoup voulu. Mais je t’en ai encore plus voulu de ne pas avoir repris contact.
Moi, les larmes aux yeux : je suis tellement désolée.
Chloé : eh, essuie tes larmes, tu es là maintenant, tout va bien.
Moi : vas-y finis.
Chloé : je ne voulais pas devoir répondre à leurs questions, pourquoi tu étais partie ? J’ai beaucoup souffert et je ne voulais remuer le couteau dans la plaie. Au fur et à mesure, j’ai réussi à un peu t’oublier, mais maintenant tu es là et c’est le principal.
Moi : oui, j’avais besoin de reprendre contact avec toi et de te prendre dans mes bras.
Chloé : tu sais que je t’aime toi. A moi de te poser une question, je sens que tu vas t’énerver car c’est un sujet sensible pour toi.
Moi : tu me fais peur là.
Chloé : tu comptes reprendre contact avec maman ?
Moi, les nerfs commençant à monter : okay, je comprends pourquoi tu avais peur de me poser cette question.
Chloé : je suis désolée mais il faut bien y penser à un moment.
Moi : je sais mais c’est tellement dur, c’est à cause d’elle tout ça.
Chloé : oui, elle n’a vraiment pas été cool.
Moi : j’ai été à la rue pendant des semaines. Heureusement que je suis partie et que j’ai rencontré Martin qui m’a beaucoup aidée à me reconstruire.
Chloé : et du coup tu comptes faire quoi avec elle ? Si tu restes à Sète, tu seras obligée de la revoir.
Moi : je sais mais j’ai besoin de temps là.
Chloé : je comprends ma chérie, je comprends. Ça te dit d’aller au Spoon prendre un café ?
Moi : oui carrément. Il faut que je remercie le gérant pour hier.
Chloé : Tristan ?
Moi : tu le connais ?
Chloé : tout le monde connait Tristan ici. Allez viens.
On se dirige alors vers le Spoon. Quand on arrive, je me dirige directement vers le bar et remercie Tristan.
Moi : bonjour.
Tristan : Ah bonjour. Alors vous avez retrouvé la personne que vous cherchiez ?
Moi : oui, elle est là-bas (en montrant la table ou est installée Chloé)
Tristan : ah mais je la reconnais maintenant, c’est Chloé Delcourt.
Moi : oui c’est elle.
Tristan : c’est votre sœur ?
Moi : oui. Je voulais vraiment vous remercier car sans vous je ne l’aurais pas retrouvée.
Tristan : c’est normal.
Moi : j’y vais, merci encore.
Je retourne alors vers ma sœur et on commande un café malgré cette chaleur.
19h, chez Chloé
Nous commençons à mettre la table pour manger lorsque quelqu’un toque à la porte. Chloé, qui semble savoir qui est derrière cette porte, va ouvrir. Elle a l’air stressée. J’ai alors un mauvais pressentiment. Qui est derrière cette porte ?
Elle ouvre la porte et quand je vois la personne, je m’enfuis dans ma chambre en courant, les larmes aux yeux. Je n’en reviens pas, comment Chloé a-t-elle pu me faire ça ?
Chloé : Anna, attends.
Marianne, à Chloé : c’était une mauvaise idée Chloé, je vais m’en aller.
Chloé : non maman, reste, s’il te plaît, je vais lui parler.
Je vois ma sœur dans l’entrebâillement de la porte de ma chambre, elle toque et entre sans que je lui donne l’autorisation. Elle s’assoit sur le lit.
Moi : comment tu as pu me faire ça ? Cet après-midi, tu me demande si je suis prête à la revoir, je te dis non, mais tu lui demande quand même de venir.
Chloé : je l’ai prévenue hier de ton retour, elle voulait venir s’expliquer, j’ai accepté qu’elle vienne ce matin, avant que tu me dises ça.
Moi : je veux pas la voir.
Chloé : écoutes au moins ce qu’elle a à te dire.
Moi : non.
Chloé : fais-le pour moi.
Moi : tu ne peux pas me demander ça.
Chloé, déçue : tant pis, elle est venue pour rien. Tu me déçois vraiment. Je fais tout pour que tu sois heureuse mais tu ne me rends pas la pareille.
Moi : ok, c’est bon, je vais écouter ce qu’elle a à dire mais si je veux qu’elle parte, elle s’en va.
Je me lève, la boule au ventre. J’ai tellement peur de la voir. Quand j’arrive, je la vois le visage. Rien que de la voir, elle me dégoûte, c’est ma mère mais j’ai envie de vomir en la voyant.
Moi, sèche : maman !
Marianne : Anna, écoutes-moi.
Moi : dépêches-toi, j’ai pas ton temps.
Marianne : je suis tellement contente de te revoir.
Moi : c’est pas réciproque.
Marianne : je suis tellement désolée de ce qu’il s’est passé il y a dix-sept ans.
Moi : pas autant que moi.
Marianne : j’étais tellement choquée à l’époque que tu sois enceinte aussi jeune que je n’ai pas su comment réagir. Je sais que c’est impardonnable mais j’espère que tu comprends.
Moi, hors de moi : c’est clair que c’est impardonnable, ce sont les monstres qui font ça, pas les mères, alors comment veux-tu que je comprenne ton geste. Ce que je comprends, c’est que tu n’as eu aucun scrupule à me virer et c’est juste dégueulasse.
Marianne : laisse-moi finir, s’il te plaît.
Moi : non, tu sais pourquoi ? Parce que je sais ce que tu vas me dire. Tu vas me dire que tu es désolée et que tu regrettes mais je suis désolée, faut assumer ces actes et arrêter de se trouver des excuses. Il y a dix-sept ans, j’ai dû abandonner mon enfant à cause de toi, tu arrives peut-être à t’en remettre mais pas moi. Ça fait dix-sept ans que je suis rongée par les remords. Alors s’il te plaît laisse-moi tranquille.
Suite à ces mots qui coupent le souffle à tout le monde, je sors dehors face à l’étang de Thau ou j’essaie de reprendre mes esprits. Au bout de quelques minutes, je sens une main se poser sur mon épaule. Je me retourne et vois Chloé. Je m’effondre dans ses bras, secouée. Je ne pensais pas mais ça m’a soulagé de dire tout ce que j’avais sur le cœur à ma mère.
Chloé : je suis désolée de l’avoir invitée, je n’aurais pas dû.
Moi : tu as bien fait, ça m’a fait du bien de lui dire tout ce que je pensais d’elle.
Chloé : en tout cas tu n’y es pas allée de main morte.
Moi : espérons que ça la fasse réfléchir.
Chloé : je pense oui. D’ailleurs, je ne savais pas que ça te faisait autant de mal d’avoir dû abandonner ton enfant.
Moi : si ça m’en fait toujours autant. En venant ici, j’espérais le retrouver.
Chloé : je suis sûre que ça arrivera. Tu l’avais appelé comment ?
Moi : Sacha.
Chloé : on pourrait aller voir à la mairie, voir s’il est susceptible d’être encore à Sète.
Moi : je ne t’ai pas tout dit sur cet abandon.
Chloé : ça veut dire quoi ça ?
Moi : je l’ai confié à une femme qui venait de perdre son bébé, on a inversé, j’ai déclaré mon enfant mort et le sien vivant.
Chloé : c’est dégueulasse, mentir comme ça c’est affreux.
Moi : Chloé, je m’en veux déjà suffisamment comme ça, tu n’es pas obligée d’en rajouter.
Je m’en vais et court dans ma chambre, bouleversée. Je l’entends malgré tout dire ses mots « qui est cette femme ? ».
Je sais qui c’est, c’est Flore Vallorta. Mais je ne suis sûre de vouloir retrouver mon enfant, Chloé m’a tellement faite culpabiliser.
Je me couche directement, l’appétit m’étant coupé. Je suis tellement triste et déçue par Chloé. Je ne l'aurais jamais cru capable d'un truc pareil. Je me demande réellement à ce moment si je devrais ici.