Code Alpha 2.0: Rainy Days

Chapitre 3 : Chapitre 3: La tache de sang

2235 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 12/07/2019 11:24

Jean

La sonnerie de fin retentissait enfin. Jean poussa un soupir de soulagement alors qu'il était en train d'essayer de régler un conflit entre deux enfants. Il leur fit signe de regagner leur classes respectives et alla chercher tous les gamins qui faisaient semblant de ne pas entendre le bruit strident qui résonnait dans la cours.


« Allez, on retourne en classe, la récré est terminée !

Une fille lui tira la langue en s'en allant. Il ne se souvenait pas que les enfants c'étaient si chiants. Quand il était jeune, lui, il n'avait pas été comme ça. Bon, il avait probablement était pire. Personne ne pouvait lui dire quoi que ce soit, il était probablement le cauchemar de plusieurs adultes qui l'avait à leur charge. Justement, il s'était dit que parce qu'il savait ce que ça faisait d'être un enfant difficile, il arriverait à les gérer. En plus, il était habitué aux enfants vu qu'il devait sans arrêt s'occuper de Léa. C'était loin d'être si simple...


Mais bon, la paie était là, même si elle restait très basse. Quand Ambre était venu emménager chez lui et que sa mère s'était faite virer de son poste, il avait bien dû trouver une solution. Pendant qu'Ambre et Léa continuerait leur parcours scolaires, il subviendrait aux besoins de la famille. Surveiller les enfants lui avait paru parfait : simple et accessible. Pas forcément besoin de diplôme et il avait pu commencer à travailler dès ses 17 ans. Même si c'était pas évident, le jeu en valait la chandelle. Depuis qu'il vivait avec Ambre, il avait l'impression de revivre. Pour la première fois de sa vie, il arrivait à se projeter dans l'avenir et toujours, il se voyait avec elle. Même la présence de Léa devenait tolérable ; Ambre avait commencé à s'en occuper, comme si elle en était la grande sœur. Elle lui lisait tous les soirs une histoire. Jean venait écouter derrière la porte, rien que pour entendre sa voix. En ce moment, c'était Coraline de Neil Gaiman. Ambre mettait toujours les formes pour raconter quelque chose, en jouant chaque personnage et en y mettant des intonations. Elle aurait pu être comédienne. Et si elle voulait l'être, Jean ferait tout son possible pour qu'elle y parvienne. Il lui était dévoué et c'était magique. Jamais il n'avait vécu comme ça, en mettant quelqu'un d'autre avant lui. Tout prenait du sens ainsi.


Bon, tout n'était pas aussi rose. Dernièrement, elle avait l'air... fatigué. Jean repensait beaucoup au dernier coup qu'elle lui avait fait, dans la cuisine. Elle ne va sans doute pas très bien. Je ne pense qu'à mon petit bonheur, mais elle s'est quand même fait chassée de chez elle par sa mère adoptive. Et puis il y a eu cette histoire avec Antoine...


Quand il était rentré un soir, il l'avait trouvé en larmes. C'était une de ses premières crises. Jusque là, ils avaient vécu leur petit bonheur à deux.

« Je n'en peux plus, Jean ! Il... Il me harcèle ! »

Elle lui montra son téléphone. Elle avait reçu une vingtaine de messages et au moins dix appel manqué. Tous d'Antoine. Jean avait décidé de prendre des mesures. Connaissant Antoine, il savait exactement où le trouver. Tout le monde avait tourné la page sur les horreurs qu'ils avaient vécu l'an passé, tout le monde sauf Antoine. Il devait encore roder dans le laboratoire de l'usine.

Quand Jean se rendit sur place, il comprit qu'il avait touché juste. Tous les écrans du labo étaient allumés. Ils y en avaient même pas mal de nouveaux. Pleins de câbles jonchés désormais le sol. Antoine était assit sur le fauteuil central comme s'il s'agissait d'un trône.

« Jean. Parfait, j'hésitai à te contacter. Il faut que tu parles à Ambre pour qu'elle me réponde. J'ai besoin de sa signature pour qu'elle puisse venir vivre avec moi.

Le jeune homme se précipita sur le génie et le souleva en l'attrapant par le col.

- C'est quoi ton problème avec elle ? Elle vis avec moi désormais.

- Je sais. Mais sa place n'est pas avec toi. Comprends-moi bien, c'est une Belpois. J'ai besoin d'elle pour pouvoir...

Jean bouillonnait de rage. Il tenait Antoine par la main droite et commença à serrer sa main gauche. Pour qui il se prenait ce petit merdeux ?

- Si elle te répond pas, tu t'es pas dit qu'il y avait p't'être une raison ? Elle a pas envie d'être ta sœur. Elle est très heureuse avec moi, donc laisse la tranquille !

- Je crois me souvenir qu'Ambre était parfaitement capable de s'exprimer toute seule, elle n'avait pas besoin d'un singe ou d'un homme fort pour la représenter. Je ne la laisserai tranquille que si elle me le demande elle-même. En attendant, tu vas...

- Mais je vais rien du tout, putain !

C'en était trop, le poing de Jean s'en alla droit rencontrer les lunettes d'Antoine. Pris par surprise et incapable de se défendre, l'intello s'écroula sur le sol. Jean se retourna et s'avança dans l'ascenseur.

- Si tu lui envoie ne serait-ce qu'un seul autre message, je reviens et je finis le travail. Elle veut pas te voir.

- Jean, je t'assure que tu vas le regretter.

- Ouais, c'est ça, cause toujours. »

Les portes de l'ascenseur se refermèrent.


Depuis, Antoine ne s'était plus approché d'elle. Et pourtant, Ambre avait continué à sombrer dans la mélancolie. Je ne sais pas comment l'aider. J'essaye de la motiver à aller en cours, mais elle reste à la maison, à ne rien faire. Je suis sûr qu'elle n'a même pas été à sa rentrée.

« Hey, Jean ! l'interpella Mathilde, une autre animatrice.

- Ah, salut. Ça a été de ton côté ?

Mathilde était une nouvelle animatrice comme lui. Bon, elle avait beaucoup moins de soucis d'autorité que lui. Pourtant, il avait une voix qui portait beaucoup plus ! Il ne l'avait pas entendu une seule fois crier, et pratiquement tous les enfants l'écoutait. Si seulement elle pouvait m'apprendre son truc. Elle était aussi assez mignonne, avec ses cheveux roux mi-long.

- Comme d'habitude ! Tu rentres chez toi là ? Lui demanda t-elle.

- Ouaip.

- Tu prends le bus ?

- Ouaip.

- On le prend ensemble ?

- Ouaip.

- Roh, t'es chiant !

- Ouaip ! »

Et ils éclatèrent de rire.


Jean se demandait si Mathilde n'avait pas un crush sur lui. Peut-être qu'il se faisait des idées mais... Elle parlait peu aux autres animateurs, elle riait à toutes ses blagues, même les plus nulles et elle l'attendait le matin pour prendre le bus. S'il n'y avait pas eu Ambre, peut-être qu'il aurait été intéressé aussi... Elle avait un truc, une façon de lui redonner confiance en lui quand il se parlait. Ca allait probablement être une très bonne amie, à défaut d'être plus.

Après quelques minutes d'attentes à l'arrêt, ils montèrent enfin dans le bus. La rouquine engagea à nouveau la conversation.

« Ta copine va bien ? Ambre c'est ça ?

- Ouais, ça va, fit Jean, l'air vague.

- T'as des frères et sœurs ?

- Une petite sœur, hélas...

- Je comprends. Et Ambre, elle en a ?

- Un frère, ouais. Mais ils se parlent pas.

- Ah bon ? Pourquoi donc ?

Mathilde posait toujours beaucoup de questions sur Ambre. Clairement, elle voulait voir si leur relation était stable, si « la voie était libre » ou pas. Il fallait qu'il lui fasse comprendre que même si elle était très charmante, il resterait avec Ambre.

- Je sais pas trop. Elle l'aime vraiment pas. Elle m'a même envoyé lui casser la gueule.

- Tu l'as fait ?

- Plus ou moins.

- Tu dois être sacrément amoureux d'elle pour aller te battre comme ça.

- Ouaip. »

C'est bon, elle a compris, pensa Jean. Ils se dirent au revoir. Le jeune homme devait aller faire les courses avant de rentrer et d'enfin revoir sa bien aimée. Elle allait probablement mieux maintenant, il allait pouvoir passer un peu de temps ensemble.


Ombre


Je me lavais les mains depuis quelques heures. Pourquoi ? Je n'en avais strictement aucune idée. Elles devaient être sales. Et elles ne paraissait pas devenir propre malgré la montagne de savon que je déversais dessus. J'étais en sueur aussi. Je devais puer la transpiration. J'avais couru jusqu'à chez Jean, sans m'arrêter. Ce dernier avait été surpris de me voir si tôt de retour, et trempée par la pluie. Il avait voulu m'embrasser mais je l'avais repoussé. Il comprit que quelque chose n'allait pas et commença à me poser quelques questions, mais je ne lui donnai aucune réponse. Il dû croire que je lui en voulais pour une quelconque raison, et s'en alla se recoucher avant de finalement se lever pour aller à son travail. Ce n'était pas grave, je n'avais pas besoin de lui. Je n'avais besoin de personne après tout, n'est-ce pas ? J'étais Ombre, hein, rien ne pouvait m'arrêter. Rien ! Rien...


J'étais Ombre et je ne devais pas l'oublier. J'étais Ombre... et quelqu'un le savait. C'était impossible. Ça m'avait semblé si... irréel... Peut-être que j'avais tout imaginé. Après tout, ce n'était pas logique qu'une fille aussi frêle puisse m'envoyer valser aussi loin ! Et puis d'où une gourdasse que j'avais jamais vu pouvait être au courant de mon plus grand secret ? Personne n'avait jamais été mis au courant de mon existence ! Ambre, cette petite conne, s'était bien gardé de me mentionner à qui que ce soit ! Alors comment cette personne pouvait savoir que je n'étais pas celle que je semblais être ? Comment pouvait-elle savoir que ce n'était plus Ambre qui habitait ce corps ?!


Ah... mais si. Il y avait une personne. Une seule qui était au courant. Qui sans savoir m'avait déjà vu. Melvin. Lorsque nous étions sur Lyoko. Ambre lui avait peut-être expliqué. Mais comment aurait-il pu savoir qu'elle avait disparu ? Toute cette histoire avait des trous, je ne comprenais plus rien... Mais une chose était sûre : on m'en voulait. Je ne savais pas qui ils étaient, mais ils ne me voulaient certainement pas du bien ! J'allais sans doute devoir me défendre. Bien. J'étais prête à le faire. Je m'étais battue pour arriver jusque là, j'étais prête à continuer à me battre.

Prêt de l'évier se trouvait un gros couteau, il coupait bien, je m'en étais souvent servi pour faire la cuisine à ce fainéant de Jean et à sa petite pute de sœur. Je pouvais m'en servir pour me défendre. Il était bien propre, je pouvais voir mon reflet dedans. Je pouvais voir mon reflet, et soudainement ce reflet se mit à rire.


« Ma pauvre petite Ombre, on dirait un chien blessé. Que comptes-tu faire avec cette arme ? Tuer quelqu'un d'autre afin que ta misérable existence sans but puisse continuer ?

Tuer ? Il n'avait jamais été question de ça... si ? Et puis Ambre... pouvait-on voir ça comme un meurtre ? Je ne l'avais pas tué. Ce n'était pas un meurtre, si ?

- Si. Tu l'as tué ! Tu es une meurtrière ! Un assassin !

Son sourire s'agrandit à un point qu'il n'était pas censé atteindre, déformant une fois de plus son visage.

- Je dirai même plus... tu es un monstre. Une abomination !

Et elle éclata de rire. Le même rire sadique qu'à son habitude. Je mis mes mains contre mes oreilles, mais sa voix résonnait dans ma tête, chantant :

- Ombre est un assassin ! Ombre est un assassin !

- Arrête... bredouillai-je, les larmes me montant aux yeux.

- Ombre est un assassin ! Ombre est un assassin !

-TA GUEULE ! hurlais-je en jetant l'ustensile contre le mur, de toute mes forces. Une immense colère s'était emparée de moi. Colère contre l'Autre et ses paroles qui faisaient toujours si mal. Colère contre cette salope d'Ambre qui continuait à me torturer alors que son absence devait tout résoudre. Colère contre le monde entier.


Léa arriva dans la cuisine en courant. J'avais oublié qu'elle était déjà rentrée de l'école celle là...

- Ça... ça va pas Ambre ?

Elle tenait dans sa main le livre que je lui lisais chaque soir, Coraline. J'étais un peu comme une grande sœur pour elle. Sauf qu'en réalité, elle aussi, c'était à Ambre qu'elle tenait. Pas à moi. Je ne pouvais compter sur personne.

- Si ça va ! Tout vas bien ! Tout vas parfaitement bien dans le meilleur des mondes ! »

Sans lui laisser le temps de réagir, j'allai chercher mon arme. Cette salope avait tord. J'avais le droit d'exister, et tout ce qui allait me dire le contraire allait le payer. En commençant par Melvin. Et puis « Ambre », c'était terminé, il était temps de m'affirmer ! Peut-être qu'ainsi l'Autre allait enfin me laisser tranquille !

- Ambre... tu es sûre que ça va ?

Je me retournai vers la petite fille, le regard plus agressif que jamais.

- Je ne m'appelle pas Ambre. »


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