Partenaire

Alice et Ben s'étaient levés relativement tôt pour se rendre chez Lucie pour préparer le repas qui leur servirait à accueillir Gaëlle à midi. Ils s'y étaient pris à l'avance et tout ce dont ils avaient besoin était rendu dans le frigo là-bas, mais ils avaient pris la décision de ne cuisiner qu'au dernier moment. Chez eux la chambre d'ami était déjà prête. Ben s'arrêta devant la boulangerie, Alice y acheta 3 croissants et 1 pain aux raisins puis ils s'en furent chez Lucie.

Quand elle leur ouvrit la porte, ils n'eurent pas à être des détectives de génie pour deviner qu'ils venaient de la réveiller. Lucie les accueillit néanmoins chaleureusement et saisit le paquet de viennoiseries des mains d'Alice. Elle y jeta un coup d’œil encore pâteux.

• Je n'aime pas les pains aux raisins.

Elle avait dit cela presque comme une question parce qu'elle savait que Alice en avait conscience. Cette dernière ne tarda pas à répondre.

• Les croissants sont en dessous. Le pain aux raisins n'est pas pour toi, c'est-ce pas Fred ?
• S'il n'y en avait pas eu, pas sûr que je serais resté, répondit la voix du-dit capitaine venant du canapé.

Alice et Ben s'approchèrent pour le saluer et le trouvèrent dans une position qui ne laissait aucun doute sur le fait qu'il avait dormi là. Lucie ne les avait même pas suivi et était directement allé dans la cuisine pour se préparer un petit-déjeuner.

• Quelle est ton excuse cette fois-ci ?, s'enquit Ben.
• Je voulais être sur place pour pouvoir donner un coup de main dès le matin, répondit-il innocemment.
• Et le week-end dernier ?
• Ça n'avait rien à voir. C'était pour une question d'organisation parce que j'avais un problème chez moi.

Sa progéniture le laissa partir avec cette excuse bidon. Ils savaient bien qu'il n'y avait rien de ce genre entre Lucie et Fred mais depuis quelques temps, le capitaine passait plus de temps chez elle. L'état du canapé témoignait parfaitement de sa nouvelle fonction de résidence secondaire.

Lucie se disait qu'avec Alice, elle avait pris l'habitude d'une autre présence dans la maison, Fred se trouvait toujours quelques raisons grotesques. Mais les faits étaient bien là. Il avait sa brosse à dents dans la salle de bain et un sac d'affaires dans un coin de la maison à défaut d'un tiroir.

La maison de la commandante était devenue un QG puisqu'il n'était plus rare d'y croiser, outre Fred lui-même, Ben, Alice et même Nassim et Elizabeth. C'est pour cela que la question de savoir où ils allaient faire le repas ne s'était jamais vraiment posée. De même que Ben n'aurait pas laissé sa mère dormir ailleurs que chez lui.

Pendant que Fred et Lucie prenaient leur petit-déjeuner, les frangins commencèrent la préparation. Ben avait décidé qu'ils mangeraient couscous et, même sans entrée, la quantité qu'ils avaient prévu était largement suffisante pour que personne ne reparte avec la faim. Lorsqu'ils eurent finis, Fred les rejoignit à la cuisine et Lucie s'en fut faire un brin de ménage dans son salon. Ben l'aida quand elle commença à mettre la table.

À l'heure prévue de l'arrivée de Gaëlle tout était prêt. Nassim, Elizabeth et Félix avaient été conviés malgré leur réticence à s’immiscer dans les affaires de famille. Ils étaient tous arrivés et attendaient avec les autres. Quand la sonnette de l'entrée retentit Fred fut le premier à tourner les roues mais laissa faire son fils qui avait accouru juste après.

Avant même de la laisser rentrer c'est lui qui était sorti pour la prendre dans ses bras. Ils restèrent plus d'une minute comme ça, sans bouger. Les autres ne les pressèrent pas. Alice retourna même dans la cuisine pour peaufiner quelques détails et commencer à ranger ce qui pouvait l'être. Loin de s'enfuir ou de se cacher elle resta attentive aux bruits du salon et entendit clairement le moment où la porte se ferma et où la voix de Gaëlle s'éleva.

• Salut Fred.

Alice avait déjà vu des photos de la mère de Ben mais c'était très différent de la voir en chair et en os. Pour lui dire bonjour Fred lui embrassa la main. Cela n'avait rien d'un baisemain princier, cela ressemblait plutôt à un compromis qu'ils avaient trouvé à la suite de l'accident. Lucie les regardait avec un sourire légèrement figé qui n'avait certes rien de froid mais qui tenait plus de la politesse que de la grande amitié. Alice ne fut pas la seule à le voir mais, comme les autres, elle ne fit aucune remarque.

Gaëlle salua ensuite Elizabeth, qu'elle avait croisé de loin en loin au cours des années et Borel dont elle se souvenait à peine. Elle se montra ensuite très chaleureuse avec Lucie mais bloqua quelques secondes sur Félix avant d'oser dire que son visage ne lui revenait absolument pas.

• C'est normal. Nous ne nous sommes jamais rencontrés. Je suis Félix Duval, le meilleur ami d'Alice.

Gaëlle parut soulagée que sa mémoire ne lui ait pas fait défaut et comme le juge se montrait aimable et tactile elle le salua avec la même ferveur. Puis il se tourna vers la cuisine, là où Alice se tenait et observait toute la scène encore un peu à l'écart. Elle avait au visage ce sourire bienveillant qui la caractérisait tant.

• Bonjour je suis Alice. On s'est déjà parlé au téléphone.
• Je sais. Je l'aurais deviné entre mille, lui répondit Gaëlle.