Un duel à deux voix.

Chapitre 1 : Il était une fois deux voix dans l'Ouest.

2858 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 17/07/2023 20:19

Note de l'auteur : petit bout de texte écrit avec bande-son musicale, pour prolonger le plaisir de la lecture.

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« Allez Cartwright, dîtes-nous en plus, maintenant. Arrêtez de nous faire mariner ».

La foule rassemblée au centre de la ville manifeste quelque peu son impatience. Quelle idée étrange, un duel musical ! L’homme sur scène parle d’une voix ferme, douce et chaude, il a indéniablement ce genre de voix qui fait stopper les conversations et attire l’attention. Bien des dames se laissent, comme moi bercer par cette voix, je les vois sourire. Par contre, je suis la seule à ne pas le connaître. Aussi ai-je l’audace de me pencher vers ma plus proche voisine pour demander qui est ce beau brun ténébreux. On m’explique qu’il se nomme Cartwright, Adam Cartwright, qu’il est un des plus beaux partis de la ville, brillant architecte, redresseur de torts à ses heures et qu’il a même été l’instituteur de la ville. Lui ? Dans une classe ? Devant des enfants ? Et ben, il a dû être d’une efficacité redoutable. Sérieusement, il a ce genre de charisme et cette autorité naturelle, matinée d’un sourire bienveillant, il devait, sans nul doute, rendre n’importe quelle lecture, n’importe quel exposé passionnant.

***

« Alors que j’étais sur la piste pour rentrer au ranch, j’ai entendu la mélodie d’un instrument. Pas le genre de choses qu’on rencontre le plus par ici, hein ? J’ai fait faire un écart à mon cheval et je me suis approché, j'ai vu quelqu'un jouer de la guitare, assis sous un grand arbre. »


*** Le fils Cartwright, assis sur un tabouret au centre de l’estrade, prend sa guitare et la met sur ses genoux. Il passe la sangle autour de son cou et vérifie qu'elle est bien réglée. Il sourit et laisse sa main droite descendre jusqu'aux six cordes au-dessus de l'ouverture ronde taillée dans le bois.

J'avais vu les tracts cloués partout en ville, et le message qu'ils contenaient m'avaient décidé à quitter la maison pour aller au concert ce soir-là. J’étais nouvellement arrivée à Virginia City, j’étais à l’aube d’un nouveau commencement et j’avais envie de découvrir la population.

Les mouvements de ses doigts produisent un son riche et chaleureux qui me fait tellement de bien, il chante une ballade lente et longue d'une voix profonde et rauque. Mes yeux se remplissent de nostalgie alors que je le regarde jouer de la guitare. Je bois dans chaque phrase, chaque ligne de vers mélodique. J'inspire et expire au même rythme que les accords qu'il joue. Mon cœur bat la chamade, je peux ressentir chaque vibration, encore plus maintenant que j’ai ce petit être qui continue de grandir dans mon ventre. Je suis enceinte de cinq mois. J'ai passé tant de jours et tant de nuits seule, avec ma colère et ma douleur, j’ai tellement rampé dans mon lit, un lit trop grand pour une seule personne. La solitude est devenue une compagne importune dans la nuit d'été à Virginia City depuis le départ de mon mari, il y a quatre mois. Il m'a laissé le cœur brisé et sans mots expliquant pourquoi il partait. Il a disparu, il a quitté notre ville, celle dans laquelle nous vivions. Voilà comment j’ai pris ma solitude et mon bébé à naître, sous le bras et je suis arrivée ici, à Virginia City.

Le beau brun charismatique tient son corps près de son instrument, ses bras le long du manche de la guitare, son dos légèrement penché vers l'avant, ses mains dansent sur les cordes, au gré de l’intensité émotionnelle de la chanson, comme si son corps lui-même absorbait les émotions qui montaient de l'intérieur. Un moment de sensualité dans toute sa splendeur ! Il semble si mystérieux, si séduisant si désirable, si sensuel, si séduisant… C’est comme si sa guitare et sa voix caressaient ma peau, mmm, je sens des frissons me parcourir. La magie fonctionne, c’est mélodieux, délicieusement enivrant. La douceur apparente dans la façon dont il joue s'infiltre dans mon corps et nourrit chaque cellule. Je ne suis pas seulement en train de vivre la musique, je ressens son effet au plus profond de mon ventre et je sens que la vie est vraiment belle.

Langoureusement les yeux fermés je me laisse emporter, doucement comme sur une vague. Ce monsieur Cartwright sait décidément vraiment bien rendre la musique sensuelle par cette relation charnelle entre lui et son instrument, la beauté dans les courbes. Ce subtil équilibre entre énergie et sensualité sublime ces moments privilégiés. Il fait de ce moment magique une rare beauté.


" Maintenant c'est votre tour. Monsieur, je vous en prie, entrez. La scène est à vous. Le public vous attend. Qu'est-ce que vous voulez jouer pour nous ?" demande Mr Cartwright.


"D'accord. Qu'aimeriez-vous entendre ?" Cette demande émane de l’homme qui vient d’arriver de derrière la bâche dressée au fond de la scène.


"Libre à vous de jouer ! Avant, peut-être pouvez-vous vous présenter ! », ajoute Mr Cartwright, en un large geste amical.


"Merci Mr Cartwright. Merci de m’accueillir sur cette scène et dans votre ville. Je m’appelle Peter Nachbarne et comme Mr Cartwright vous l’a dit, nous nous sommes rencontrés par hasard. Peter prend sa guitare et se met à chantonner une première mélodie. Au moment où il se tait et qu’il prolonge le dernier accord, c’est ponctué par de très forts applaudissements.

Mr Cartwright est un homme très classiquement beau et viril, aucun doute à ce sujet. Mais ce Peter Nachbarne est tout aussi attirant, la vibration de ce monsieur est pleine de vie. Il est édifiant, inspirant et charmant. C'est vraiment une personne amusante à côtoyer : Peter - en pantalon noir et chemise anthracite, ouvert sur la poitrine, en touchant quelques mains, est en train de voler les quelques fragments qui restaient dans mon cœur. Son sourire est si large et sa voix douce et profonde incroyablement belle est délicieuse à écouter. Ses chansons sont plus légères, ce qui les rend attrayantes pour les gens de tous âge.

J’ai cette étrange impression que cette chanson fait écho à ce que je vis et je sens les larmes monter dans mes yeux.

Ils ont tous les deux une apparence physique vraiment très attrayante. Peter Nachbarne et Adam Cartwright savent tous les deux faire plaisir aux autres. Ils ont cette capacité à fasciner les gens. Les deux sont incontestablement beaux, intelligents et très charmants.


***Peter Nachbarne arrête de gratter sa guitare et pendant quelques minutes il raconte un peu de lui, il est né au Canada et est un peu rêveur, poète, chercheur d’or, musicien bourlingueur. Son refrain préféré parle d’une jeune Aylen et il commence à le chanter, rien que pour nous.

Quand Peter finit de chanter, Mr Cartwright prend une profonde inspiration, reprend sa guitare, incline lentement la tête et commence à chanter en posant ses doigts sur les cordes. Adam Cartwright a vraiment une voix merveilleusement forte qui sert de très belles mélodies. En fait, ils sont tous les deux absolument incroyables.

« J'étais aveugle, mais maintenant je vois ».


Adam Cartwright a un talent si naturel – sa voix est extraordinaire ! Il reprend maintenant beaucoup de vieilles chansons traditionnelles. Sa voix est magique. Les mots peuvent à peine décrire à quel point c’est incroyable !C’est une performance impressionnante. Mais Peter Nachbarne tient la cadence, en plus d’être un excellent musicien, il est un charmeur coquin… Quel interprète attachant et généreux ! Chaque fois que Adam termine de jouer le dernier accord, Peter dégaine une nouvelle mélodie, avec sa voix douce.

Et comme tous les gens autour de moi, j’ouvre la bouche et je chante avec lui, avec toute la force de mon âme, je sens en moi que je communique avec tous les esprits des sages. Peter Nachbarne est chaleureux, drôle, connecté à la foule et sa voix est magnifique ! Sa musique est si émouvante. Quel duel somptueux et pas un ne faiblit d’intensité. Nous en prenons plein les oreilles, plein le cœur.


*********Dimanche 21 juin : jour du solstice d'été, c’est l'heure de célébrer la lumière du Soleil ; le jour durera longtemps, offrira une belle énergie aux gens.

Le premier concert à Virginia City a été un énorme succès et les deux hommes ont eu tellement de plaisir qu'ils ont décidé de recommencer. Une fois encore, ils convient les citoyens de la ville à un nouveau duel.

Le soleil se couche, le vent remue les feuilles des chênes qui entourent la clairière. Au loin, on entend une petite rivière. Les premiers feux de camps sont en train d’être allumés. Les enfants attendent, excités, le moment de griller quelques guimauves.

La voix profonde de baryton d'Adam m’ébranle une fois de plus. Chaque syllabe dans sa bouche est un baiser posé sur mes lèvres. Quelque chose dans sa voix, comme un petit je ne sais quoi de mélancolique mais si apaisant. J'écoute cette belle chanson. Sa voix est toujours aussi belle, elle m'envoie des frissons dans le dos. L'homme est vraiment doué. Dans sa voix il y a ce petit supplément d’âme que je ne saurais définir, quelque chose de plus profond : un chagrin enfoui ? Une douleur ravalée ? Je me suis adossé à l'arbre et j’écoute sa voix incroyable, qui a le don de vous aller droit au cœur. J'aurais aimé savoir, j'aurais aimé avoir plus de mots pour décrire la beauté de sa voix, si profonde, forte et si pleine de passion. La voix d'Adam m'emmène là où je ne vais pas souvent. Il se met à chanter « in the pines ».

« Pour ceux qui croient sincèrement à l’amour vrai, je vous dédie celle-ci », nous lance doucement Peter Nachbarne.

Je sais maintenant qu’on peut tomber amoureuse d’une voix, comme ça, si profondément, si passionnément. Leurs mélodies me font me sentir si vivante.

Et comme il termine sa chanson, le silence n’a aucune chance d’espérer recouvrir la plaine car Adam se met à chanter…

Je suis bouleversée d’entendre ces ballades incroyables. Quels hommes, quelles voix, quel talent. Je me sens si bien dans cet endroit, près d'eux, si en sécurité. Je suis fascinée par leurs voix. Leurs voix et leur jeu de guitare sont si réconfortants et apaisants. Je me laisse me perdre dans un monde musical. Ils manient avec génie les barrés et moi je ne pense plus à celui qui s’est lamentablement barré de ma vie. Et déjà Peter reprend son souffle et nous offre un autre joyau :

C’est si agréable ! Leurs yeux sont si hypnotisant, si tendres et doux. Je souhaitais rester ainsi pour toujours. Ces gars-là ont du talent, du charme, une profondeur d’âme insondable et cette beauté du cœur alliée à la grandeur de l’âme. Leurs mains volent de haut en bas, avec le médiator, créant des hymnes célestes et des airs doux. Le délice de l'instant tendre, romantique et céleste. Leur musique est comme une centaine de baisers doux et délicats sur mes lèvres douces.


************ Je ne quitte pas le feu des yeux. J'écoute les paroles de cette magnifique chanson chantée par le magnifique et beau Adam Cartwright. Quelle voix merveilleuse et paisible. Il a des mains délicates et les yeux plein de douceur. Il y a tant de pouvoir dans cette merveilleuse voix profonde et forte. C'est comme si mon corps était soulevé du sol par la seule force de cette voix.

***Tard dans la nuit. Le duel s’éternise, les notes fusent de toutes parts, nous sommes là, touchées en plein cœur, victimes de leur explosions de voix.

« Hey l’ami, on chante ensemble pour terminer ? » lance Adam de sa voix profonde. Peter hoche la tête et sourit. Adam pose ses doigts sur les cordes et commence une douce caresse sur l’instrument, s’accompagnant d’un sifflet de voix léger et aérien. Le silence se fait et sa voix s’élève au-dessus des feux qui n’en finissent plus d’éclairer nos visages émus.

La chanson parle de quelqu'un qui a quitté la maison. Ce vagabond réfléchit sur ses voyages et les nombreuses routes qu'il a trouvées. Cependant, il n'en a jamais trouvé une pour le ramener chez lui. C’est un message pour moi aussi, mon amour passé ne reviendra jamais et je vais continuer mon chemin.

C’est une chanson tellement significative, et elle dit tant de choses à tous. Chacun est touché à sa façon, chacun cheminant sur un sentier plus ou moins rocailleux. La mélodie est douce et tendre, et leurs voix se mêlent parfaitement. C’est une chanson lente et belle. Leurs émotions sont pures et sincères, ils sont en train d’accomplir une performance incroyable, quel merveilleux moment de paix. Ils ont livré un tel duel avec leurs guitares et leurs voix, ils y ont mis toute leur âme avec une telle intensité. Mais rien n’est plus intense que cette harmonie. C’est une si belle balade, douce-amère. Avec cette chanson, ils nous disent au revoir, leurs voix incroyables résonnent sous la lune pour la dernière fois.


*********** Épilogue

Je suis maintenant une femme de 95 ans, ma mémoire n’est pas fiable, c’est parfois dur de me souvenir. Mais j’ai de précieuses photos en tête, je n’ai jamais oublié les belles nuits d'été que j'avais passées à Virginia City. Chaque seconde de cet incroyable duel musical à Virginia City est restée dans ma mémoire. J'étais une jeune femme, enceinte et seule dans cette ville.

Je n’ai jamais pu choisir entre ces deux là, tous les deux si agréables à regarder et à écouter, tous deux sauvages et virils, masculins et puissants, et sensibles en même temps. D’une certaine manière ils m’ont enveloppé de leur bras, ils ont su toucher mon cœur avec leur voix douce, délicate et tendre, ils ont eu ce don incroyable de faire tomber les remparts difficiles des instants de vie cruelle. Peter aurait pu tirer des larmes d'une pierre, il avait cette belle voix qui sonnait, chargée d'émotion, tandis que le grand, sombre et beau Adam Cartwright, m'avait fait frissonner avec sa riche voix chaude de baryton et avec son regard de braise, empreint de confiance et de force, à peine teinté d’un filet de fragilité. J'avais été hypnotisée par le suave Adam Cartwright, à la voix grave et aux cheveux noirs, avec une présence si charismatique et imposante. Sa voix hypnotique très résonnante m'avait fait fondre le cœur.

Je retrouve une feuille froissée, sur laquelle j’avais écrit ces bouts de vers, en souvenir de ce moment si touchant.                        



Il a cette voix qui pousse à l'orgasme,

Voix amplement chaude, qui pénètre

Au plus profond de mon être.

Ce qui sort de sa gorge appelle au fantasme,

Chaque son est une sorcellerie

Qui injecte en mon esprit une folle euphorie.

Ces fins de phrases , je ne saurai dire

Si elles sont rocailleuses ou profondes,

Mais elles sont plus arrondies que le monde.

Voyelles largement ouvertes ,pour étourdir,

Souffle léger qui enrobe le fruit des notes,

Contre-chant harmonieux qui picote.

La main qui gratte les cordes est ferme,

Le rythme est régulier comme un battement,

Une pulsation qui combat l'accablement.

Un frisson parcourt mon épiderme,

C'est si bon de l'entendre chanter :

Lily of the West a dû le hanter.

Et la rivière large , et les pins,

Il réussit à sublimer la nature

Et les filles calmes avec désinvolture.

Et que dire encore de ces frais matins,

De ces tendres filles au cœur attentionné,

Prêtes à tout pour prendre soin de leurs aimés.

C'est sans fin, le bonheur de l'entendre,

C'est une vague de chaleur qui s'insinue

Sous ma chemise, sur ma peau nue.

Je ferme les yeux, et je rêve de m'étendre

Dans cette rivière profonde et qu'il chante,

Ou qu'il me caresse ou qu'il m'évente.

Mon corps lui appartiendra, je serai guitare

Il s'y posera, ses doigts s'y promèneront,

J'espère qu'il y trouvera l'inspiration.

Chacune de ses mélodies, sucrée comme un nectar;

Est douce à mes oreilles, et je goûte sans relâche

Ses paroles mielleuses parfumées de panache.

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