Prologue

Une jeune fille aux longs cheveux et aux yeux couleur d'ébène errait sans but, sur une route solitaire et enneigée. Elle était vêtue de haillons qui ne la protégeait guère du froid glacial qui régnait en cette saison hivernale... Et la faim la tenaillait, menaçant de la faire s'écrouler d'épuisement.

Elle ne se souvenait plus exactement quand avait eu lieu son dernier vrai repas... Ses immenses yeux sombres reflétaient beaucoup d'émotions : souffrance, désespoir, résignation.

- Combien de temps encore va durer ce calvaire ? s'écria-t-elle, désespérée en levant les yeux vers le ciel couvert de nuages sombres – comme son cœur.

En effet, sa mère, très malade, venait de succomber par manque de soin et de nourriture. Karin – c'était son nom – ne supportait plus cette cruelle absence. De plus, elle se sentait terriblement coupable de ne pas avoir pu l'aider... Sa mère était sa seule famille en ce bas monde et voilà qu'elle disparaissait, la laissant seule et démunie. La jeune paysanne ne savait comment elle allait pouvoir survivre, elle ne possédait plus rien, à part un toit et un lit sans couvertures. Karin n'avait même pas de quoi se payer une miche de pain... Quelle désolation !

Tout en laissant ses pensées sombres vagabonder, la jeune paysanne continuait de marcher, sans vraiment voir où elle se dirigeait. Elle voulait en finir avec la vie, plus rien n'avait d'importance à ses yeux... Tout à coup, elle buta contre quelqu'un et tomba par terre, tellement le choc l'avait sonnée.

- Vous allez bien, Mademoiselle ? demanda une voix d'homme avec inquiétude.

- Oui, je... vous... remercie, balbutia Karin, encore embrouillée.

Soudain, elle vit une main se tendre vers elle, comme pour l'aider à se relever. Elle la prit avec reconnaissance et lorsqu'elle leva les yeux pour regarder son sauveur, la jeune fille était surprise mais n'en laissait rien paraître devant l'inconnu devant elle.

Le jeune homme qui l'avait aidée était sans doute noble, vu la qualité de ses vêtements et son air fier. Mais cela n'enlevait rien à son charme dévastateur : l'homme avait des cheveux d'une couleur étrange, elle n'avait jamais vu cela de son existence. Quand il posa son regard dans le sien, elle reçut comme un électrochoc. Il avait les yeux turquoises, les plus beaux que Karin n'ait jamais vus de sa courte vie !

- Merci, Monsieur, fit-elle en s'inclinant. Je vais rentrer chez moi, maintenant...

- Attendez, Mademoiselle... s'écria-t-il, tentant de la retenir.

Mais elle était déjà loin... Karin était complètement perdue. « Mais qui est-il ? Et que faisait-il dans le village ? » songea-t-elle, encore sous le choc de sa rencontre. Mais il lui fallait l'oublier, car jamais elle ne le reverrait... Cela la rendit triste... « Quelle idée ! Reprends-toi, idiote ! » se tança-t-elle. Il fallait qu'elle arrête d'y penser, pour son bien.

Au même moment, le jeune homme à la chevelure argentée pensait que cette jeune fille à la chevelure d'ébène l'avait émue. Il ne savait quoi en penser... Il ne pensait pas rencontrer une jeune fille comme elle, dans ce village loin de tout... Tout en réfléchissant, il rejoignit son cheval qui piaffait d'impatience.

- Calme-toi, Hyorinmaru... fit-il d'une voix douce. On rentre à la maison.

Le jeune duc Toshiro Hitsugaya, cousin du Roi, s'en alla doucement en direction de son manoir ancestral, laissant errer, de temps en temps, son regard turquoise dans le lointain, où la mystérieuse jeune fille aux yeux sombres avait disparu...