Le Monde de Piko

J'étais dans un village –sur une île pour être plus précis– que je ne connaissais pas. Je me réveillai sur une place qui séparait une plage de ce qui me semblait être une mairie où flottait un joli drapeau de renard roux sur sa droite, et à gauche de laquelle s'étendait un chemin menant à un village. J'allais ouvrir la porte mais elle était verrouillée, et resta fermée. En y réfléchissant, le soleil était assez bas dans le ciel, on était tôt le matin, aux premières heures de la journée. Regardant aux alentours pour essayer de trouver quelqu'un, je rencontrai une femme peu commune venant des habitations. C'était une femelle rhinocéros rose dont le haut de la tête était recouverte d'un nappage blanc comme de la crème ainsi qu'une corne ressemblant à s'y méprendre à une fraise. Elle était vêtue d'une tenue de sport, probablement pour faire son jogging matinal, mais elle avait en réalité plutôt l'air de se promener, à regarder les fleurs et les papillons. 

« Bonjour, m'exclamai-je de loin avec un signe de la main. Bonjour, je me suis réveillé sur la place devant votre mairie et je ne sais pas du tout où je suis, pouvez-vous m'aider s'il vous plaît ? 

— Oh mais bien sûr, me répondit-elle avec un joli sourire. Tu te trouves sur l'île de Kakko gérée par la Compagnie Nook dont le Bureau des Résidents est ce que tu appelles la mairie.

— Kakko ? Nook ? demandais-je à voix haute. Ces noms me disent quelque chose mais je n'arrive pas à me souvenir où je les ai entendus. 

— Bah, de moi voyons ! Je viens tout juste de te les dire, plaisantait-elle. Si tu ne sais pas quoi faire, nous organisons une fête au centre du village ce midi mais il faudrait se dépêcher, ça va bientôt commencer.

— Commencer ? Mais il est... »

Je n'eus le temps de terminer ma phrase qu'en levant les yeux au ciel, le soleil était déjà à son zénith, et quand je revis la demoiselle, elle était habillée en cheffe cuisinière. Je commençais à croire que je devenais fou, avec un animal pâtisserie et le temps qui passait à toute vitesse sans le voir. N'ayant pas d'autre choix, je suivis mon guide involontaire dans le village jusqu'à une fontaine à laquelle étaient attachés des fanions de toutes les couleurs de l'arc-en-ciel. Beaucoup de monde était réuni autour de cette source artificielle et tous avaient une petite particularité qui me faisait sourire. Un chat au nez rouge, un kangourou bleu dont les poings étaient logés dans des gants de boxe, une jument avec une étoile de shérif faisant office de bindi, ou encore, un taureau en pyjama. Ils me souhaitèrent tous la bienvenue à la fête de l'été, mais cela me parut étrange car j'avais la certitude que l'automne avait débuté. Je laissai ces questionnements pour plus tard et je pris un verre de citronnade qu'on m'invita à goûter.

Plusieurs heures passèrent, où je discutai et rigolai avec chaque villageois jusqu'à ce qu'une forme qui m'était familière vienne à moi. C'était Serena, une femelle tapir du monde onirique, puis tout m'était revenu d'un coup. Je ne m'étais pas échoué sur cette île ou bien tombé du ciel sans explication. J'étais en train de rêver, et c'était justement un rêve que l'administratrice de la librairie onirique m'avait conseillé. Sachant cela, je connaissais la raison de sa venue en plein rêve : c'était l’heure pour moi de me réveiller dans le monde réel. Je fis un dernier tour du village pour dire au revoir à tous mes amis de courte durée et je retournai à la place du bureau des résidents où m'attendait mon lit. Je fermai les yeux et tombai doucement dans un sommeil profond avant de me réveiller, cette fois-ci pour de vrai, dans ma chambre.