Dans l'ombre et le secret
Chapitre 1 : Dans l'ombre et le secret
Catégorie: M
Dernière mise à jour 13/10/2012 17:08
Dans L’Ombre et le Secret.
« Ouvre les yeux… Regarde-moi… rien qu’un peu… juste un peu… Regarde-moi… »
***
Rien que de la terre aride, des arbres desséchés et ratatinés sur eux-mêmes… Rien d’autre que des landes sans vie à perte de vue et même plus loin encore… des paysages dévastés et brulés… A dire vrai, Katô ne s’était pas attendu à autre chose dans un tel endroit. Cependant, l’étendu de la désolation de ce lieu ne le laissa pas de marbre. Il resta un moment immobile et silencieux, gravant dans son esprit chaque détail de ce grotesque tableau. Il aurait dû s’en foutre… comme le reste… ça n’aurait même pas dû éveiller un semblant d’émotion en lui à dire vrai. Pourtant, c’était tout le contraire. Plus il fixait ce point imaginaire sur l’horizon, plus il sentait son cœur se serrer. C’était comme si ce paysage stérile faisait écho à l’état général de son corps…de son cœur… Peut être même de son âme au final… C’était douloureux… si douloureux…
« _ Hey Katô… Bouges-toi un peu tu veux ! On a vraiment pas que ça à foutre d’admirer la nature locale !
_ Hum… juste un instant … un tout petit instant... Setsuna…
_ Juste quelques minutes alors…»
Une brise chaude et humide s’insinua dans ses vêtements et ses cheveux charriant jusqu’aux fond des ses narines des relents de cadavres et de pourriture… Et après tout, c’était tout ce qui les attendait eux aussi au-delà de cette chaine montagneuse escarpée… au-delà de tous ces nuages… la mort… la mort et lui…
« _ Encore juste un peu… encore juste un peu de temps… »
***
« _ Sors de cette putain de pièce ! Tu m’entends sors d’ici espèce de connard dérangé ! Personne ne t’as invité à foutre ton nez dans les affaires des autres ! Va-t’en ! Va-t’en!
_ Non. »
Le visage de katô se décomposa. Il hésitait à présent entre la colère sourdre et l’hébétement. Il demeura figé au milieu de la pièce, les poings encore levés et serrés, mais ne parvint pas à esquisser le moindre geste cohérant. Son cerveau tournait pourtant à toute allure. Ses lèvres bougèrent plusieurs fois, ses pincèrent puis se fermèrent de nouveau : c’était trop dur. Il se laissa tomber lourdement sur le lit et posa son front dans la paume de ses mains sans un mot de plus. La colère était passée sur lui comme une douche froide… maintenant il était seul face à sa douleur… de nouveau… et il ne connaissait qu’un remède à cela…
« _ Tu dois aller le voir.
_ Non…
_ Tu le regretteras… il va mourir Katô… C’est tout de même ton père…
_ Je ne peux pas… je ne peux pas bon sang… je ne peux pas… »
Des larmes dévalèrent le long de ses joues et s’écrasèrent entre ses doigts serrés. Ses ongles pénétraient douloureusement la chaire de son visage, pourtant il ne sentait rien. Rien d’autre que cette souffrance qui lui remuait les entrailles et nouait sa gorge au point de faire remonter ces sanglots pathétique à la surface. Il détestait ça : cet étranger qu’il était devenu au fil du temps. Il voulait juste oublier… oublier qu’après ça il était seul… qu’il devait pardonner… Qu’il devait continuer… Il n’en avait pas la force… Tout oublier… tout oublier et recommencer…
Se redressant d’un bond, Katô se mit à fouiller machinalement le moindre recoin de sa chambre. Retournant couverture, oreiller et même jusqu’au contenu de ses tiroirs. Au bot d’une dizaine de minutes, il mit la main sur la boite de pilules et de caché qu’il avait si bien dissimulé derrière une pile de vêtements froissés … sa boîte pour tout oublier…
«_ Ne fuis pas… pas une fois de plus…
_ C’est trop dur…
_ Tu n’as pas besoin de fuir continuellement Katô… pour une fois… juste une fois… bat toi…
_ Je n’en ai pas la force… pas la force ni le courage…
_ Alors… si un jour tu la trouve au fond de toi… saches que je serais là… Je serais là et je te tirerais de là mon vieux… »
***
Katô se réveilla en sursaut. Ses yeux mirent un moment à s’accommoder à l’obscurité épaisse et poisseuse qui l’entourait. Pendant de longues minutes il demeura désorienté, incapable de savoir où il était et comment il était arrivé là. Puis il se redressa difficilement entre les draps trempés de sueur et poussa, de sa seule main disponible, la couverture qui l’étouffait de son poids. Une fois libéré de ses entraves, il posa ses pieds nus à même le sol glacé et respira autant de goulées d’oxygène qu’il pût. Aussitôt, son cœur commença à se calmer et sa respiration, auparavant haletante, reprit un rythme normal. Le jeune homme soupira de soulagement avant de redresser. Il s’approcha de la fenêtre qui se trouvait tout au fond de la pièce, à droite son lit, et en poussa l’épais rideau de brocard avant de poser son front contre la vitre, vidé de toute force.
« _ Menteur… »
Le ciel noir encre se déchira avec haine. Plusieurs éclairs bleuâtres se mirent à zébrer les nuages de toute part avec véhémence et fracas… comme si de là où il était, il l’avait tout entendu et assimilé… ridicules et pathétiques pensées … Il n’y avait plus place pour l’espoir depuis bien longtemps… Il n’y avait plus de place que pour la plaie béante qui avait pris place dans son corps et pour le ressentiment tenace qui l’accompagnait… Au final, il se demandait ce qui gagnerait le plus de terrain… Finirait-il par éprouver plus de rancune que de bons sentiments ? Il n’en savait fichtre rien…
Il tapa du plat de la main sur la grande surface vitrée.
« _ T’es vraiment qu’un putain de menteur… »
***
« _ Il est quelle heure ?
_ Quatre heure du matin…
_ Tu ne devrais pas être en train de dormir comme les autres ?
_ Peut être… »
Setsuna se frotta les yeux d’un poing fermé et remis un peu d’ordre dans ses cheveux emmêlés par le sommeil, puis d’un geste extrêmement lent alluma la lumière. Celle-ci inonda presque aussitôt la chambre à coucher et ce avec une violence inouïe. C’est avec grand peine qu’il réussit malgré tout à maintenir ses yeux grands ouverts. Près de la porte, se détachait la silhouette fantomatique de l’ex-junky. Il le détailla avec attention cherchant dans sa position ou dans les traits de son visage, quelque chose qui le trahirait. Pourtant, il demeurait inexpressif. Katô était comme ça… Toujours à faire le pitre, à être insolant ou même violent… mais jamais personne n’arrivait à comprendre ce qu’il ressentait vraiment dans le fond.
« _ Quelque chose te tracasses ?
_ Pas vraiment…
_ Alors tu veux peut-être me parler de quelque chose en particulier ? Je veux dire… au beau milieu de la nuit… excuse-moi de fortement remettre en doute la validité de l’excuse « visite de courtoisie »… surtout venant de toi…
_ Tu te souviens la promesse que je t’ai faite ?
_ La… promesse… ?
_ Visiblement non… tant pis… »
Katô tourna les talons sans jeter un regard derrière lui. Il avait si vif que c’est à peine si Setsuna avait eut le temps de le voir rebrousser chemin. Sa démarche et son empressement à quitter la pièce en disait pourtant long sur ce qui se tramait dans sa tête… même ses paroles trahissait son calme apparent… et pour être tout à fait honnête, l’ange n’aimait pas ça. Il se redressa dans son lit et fronça les sourcils.
« _ Attends… Katô…
_ T’en fais pas… Je ne vais pas me faire la malle… Je vais rester auprès de toi… On va vraiment récupérer Sarah et vous pourrez roucouler à nouveau… comme avant…»
Il tourna la poignée et disparu aussi rapidement qu’il était apparu. Les ténèbres du corridor l’avait de nouveau englouti dans ses entrailles putrides. Il avait disparu… Une angoisse indescriptible et irraisonnée commença à enfler au creux de l’estomac du jeune homme. Il se tourna rapidement vers l’entrée et se précipita à sa suite. Mais il semblait n’être nulle part… volatiliser...
Un mauvais pressentiment… Setsuna avait vraiment un très mauvais pressentiment…
***
«_ Pourquoi as-tu utilisé cette épée contre moi alors que tu savais pertinemment qu’elle ne serait d’aucune utilité ?
_Ne me dis pas que tu ne m’as pas tué du premier coup pour me poser cette question ? Je te l’ai déjà dis… souviens-toi… je suis amnésique…
_ Même maintenant… tu ne sais pas mentir katô… »
***
« Regarde-moi juste un peu… Détourne tes yeux d’elle … accorde-moi un tout petit peu d’importance… juste une once… de quoi me faire vivre… de quoi me donner envie de me battre… »
« Ne laisse pas mon âme pourrir seule.»
« Souviens-toi de moi. »
« Aime-moi juste un tout petit peu comme moi je t’ai aimé… »