L'Ecrin des illusions

Chapitre 16 : Les Liens du Destin

3897 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 28/02/2024 14:48

Le corps du Mangemort fut emporté par les Aurors. Hazel, une fois le patronus disparu, s'approcha du maître des potions. Ce dernier, indifférent à la pluie, se tenait un peu à l'écart et avait refusé de se joindre à la discussion de ses collègues.

- Professeur Rogue.

Il se retourna. Une goutte pareille à une larme, était perchée au bout de son nez crochu. Hazel se mit à détailler le visage cireux de son professeur. Elle aurait été bien incapable de deviner les pensées l'agitant à cet instant.

- Evans, déclara-t-il d'une voix enrouée, maintenant que Carew ne peut plus vous nuire, j'espère que vous éviterez les situations périlleuses.

Il croisa les bras contre sa poitrine, reprenant sa posture favorite afin de se redonner une certaine prestance. Il esquissa un curieux rictus.

- Sinon, vous finirez votre vie à vagabonder dans la forêt, à faire pousser des citrouilles en compagnie de Hagrid.

Hazel lui décrocha un regard outré. Ses lèvres s'animèrent en un sourire qui ne manqua pas de faire réagir son professeur.

- Ôtez-moi cette risette ridicule de votre figure, cela ne vous sied guère !

- Je m'apprêtais à vous présenter des excuses, professeur. Je n'aurais jamais dû toucher votre patronus.

Il parut surpris par cette sollicitude inattendue. Ses traits se détendirent et, un court instant, il ne semblait plus aussi terrifiant et dépourvu d'humanité.

- Que cela vous serve de leçon.

Il voulut rejoindre Flitwick mais saisie par une inspiration qu'elle ne put expliquer, Hazel l'attrapa par le bras, ce qui lui attira un nouveau regard ébahi de sa part.

- Votre sort, murmura-t-elle d'un ton précipité, le sort que vous avez lancé contre Peeves. Je l'ai utilisé contre Carew, il n'a pas très bien fonctionné, mais ...

- Ms. Evans, l'interrompit Rogue d'un ton adouci. Ne l'utilisez plus. Ce sort a été inventé par une personne peu digne de confiance.


Pourquoi lut-elle de la tristesse dans ses yeux sombres à cet instant ? Il n'essaya même pas de se dégager de son étreinte, comme s'il acceptait ce simple contact physique. Hazel se rappela alors des voix entendues quand le Détraqueur s'était approché d'elle : l'une d'elle ressemblait à celle de Rogue. La main de Hazel descendit le long du bras de Rogue et vint s'enrouler autour de son avant-bras gauche. Elle sut alors que leurs deux existences étaient liées d'une façon inextricable et qu'un lien invisible et fragile s'était forgé entre eux. Quand ce lien avait-il été créé ? Pourquoi avait-elle cette curieuse sensation qu'un morceau de son passé appartenait au sinistre maître des potions ? Rogue, comme brûlé par ce simple geste, tenta de se dégager de cette emprise ; Hazel tint bon, espérant un début de réponse qui lui permettrait de comprendre ce passé morcelé qui était le sien.


- Ah, les interrompit Jekyll en ébouriffant les cheveux de Hazel avec force, la forçant à lâcher le maître des potions. Wilde m'a raconté votre étonnant tour de passe-passe. Curieux sortilège, n'est-il pas Severus ? Qui m'en rappelle un autre ... N'était-ce pas Sirius et James qui avaient usé d'un sortilège semblable contre un camarade particulièrement déplaisant ?

- Je fais confiance à votre mémoire, Hydra, elle me semble beaucoup mieux fonctionner que votre cervelle.

Sur ces derniers mots, il s'éloigna pour rejoindre le petit groupe d'Aurors. Jekyll eut un petit sourire malicieux avant de se retourner vers Hazel.

- Votre cauchemar est terminé, Hazel : plus rien ne devrait perturber votre année à Poudlard, sauf si vous vous faites de nouveaux ennemis.

- Je n'ai pas l'intention de m'attirer davantage d'ennuis, répliqua la jeune sorcière.


Jekyll esquissa une noue dubitative avant de s'éloigner à son tour. Elle fut accueillie par un regard énamouré de la part du pauvre Flitwick. Hagrid s'approcha d'elle, la gourmanda avec gentillesse pour être restée sous la pluie et la conduisit dans sa cabane où Seren l'attendait, attablé devant un immense bol de chocolat chaud. La jeune sorcière prit place face au Serpentard, tandis que le demi-géant se pencha vers la cheminée.

- Je ne connais rien de mieux que des rochers croquants pour vous remonter le moral !

Il réchauffa quelques biscuits qui paraissaient aussi durs que de la pierre en sifflotant une vieille chanson :


The day is cold, and dark, and dreary;

It rains,and the wind is never weary;

The vine still clings to the mouldering wall,

But at every gust the dead leaves fall,

And the day is dark and dreary.


Un silence pesant s'installa dans la cabane lumineuse. Le feu avait beau la protéger du froid de cette nuit automnale, Hazel sentit pourtant un frisson la gagner quand elle se mit à écouter la triste chansonnette de Hagrid. Le demi-géant n'avait pas une voix désagréable, bien au contraire ! Mais l'évocation d'un jour de pluie n'avait rien de bien réjouissant ...

Percevant son chagrin, Seren tenta de la consoler à sa façon : il se saisit du bol vide posé sur la table et le remplit du chocolat bouillant dans la casserole posée entre eux. Il l'offrit ensuite à Hazel, qui l'accepta de bon cœur. Elle porta le bol à ses lèvres et la délicieuse odeur lui chatouilla les narines. Seren l'imita et but son propre chocolat avec avidité. Hazel ne put réprimer un sourire quand elle vit une fine moustache chocolatée se dessiner sur les lèvres du Serpentard. Peu à peu, la jeune sorcière se détendit et se laissa gagner par la douce torpeur des lieux.

- Rogue a raison, soupira Hazel entre deux gorgées du breuvage, j'ai une fâcheuse tendance à m'attirer des ennuis.

- Carew est un sale type, je n'ai jamais compris pourquoi mes parents le fréquentaient. Tu sais...

Il hésita, elle l'invita à poursuivre d'un petit signe de tête.

- Mes parents étaient des Mangemorts parmi les plus fidèles. Il n'était pas rare que notre manoir soit un lieu de réunion ... Un soir ...

Le jeune Serpentard déglutit et acheva d'une voix étranglée par l'émotion :

- Tu-Sais-Qui est même venu leur rendre visite. J'étais caché sous la table car je voulais le voir. Il m'a repéré et s'est amusé à me menacer de sa baguette. Il était terrifiant.

Seren se tut et se mit à contempler le fond de sa tasse vide. Se sentait-il coupable des crimes commis par ses parents ? Craignait-il de devenir comme eux ? Hazel pouvait tout à fait comprendre le poids que pesaient les liens du sang. Elle-même se sentait mise en compétition contre deux fantômes: celui de la brillante Lily dont on ne cessait de lui vanter les louanges et celui, plus énigmatique, de sa mère ...

- Mon garçon, fit Hagrid en posant l'assiette de biscuits entre eux, je te l'ai déjà dit : tu n'es pas responsable des actes de tes parents. C'était une drôle d'époque, tu sais ...

- Et ma mère ? demanda alors Hazel. Dans quel camp était-elle ?

Hagrid rougit et se mit à gratter sa barbe avec nervosité.

- Ma foi, marmonna-t-il, Dahlia Black n'a jamais servi que les intérêts de Dahlia Black.


Hazel s'apprêtait à le questionner pour en savoir davantage, quand la porte de la cabane s'ouvrit sur Dumbledore, suivi par un Rogue visiblement peu enchanté par cette petite visite rendue à Hagrid. Les deux amis se levèrent afin de saluer le directeur de Poudlard. Celui-ci, sans plus de cérémonie, s'assit à la table ; Rogue quant à lui, se posta près de la fenêtre, le dos tourné au petit groupe rassemblé autour de l'accueillante cheminée. Curieux, Crockdur s'approcha du maître des potions, renifla le bas de sa cape et se voyant congédié d'un regard assassin, il déguerpit et se réfugia près du garde-chasse. Seren et Hazel échangèrent un regard inquiet avant de se rasseoir.

- Hagrid, déclara le directeur en piochant un biscuit, pourriez-vous me faire une tasse de thé ? Je suis frigorifié.

Il se tourna vers le professeur Rogue.

- Severus, vous devriez prendre un peu de thé, vous me paraissez bien pâle.

En guise de réponse, l'intéressé se contenta d'un vague grognement avant de reprendre sa morne contemplation. Hagrid, honoré par la présence du directeur, s'empressa de retourner à l'âtre afin de lui préparer la boisson désirée. Dumbledore en profita pour reposer le croquant sur l'assiette : à l'instar des deux élèves, il avait peur d'y laisser une ou deux dents lors de sa dégustation !

- Quelque chose me dit que vous brûlez d'envie de me parler, déclara-t-il, le regard pétillant de malice derrière ses lunettes en demi-lune.


Hazel et Seren acquiescèrent. Ils sortirent leurs baguettes et les déposèrent sur la table : celle de Hazel, en bois de noisetier, paraissait bien pâle et chétive à côté de celle de Seren, massive et faite d'ébène. Les doigts effilés du directeur effleurèrent les deux baguettes, tandis que leurs propriétaires évoquèrent leur duel contre Carew. À la fin de leur récit, ils baissèrent les yeux vers leurs mains, embarrassés.

- Donc, si j'ai bien compris, vous avez lancé le même sort et celui-ci a gagné en intensité quand vous l'avez prononcé au même moment ?

Hazel redressa le menton et confirma du bout des lèvres. Rogue les observait avec une attention soutenue.

- Quel est le cœur de votre baguette ?

- Plume de griffon ! répondit Seren.

- Poil de griffon, fit Hazel.

Hazel se souvint alors des paroles étranges d'Ollivander lors de son achat. Elle vit le visage de Seren se peindre de surprise. Les deux anciens ennemis échangèrent un nouveau regard, comprenant peu à peu, le fabuleux pouvoir unissant leurs baguettes.

- Ollivander a créé ces baguettes jumelles alors qu'il n'était encore qu'un simple apprenti ... La puissance créative de la jeunesse m'impressionnera toujours, murmura Dumbledore.

- Qu'est-ce que cela implique ? s'enquit Seren.

- Le pouvoir de vos baguettes est décuplé quand elles sont utilisées ensemble. Vos baguettes ont un lien très particulier et mystérieux. Ce sont des baguettes sœurs.

Il fit glisser les deux baguettes vers eux.

- Le Destin peut parfois lier nos existences de façon bien malicieuse ...


Hazel et Seren, n'osant plus se regarder, s'empressèrent de ranger leurs baguettes. Hazel n'aurait jamais pu imaginer avoir un lien quelconque avec un Serpentard et surtout pas, le fils de célèbres Mangemorts ! À croire que cette première année passée à Poudlard n'avait pas encore dévoilé toutes ses surprises ...


Hagrid revint vers la table, les mains chargées d'un plateau contenant deux tasses de thé fumantes et d'une assiette débordante de caramels fondants. Il prit place face à Dumbledore et d'une main tremblante, lui tendit sa tasse. Le vieil homme le remercia avant de poser la tasse devant lui. Rogue, dédaigneux, se replongea dans sa contemplation du potager de Hagrid. Hazel se saisit de la tasse et s'avança vers lui.

- Professeur ?

Il semblait partagé entre l'envie de lui verser le thé brûlant sur la tête et le désir de décliner son geste d'une réplique bien acide. Voulait-il éviter de s'attirer la désapprobation du directeur ? À la grande stupeur de Hazel, il lui prit la tasse et la garda serrée entre ses mains.

- Hagrid, demanda alors le professeur Dumbledore, comment se portent vos plantations ?

Le demi-géant s'empressa de répondre avec joie, vantant les mérites de son nouveau engrais déniché dans une boutique obscure de l'Allée des Embrumes.


Hazel se désintéressa de la discussion et observa le paysage nocturne : vu de la cabane de Hagrid, le château était encore plus impressionnant et la forêt interdite, encore plus inquiétante ! Elle posa son doigt sur la fenêtre et se mit à suivre la glissade d'une goutte de pluie contre le carreau. Elle se souvenait encore des pleurs de Carew. Et que dire de cette sensation de terreur quand le Détraqueur s'était approché d'elle ? Elle avait cru que plus jamais, elle n'aurait été capable d'éprouver ne serait-ce qu'une parcelle de joie. Le rire tonitruant de Hagrid, combiné à celui de Seren, la tira de ses pensées. Le demi-géant rangea les tasses sur le plateau, tout en laissant les biscuits et les caramels à la disposition de ses invités. Il se leva, sifflotant le reste de sa chanson dont Hazel perçut quelques paroles :


My life is cold, and dark, and dreary;

It rains,and the wind is never weary;

My thoughts still cling to the mouldering past,

But the hopes of youth fall thick in the blast,

And the days are dark and dreary.


Les paroles de la chanson suffirent à plonger de nouveau la cabane dans une étrange mélancolie. Hazel souffla sur la vitre et se mit à esquisser un trait à l'aide de son index. Elle fit partir le trait de son front et avec lenteur, l'éleva jusqu'au visage de Rogue se dessinant sur la vitre embuée. Son trait se changea en un point d'interrogation tremblant. Devinait-il ses intentions, les questions se bousculant dans son esprit ? Il leva sa main à son tour et d'un geste vif, quoique dépourvu de rage, il effaça le point d'interrogation dessiné sur la fenêtre. La réplique était claire : il ne lui apporterait pas les réponses tant désirées. Hazel releva la tête et aperçut le bien curieux regard que Dumbledore faisait peser sur eux. À cet instant, le vent s'engouffra dans la cabane et vint souffler les bougies l'éclairant. Seul le visage de Hazel, nimbé par la lumière rougeoyante de la cheminée, se reflétait dans la vitre gorgée de pluie.


Hagrid poussa un juron, Dumbledore s'empressa de rallumer les bougies avant de se lever. Prenant subitement congé, le directeur se leva et remercia Hagrid pour son hospitalité.

- Severus, il est temps de laisser nos deux élèves à leurs corvées. Leur heure de retenue n'est pas terminée, et notre ami se fera sans nul doute une joie, de les ramener au château.

Hagrid confirma par une réponse plus qu'enthousiaste ! Rogue se contenta de déposer sa tasse, à moitié vide, sur la table avant de suivre le vieux sorcier hors de la cabane.


Une fois la porte refermée, Hagrid tira une petite caisse de dessous le lit qu'il posa sur la table. Hazel se plaça auprès de Seren et se hissa sur la pointe des pieds. Le garde-chasse souleva une petite couverture de laine grossière, dévoilant un petit animal ressemblant à la peluche veillant sur Hazel depuis des années. La curieuse petite créature bailla avant d'ouvrir les yeux.

- Qu'est-ce donc ? s'enquit Hazel en observant l'animal qui tentait de s'emparer de l'une des chevalières ornant les doigts de Seren.

- Un Niffleur, répondit-il en tendant une bague à la créature. Hagrid et moi l'avons trouvé dans le potager, mourant de faim ... C'est encore un bébé.

- Quand il sera assez grand, le professeur Brûlepot l'intégrera dans le petit troupeau qu'il possède, mais pour le moment, nous devons nous en occuper, expliqua Hagrid en aidant la créature à se dégager de la couverture.

Le Niffleur s'assit et se mit à jouer avec le bijou confié par Seren. Il examina la bague d'un œil expert, avant de le presser contre son curieux museau allongé. Ravi de cette offrande, il se mit à pousser des petits cris de contentement.

- Je cherchais de quoi l'occuper, confia alors Seren, le jour du match ...

- C'est pour lui que tu avais caché toute cette nourriture et ces couverts ?!

- Oui, lorsque Jekyll nous a emmenés dans le garde-manger pour affronter la goule, j'ai bien observé les lieux et je suis venu piquer quelques trucs.

- Ce qui n'était pas très malin, bougonna le garde-chasse.

Le Niffleur se désintéressa de la bague et se mit à crier tout en tendant ses bras vers Seren. Le Serpentard se pencha vers lui et lui gratta le haut de la tête avec affection.

- Je crois qu'il est temps de te nourrir, pas vrai, mon ami ?

Le Niffleur lui répondit en lui effleurant la main de son bec. Hazel ne put retenir un sourire en voyant la scène : Elle avait découvert un tout autre Seren depuis leur dernier affrontement. Un Seren qui éprouvait des peurs dans lesquelles elle se reconnaissait. Un Seren capable de bienveillance et d'humour, un Seren courageux et n'hésitant pas à braver les dangers pour venir en aide à autrui. Un Seren qu'elle aimerait connaître davantage ...


Seren prit le Niffleur dans ses bras, s'approcha du chaudron bouillant sur le feu de cheminée et en tira un biberon. Toujours chargé de son précieux fardeau, il se lova dans le fauteuil de Hagrid, le Niffleur calé sous son bras. Hazel se percha sur l'accoudoir.

- Depuis mon enfance, confia-t-il en approchant le biberon du petit animal, je suis passionné par les créatures fantastiques. Comme tu le sais, je suis en retenue avec Hagrid depuis le début de l'année et avec lui, j'ai pu en parler ...

Le Niffleur aspirait le lait de chèvre avec gloutonnerie. Trop empressé, il fut pris de hoquet et Seren dut cesser de l'alimenter pendant quelques secondes. Le Niffleur s'empara du biberon et manifesta sa contestation en tirant sur la tétine. Seren, comprenant la demande, se hâta de le nourrir.

- Ma grand-mère Morrigan déteste les créatures magiques, avoua-t-il en baissant les yeux afin de masquer sa gêne. Quand je suis à la Nouvelle-Orléans, en revanche ...

Il se redressa, les yeux pétillant d'une joie indescriptible.

- Ma' Althea vit entourée d'une vraie ménagerie ! Il faut dire que Cassandre est une spécialiste des animaux fantastiques américains !

- Qui est Cassandre ? demanda Hazel avec curiosité.

Elle se souvint alors de la Beuglante reçue par le Serpentard : la grand-mère du jeune homme l'avait effectivement menacé d'envoyer une certaine « Cassandre » à Poudlard, s'il persistait à se comporter comme une petite terreur. Seren retira le biberon au Niffleur et se mit à le bercer avec précaution. Il releva le menton et Hazel vit l'embarras se peindre sur ses traits.

- Cassandre est ... ce n'est pas que j'ai honte, mais grand-mère Morrigan dit que je dois tenir ma langue à ce sujet.

Il se mit à se gratter les cheveux, sans doute un moyen pour masquer sa nervosité. Hazel se pencha vers lui :

- Si tu as envie de me le dire, je garderai ça pour moi.

- Cassandre est la compagne de Ma' Althea. Elles vivent ensemble depuis des années. Grand-mère Morrigan trouve cela outrageant ... Ma' Althea a été mariée de force à son mari ; après son décès, elle a choisi la personne qu'elle aimait depuis son adolescence. Quand ma mère est tombée amoureuse de mon père, et même s'il lui déplaisait, elle ne s'est pas opposée à son choix. Selon Ma' Althea, on ne peut pas contrôler les élans de son cœur ...

- J'imagine que ton autre grand-mère a très mal accepté ta mère ...

- Oui, mais mon père a tenu bon. C'est sans doute la seule chose de bien qu'il ait faite au cours de sa vie : se marier par amour, pour le reste ...

La réplique de Seren demeura en suspens. Hazel comprenait ce que signifiait ce silence : son camarade était en colère contre ses parents et surtout, contre son père. Il ne le détestait pas mais il ne parvenait pas à comprendre ses choix. Dans une moindre mesure, Hazel devait s'avouer qu'elle aussi, en voulait à son père : elle ne le montrait pas forcément, mais elle ne parvenait toujours pas à accepter son mariage avec Mary Murderstone et ses mensonges sur la mort de sa mère. Elle avait tenté de recoller les morceaux dans leurs dernières lettres, cependant quelque chose s'était brisé dans leur relation, malgré les explications et le pardon accordé.


Hagrid, installé à la table, tricotait un bonnet que Hazel devina être destiné au Niffleur. Tout en maniant les aiguilles avec dextérité, leur hôte écoutait avec attention leur conversation et paraissait ravi de les voir échanger des confidences. À croire que le demi-géant avait manigancé avec Carew pour leur permettre de mieux se connaître ! Hazel esquissa un sourire à cette pensée absurde et se retourna vers le Niffleur. Seren le leva vers elle, l'invitant à le prendre dans ses bras. La petite créature se roula en boule et nicha sa tête sous l'épaule de la jeune sorcière conquise par ce redoutable petit séducteur.

- J'aurais besoin de vous pendant les prochaines vacances, déclara alors Hagrid.

Il déposa son tricot sur la table et s'agenouilla devant la cheminée.

- Je dois m'absenter pour Noël, expliqua-t-il en remuant le brasier à l'aide d'un tisonnier. Crockdur viendra avec moi, mais le Niffleur est trop fragile pour voyager. L'un de vous pourrait-il le prendre en charge ?

Seren secoua la tête, déçu.

- Impossible. Si elle lui met la main dessus, grand-mère Morrigan risque d'en faire un pâté pour le réveillon.

- Je m'en chargerai, proposa alors Hazel.

Qu'importe les cris d'orfraie que ne manqueraient pas de pousser sa belle-mère, elle comptait bien veiller sur la petite créature ! Oliver n'y verrait sans doute aucun inconvénient et pour éviter tout conflit, elle envisageait même de s'installer dans le grenier afin que le Niffleur puisse bénéficier d'un espace de liberté beaucoup plus grand ! La pauvre créature ne supporterait pas d'être enfermée dans une cage pendant deux semaines ...

- Et bien, ça m'arrangerait, dit Hagrid. Après les vacances, je pense qu'il sera assez costaud pour rejoindre la réserve du professeur Brûlepot.

- Il a un nom ? s'enquit Hazel.

Le Niffleur, devinant qu'il était le centre de cette discussion, se réveilla et s'assit sur les genoux de Hazel. Ses petites pattes aux griffes frétillantes tendues devant lui.

- Je vous laisse le choisir.

Hazel et Seren se consultèrent et tombèrent tous les deux d'accord : le petit animal ne pouvait que porter le prénom du plus célèbre des magizoologistes.

- Norbert, répondirent-ils en chœur.


Ainsi fut baptisé le petit Niffleur qui scella définitivement l'amitié naissante entre la Gryffondor et le Serpentard. Il faut parfois peu de choses pour permettre à une amitié d'éclore : combattre un Mangemort et devenir les nourrices d'une créature fantastique permirent aux deux rivaux de se découvrir et de nouer des liens complices.


Note:

La "chanson" de Hagrid est en réalité des vers empruntés à un poème de Henry Wadsworth Longfellow intitulé The Rainy Day.

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