L'Ecrin des illusions

Chapitre 8 : Un Epouvantard dans le placard

2555 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 13/01/2024 14:02

Le reste de la semaine fut beaucoup plus calme pour Hazel, même si le premier cours de vol ne s'était pas révélé fort concluant, elle l'avait tout de même apprécié. Elle avait été soulagée de constater qu'elle n'était pas la seule à ne pas savoir manier un balai et mis à part Charlie, aucun élève n'avait réussi à se faire obéir de son balai. La séance avait même dû être écourtée car une élève de Poufsouffle, une certaine Nymphadora Tonks, avait réussi l'exploit de rester pendue à l'une des tuiles du château.

Les nouveaux camarades avaient également beaucoup apprécié le cours de sortilèges donné par le professeur Flitwick et avait découvert la serre contenant les plantes magiques du professeur Chourave.


Il ne restait à présent qu'un cours à découvrir pour les Gryffondor : celui consacrée à la Défense contre le forces du mal.

- On va enfin s'attaquer aux choses sérieuses ! s'écria Charlie en se frottant les mains.

Le quatuor se dirigeait d'un pas enjoué vers la tour Est.

- J'espère que le professeur Jekyll a les épaules solides. Les professeurs de cette matière ne tiennent pas plus d'une année. Celui de l'an passé est hospitalisé à Sainte Mangouste et ne reconnaît plus personne.

- L'autre d'avant a disparu dans la Forêt interdite, renchérit Sofia. Quant à celui qui venait des Carpates ...

- Bill prétend qu'il était un vampire. Un beau jour en arrivant en cours, lui et ses camarades ont simplement vu un petit tas de cendres près du bureau et le professeur Drakul a été porté disparu.

Jonathan eut un frisson.

- C'est si dangereux que ça ?

- Pour les élèves, non ; en revanche pour les profs ...

Charlie baissa la voix :

- Beaucoup pensent que Rogue est le responsable de tout ça. Il convoite le poste depuis son arrivée...

Hazel ne fut même pas étonnée pas cette supposition : le professeur Rogue était tout à fait le genre de personne capable se débarrasser d'un collègue « indésirable ».


Ils arrivèrent devant la salle de classe. La porte était ouverte sur la pièce, plongée dans la pénombre. Charlie s'avança le premier et découvrit le professeur Jekyll assise derrière son bureau, éclairée par une simple bougie flottant près de son visage.

- Venez, les convia-t-elle d'une voix douceâtre. Je ne mange pas.

Intrigués, les élèves de première année s'exécutèrent en silence. A la grande surprise, la salle de classe était dépourvue de pupitres et ils se retrouvèrent debout devant le bureau et le tableau. Seule une vieille armoire trônait au milieu de la salle.


La bougie se mit à tournoyer, projetant les éclats rouges du collier de Jekyll tout autour d'elle.

- Dans ce cours, nul besoin de livres ou de bureaux. Vous aurez besoin de votre cervelle et de votre baguette.

Elle se leva et descendit de l'estrade. La bougie la suivit.

- Je vais vous apprendre à discerner les forces maléfiques qui vous entourent. Certes, vous êtes encore trop jeunes pour former un patronus , mais vous êtes tout à fait aptes à vous défendre contre certaines créatures. A propos, qui sait ce qu'est un patronus ?


Jonathan s'empressa de lever la main. Jekyll darda son regard vers lui et lui donna la parole. Jonathan balbutia quelques mots d'une voix intimidée. Un sourire se dessina sur les lèvres du professeur. Elle s'approcha de lui, Hazel fronça le nez, un brin gênée par le parfum capiteux émanant de son corps.

- Bien, très bien, mon garçon. Avez-vous étudié pendant l'été ?

Elle tendit la main et lui pinça la joue avec tendresse.

- Pour un enfant de Moldus, vous vous débrouillez bien, Mr. Harker.

Elle lui accorda une dizaine de points avant de marcher jusqu'au fond de la salle. Le groupe se tourna vers elle. Jekyll brandit sa baguette vers le plafond :

Spero patronum !


Sous les yeux ébahis de la classe captivée, un corbeau fait de lumière jaillit de la pointe de sa baguette et se mit à voltiger autour de leurs têtes. Guidée par la baguette de la sorcière, l'oiseau se posa aux pieds de Hazel et s'inclina devant elle. Hazel voulut tendre la main pour le caresser, fasciné par l'oiseau, mais Jekyll l'en dissuada :

- Non, Miss Evans. C'est un geste beaucoup trop intime et nous venons à peine de nous connaître ...


Elle fit disparaître le corbeau lumineux et s'avança vers le tableau.

- Il existe de nombreux sortilèges, comme la création de patronus, qui permettent de vous protéger. De vous protéger du Mal sous toutes ses délicieuses formes. Pour vous, qu'est-ce que le Mal ?


Plusieurs mains se levèrent. Des réponses quelque peu nerveuses et confuses se firent alors entendre. Hazel comprit que pour nombre de ses camarades issus de familles de sorciers, le Mal portait justement le nom de celui dont il ne fallait pas le prononcer. Combien de familles avaient-elles été détruites par ce mage noir ? Un mot attira l'attention de Hazel.

- Un Mangemort, murmura-t-elle à Charlie, qu'est-ce donc ?

Son ami ne put répondre car Jekyll s'empressa de se tourner vers eux.

- Un Mangemort, Miss Evans, est un partisan de Vous-Savez-Qui. Certains sont morts, d'autres sont à Azkaban ; quant à ceux ayant échappé à la justice, ils se cachent, attendant patiemment leur heure ...

Des chuchotements apeurés se firent entendre. Jekyll esquissa un sourire amusé.

- C'est pourquoi, vous devez être prêts à vous défendre. Weasley, pourriez-vous me donner l'un des trois sorts impardonnables ?

Imperium, répondit Charlie d'une voix tremblante.

Imperium, ce sort vous permet de prendre le contrôle d'un individu ... Effroyable perspective, n'est-il pas ?

Jekyll s'approcha de nouveau du petit groupe. Le bas de sa cape rougeoyante effleura le bout de leurs chaussures.

- Un autre sort impardonnable ?

Endoloris, proposa Johanne.

Endoloris, le sort infligeant une douleur telle que la mort vous semble bien douce à côté ...


Hazel jeta un coup d'œil à Jonathan : celui-ci était plus que blême et l'énumération des sorts impardonnables ne faisait qu'accroître son malaise. La jeune sorcière se rapprocha de son camarade et lui pressa l'avant-bras en signe de soutien. Si certains élèves fixaient Jekyll avec admiration ; d'autres, au contraire, semblaient agités et nauséeux. Hazel tenta de déchiffrer l'heure à la pendule suspendue au-dessus du bureau, mais l'obscurité l'en empêcha. Le temps s'étirait lentement et elle avait l'impression de suffoquer dans cette salle de classe. La bougie eut un sursaut et s'immobilisa face à elle. Des gouttes de sueur coulaient le long de son front et de ses joues.


Jekyll s'avança vers elle et tendit sa baguette vers son cœur.

- Savez-vous quel est le dernier sort impardonnable, Miss Evans ?

Avada kedavra, souffla Jonathan à son amie.

- Parfaitement, Mr. Harker. Le sort qui provoque la mort de celui qui en est frappé.

Elle posa sa baguette sur le front de Hazel et releva lentement sa frange. Hazel déglutit avec difficulté.

- Selon moi, il existe des maléfices encore pires que la mort. Quelle est votre plus grande peur, Miss Evans ? Perdre un être cher ? Ne pas vous montrer à la hauteur des attentes d'autrui ? Foutaises que cela ! la pire peine serait de perdre l'esprit, d'être prisonnière d'une terrible illusion ou d'un sommeil éternel vous enchaînant à un monde qui n'est pas réel. La mort, Miss Evans, n'est rien à côté des illusions.

Jekyll retira sa baguette avec lenteur avant de se retourner vers les élèves.

- Pour combattre le Mal, vous devez affronter la Peur et lui faire face avec courage.


La sorcière se plaça devant l'armoire. La bougie s'écarta d'elle et retrouva sa place sur le lustre. Celui-si s'alluma, baignant la salle de classe d'une inquiétante lueur tremblotante.

- Je vais vous apprendre à combattre vos peurs.

L'armoire fut saisie de violents soubresauts. Les élèves se reculèrent. Jekyll émit un petit rire cristallin.

- N'ayez crainte, nul Détraqueur ou loup-garou ne se dissimule dans cette armoire, ce n'est qu'un simple Epouvantard ... Quelle est la particularité de cette fascinante créature ?

Quelques mains se levèrent. Jekyll se tourna vers Sofia.

- Je vous écoute, Miss Mirwani.

- Un Epouvantard prend la forme de ce qui nous terrifie le plus ...

- C'est exact. Dix points pour votre maison. L' Epouvantard se saisit de votre peur la plus intime . Pour le vaincre, vous devez affronter cette peur et prononcer le mot magique : Riddikulus.

Elle leva sa baguette et la pointa vers le groupe.

- Alors, des volontaires ? Vous y passerez tous, de toute façon.

Les élèves se reculèrent. Jekyll, d'un geste de baguette, attira un Jonathan terrorisé vers elle. Elle le força à se placer devant l'armoire. Hazel eut un frisson, compatissant avec son camarade.

Cistem aperio!


Le cadenas verrouillant l'armoire explosa. Deux mains noirâtres, couvertes de croûtes et pourvues de longues griffes jaillirent et griffèrent la porte. Une silhouette informe surgit de pénombre et se dressa devant les premières années, diffusant une odeur nauséabonde dans la salle. L'ombre se pencha vers Jonathan et quand elle se releva, Hazel reconnut le professeur Dumbledore. Celui-ci avait un sourire malfaisant et un parchemin, sur lequel était inscrit « renvoyé » en lettres capitales, se dépliait entre ses doigts. Il pointait un index accusateur vers un Jonathan au bord des larmes.


Jekyll se rapprocha de Jonathan et lui glissa au creux de l'oreille :

- La peur de l'échec ? Voilà qui est intéressant .... Regardez votre peur en face, allez !

Jonathan s'exécuta en tremblant. L' Epouvantard ricanant s'avança vers lui.

- A présent, poursuivit Jekyll, imaginez-le dans la tenue la plus ridicule possible. Creusez dans vos souvenirs de Moldu.

- Je ... Je ne sais pas, bredouilla Jonathan d'une voix enrouée de sanglots.

- Allons, allons ... chuchota Jekyll en effleurant la joue du garçon d'une caresse, rappelez-vous d'une personne habillée de façon excentrique : un voisin, un professeur ou un simple passant.

Jonathan murmura une réponse inaudible. Jekyll enfonça ses ongles dans l'épaule du jeune homme.

- Ayez confiance en vous et imaginez Dumbledore vêtu de cette tenue. Les pouvoirs de l'imagination et de l'illusion sont sans limites, Mr. Harker.

Quelques camarades poussèrent des soupirs, charmés par le ton mélodieux employé par la ravissante Jekyll. Jonathan ferma les yeux.

- Maintenant mon garçon, levez votre baguette et prononcez « Riddikulus » avec assurance.


Le jeune Gryffondor brandit sa baguette et formula le sort indiqué. Un nuage de fumée entoura l'avatar maléfique de Dumbledore ... qui se retrouva affublé d'un hideux maillot de bain à fleurs et de ridicules lunettes de soleil. Une bouée jaune ceignant ses hanches creuses complétaient ce drôle de tableau.


- Bien, très bien ! s'écria Jekyll sous les rires des élèves. Dépêchez-vous, placez-vous face à lui et lancez-lui des Riddikulus !


Sofia fut la deuxième élève à tenter l'expérience. Un « crac » résonna dans la pièce et elle se retrouva devant un Voldemort au sourire carnassier. Sofia leva sa baguette avec assurance et le Seigneur des ténèbres se retrouva vêtu comme un nouveau-né. Charlie suivit son amie et lutta contre un clown à l'air particulièrement malsain. Le clown maléfique perdit son nez rouge, marcha dessus et tomba au sol dans un bruit sourd. Les jeunes élèves de Gryffondor, appelés par Jekyll, mirent leurs peurs à nu et guidés par les encouragements et les rires de leurs camarades, parvinrent à les rendre amusantes : un serpent s'étrangla avec sa propre queue, une araignée s'emmêla dans sa toile et un loup-garou prit la forme d'un chiot baveux.


Jekyll se tourna vers Hazel. Le rire de cette dernière s'éteignit. La jeune femme la fixait d'un œil inquiétant et son sourire charmeur se changea en un rictus antipathique. Hazel eut même la désagréable impression que les traits charmants de Jekyll s'étaient creusés, devenant plus masculins.

- A vous, Evans, ordonna la professeure.


Hazel se saisit de sa baguette et s'approcha de l'Epouvantard affaibli. La créature agenouillée tentait de reprendre son souffle. L'Epouvantard se releva avec peine et n'était plus qu'un amas de créatures répugnantes, cependant bien décidé à poursuivre la lutte.

- Révélez-moi votre peur la plus intime, Hazel Evans, susurra Jekyll d'une voix rauque. Noctem.


Le lustre s'assombrit, plongeant la pièce dans l'obscurité et les élèves dans la perplexité. L'Epouvantard eut un regain d'énergie et s'éleva. Hazel sentit la joue de Jekyll frôler la sienne. La jeune femme s'était placée à la hauteur de son élève, sans doute pour la rassurer. Seul son collier écarlate offrait un point lumineux. Jekyll se redressa et s'écarta. Hazel lui décrocha un regard et sentit un frisson glacé lui parcourir l'échine. A nouveau, le visage du professeur Jekyll semblait avoir changé ; son sourire et son menton étaient semblables à ceux que la jeune sorcière voyait tous les matins dans son propre miroir !


La créature s'approcha d'une Hazel paralysée par la stupeur et la peur. Cette curieuse masse fusionnant les corps d'un clown, de Dumbledore et de Voldemort, se dressa sur ses pattes d'araignée et se pencha, sa bouche immense ouverte sur des canines vampiriques étincelantes et ensanglantées. Il poussa un hurlement monstrueux qui fit crier les premières années. Tout d'un coup, le visage monstrueux se métamorphosa, prenant les traits à peine esquissés, d'un être humain.


Hazel, reprenant ses esprits, se recula, terrifiée par l'apparition, horrifiée par cette peur qu'elle ne pouvait nommer, qu'elle ne pouvait visualiser, remuant de bien sombres et confus souvenirs. Les contours de la créature devinrent de plus en plus nets, prenant l'apparence d'un homme inconnu, aux traits aristocratiques et aux longs cheveux bruns.


Des chuchotements se firent alors entendre :

- Black ?!

- Sirius Black ? Tu crois que c'est lui ?

- On dirait, mais je ne suis pas sûre ...

Sirius Black ou pas, Hazel était certaine d'une chose : cet individu la terrorisait. Elle se mit à trembler , sa baguette glissa de ses doigts. Le professeur Jekyll se tenait à l'écart et ne perdait pas une miette de ce spectacle.

- Hazel, cria Sofia, imagine-le dans une tenue ridicule !

- Professeur ! intervint Jonathan, aidez-la !

- Non, Miss Evans doit affronter sa peur, seule.


Quelques paroles indignées parvinrent jusqu'aux oreilles de la jeune sorcière, mais bientôt, elle n'entendit plus les voix de ses camarades. L'homme tendit les mains vers Hazel et encadra son visage de ses mains arachnéennes. Il murmura un sort incompréhensible avant d'abaisser son regard vers elle . Hazel sentit ses forces l'abandonner, ses genoux ployèrent sous le poids de la peur et l'obscurité l'envahit.

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