et pourtant...

Chapitre 34 : la news de l'année

Catégorie: M

Dernière mise à jour 08/11/2016 15:46

On était samedi.

Olli devait partir aujourd'hui.

Et c'était bizarre. Ce n'était pas réel. Ce jour qu'il attendait depuis des semaines comme une libération, il y était enfin, et il n'arrivait pas à l'appréhender.

Il s'était levé comme tous les autres matins. Comme si rien d'extraordinaire n'allait se passer. Comme s'il n'était pas en train de laisser partir l'amour de sa vie.

Et il était là, à vaquer à ses occupations comme si, vraiment, rien de ce qui allait se passer aujourd'hui ne le touchait...

Il ne savait même pas à quelle heure il s'en irait !

 

 

Il descendit au No Limits prendre son service.

Gregor lui envoya un regard sévère, mais il n'y prêta pas attention, comme toutes les autres fois. Il avait coupé court à chaque tentative de son frère de lui parler. Il savait ce qu'il allait lui dire. Il n'avait pas besoin, pas envie de l'entendre.

 

Il fut surpris de trouver Olivia, installée au comptoir. Elle ne s'était pas remontrée depuis cette après-midi là... trois jours plus tôt. Olli avait dit qu'elle avait quelque chose à voir dans ce qui s'était passé. Il ne savait pas pourquoi, ni comment, mais cela ne l'étonnait pas... Olivia n'avait pas son pareil pour mettre les gens dans l'embarras, même involontairement.

 

- Salut, tu attends Olli ? Parce-que, je ne pense pas qu'il passera par le bar...

Olivia darda son regard sur lui.

- Olli est au Schneider's. Mais je comprends qu'il ne veuille plus « passer » par ici.

 

Christian sursauta. Que savait-elle exactement ? En tout cas, plus qu'il ne l'avait pensé. C'était pourtant assez évident qu'Olli se soit confié à elle ! Mais dans quelle mesure... ?

- Pourquoi est-il là-bas ? demanda-t-il sans relever la dernière remarque ; quoiqu'il ait dit, elle avait plus que le droit d'être en colère contre lui.

- Il ne travaille quand même pas le jour de son départ !?

 

Olivia le toisa. Puis se mordit les lèvres... Devait-elle lui dire ? Olli lui avait bien spécifié de ne plus se mêler de tout ça. Oh, et puis de toutes façons, il le remarquerait bien tôt ou tard...

- Olli ne part pas. Pas aujourd'hui en tout cas.

 

Christian devint tout pâle. Non, non, non, non, non, pas ça. Il ne pouvait pas ne pas partir. Tout son plan résidait dans ce seul point, qu'il parte. Qu'il ne soit plus là. Que penser à lui, à chaque putain de seconde de chaque putain de minute, soit vain et inutile, puisque de toutes façons, il ne serait plus là. Qu'il puisse enfin tourner la page et passer à autre chose. Tout ça n'était possible que s'il partait !

- Pourquoi ? demanda-t-il d'une voix blanche.

 

Olivia descendit de son tabouret pour s'en aller.

- Vois ça avec lui ; moi j'en ai déjà trop fait, il paraît.

 

Christian la retint par le bras.

- Pourquoi il ne part pas aujourd'hui ? demanda-t-il en essayant de contrôler la fureur et la panique dans sa voix.

 

- Tu me fais mal !

Christian retira sa main, et vit les marques rouge que ses doigts avaient laissé. Il ne s'était pas rendu compte qu'il serrait.

- S'il-te-plait Olivia. Pourquoi il ne part pas ?

 

- Parce-que c'est un crétin ! Voilà pourquoi !

Elle regarda Christian dans les yeux. Elle voulait lui faire mal. Autant que ce qu'il faisait à Olli.

- Il a prit cette décision il y a une semaine. Quand il pensait encore que tu étais assez intelligent pour comprendre les choses tôt ou tard. Il voulait te laisser du temps.

- Du temps pour quoi ?

- Pour que vous ayez une chance... Il avait même pensé démissionner au départ ! Eh ouai, tout ça pour un imbécile comme toi. Heureusement qu'il ne l'a pas fait, hein ! Mais résultat, il est là pour un mois encore, à devoir subir ta présence.

 

Christian vacilla.

- C'est ce qu'il a dit ?

- Quoi ?

- Qu'il devait subir ma présence...

 

Olivia se retint de justesse de confirmer. Elle voulait le voir souffrir, mais avait fait une promesse. Non pas que ce soit un problème habituellement, mais là, c'était Olli.

- Vois ça avec lui ! dit-elle encore en se retournant.

 

- Attends !

Olivia soupira et tourna son tête vers Christian, laissant intentionnellement le reste de son corps dans l'axe de la porte.

- Qu'est-ce qu'il s'est passé mercredi après-midi ? Il a dit que c'était un de tes plans. Qu'est-ce que tu as fait exactement, et pourquoi ?

- Ça changera quelque chose que tu le saches ? Tu iras lui parler après ?

Christian baissa la tête.

- Non.

- Dans ce cas ! répondit-elle en partant.

 

 

                                                                         *

 

Christian regardait toujours la porte par laquelle Olivia venait de partir. Son cerveau travaillait à assimiler les informations.

La première : Olli ne partait pas aujourd'hui. Il serait là encore un mois. Un mois !! 30 jours. Il ne supporterait pas tout ça encore pendant trente jours ! Il allait péter un câble avant.

La deuxième : Olli devait supporter sa présence. Il subissait sa présence.

Cela n'aurait pas dû être un choc de l'entendre. C'était assez logique. Avec tout ce qu'il avait dit, tout ce qu'il avait fait... depuis des semaines maintenant. C'était assez évident au final qu'il veuille partir autant que lui désirait qu'il parte.

 

Il posa ses mains sur le comptoir et pencha la tête. Et tout ça c'était de sa faute. Une boule lui enserra la gorge.

Il se détestait lui-même ! Pourquoi serait-ce étonnant qu'Olli en soit là aussi !?

Comment allait-il gérer ses émotions pendant un mois encore !? La culpabilité, la colère, le ressentiment, mais aussi l'amour, le désir, la frustration.

 

 

Il leva la tête et croisa le regard de son frère. Ses yeux exprimaient un mélange d'irritation et de compassion. Il sentit la colère remonter en lui. Elle ne le quittait jamais vraiment, et n'avait pas besoin de beaucoup pour revenir à la surface.

- Tu le savais ?

- Quoi ? demanda Gregor nonchalamment.

- Qu'Olli ne partait pas aujourd'hui. Tu le savais !?

- Bien sûr. Il a reconduit son bail pour un mois la semaine dernière, dit-il tranquillement.

 

Christian eut beaucoup de mal à contrôler le ton de sa voix.

- Pourquoi tu ne me l'as pas dit !!?

 

- Eh bien, petit frère, tout d'abord j'ai pensé que tu étais au courant, Olli étant censé être ton meilleur ami à ce moment là. Et je te signale que ça fait deux jours que j'essaie de te parler et que tu me remballes...

 

Christian ouvrit la bouche mais aucun son ne sortit... pour la bonne raison qu'il ne savait pas quoi rétorquer.

- Je ne tiendrais pas encore un mois Gregor ! finit-il par dire d'une petite voix.

- Eh bien arrêtes de vouloir tenir ! Laisses-toi aller, laisses parler tes sentiments, bordel !

Il détourna les yeux.

- C'est trop tard ! Il a fait une croix sur moi...

 

Gregor le regarda, stupéfait. Mais que grgkùqjqfoj... Il prit son frère par le bras et le tira jusqu'à la réserve.

- Christian, tu vas finir par bouger tes fesses et aller le récupérer !? Parce-que, quand il sera parti, là, ce sera vraiment trop tard ! Arrêtes avec tes excuses bidons ! Que tu sois gay, ou bi, ou peu importe, ça m'est complètement égal. Mais que tu agisses comme un imbécile et un lâche ! Que tu te fasses du mal, et qu'en plus tu lui en fasse à lui ! C'est là tu me déçois Christian !

 

- Mais c'est ça ! Depuis le début je ne lui fais que du mal ! Je… je ne suis pas bon pour lui !

 

Gregor émis un rire sarcastique.

- Ah t'as trouvé une nouvelle excuse ! D'abord c'était la peur de me perdre, la peur de ce que ça « signifiait » à propos de toi... et maintenant c'est par altruisme que tu te restreins ! Pour ne pas lui faire de mal ! Alors que c'est justement là, maintenant, que tu lui en fais le plus ! Une petite question, tu as vu Olli dernièrement ?

 

Son cœur se mit à battre plus fort.

- Tu l'as vu ? Vous avez parlé ??

 

Gregor secoua la tête.

Oui, il avait vu Olli, ou du moins ce qu'il en restait ! Il avait tenté de lui parler mais il n'y avait rien à faire. Et il savait par Charlie qu'il ne parlait à personne. Ni à elle, ni à Olivia.

Il avait été choqué l'aspect creusé de son visage, par le regard vide dans ses yeux. Et il en avait voulu à Christian, tellement voulu, de sa stupidité et de son insensibilité.

Si au moins il allait s'excuser ! Au moins ça...

- Si tu veux savoir comment il va, vas le lui demander toi-même ! dit-il encore avant de quitter la réserve.

 

 

 

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