Chapitre 7 : Un pas de trop
Au réveil, Ranma fut déçu. Il avait passé une nuit très reposante et n’avait fait l’objet d’aucune visite nocturne. Il décida de bon matin, de partit à la recherche du cochon d’Akané.
— Tu cherches P-chan ? s’étonna cette dernière. Je ne sais pas, il n’a pas dormi avec moi cette nuit.
— Ha… D’accord.
Dépité, il mangea rapidement son déjeuner en se demandant où avait pu passer ce vagabond de Ryoga puis suivit Akané sur le chemin du lycée. Il passa la matinée à ruminer puis décida vers midi qu’il était ridicule. Il n’allait pas courir après cet abruti comme une jeune fille énamourée. Il décida donc de l’oublier et de mettre toute son énergie dans le cours de sport, pour le plus grand malheur de l’équipe adverse. Une averse en fin de journée le changea en fille et pour son plus grand malheur, Kuno, le capitaine de l’équipe de Kendo, surgit de nulle part tenter de l’embrasser. C’était ainsi depuis fort longtemps, au grand amusement de tout le lycée. Le valeureux kendoka était fou amoureux d’Akané mais aussi de celle qu’il avait surnommée « la jeune fille à la natte ». Il faisait partie des rares élèves à n’avoir pas compris la double identité de Ranma. Aussi partageait-il son temps entre tenter de vaincre le fiancé de celle qu’il aimait et tenter de le séduire lorsqu’il avait l’apparence d’une jeune fille. Bien évidemment, il se faisait battre à plate couture et ce ne fut pas différent cette fois-là. Ranma l’écrasa sans effort et avec une rage décuplée par ses états d’âme.
Il rentra au dojo en compagnie de sa fiancée qui était étrangement bien disposée à son égard depuis qu’ils avaient failli s’embrasser. De moins jusqu’à ce que Shampoo ne débarque. La belle chinoise tenta d’enlacer le garçon et Akané, furieuse, les arrosa d’eau froide, les changeant respectivement en chat et en fille. Ranma, qui détestait les félins faillit s’évanouir de terreur et s’enfuit en hurlant. Lorsqu’il rentra enfin au dojo, plus fatigué que furieux, il s’arrosa d’eau chaude et prit son repas en subissant les sautes d’humeurs d’une Akané vengeresse. Dès la fin du dîner, il annonça son intention de prendre un bain tranquillement.
— Et s’il était possible de ne pas être dérangé ! J’aimerais un peu d’intimité.
— De la part de quelqu’un qui prend un bain sur deux avec une fille, c’est tordant ! commenta subtilement Akané.
— Je n’y suis pour rien si Shampoo m’a rejoint dans le bain l’autre jour, je ne lui avais rien demandé, essaya-t-il de se défendre.
— Ça n’a pas semblé te déplaire !
— Elle est plus féminine que toi, c’est sûr !
Et Ranma subit les foudres de sa fiancée qui l’envoya valser dans le bassin à poissons. Pestant contre le sale caractère de ce garçon manqué, c’est à nouveau sous sa forme féminine qu’il se dirigea vers la salle d’eau. Il verrouillait la porte quand il sentit un bras saisir sa taille. Ryoga enfouit son visage dans son cou qu’il parcourait déjà de petits baisers tandis qu’une main baladeuse venait caresser son ventre plat. Ranma se dégagea d’un geste brusque.
— Laisse-moi tranquille, je ne suis pas d’humeur ce soir.
Le jeune homme tenta de saisir la main de Ranma.
— Toi, pas d’humeur ? C’est toi qui m’as fait tout un laïus hier, comme quoi on avait bien le droit de se défouler. Je t’attends depuis près d’une demi-heure.
C’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd en tout cas ! s’étonna Ranma. Hier il me mordait, aujourd’hui il m’embrasse !
— T’étais où toute la journée ? s’entendit-il demander avec horreur.
— Pourquoi, je t’ai manqué ? lui rétorqua Ryoga, charmeur.
Et celui-ci plaqua l’adolescente contre le mur, caressant ses seins ronds à travers ses vêtements. Il est vraiment joli en fille, pensait-il. Il s’était toujours interdit toute attirance pour la version féminine de son ennemi mais les choses avaient changées. Il l’embrassa à pleine bouche, et s’autorisa à descendre sa main plus bas, encore plus bas. Ranma le repoussa, l’envoyant dans la baignoire.
— Je t’ai dit non !
Ryoga émergea de l’eau chaude, furieux d’avoir bu la tasse.
— Non mais qu’est-ce qui te prend ?
— Pas sous cette forme ! lui répondit Ranma.
Interloqué, son ami le dévisagea avec des yeux ronds.
— Qu’est-ce que ça change ?
— Ça change que je n’suis pas une nana !
— Je le sais mais je me disais qu’on pouvait profiter…
— C’est ça, le coupa Ranma, tu comptais en profiter pour te faire plaisir et me baiser ! Et moi, je dois jouer la fille ! Ecoute-moi bien Ryoga Hibiki. Avec moi c’est quand tu veux, où tu veux mais en tant que mec !
Eberlué, Ryoga était en train de comprendre la bourde qu’il venait de commettre. Il avait pris la chose comme un jeu et l’idée de tripoter Ranma-fille l’avait réellement émoustillé. Son ami de son côté faisait de son mieux pour vivre avec sa malédiction mais sa part féminine restait un sujet sensible. Il se sentait constamment obligé de prouver qu’il était un homme, un vrai.
— Excuse-moi, finit-il par dire, j’avais pas réfléchi. Moi non plus, je ne voudrais pas faire ça sous ma forme de cochon.
Ranma le fixa, bouche-bée.
— Parce que tu crois que ça pourrait faire envie à quelqu’un ?
— Non, bégaya Ryoga, soudain conscient de l’énormité qu’il venait de prononcer. Je ne voulais pas dire ça !
— A moins que… Non ! Tu ne l’as pas déjà fait avec une jolie petite cochonne ?
— Arrêtes tes conneries Ranma, c’est pas drôle, se défendit-il, heureux cependant de voir que la jeune fille riait. Elle semblait avoir oublié son malaise et pénétrait à présent dans l’eau chaude.
— Ha ! Ça fait du bien ! fit la voix masculine de Ranma.
Ils restèrent silencieux un grand moment, chacun plongé dans ses propres pensées. Ryoga sentait pourtant monter l’excitation tandis qu’il contemplait Ranma. Il devait s’avouer qu’il n’avait pas besoin de le voir en fille pour le trouver attirant. Si l’idée de faire l’amour avec sa version féminine l’avait tenté, c’était aussi pour s’assurer qu’il était un gars normal, aimant les filles.
— Si je t’avais pas arrêté, j’aurais eu l’impression qu’on allait trop loin, fit soudain Ranma dont les pensées suivaient le même chemin. Entre mec, c’est pas pareil, tu comprends ?
Oui, Ryoga comprenait. Il n’avait pas l’impression de « tromper » ses sentiments envers Akané avec Ranma car c’était « entre mec. »
— Dépêche-toi, t’es pas tout seul dans cette maison ! Ne me dis pas que Shampoo est encore là ! fit la voix d’Akané de l’autre côté de la porte.
— N’importe quoi ! lui répondit Ranma, je suis avec Ryoga espèce de sale jalouse !
— Je suis pas jalouse abruti ! rétorqua-t-elle. Bonjour Ryoga, ajouta-t-elle d’une voix radoucie. Tu veux que je te prévoie un petit quelque chose à manger ?
Elle est vraiment trop mignonne, pensa celui-ci des larmes de joies dans les yeux.
— Y’a vraiment deux poids deux mesures dans cette maison, marmonna Ranma, un peu surpris par la pointe de jalousie qu’il ressentait. Depuis quand se sentait-il menacé par Ryoga ? Gêné, il sortit de l’eau remarquant au passage l’air béat de son camarade. Il s’habilla rapidement et le laissa à sa rêverie.