Donjon Mystère - Dream Team

Chapitre 27 : Un quotidien mouvementé

9077 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 11/07/2021 23:04

- DEBOUT, LÀ-DEDANS !!!

Hurla-t-il d’une voix à l’accent sudiste, et au ton aussi grave que perçant. Tout le monde l’avait déjà entendu la première fois, mais il prit le temps de passer dans chaque chambre pour se répéter. Ce Pokémon était un apprenti, physiquement balèze et bleu de peau. Son chapeau de paille sillait parfaitement ses deux grandes oreilles arrondies, tandis que sa plus grande force semblait être sa voix aux intonations et gravitées uniques.

Voilà les premières informations qu’annota Salamèche, en se levant de son lit de paille. Le sourire aux lèvres, il était prêt à découvrir une nouvelle partie du monde et, par-dessus-tout, découvrir la vie d’un apprenti explorateur.

 

L’histoire de la Dream Team – Chapitre 27 : Un quotidien mouvementé

 

La septième heure de la journée venait à peine de se pointer, que tous les apprentis attendaient l’arrivée du chef au premier sous-sol de la fondation. Il arriva avec plusieurs dossiers entre les ailes, le sourire au bec.

- (Pijako) Bien le bonjour, apprentis explorateurs !

- BONJOUR, CHEF !!!

Hurla à nouveau le Pokémon au chapeau de paille. Tout le monde se boucha les oreilles, le concerné également.

- (Pijako) Oui, c’est bien d’être motivé… mais parle un peu moins fort, veux-tu ?

- Ouais, ferme-là… !

Grogna un autre apprenti dans son coin.

- (Pijako) Bien, aujourd’hui commence votre année à la guilde d’exploration ! Répétons les formalités : mon nom est Pijako, je suis le chef, et serais donc votre gérant tout au long de cet examen. Eoko, ici présente…

Disait-il en pointant du regard la concernée, buvant un café par télépathie derrière son comptoir.

- (Pijako) Est en stage de gestion à nos côtés et sur la même période que vous. Elle s’occupe de tout un tas de choses compliqué, alors ne la dérangez pas pour rien. Si vous avez besoin d’aide, vous devez vous entre-aider, vous devez communiquer, voilà l’essence de notre domaine.

Pikachu bailla. Un silence se créa, avant que Pijako lui bondisse dessus tout en lui infligeant le même coup d’aile au crâne qu’à Salamèche, le jour dernier. Sa vitesse était remarquable, et sa manière de recentrer l’attention réveilla définitivement tout le monde.

- (Pikachu) Aïe !!

- (Pijako) RETOURNE TE COUCHER, SI C’EST POUR ÊTRE AUSSI PEU MOTIVÉ !!!

- (Pikachu) P… pardon, m’sieur !

Les autres apprentis marmonnèrent dans leur coin.

- Attends, mais ce sont des gosses !?

- Tu n’avais pas remarqué ? Ils sont nombreux, en plus.

- La mentalité de la guilde a bien changé…

- (Pijako) *tousse* Bref, où en étais-je ?

Il resserra sa cravate, puis ouvrit ses dossiers.

- (Pijako) Ah oui, les emplois du temps ! Vous allez aujourd’hui apprendre à vivre selon le quotidien des apprentis explorateurs. Qu’importe le chemin que vous prendrez à l’avenir, savoir adapter son milieu de vie fait partie des bases de la profession. Si vous lever à sept heure du matin vous fatigue, alors vous pouvez déjà prendre le large, car ce n’est que le début d’une longue épreuve d’adaptation.

Il commença à distribuer deux feuilles à chacun. La première était l’emploi du temps normal, la seconde décrivait la partie « activités » de ces derniers.

 

Voici comment il se présentait :

7h-8h : Petit déjeuner et Entraînement matinal

8h-10h30 : Études

10h30-12h30 : Activités

12h30-14h : Déjeuner

14h-16h : Activités

16h-19h30 : Exploration

19h30-22h : Diner et Temps libre

22h : Extinction des feux

 

Les premières remarques se firent dans des groupements de chuchotements, mais personne ne semblait trouver cela si dérangeant. Cependant, certains semblaient déjà perdus.

- (Rocabot) Chef ? Pourquoi y a marqué… études ?

- (Pijako) Que croyez-vous, vous n’êtes pas là que pour remuer vos muscles ! Tous les jours, je vous ferai cours dans la salle à manger. On étudiera l’histoire du continent Sud, sa géographie ainsi que les bases que tout explorateur doit acquérir.

- (Germignon) Y aura-t-il des notes ?

- (Pijako) Évidemment !

Tout le monde râla soudainement.

- Sérieux, j’ai quitté l’école pour revenir dans le même système !?

- J’suis pas là pour ne rien foutre pendant deux heures, putain !

- En plus c’est noté ! J’veux pas rater mon examen à cause de ça, moi… !

- (Pijako) SILENCE !!!

Sa voix stridente raisonna dans toute la fondation, et tout le monde se tut.

- Mais… chef, je croyais qu’il n’y avait pas de ça, à la guilde ?

- (Pijako) Jusqu’à cette année. Au vu de toutes les dérives que peuvent se permettre de faire certains… « professionnels », nous avons pensé nécessaire de renforcer nos épreuves avec de l’apprentissage écrit. Ce fut également une demande du gouvernement, qui voulait un moyen juridique de punir les explorateurs en infraction.

- (Pikachu) *soupir* Moi qui pensait tout donner une dernière fois, pour le diplôme scolaire…

- (Salamèche) On révisera ensemble, ne t’en fais pas !

Rétorqua le type feu avec le sourire.

- (Pikachu) T’es vraiment masochiste, mec…

- (Germignon) On aura peut-être un avantage, dans ce cas ?

Demanda rhétoriquement Germignon à Riolu, en le regardant avec le même sourire. Mais ce dernier n’en affichait pas. Il semblait juste… s’ennuyer.

- (Riolu) Hum…

- (Germignon) … Ça va aller ?

Il lui mit un vent en détournant le regard, et Pijako poursuivit avant qu’elle ne puisse intervenir à nouveau.

- (Pijako) Parlons de la deuxième feuille, celle sur les activités. Deux fois par jours, vous devrez vous dédier à différents travaux dans le village. La guilde s’est toujours basée sur ce système : aider Bourg-Trésor à se développer malgré sa position éloignée des pôles de mondialisation. Cela se traduit par de l’aide apportée aux fermiers pour leurs agricultures, à la restauration, aux bars, épiceries ou marchés, à l’orphelinat, à l’entretien des rues, à l’aide médicale ou technique auprès d’Eoko ou aux demandes de récoltes dans certains territoires du continent. Vous ne serez pas rémunérés, et devez-vous diversifier le plus possible. L’objectif est de devenir adepte dans chacun des domaines proposés, car s’adapter, je le rappelle, est la règle d’or de chaque explorateur.

- (Salamèche) … (Je n’y avais jamais pensé, mais il est vrai qu’aider autrui ne signifie pas seulement l’aider face aux éventuelles menaces. Apprendre à connaître le métier des autres et leurs difficultés, quitte à les aider quand il le faut, c’est essentiel si l’on veut vraiment comprendre ce que l’on protège.)

- (Pijako) Pour le reste, vous ne devriez pas avoir de questions. Découvrez aujourd’hui en quoi consiste la vie d’un apprentis explorateur, et je ne vous demanderai qu’une chose : ne baissez jamais les bras. Combien d’imbéciles quittent le navire au bout d’une semaine, parce qu’ils n’ont pas trouvé ce qu’ils cherchaient ? Ces gens-là ont volés la place d’autres Pokémon bien plus méritants, et si cette année est la première dans laquelle le nombre de demandes est inférieur au nombre de places… alors il faut se poser les bonnes questions. Le monde a besoin de vous, pensez-y à chaque instant de doutes, parce que je sais que vous en aurez.

Tout le monde l’écoutait attentivement, même ceux qui savaient parfaitement de quoi leur avenir était fait. Car dans un monde comme celui-là, tout pouvait arriver…

Sur ce dernier silence, Pijako leva soudainement les ailes.

- (Pijako) Allez… EN AVANT, GUILDE D’EX… *tousse* ouh là…

- Je peux vous aider, chef ?

Demanda le Pokémon au chapeau de paille.

- (Pijako) Non, c’est ma phrase ! *soupir* Je disais… EN AVANT, GUILDE D’EXPLORATION !!!

- OUAIS !!!

Tout le monde s’écria, et une nouvelle journée commença. Jusqu’à la huitième heure de la journée, les apprentis découvrirent la diversité des repas proposés pour le petit déjeuner : fruits, jus, pain ou céréales, rien ne manquait à l’appelle. Mais ils n’avaient pas le temps de se détendre ou de blablater, car un bon quart d’heure plus tard, Pijako les força à quitter le réfectoire. Ils devaient s’échauffer pour cette nouvelle journée et, ne sachant pas comment s’y prendre, les adolescents suivirent leurs collègues, trottinant hors du compartiment. Ils descendirent les grands escaliers, puis firent le tour de Bourg-Trésor en mettant à l’épreuve leur endurance.

Salamèche ne faisait attention qu’à ses amis : Carapuce était loin devant, sans grande surprise. En plus d’être le plus déterminé, il était de loin le membre de la Dream Team le plus adapté à des épreuves physiques. Lui qui n’avait pas mis les pieds au dojo Makuhita depuis des mois, il savait que son rival de type eau s’y entraînait d’arrachepied. Et ses efforts payèrent : il semblait impressionner même les autres apprentis. Argouste, Poussifeu, Ptyranidur, Rocabot, Branette et Pikachu suivaient le rythme normalement, tandis que Mangriff trainait par feignantise. Germignon et Riolu étaient derrière, sans grande surprise non plus. Mais la guitariste ne lâchait rien et gardait le sourire, contrairement à son ami scientifique, opérant toujours d’un air désintéressé.

L’heure de l’étude arriva, et tous les apprentis attendirent sagement que leur chef leur ouvre l’accès à la salle à manger, mais cette fois pour y travailler. Chacun pris la même place que durant le soir dernier, et Pijako leur distribua du matériel scolaire basique. Pendant les deux heures et demie qui suivirent, le calme régna dans la fondation. Le chef ouvrit ses cours sur un chapitre de géographie, centré sur le continent Sud. La plupart des apprentis ne disaient rien, ils semblaient s’ennuyer ou ne pas comprendre, d’autres baillaient en cachette. Germignon et Salamèche semblaient être les seuls à prendre des notes, mais ce ne fut plus le cas lorsqu’après une heure seulement, le chef s’écria :

- (Pijako) Bon, sortez une feuille !

Depuis ce coup fourré, les prises de notes se multiplièrent. Puis, la première séance dédiée aux activités arriva. Les apprentis devaient agir en autonomie, c’étaient à eux de se repérer et de décrocher l’aide qu’ils avaient à apporter au village. Les adolescents se regroupèrent un peu avant de quitter la fondation, feuilletant les descriptions des différentes activités proposées.

- (Rocabot) Vous savez quoi faire, vous ?

- (Pikachu) Moi, j’vais foncer au bar Spinda direct !! J’adore ce genre d’ambiance, j’espère qu’il va m’accepter en tant que serveur !

- (Germignon) Tu vas faire quoi, Carapuce ?

- (Carapuce) … Faire un truc qui me d’mande de bouger.

Il quitta le groupe sur ces mots.

- (Branette) Il veut déjà fuir le village ?

- (Germignon) Je le comprends.

Elle se tourna brusquement, puis bondit à ses côtés.

- (Germignon) Je t’accompagne !

Lui exclama-t-elle, d’un sourire qu’ils se partagèrent mutuellement. Ils partirent sur ces mots, pendant que Pikachu regarda sur un plan la position du fameux bar Spinda.

- (Branette) Puis-je venir avec toi ?

- (Pikachu) Ouais, carrément ! Toi aussi, t’aimes ce genre d’endroit ?

- (Branette) J’aurai tendance à dire non, puisque c’est un regroupement de gens dans un espace clos, et je n’aime pas les… gens. Mais je préfère supposer que les Bourg-Trésoriens ne picolent pas dès l’aube.

- (Pikachu) Ah ah, ça m’étonnerait, si c’est l’seul bar du village ! Bon, on y va, les amis !

Ils partirent à leur tour.

- (Poussifeu) … Argouste ?

- (Argouste) Hum… ? Peut-être l’agriculture.

- (Rocabot) Ah ouais !? Ce n’serait pas dix fois moins chiants d’aller s’occuper de gosses à l’orphelinat ?

- (Ptyranidur) C’est vrai que ça nous connait.

- (Argouste) Justement, je n’ai pas envie de remettre les pieds dans un orphelinat tout de suite. Salamèche, tu m’accompagnes ?

- (Salamèche) Euh… si tu veux. Poussifeu ?

- (Poussifeu) Non, certainement pas. Au vu de la taille de mes ailes, je sens que je vais devoir utiliser mon bec, pour défourailler de la carotte. Je fouillerai le village et trouverai bien autre chose.

- (Salamèche) Hum, ça se comprend.

Un silence se créa, puis les regards se tournèrent vers Mangriff, affalé dans le canapé de l’étage.

- (Rocabot) Bon, toi, t’as pas l’air motivé à faire quoique ce soit.

- (Ptyranidur) Tu veux venir avec nous ?

- (Mangriff) … Nan.

- (Ptyranidur) Bon… revient vers nous si tu changes d’avis.

Ils se séparèrent sur ces mots, entamant la deuxième partie de cette matinée avec ce brin de découverte toujours aussi fou. Le soleil brillait aux éclats, pas le moindre nuage occultait ces jeunes Pokémon de rayons bien chaleureux, peut-être même un peu trop.

Les différents groupes se séparèrent une fois descendu des grands escaliers, Salamèche et Argouste partant du côté des vignes et récoltes du village. Ils se renseignèrent auprès de quelques villageois, tous très aimables et amicaux.

- Contournez la fondation de la guilde, vous trouverez le domaine et la ferme de la propriétaire !

- (Salamèche) Merci beaucoup !

Ils marchèrent tranquillement vers leur destination, profitant de la belle vue et du temps si agréable.

- (Salamèche) Je ne pensais pas qu’ils nous laisseraient autant d’autonomie, mais ce n’est pas plus mal. Un explorateur doit savoir se débrouiller seul.

- (Argouste) … Dis, tu penses quoi des autres apprentis ?

- (Salamèche) Pas grand-chose, je n’ai parlé à encore aucun d’entre eux.

- (Argouste) Mais tu les as bien vu pendant l’entraînement, ce matin. Mise à part Carapuce, ils avaient tous une avance de dingue !

- (Salamèche) C’est normal, ne sois intimidé par ça.

- (Argouste) Tu rigoles, on ne trouve pas un métier plus compétitif que celui de l’exploration ! C’est juste que je pensais avoir une petite longueur d’avance, avec ce qui nous est arrivé…

- (Salamèche) Peut-être ont-ils également vécu de sacrées histoires, tu ne le sauras qu’en ouvrant la conversation avec eux.

- (Argouste) Je sais…

Marmonna-t-il, en pointant du regard un apprentis qu’il vit au loin et qu’il avait entendu vouloir se diriger vers l’activité agricole : le Pokémon au chapeau de paille. Quelque chose l’intriguait chez lui, voilà pourquoi il l’avait suivi.

- (Salamèche) Hum… dis-moi, tu as mis un sacré vent à Poussifeu, tout à l’heure.

- (Argouste) Quoi ?

- (Salamèche) Quand elle t’a demandé ce que tu allais faire.

- (Argouste) Je lui ai répondu.

- (Salamèche) Sans l’avoir invité, c’est ce qu’elle attendait je pense.

- (Argouste) Merde, tu crois… ?

- Bonjour, vous deux !

Un Pokémon les interrompit, une femme si grande que son ombre les cacha entièrement du soleil. Les deux ados levèrent la tête pour la regarder droit dans les yeux, traversant du regard son imposant corps, son long cou et ses grandes feuilles de palmiers d’un vert étincelant qu’elle avait sur le dos.

- Mon nom est Tropius, je suis la fermière de Bourg-Trésor !

- (Salamèche) Bonjour, madame Tropius, nous sommes deux apprentis de la guilde d’exploration !

- (Tropius) Je m’en doutais, malgré vos jeunes âges. Les nouvelles têtes se voient de loin, vous savez.

Elle se tourna et afficha d’un grand sourire toute son exploitation.

- (Tropius) Bienvenue sur mon terrain ! La terre rouge du continent renferme une richesse que nul ne peut soupçonner, et je suis très fière d’être la propriétaire de l’une des plus grandes institution du village !

- (Salamèche) Ça ne me surprend pas. Bourg-Tranquille ne basait pas beaucoup sa richesse sur l’exploitation agricole, alors il fallait bien que toutes ces délicieuses ressources viennent de quelque part. Je suis content de vous aider cette année !

- (Tropius) Ah ah, tu es motivé, c’est bien !

Exclama-t-elle, en l’annotant sur une feuille. Argouste gardait silencieusement le regard fixé sur le Pokémon au chapeau de paille, déjà en train de récolter.

- (Tropius) Bref, j’aimerai que vous vous occupiez du côté gauche des vignes. N’hésitez pas à aller aider vos camarades par la suite, en fait, je vous laisse un peu vous gérer. L’idée est de remplir des sacs de récolte, puis de venir me les déposer dans l’enclos. Votre chef m’a demandé de faire un contre rendu de votre travail pendant cette première semaine, alors donnez-vous à fond !

- (Argouste) Hein ? La compétition commence déjà… ?

- (Salamèche) Pas de problème, merci de nous faire confiance !

Le type feu se tourna vers son ami, lui affichant un poing empli de détermination.

- (Salamèche) Allez, Argouste, faisons de notre mieux !

Ce dernier lui soupira au nez, avant de finalement l’accompagner dans son délire.

- (Argouste) Très bien, allons-y… ! (Comment tu peux être à ce point passionné ?)

Et les activités commencèrent pour ces deux-là. Les deux heures qui suivirent furent longues et fastidieuses, surtout pour Argouste. Son corps n’était pas adapté à l’agriculture, et il s’en rendit rapidement compte. De plus, le soleil frappait. Et si Salamèche ne ressentait pas les fortes chaleurs, l’autre adolescent se mouilla avant même d’avoir fournis de premiers vrais efforts physiques. Mais il n’abandonna pas, il avait cette mentalité de ne plus jamais en arriver à ce point, et ce depuis qu’une deuxième vie lui avait été offerte. Alors même si ce n’était pas marrant, même s’il se salissait dans une transpiration très désagréable, même s’il ne partageait pas la même flamme de motivation que celui qui l’accompagnait aujourd’hui, il s’efforça à tout donner, et parvint finalement à remplir un gros sac de raisins après plus d’une heure de récolte.

Et cette détermination, elle paya. Alors qu’il entama la récolte de carotte, un Pokémon s’approcha.

- Excuse-moi ?

Il connaissait cette voix. En fait, il l’avait suivie depuis le début de la matinée : c’était celle du Pokémon au chapeau de paille. Lui avait déjà rempli de nombreux sacs, il savait s’y faire dans ce domaine. D’ailleurs, la couleur de sa peau était tout aussi bronzée que celle des autres habitants du village. Il portait un short et des gants mitaines seulement, transpirant abondamment également à cause du soleil frappant. Argouste resta fixé un instant sur sa musculature imposante, se demandant s’il aurait un jour la force d’aller aussi haut, la motivation d’aller aussi loin ; puis… il baissa le regard vers la carotte qu’il n’avait toujours pas réussi à débusquer de la terre, l’air démotivé.

- (Argouste) Quoi… ?

- Je… euh… je ne souhaite pas être intrusif, mais je peux te montrer une meilleure technique de récolte, si tu veux ?

- (Argouste) … Pourquoi ?

- Simplement parce que tu as l’air de te donner à fond, alors si je peux aider… ?

- (Argouste) Hum…

Marmonna-t-il, en signe d’acquiescement tout en détournant le regard. Voyant qu’il fut abordé, Salamèche s’approcha, intrigué. L’apprentis s’avança vers la carotte, et la débusqua en un instant et sans arracher la moindre feuille en son bout.

- Voilà ! Ne tire pas les tiges directement, déterre un peu avant et prend-le vraiment en son embout.

- (Argouste) … Je vois, merci.

- Pas de soucis, ah ah !

Rigola-t-il, en lui tendant la carotte. Salamèche arriva.

- (Salamèche) Bonjour ! Tout va bien ?

- (Argouste) Ouais, il m’a appris à mieux faire ce putain de taf.

- (Salamèche) Oh, c’est sympa à vous, merci beaucoup !

- Ne m’vouvoie pas, s’il te plaît ! On est partenaire de guilde, ce serait très bizarre !

- (Salamèche) Oh, dans ce cas… merci à toi ! C’est gentil de venir nous aider, je pensais que vous seriez tous un peu plus dans un esprit de compétition.

- Ouais, je vois le genre.

Il redressa son chapeau, le sourire aux lèvres.

- Mon nom est Ramboum ! Et non, je ne suis pas comme ça, probablement parce que je n’ai jamais vraiment été confronté à de la concurrence.

- (Salamèche) Ah oui ? Où exerçais-tu ?

- (Ramboum) Dans le territoire de Bourg-Lavaley, au centre du continent Ouest. Je suis le fils du célèbre fermier Canarticho !

Un silence se créa.

- (Salamèche) Jamais entendu parler…

- (Ramboum) Ah… ah ouais !?

- (Salamèche) Mais je serais ravi d’en apprendre plus, ah ah !

Se rattrapa-t-il poliment.

- (Salamèche) On ne devrait pas blablater sans rien faire, je peux venir récolter à tes côtés ?

- (Ramboum) Bien sûr !

- (Salamèche) Tu viens, Argouste ?

- (Argouste) Euh… je termine ma récolte et je vous rejoins après.

- (Salamèche) Très bien.

Ils se séparèrent sur ces mots, et Argouste se retrouva seul. Il soupira, reprenant un air pensif, le regard fixé sur les carottes à déterrer.

- (Argouste) … (Qu’est-ce que tu fais, imbécile ? Salamèche t’ouvre une porte, et tu rebrousses chemin. Serais-je… timide ? Non, ce n’est pas ça, enfin…)

Il repensa à la facilité avec laquelle Ramboum fit son travail.

- (Argouste) … (La compétition me répugne. Pourtant… j’en suis obsédé. Merde, ressaisis-toi, repense à ce pourquoi tu es venu faire ce travail de chiotte en premier ! Ma voix, ma technique… ouais !)

Il remonta plus loin dans ces souvenirs.

 

Le 15 Juillet 231, le jour où il fut libéré de la prison d’enfants soldats de la DDR, le jour où sa vie fut mise dans un grave danger ; son corps se développa. Ce pauvre Pokémon de type normal, dénué d’une quelconque capacité spéciale, avait ce jour-là transcendé l’atmosphère grâce à sa voix. Une multitude d’ondes de choc s’étaient déployées sur l’ennemi, qui en fut réellement déstabilisé. Elles étaient bien réelles, et cela l’obséda les jours qui suivirent.

Dans les Petits Bois, il s’entraînait sans relâche pour parvenir à un même résultat. Mais rien ne se produisit, il criait juste bêtement en espérant recracher la même puissance. Cela dura si longtemps, qu’une autre voix se fit entendre l’approcher dans ces bois.

- (Poussifeu) Argouste… ?

C’était Poussifeu, inquiète de son état. Les deux personnages ne s’étaient jamais retrouvés seuls, et Argouste avait honte de se montrer aussi faible. Il n’avait jamais été dans un état aussi pitoyable. Mais au lieu de s’en moquer, son interlocutrice, qui devint assurément son amie ce jour-là, lui tendit une aile.

- (Poussifeu) Je vais t’aider, ne t’en fais pas. Si cette capacité compte tant pour toi, alors… il doit forcément y avoir un moyen de te la faire apprendre pour de bon !

Elle était motivée à l’aider, et respectait sa volonté de n’en parler à personne. Chaque jours, ils s’entraînaient hors de Bourg-Tranquille, et après plusieurs semaines d’acharnement, le Pokémon de type normal envoya de puissantes ondes de choc grâce à sa voix. Il avait appris à ressortir cette capacité grâce à Poussifeu, il en avait les larmes aux yeux tandis qu’elle était sincèrement euphorique pour lui.

Il pouvait le faire à volonté, mais ne gérait malheureusement pas l’intensité. Après chaque utilisation, il se retrouvait épuisé, tremblant et dans l’incapacité d’agir à nouveau pendant plusieurs heures. Voilà pourquoi il fut paralysé, lors de l’assaut des deux bandits sur le navire d’Octillery. Mais cela, personne ne le savait, pas même Poussifeu. Ils avaient arrêté de s’entraîner une fois la technique acquise, parce qu’Argouste ne voulait pas lui faire perdre du temps. Il pensait être un poids, et se renferma auprès de ses amis pour cela.

 

Alors quand il fut réveillé par la puissante voix de Ramboum, quelque chose s’anima en lui. Peut-être avait-il l’espoir d’apprendre à maîtriser parfaitement la seule capacité spéciale qu’il pouvait apprendre ? Peut-être pourrait-il ne plus être un fardeau pour ses amis ? Peut-être que son espèce pouvait, pour la première fois, lui faire ressentir autre chose que de la honte ?

Voilà à quoi il pensa, en continuant de remplir son sac de carottes. Mais en attendant, il restait seul, paralysé par la honte de possiblement faire perdre du temps à un apprenti qui méritait mieux que son attention. De son côté, Ramboum rigolait avec Salamèche.

- (Ramboum) Je serai heureux de vous aider en cas de besoin, en tout cas !

- (Salamèche) C’est vrai ? Le fait qu’on soit jeunes ne te dérange pas ?

- (Ramboum) Non, au contraire. Au vu du programme chargé de la guilde, je suis surpris qu’ils vous aient acceptés, qu’importent vos exploits pour en arriver jusqu’ici. Le simple fait d’être en concurrence avec des adultes est malsain, je ne peux pas tolérer ça. Voilà pourquoi, s’il y a le moindre problème, il ne faut pas hésiter à venir m’en parler.

- (Salamèche) Je préviendrai les autres, mais merci beaucoup. Je… *souffle* je dois t’avouer que je suis rassuré de t’avoir comme collègue, c’est quelque chose qui me faisait vraiment stresser, avant d’arriver ici.

- (Ramboum) Oui, moi aussi. L’esprit de compétition y est fort, et n’ayant jamais été en concurrence avec d’autres équipes de secours, je ne savais pas trop à quoi m’attendre. Mon coéquipier, Keunotor, me répétait constamment qu’on n’avait rien à craindre, qu’on défoncerait tout quoiqu’il arrive… Un vrai idéaliste !

Salamèche rigola.

- (Salamèche) Il en faut toujours un, dans une équipe !

- (Ramboum) Il est bien plus que ça. Keunotor est comme un frère ; enfin je suppose, je suis fils unique. Mais je mourrai pour lui, parce que je ne serai rien sans lui.

- (Salamèche) Oui, je comprends totalement ce sentiment. Jusqu’où comptez-vous aller ?

- (Ramboum) Jusqu’où ? Tu veux dire notre objectif ultime ? On ne sait pas vraiment… s’installer et vivre en colocation à Loliloville, ça c’est sûr. Mais on laisse la magie du métier d’explorateur faire le reste. En tout cas, c’est une passion, et on veut en vivre à jamais !

- (Salamèche) Alors vous aussi ?

- (Ramboum) Ouais, mais j’ai encore tellement à accomplir…

Chuchotait-il, en regardant le ciel avec des étoiles dans les yeux. Salamèche lui décrocha la carotte dont il devait s’occuper, ce qui attira à nouveau son attention vers lui. Il la lui tendit, le sourire aux lèvres.

- (Salamèche) On est là pour ça.

Il lui sourit à son tour, puis récupéra la carotte en le remerciant. Dès cette première matinée, la Dream Team se créa un nouveau contact avec le monde extérieur. Ce fut le premier parmi beaucoup d’autres, mais n’avançons pas trop vite.

L’heure du déjeuner arriva, et après un rythme surchargé, deux heures pour se remplir la panse parut telle une éternité. La guilde leur laissait un temps de digestion, un temps libre qui pouvait possiblement servir aux apprentis pour nouer ou renforcer leurs liens sociaux. Mais durant cette première journée, chaque équipe resta dans son coin. Même Ramboum n’aborda pas Salamèche ou Argouste, il laissait les choses avancer lentement, personne ne voulait forcer quoique ce soit. La fondation fut donc bien calme, en ce début d’après-midi.

À quatorze heure, les activités reprirent. Et sans grande surprise, les apprentis terminèrent ce qu’ils avaient accomplis le matin même. Presque tous choisirent à nouveau les mêmes activités, comme chaque année, selon Pijako. Salamèche, Argouste et Ramboum se retrouvèrent encore sur les champs de Tropius, et cette fois, ils engagèrent la conversation. Enfin… Argouste resta encore un peu à l’écart. Il écoutait tout, il pensait comprendre comment son ami arrivait à se lier aussi facilement d’amitié avec l’autre apprenti, une qualité qu’il pensait ne pas partager. Alors pendant la première heure, il ne décrocha pas un mot.

Ramboum s’étira à mi-temps, épuisé par la chaleur du continent.

- (Ramboum) Dis donc, tu ne meurs pas de chaud, là-dessous !?

Demanda-t-il à Salamèche, en fixant sa chemise bleue ouverte sur un t-shirt blanc et ne montrant aucun signe de transpiration.

- (Salamèche) Non, mon type m’offre une résistance plus forte au climat. Qu’il fasse cinq ou quarante degrés, je sentirai la même atmosphère.

- (Ramboum) Bon sang… ! Petit chanceux, ce doit être sacrément pratique !

- (Salamèche) Oui, enfin j’ai quand même été exclu du programme de piscine, à l’école.

- (Ramboum) Tu ne sais pas nager ?

Le type feu nia d’un mouvement de tête.

- (Salamèche) Les inconvénients de mère nature.

- (Argouste) Ça arrange le pudique que tu es, avoue.

Lança naturellement Argouste.

- (Salamèche) Ah ah, carrément !

- (Ramboum) Un apprenti explorateur pudique ? Je sais que tu es jeune, mais on vit vraiment dans un autre monde avec toi, c’est dingue. Du coup, on peut dire que tu ne mouilles pas le maillot ?

Argouste rigola, et Ramboum plaça son attention sur lui.

- (Ramboum) Et toi, tu n’as pas chaud ?

- (Argouste) Si, complètement, en fait…

Il enleva son t-shirt sur ces mots, avant de se remettre au travail.

- (Argouste) J’avais oublié qu’on faisait notre propre lessive… !

- (Ramboum) Ah ah, ouais, chacun économise sa souffrance comme il peut !

- (Salamèche) Vous avez de la chance, de ne pas avoir ce genre de honte…

- (Ramboum) Honte de quoi, on a tous une morphologie différente. Mais ne t’en fais pas, avec ce qui nous attend, tu auras largement le temps d’apprendre à ne plus être pudique.

- (Salamèche) Face à des montagnes de muscles comme toi, c’est compliqué.

- (Ramboum) Nan, y a aucune fierté derrière ça.

Disait-il, en se frappant les abdominaux.

- (Ramboum) Je n’ai rien mérité.

- (Argouste) Comment ça ? Ce n’est pas le travail à la ferme qui t’a musclé ?

- (Ramboum) Non, j’ai eu don de ce corps en évoluant.

Un silence se créa.

- (Argouste) Pardon ?

- (Ramboum) Je suppose que j’en perdrai si je ne pratique aucune activité sportive, mais je me suis réveillé dans ce même état, après qu’une soudaine lumière m’ait envahie.

- (Salamèche) Oui, l’évolution offre parfois de belles surprises. À l’inverse, il arrive à certains Pokémon de perdre des membres en évoluant.

- (Argouste) Comment tu sais ça, toi ?

- (Salamèche) Je lis, Argouste.

- (Ramboum) Ils la redoutent pour ça. Ce doit être terrifiant de vivre dans l’angoisse de ne pas vouloir évoluer.

- (Argouste) Parce qu’on ne peut pas renoncer à son évolution ? Mais… personne ne sait comment la provoquer, pas vrai ? Et chaque espèce a une lignée bien précise ?

- (Salamèche) Oui, pourquoi ?

- (Argouste) Non, rien, c’est juste… pour être sûr.

Marmonna-t-il, en se rappelant avoir vu une bibliothèque non loin des champs de Tropius. Il voulait y passer après la fin des activités, mais n’eut le temps à cause de la suite chargée de l’emploi du temps. Néanmoins, Ramboum remarqua son attention vis-à-vis de l’évolution. Lui qui avait un corps inadapté à l’exploration avant d’évoluer, lui qui était également de type normal, il pensait comprendre quel était le problème.

La seizième heure de la journée se pointa, et la partie la plus attendue démarra enfin. Tout le monde se rendit au premier sous-sol, face aux tableaux d’affichages des missions d’exploration. Pijako et Eoko continuaient de les observer de loin, analysant les mentalités et efforts de chacun.

- (Pikachu) On y va tous ensemble, pour aujourd’hui ?

- (Carapuce) Plutôt crever que d’faire équipe avec le lèche-cul !

Le type eau attrapa une mission au hasard.

- (Carapuce) Celle-là me conviendra parfaitement.

- (Germignon) Ok, je vais te laisser bouger à ton rythme, cette fois. Pikachu, je suis partante pour une mission en groupe !

- (Branette) Bien, partons ensemble.

- (Ptyranidur) Pouvons-nous nous joindre à vous ?

- (Salamèche) Évidemment !

Exclama avec surprise et joie le type feu. Les deux personnages se sourirent mutuellement.

- (Ptyranidur) C’est gentil de ne pas hésiter, ah ah !

- (Poussifeu) Si la Dream Team et l’équipe Renaissance font équipe, prenons un peu de risques. Tiens… le Mont Hérissé, ça me parait pas mal !

- (Rocabot) Ah ouais, c’est au moins à vingt minutes de route !

- (Poussifeu) Tranquille, on a déjà fait trois fois plus long.

- (Branette) « Récolter de la Racaillasse », quelqu’un veut vraiment avoir des cailloux ?

- (Salamèche) Peut-être sont-ils rares, ou importants pour un quelconque projet ? Nous n’avons pas à juger l’auteur de la demande, faisons juste ce qui est demandé !

- (Branette) Je te suis.

- (Pikachu) Ouais ! On embarque un plan du continent, et on fonce !

- (Salamèche) Bien ! En avant, Dream Team !!

- (Argouste) On y va, l’équipe Renaissance !

Et le groupe d’adolescents fonça accomplir sa quête, toujours sous le regard observateur des deux gérants de la guilde.

- (Pijako) Hum… intéressant.

- (Eoko) Vous avez remarqué quelque chose ?

- (Pijako) J’essaie toujours de comprendre pourquoi le maître les a acceptés parmi nous. C’est contreproductif, cela nuit à notre image et à la motivation des autres apprentis, qui ne sont pas pris au sérieux à être comparé à des gamins. Et puis même pour eux, la pression doit être folle. Alors pourquoi a-t-il pris une telle décision, je cherche encore ! En revanche… je ne peux pas nier leur détermination.

- (Eoko) Vous aussi, vous pensez déjà avoir discerné le rôle de chacun ?

- (Pijako) Les deux futurs chefs de ces deux équipes ? Oui, je le pense.

Annonçait-il, en continuant d’annoter beaucoup de choses. Il avait également récupéré tous les dossiers des gérants des activités exercées ce jour-là, comme ceux de Tropius. Et tout cas, les jeunes adolescents se retrouvèrent enfin dans un domaine qu’ils connaissaient. Et même s’ils découvraient une toute nouvelle zone, sur un tout nouveau territoire ; les bases acquises de l’exploration leur permis de s’en tirer à merveille.

À peine entré dans le territoire, Salamèche leur donna une stratégie à suivre jusqu’à la fin du donjon. Ils gravirent lentement mais assurément les étages, tout en restant groupés, concentrés et prêts à s’entraider au moindre problème. Et les problèmes arrivèrent rapidement, notamment avec les Pokémon sauvages. Alors qu’ils avaient tous appris à devenir amis avec eux dans le territoire de Bourg-Tranquille, ceux du continent Sud étaient tous beaucoup plus agressifs, probablement car beaucoup plus coriaces. Ils attaquaient sans leur laisser la moindre chance de s’exprimer autrement que par les poings. Alors ils s’exécutèrent selon leurs obligations, même si cela les répugnait. Ils s’arrangèrent pour leur infliger le moins de dégâts possible, puis continuèrent le chemin et récoltèrent tout un tas de Racaillas. Après deux bonnes heures, ils atteignirent finalement le sommet de cette grande colline. Ils profitèrent de la sublime vue de la première partie du continent, la moins dangereuse de toute. Et alors que le soleil commençait doucement à se coucher, alors qu’ils étaient tous couverts de plusieurs égratignures, ils firent le chemin inverse en gardant la tête haute, et ce uniquement grâce au travail d’équipe, grâce à la détermination d’agir les uns pour les autres.

Ils franchirent les portes de la fondation à vingt heure, soit trente minute après le commencement du dîner.

- (Pijako) Vous êtes en retard !!

Le chef les y attendait de pied ferme pour les enguirlander.

- (Pikachu) Désolé, chef ! On a peut-être été un peu trop ambitieux, pour une première mission !

- (Pijako) Bon… avez-vous au moins réussi ?

Branette sortit, en utilisant ses puissants pouvoirs spectre, un grand sac de Racaillas ; le chef s’en exclama.

- (Pijako) Ah oui, c’est vrai que vous aviez décidé de vous occuper de celle-là ! Et dire que je l’avais écrite en trois minutes, je ne pensais pas qu’une équipe oserait s’aventurer dans le Mont Hérissé dès le premier jour.

- (Poussifeu) Une minute, c’est vous qui avez rédigé cette mission !?

- (Pijako) Comme toutes les autres, d’ailleurs.

Un silence se créa. Tous les adolescents regardèrent, immobiles, leur chef de guilde d’un air assassin. Puis Salamèche soupira, le sourire aux lèvres.

- (Salamèche) On s’est bien fait avoir. En tout cas, vous avez tous été incroyables, les amis ! J’ai hâte de recommencer demain !

- (Pijako) Bonne façon de penser, Salamèche ! Allez, foncez à table tant que c’est encore chaud ! Vous avez fait du bon travail, les mioches !

- (Salamèche) Merci, chef !

- (Rocabot) Pas la peine de m’le dire deux fois, JE CRÈVE LA DALLE !!

Et un nouveau rendez-vous s’organisa dans la salle à manger, mais cette fois pour le bonheur et l’appétit de nos héros. Tout le monde se remplit l’estomac, tout le monde le méritait. Le maître mangea avec eux, comme tous les soirs, visiblement. Lui qui ne s’était pas montré de la journée, il rigola de l’état sale, boueux, poussiéreux, égratigné et transpirant de ses apprentis. Et même si certains avaient l’impression de ne pas avoir été pris au sérieux, malgré le fait d’avoir tout donné, l’ambiance générale ne fut que plus agréable. Grodoudou montra qu’il était inutile de chercher uniquement la compétition, d’en être obsédé et d’agir uniquement selon ce principe. Car après tout, en cet instant précis, ils n’étaient que de pauvres Pokémon barbouillés qui se réunissaient autour d’une grande table pour partager un bonheur commun : la bouffe !

Alors que les autres partirent ensuite prendre leur douche, Argouste descendit vers Bourg-Trésor dans le but de récupérer un ouvrage à la bibliothèque. Mais à cette heure-ci, elle était fermée. Tout de même obsédé par l’information qui lui trottait en tête depuis les activités de l’après-midi, il remonta et toqua à la porte de la chambre de Riolu.

- (Argouste) Salut, je te dérange ?

- (Riolu) Pas plus que d’habitude…

Une ambiance délétère semblait animer la chambre, quand Riolu s’y trouvait seul.

- (Argouste) Ah, euh… c’était juste pour savoir un truc sur mon espèce. Je sais que t’a retourné tous les bouquins de la bibliothèque de Bourg-Tranquille deux fois, alors peut-être que tu en as entendu parler ?

- (Riolu) … De ton espèce ?

Argouste hocha la tête, et son interlocuteur souffla du nez en repensant aux milliers de récits qu’il lut, à l’époque où il vivait encore dans un monde enfantin.

- (Riolu) Si mes souvenirs sont bons, tu es la forme évolué de l’espèce Manglouton, de type normal et de la catégorie… filature, peut-être ? Ton groupe œuf est Terrestre, enfin c’est déductible assez facilement.

- (Argouste) Et est-ce que j’ai d’autres formes à ma disposition ? Une autre évolution, peut-être ?

Riolu nia d’un mouvement de tête.

- (Riolu) Non, tu as déjà atteint l’apogée de ton espèce, ça j’en suis certain.

- (Argouste) … Merde.

Marmonna-t-il, en baissant le regard de honte.

- (Argouste) Je vois, merci pour l’info.

- (Riolu) N’oublie pas de fermer la porte en partant.

Il s’exécuta sous la demande du sans cœur qu’était devenu Riolu. Il était trop déstabilisé pour s’en rendre compte, complètement démotivé à l’idée d’avoir déjà atteint son état physique final. Il partit prendre sa douche silencieusement et seul, lorsqu’il croisa Ramboum, en peignoir et sortant à peine de là où il s’apprêtait à entrer.

- (Ramboum) Bonsoir !

- (Argouste) Salut…

Il garda la tête baissée et continua d’avancer. L’autre apprenti le regarda passer, l’air inquiet.

- (Ramboum) Euh… ça va aller ?

- (Argouste) …

- (Ramboum) Argouste, attends !

Il s’arrêta doucement.

- (Ramboum) … Ne me dis pas que tu complexes à cause de qui tu es ?

Un silence se créa, mais l’adolescent crispa les dents.

- (Argouste) Et qu’est-ce que tu comptes me dire, toi, le Pokémon à la taille, membres et musculature idéale pour l’exploration !?

- (Ramboum) Que je peux t’aider.

Argouste tourna un regard intrigué vers lui.

- (Ramboum) C’est ma voix, qui t’a fait venir dans le domaine agricole ?

- (Argouste) Quoi ?

- (Ramboum) Tu ne t’y plaisais pas, ça se voyait. Choisir ce métier en première activité était insensé pour quelqu’un comme toi, alors je suis navré si mon hypothèse me rend mégalomane, mais je…

- (Argouste) Tu maîtrises l’attaque Hurlement !?

L’adulte lui hocha la tête.

- (Ramboum) En fait, tous les Pokémon de type normal peuvent l’apprendre. C’est ce que mon père m’enseignait, tout en m’aidant à maîtriser cette fameuse attaque spéciale. Si tu complexes tant sur les capacités physiques de ton espèce, alors je suis prêt à t’aider à maîtriser tes capacités spéciales… enfin ta capacité spéciale.

- (Argouste) … Je ne veux pas te faire perdre du temps.

- (Ramboum) Non, pas de ça avec moi, s’il te plaît. Que dirais-tu d’explorer à mes côtés, demain ? Ce serait un bon début pour notre entraînement qui, comme tu le sais probablement, nous demandera un espace calme et prêt à supporter nos brusques voix.

Un dernier régna. Argouste était légèrement bouche bée, sincèrement et agréablement surpris par la proposition si gentille de son partenaire de guilde. Il ne savait pas quoi répondre, toute la honte qu’il ressentit auprès de Poussifeu ou de ses amis, lorsqu’il ne voulait pas leur avouer les faiblesses de la seule capacité que faisait de lui autre chose qu’un misérable Pokémon, ressortait à nouveau pour le morfondre dans une solitude palpable. Mais ce jour-là, Ramboum lui offrit bien plus qu’une motivation ; il lui tendit directement une main.

Et timidement, Argouste la saisit.

- (Argouste) Je… je m’occupe de chercher un territoire calme.

Ramboum lui sourit, avant de se retourner en direction de sa chambre.

- (Ramboum) Dans ce cas, à demain !

- (Argouste) Merci, Ramboum. Merci beaucoup.

Ils se saluèrent et se séparèrent. Argouste repensa à ses objectifs tout le reste de la soirée, à la fois inquiet et motivé quant à son avenir au sein de la guilde. Il n’aimait pas la compétition, mais en était pourtant obsédé. Avoir du retard sur les autres l’angoissait, apprendre à les connaître le dépassait, et pourtant, une sacrée perche lui fut tendu en ce premier jour à la guilde d’exploration. Était-ce grâce à Salamèche ? Probablement, et à nouveau, il ne savait comment le remercier, lui qui paraissait si désintéressé auprès de ses amis. Mais ce soir-là, aux côtés de Rocabot et de Ptyranidur, Argouste s’endormit avec un sourire d’espoir aux lèvres.

Ce premier jour à la guilde, symbole du nouveau quotidien chargé des membres de la Dream Team et de l’équipe Renaissance, toucha enfin à sa fin.

Dès le lendemain, la routine semblait déjà avoir été acquise par les apprentis. Ramboum passa dans chaque chambre pour hurler de sa puissante voix grave :

- (Ramboum) DEBOUT, LÀ DEDANS !!!

- (Pikachu) Ça va être comme ça tous les jours… ?

En cette deuxième matinée, le rythme fut tout de suite mieux acquis. Les adolescents n’avaient plus besoin de suivre les autres, lors de l’échauffement. Ils prirent chacun leur propre chemin, déterminé par les parties de Bourg-Trésor visitées lors des activités le jour dernier.

L’heure des études arriva, et Pijako rendit la première note de l’année, celle du contrôle surprise d’hier. Sans surprise, Germignon obtenue la note maximale. Riolu également, lui avec un peu plus d’étonnement, puisqu’il n’avait pas pris de notes. Carapuce était juste en dessous, et Salamèche encore un peu plus bas. Tous les autres adolescents peinaient à avoir la moyenne, tandis que les autres apprentis vacillaient entre le médiocre et la bonne note. Certains insultaient les jeunes d’être… jeunes, et donc d’avoir encore le système scolaire dans le sang ; tandis que d’autres, comme Ramboum ou son fameux meilleur ami Keunotor, étaient impressionnés par le sérieux des membres de la Dream Team.

À l’heure du déjeuner, ils virent s’installer aux côtés de Riolu, Germignon et Salamèche.

- (Ramboum) Salut ! Vous avez performé, lors du contrôle !

- (Keunotor) C’est clair, vous êtres trop chauds !

Exclama ce Pokémon quadrupède au pelage brin et épais, aux deux dents agressives mais au regard peu intimidant, à la queue joufflue et au gabarit d’un demi-mètre seulement. Il zozotait un peu, mais semblait par-dessus tout se sentir détendu, serein et sociable.

- (Germignon) Merci, ah ah !

- (Keunotor) Je n’sais pas si j’dois m’sentir humilié d’être impressionné par des mioches, mais faut croire qu’vous êtes mes partenaires de guilde avant tout !

Il leur tendit une patte, que Salamèche et Germignon serrèrent sans problème.

- (Keunotor) Mon nom est Keunotor, ravi d’faire c’t’année avec des minus comme vous !

- (Germignon) De même. Mon nom est Germignon, et lui…

- (Keunotor) C’est Salamèche, je sais, Ramboum m’en a beaucoup parlé.

- (Salamèche) Ah oui ?

Le Pokémon au chapeau de paille rigola nerveusement.

- (Ramboum) Il fallait bien que je lui raconte ma journée, ah ah !

- (Salamèche) Ne t’en fais pas. Si Pikachu était là, il dirait la même chose de toi.

- (Germignon) Vous vous en êtes sortis, au test surprise ?

Les deux adultes nièrent d’un mouvement de tête honteux.

- (Germignon) Il voulait nous saquer, c’est normal.

- (Keunotor) Ça n’a pas fonctionné sur vous.

- (Germignon) Et ça ne fonctionnera jamais. Vous voulez qu’on révise ensemble ?

- (Keunotor) Quoi !? On était juste venu vous féliciter, nous… !

- (Riolu) Tant mieux, vos résultats ne sont pas mes problèmes.

Un silence suivie cette réplique… avant que Germignon ne rattrape ce moment gênant.

- (Germignon) *tousse* Ce qu’il voulait dire, c’est qu’on serait ravi de vous aider !

- (Salamèche) On révise presque tous les jours ensemble depuis des mois, ça forge une habitude. Vous voudriez essayer ce soir ?

Ramboum et Keunotor s’échangèrent un bref regard.

- (Keunotor) Je n’sais pas comment vous faite pour vous motiver, mais j’suis carrément prêt à essayer vos méthodes !

- (Ramboum) En d’autres termes, on est partant.

- (Germignon) Parfait ! On se donne rendez-vous dans la chambre de Salamèche après le diner, ça ne devrait pas être très long.

Ils discutèrent et mangèrent tranquillement ensemble, pendant le reste du déjeuner. Cette conversation fut la première inter-équipe au sein de la guilde et hors des activités, et Pijako le remarqua. Il l’annota également, remarquant pour la première fois quelque chose de surprenant.

- (Pijako) … (Normalement, les apprentis de différentes équipes ne s’adressent pas la parole avant le début des événements spéciaux. La Dream Team et l’équipe Contre-Coup se sont rapprochés très rapidement, et étonnement pas par l’intermédiaire des plus sociables de ces deux équipes. La curiosité a joué un rôle, mais également le respect de l’autre. Malgré leur jeune âge, Ramboum ne les a pas sous-estimés. Et de leur côté, ces ados à la mémoire des épreuves du diplôme scolaire encore fraiche ont assuré lors du test surprise. Étaient-ils supposés servir d’exemples ? Pour… faire redescendre l’égo des autres apprentis ? Ce fut votre volonté, maître !?)

Il commençait à comprendre une des motivations qui avait poussé Grodoudou à accepter la Dream Team et l’équipe Renaissance parmi eux.

De leur côté, la routine s’installa tranquillement. Les activités, les explorations et même les séances d’études, les apprentis s’habituèrent tous très rapidement. Ramboum et Keunotor s’essayèrent aux soirées de révisions de Germignon et Salamèche, et cela paya. Ils ne venaient pas tout le temps, mais étaient toujours les bienvenus.

Les jours s’écoulèrent un à un, et rapidement, la première semaine passa. En se couchant, le soir du 23 Septembre 231, Salamèche feuilleta son rappelle-tout. Il avait annoté trois nouvelles pages, uniquement centrées sur Ramboum et Keunotor. Il ne les avait encore jamais vu se battre, mais en avait déjà suffisamment entendu pour en faire une première analyse stratégique. Parce qu’après une semaine seulement à la guilde, ils étaient devenus amis.

Les autres duos semblaient moins accessibles, si ce n’est plus hostiles à l’idée de se rapprocher de ces adolescents. Peut-être se sentaient-ils insultés par le maître, par sa décision de les accepter parmi eux. Ce qui est certain, c’est que cette longue aventure ne faisait que commencer.

..

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..

Il courait de toutes ses forces. S’agrippant quand il le pouvait à un arbre, se propulsant sous une pluie aussi violente que bruyante, sa détermination semblait être sans faille. Et son travail paya : après tout ce temps de recherche, il le trouva enfin. C’était forcément l’un d’entre eux, l’aura scintillante l’entourant ne pouvait que contenir un objet d’une telle rareté, un objet aussi puissant.

Alors d’un coup de liane excessivement brusque, il brisa le sceau. La lumière s’éteignit, sa peau verte se noircie en même temps que le paysage l’entourant. Il récupéra l’artéfact tombé au sol, de la taille d’une petite roche en forme de rouage.

- *souffle* Et d’un… *souffle*

Cet acte de vandalisme ne semblait qu’être le premier. Un tonnerre frappa le lac derrière lui, sa figure se différencia du reste pour l’espace d’un instant. Il n’en imposait pas tant que ça, il semblait jeune. Pourtant, personne ne fut capable de l’arrêter, ce soir-là.

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