Au-delà des Mers

Chapitre 16 : Le bonheur des uns...

764 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 02/05/2021 11:14

Après plus d’une heure de cris, menaces et autres tentatives infructueuses d’enfoncement de porte, le silence revint progressivement.

Assis dos à la porte, l’épée posée sur ses genoux, épuisé, Mendoza avait retrouvé son calme habituel et un vague à l’âme avait remplacé cette colère contenue trop longtemps et qui, enfin, avait pu s’exprimer.

Des souvenirs perdus loin dans le passé se réinvitaient sans permission.

Pas seulement ceux liés à Marinchè, mais tout ce qu’il avait refoulé au cours de sa vie semblait avoir profité de la brèche pour s’échapper. La mort de sa mère, les amis perdus sur des champs de batailles trop nombreux, sa fuite en avant pour oublier, Esteban auquel il s’était attaché quasiment comme un père et qui lui manquait si souvent, ses regrets tels un chapelet de tristesses et maintenant ça…

Il avait la sensation d’être passé à côté de tout ce qui avait pu être réellement important dans sa vie, refusant de s’avouer qu’il n’était qu’un homme et qu’il pouvait souffrir… qu’il devait accepter de souffrir pour guérir ses douleurs et panser ses plaies.


Côté pont, Calmèque et Marinchè étaient conjointement adossés à la porte, eux aussi. Attendant.


La nuit tombait doucement et l’équipage avait allumé quelques lanternes, Ortega aidé de quelques marins commençait à monter les plats du repas. Rien d’extraordinaire, on restait sur un bateau avec des produits à la conservation facile, mais c’était toujours un moment de la journée que chacun attendait pour sa convivialité et la détente qu’il apportait.

Même La « De Messy » semblait vouloir se joindre à l’équipage ce soir et Calmèque se fit la réflexion qu’elle avait intérêt à s’habituer à côtoyer les petites gens, parce que tel que Mendoza envisageait leur voyage… on n’allait pas faire dans le « cinq étoiles » !

Pas un mot ne s’était échappé des lèvres de l’Inca et elle regardait elle aussi, l’effervescence qui prenait vie sur le pont. Songeuse.

C’est à ce moment que la voix, tout à fait calmée, de Mendoza leur parvint au-travers de la porte.

-Elle s’appelle comment ?

Marinchè parût reprendre pieds après une longue absence et mit du temps avant de répondre.

-« Maria ».

Un frottement contre le bois.

-Oh…, fit Mendoza, touché. Tu as respecté la tradition ? Tu lui as donné le nom de ma mère ?

Marinchè se mordit les lèvres et lança à Calmèque une mine ennuyée.

-La mère de Cortes s’appelle Maria aussi, lui glissa-t-elle tout bas.

Mais n’ayant pas le cœur de contredire le Navigateur, elle lui répondit que oui, la voix tremblante digne d’une tragédienne. Et Calmèque se pinça l’arrête du nez en secouant lentement sa tête de droite à gauche.

-De toutes façons la moitié des femmes en Europe s’appellent « Maria »…, se justifia-t-elle en confidence auprès de son complice.

Sur ce, l’Olmèque fit la grimace, se leva et lui sourit. Il était temps pour lui de prendre congé et de les laisser colmater au mieux les brèches de leur improbable histoire.

-Je vais manger, argua-t-il en chuchotant.

Et il s’en fut à reculons en lui faisant comprendre qu’il était temps qu’elle se démerde seule.



Des heures plus tard, quand l’Olmèque regagna sa cabine, il ne fut pas surpris de la trouver vide. Marinchè et Mendoza ayant fini par s’éclipser tous deux derrière la fameuse porte pour une solide discussion et plus si affinités retrouvées.

Il considéra le lieu vide, essayant de se convaincre qu’il y gagnait en place, mais il ne put s’empêcher d’avoir un petit regret. Et il soupira en enlevant le gros de ses vêtements et en se rafraichissant un peu avant de se coucher.

Une fois allongé, il sentit sur le drap, un discret effluve de parfum provenant d’un onguent à la senteur très fleurie que Catherine avait donné à Marinchè, et dont l’Indienne adorait s’enduire.  

A plusieurs reprises, Calmèque lui avait reproché d’abuser de ce cosmétique trop odorant, mais là… il aurait donné n’importe quoi pour que cette senteur ne disparaisse jamais.

Et il eut du mal à trouver le sommeil, un peu abattu.



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