Secrets de Serpentard : La noble famille Black

Chapitre 9 : La Chaumière au Coquillages

2719 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 14/06/2022 08:59

Un mois plus tard, dans la chaleur étouffante du salon, Narcissa et ses sœurs s'éventaient comme elles le pouvaient avec de gros grimoires. Bellatrix agitait De la création à la destruction : tout savoir sur les Inferi devant son visage, espérant créer une petite brise ; Andromeda faisait de même avec un livre qui partait en lambeaux, intitulé Magie Noire : apprenez à punir et tuer vos ennemis comme il se doit et Narcissa, en nage, avait abandonné le Manuel de nécromancie réservé aux sorciers expérimentés sur ses genoux, et se rafraîchissait avec sa lettre d'admission à Poudlard – ce qui était moins fatiguant, mais aussi moins efficace.

Andromeda et Bellatrix étaient rentrées de Poudlard deux semaines plus tôt, et depuis, le soleil brillait sans discontinuer, rendant la vie de la maison particulièrement difficile à supporter. Pour couronner le tout, la tante Walburga venait de passer sa tête dans le salon. Elle s'approcha d'elles, leur arracha les grimoires un par un, malgré leurs protestations, et les reposa sèchement sur les étagères, bien à leur place.

– Orion et moi partons en week-end au bord de la mer, avec nos chers amis, les Crabbe. Nous emmenons Kreattur, vous devrez donc vous débrouiller pour les repas. Les Goyle seront là aussi, c'est dommage que vous ne soyez pas invités... En tout cas, je compte sur vous pour être sages, pour surveiller Sirius, et surtout, ajouta-t-elle en désignant les grimoires, pour ne toucher à rien.

Et elle sortit en faisant claquer les talons de ses bottines sur le parquet, et en allongeant le cou comme un cygne noir. Dès que son chignon brun eut disparu, Bellatrix poussa un soupir déchirant.

– Encore un week-end d'ennui mortel en perspective ! Bon, au moins, je pourrai utiliser ma baguette sans me faire enguirlander...

Narcissa, quant à elle, pensait à autre chose. Lorsqu'ils habitaient sur la Colline d'Émeraude, Vera Goyle et sa mère étaient inséparables, comme Narcissa l'était avec Daisy. Mais, depuis qu'elles étaient parties, elles n'avaient plus eu aucune nouvelle, et Walburga ne manquait jamais de narguer sa belle-sœur en racontant à quel point Vera Goyle et elle étaient devenues de proches amies.

Mais ses sombres pensées furent rapidement interrompues.

– Qu'est-ce que je vois ? Vous avez une triste mine, mes chéries !

En se tournant vers la porte, Narcissa crut halluciner. Sa mère se tenait devant elle, fraîche comme un bouton de rose.

– Maman ?

– Allez préparer quelques affaires ! Nous partons en week-end, nous aussi, avec vos cousins !

Sa mère était pourtant particulièrement fatiguée, lors des dernières semaines. Devant leur expression interloquée, Druella leur expliqua qu'elle avait conservé les fioles précédentes, sans les consommer, et venait de boire cinq doses de Croculus Sativus d'affilée, ce qui expliquait pourquoi elle était dans une forme éblouissante.

– Je tenais beaucoup à cette petite excursion, j'y pensais depuis longtemps, ajouta Druella Black. Je voudrais vous montrer un endroit qui me tient beaucoup à cœur. Et puis, vous aussi, vous avez le droit de vous amuser, n'est-ce pas ?

Andromeda fut, comme toujours, la plus réticente à enfreindre les règles.

– Papa ne va pas se demander où nous sommes parties ?

– Nous trouverons bien une explication, répondit Druella Black. Ne t'en fais pas, je suis sûre qu'il ne remarquera même pas notre absence !

Malgré la chaleur, Bellatrix, Andromeda, Narcissa, Sirius et Regulus firent leurs sacs en un clin d'œil. Druella les entraîna tous les cinq dans la cuisine, radieuse.

– Venez par ici, les enfants... Nous allons utiliser la poudre de cheminette. Je sais, Regulus, tu n'aimes pas beaucoup ça, mais c'est ce qu'il y a de plus rapide, et nous ne devons pas perdre une miette de ce formidable week-end en famille, n'est-ce pas ?

Regulus fit la moue. Leur petit cousin, alors âgé de six ans, empruntait souvent la voie des Cheminettes avec sa mère, et il n'était pas friand de tout ce vacarme et de cette grande explosion verte.

– Quelle poule mouillée, se moqua Sirius.

– Sirius, ce n'est pas la peine d'en rajouter, le réprimanda gentiment Druella. Allez, viens par-là, Regulus, mon chéri... Monte avec Bellatrix, elle sait s'y prendre.

Bellatrix, toute fière de la confiance qu'on lui accordait, prit fermement la main de Regulus. Celui-ci, malgré son appréhension, regardait Bellatrix avec une profonde admiration, et ses yeux gris brillaient d'excitation à l'idée de partir à l'aventure avec les grands.

– Tiens, prends une grosse poignée, dit Druella à Bellatrix en lui tendant le sac.

– Qu'est-ce que je dois dire ?

– J'y viens... Fais attention, il faut bien articuler : l'endroit s'appelle...

Les joues de Druella rosirent légèrement.

– La Chaumière aux Coquillages.

– D'accord, dit Bellatrix, très concentrée. Regulus, tu es bien accroché ?

Regulus hocha la tête, s'agrippa fermement à la taille de Bellatrix, et ferma étroitement ses paupières.

– La Chaumière aux Coquillages ! s'exclama Bellatrix d'une voix forte.

Et tous les deux disparurent dans un nuage de fumée verte.

– Pff, gloussa Sirius. Vous avez vu la tête de Regulus ? Un vrai trouillard...

– Monte dans la cheminée, au lieu de faire le malin, le taquina Druella Black.

– Tout seul ? demanda Sirius, plein d'espoir.

– Non, avec Andromeda. Tu es encore trop petit.

– Bon, d'accord, ronchonna-t-il. Mais je peux dire la phrase, alors ? Qu'est-ce que c'est, déjà, la Bicoque aux Bulots ?

– Non, Sirius, pas encore, rit Druella. Je ne veux pas que vous vous retrouviez tous les deux à l'autre bout du pays. Vas-y, Andromeda.

– Maman, tu es sûre que...

– Tu vas y arriver, Andromeda. Tu rentres bientôt en troisième année, tu es une grande fille, maintenant.

Andromeda hésita, tout en caressant les cheveux bouclés de Sirius pour se donner du courage.

– Allez ! s'impatienta gentiment Sirius en tirant sa cousine vers la cheminée.

La main tremblante, Andromeda prit la poignée de poudre, la jeta dans l'âtre de la cheminée, et lança d'une voix distincte :

– Chaumière aux Coquillages !

Et ils disparurent à leur tour.

Druella et Narcissa se retrouvèrent seules dans la cuisine. Le cœur de Narcissa battait à mille à l'heure. Dans cette maison surpeuplée, les moments d'intimité étaient rares, et la plupart du temps, sa mère se reposait, ou bien se terrait dans sa chambre pour éviter Walburga. Et voilà qu'elles étaient toutes les deux, libres, tranquilles, comme avant...

Avant de monter dans la cheminée, Druella s'accroupit pour se mettre à la hauteur de Narcissa, et lui caressa la joue.

– Avant de rejoindre les autres, ma chérie, je tenais à te dire que c'est à toi, plus particulièrement, que je tenais à offrir cette petite escapade, dit-elle.

Aussitôt, Narcissa sentit une onde de chaleur intense naître dans sa poitrine. Elle battit des cils, et ouvrit grand ses oreilles.

– Tu ne peux pas savoir à quel point je suis fière de toi, mon petit ange... Je me rends bien compte à quel point il est difficile pour toi de vivre ici... Et malgré tout, pendant ces deux longues années, tu as été un véritable soleil. Je te remercie infiniment pour cela.

Narcissa sentit des fourmillements de bonheur lui parcourir le corps, sourit de toutes ses dents, et sauta au coup de sa mère.

– Ma petite Cissy, tu es mon trésor le plus précieux, dit Druella en la couvrant de baisers. N'oublie jamais cela.

Narcissa acquiesça, remplie d'une force nouvelle.

– Alors, on y va ?

Elles montèrent dans la cheminée, main dans la main. Narcissa pensa qu'elle aurait préféré que le réseau des cheminettes tombe en panne, et qu'elle reste coincée dans la maison avec sa mère, tout le week-end durant.

Lorsqu'elle arriva dans la cheminée de la Chaumière aux Coquillages, Narcissa faillit bien se cogner : la cheminée était absolument minuscule, et sa mère dut s'agenouiller pour s'en extirper.

La première chose que Narcissa ressentit fut une odeur puissante et salée, qui lui donna encore plus d'énergie qu'elle n'en avait déjà. Ensuite, elle prit conscience de l'humidité qui régnait dans l'air : mais c'était une humidité fraîche et sauvage, qui n'avait rien à voir avec la moiteur étouffante du square Grimmaurd.

Elle fit un pas en dehors de la cheminée. Elles se trouvaient dans un petit salon aux murs couverts de coquillages blancs. Un tapis duveteux, tout aussi blanc, était étalé sur le sol, et tous les meubles étaient en bois flotté, ce qui leur donnait un aspect clair et irrégulier.

– On dirait la maison d'un ange, murmura Narcissa.

Soudain, elle entendit un bruit étrange, un grondement majestueux, qui allait et venait, comme le ronflement d'une gigantesque créature. Narcissa courut à la fenêtre, et fut prise de vertige. Au-dessus d'elle, le ciel comme elle ne l'avait jamais vu, immense, interminable... Et ce ciel se reflétait dans une immense étendue mouvante et toute aussi bleue, couverte d'écailles brillantes.

– Cissy ! Regarde, c'est la mer !

Ses sœurs et ses cousins étaient dehors, en train d'admirer le spectacle. Bellatrix dévalait déjà la pente de la falaise pour aller voir la mer de plus près.

Narcissa regardait partout autour d'elle, ébahie. Partout, à perte de vue, elle ne voyait personne, aucune autre habitation que celle-ci. En bas, sur la plage, Sirius retira ses vêtements, et courut dans l'eau avec enthousiasme.

– Venez, les cousines ! Waouh !

Bellatrix commença à enlever sa robe, mais se ravisa et courut dans l'eau tout habillée. Elle plongea la tête la première dans les vagues, pataugea pendant quelques secondes, puis se retourna pour héler son petit cousin :

– Reggie ! Viens !

Mais Regulus était resté tétanisé à quelques mètres du bord de l'eau, effrayé par le vacarme des vagues pourtant inoffensives qui se brisaient sur le sable.

– Hé ! Le trouillard ! lui cria Sirius en faisant une pirouette dans une vague.

Sirius battit des pieds à la surface de l'eau, et envoya une gerbe d'éclaboussures en direction de son frère. Vexé et apeuré, Regulus recula, le visage écarlate.

Dans l'eau, non loin de Sirius, Bellatrix fit un petit geste de la main dans sa direction, et aussitôt, une énorme vague se dressa derrière lui, l'engloutit et le fit rouler sur le rivage, où il se redressa en toussant et en crachant.

– Bella ! s'indigna Andromeda, qui se précipita pour aller aider Sirius à se relever.

– Ça lui apprendra à se moquer de Reggie, rétorqua Bellatrix en sortant de l'eau, ruisselante dans sa longue robe noire qui lui collait à la peau.

– Même... Kof ! Même pas mal ! prétendit Sirius, qui se releva en titubant.

Il secoua sa crinière brune et bouclée en propulsant des gouttelettes d'eau partout autour de lui, et replongea dans la mer, plus sagement, en gardant un œil attentif sur Bellatrix. Sa cousine, elle, rejeta sa lourde chevelure noire en arrière, l'essora soigneusement, et s'approcha de Regulus, qui prit soin de s'abriter derrière elle.

– Allez, viens ! Tu vas voir, je vais te porter.

Regulus accepta de s'accrocher au cou de Bellatrix, qui le porta dans ses bras jusqu'à ce que tous les deux aient de l'eau jusqu'à la taille.

Narcissa tenait toujours la main de sa mère, et les observait depuis le haut de la falaise, amusée et émerveillée.

– Regarde, Maman, il y a des oiseaux blancs ! Comme ils sont beaux !

– Ce sont des mouettes, ma chérie, l'informa Druella.

Narcissa remarqua que la voix de sa mère était différente, troublée...

Druella, en effet, semblait perdue dans ses pensées, et ses yeux brillants parcouraient le bord de l'eau, comme si elle suivait quelqu'un du regard.

– J'ai vécu des moments incroyables, ici...

Sans y prendre garde, Narcissa serra la main de sa mère dans la sienne, et retint sa respiration. Peut-être était-ce là que ses parents s'étaient rencontrés ?

– Mais c'est une histoire triste, se reprit soudain Druella, et aujourd'hui, il faut s'amuser ! Allez, mon trésor, on y va !

Narcissa oublia aussitôt cet instant d'égarement. Toute les deux s'élancèrent vers la mer, où Andromeda essayait d'empêcher Sirius de nager vers le large, et Bellatrix portait toujours Regulus dans ses bras pour qu'il accepte de s'éloigner du rivage. Celle-ci, d'un geste de la main, cassait les vagues devant elle pour éviter les remous et les éclaboussures, et montrait à Regulus comment s'y prendre pour faire de même. Narcissa poussa un petit cri de surprise quand la première vague lui fouetta les jambes, puis plongea à son tour dans le vaste tumulte de la mer.

Pendant deux jours, les cinq enfants Black vécurent dans la joie la plus totale. Ils s'émerveillèrent des vagues inépuisables, de l'écume blanche qui les coiffait et qui s'éparpillait dans le vent, et se baignèrent pendant des heures dans les grondements de la Manche. Le premier soir, ils s'enrobèrent tous les six dans de grosses couvertures de laine et admirèrent le spectacle des ondulations roses et dorées dessinées sur le sable, caressées par le soleil de fin de journée. Ils inventèrent des formes aux nuages jusqu'à la nuit tombée, puis s'entassèrent tous les six sur le tapis duveteux du salon, et s'endormirent au coin du feu, le sourire aux lèvres et les cheveux asséchés par le sel.

Le deuxième jour fut tout aussi fantastique que le premier. Le souffle de la mer rendait les voix plus douces, et le sommeil plus facile. Comme ils se sentaient vivants ! Comme Druella était belle, soudain, quand le souffle de la mer lui rosissait les joues, quand elle se réveilla après cette nuit enfin longue et silencieuse !

Le deuxième et dernier soir, Druella coucha Sirius et Regulus sur le premier canapé, elle s'étendit sur le deuxième, et les trois sœurs Black s'allongèrent sur le tapis clair et duveteux, face aux flammes qui bondissaient et crépitaient dans la cheminée blanche.

– Qui habitait ici, d'après vous ? demanda Narcissa à ses sœurs à voix basse, une fois que leur mère fut endormie.

– Personne, répondit Andromeda. Je pense que c'est un abri... Une cachette, pour ceux qui en ont besoin...

– Pourquoi se cacher ? Tu penses que Maman a fait quelque chose d'interdit ?

– Pas forcément... Parfois, on a besoin de s'abriter du monde, et de son agitation perpétuelle...

Narcissa approuva, soulagée. Elle préférait ça.

– Et à ton avis, de quoi rêve-t-elle ? demanda encore Narcissa.

Andromeda hésita, et regarda leur mère qui souriait dans son sommeil, paisible.

– Peut-être de quelqu'un qu'elle a beaucoup aimé...

Bellatrix se moqua aussitôt :

– Ridicule !

Et à son tour, elle se mit à regarder leur mère, à la recherche d'une meilleure explication.

– Non, dit-elle en secouant résolument la tête, vu son sourire, je dirais qu'elle rêve d'un gros gâteau à la crème...

Dans son sommeil, Druella remua sur le canapé, comme si quelqu'un l'avait embrassée dans le cou.

– Vous voyez ? se réjouit Bellatrix, comme si ce mouvement délicat venait confirmer sa supposition.

– Tu en penses quoi, toi ? chuchota Andromeda à Narcissa.

Narcissa ferma les yeux et sourit, déjà sur le point de s'assoupir.

– J'espère qu'elle rêve de nous trois...



Note d'auteur :


J'espère que cette histoire vous plaît, et que vous trouvez ce point de vue sur la famille Black convaincant :)


Pour info, je suis actuellement en lien avec la formidable Alixe (autrice de la quadrilogie Harry Potter 7 3/4) pour faire imprimer cette fanfiction (j'y tenais beaucoup, notamment pour mes proches qui n'aiment pas lire sur des écrans).


Je l'accompagnerai à la Japan Expo le jeudi 14 juillet, si jamais certains d'entre vous sont dans le coin ! Et peut-être... Peut-être qu'il y aura quelques exemplaires papier des Secrets de Serpentard... O:)


Dans tous les cas, il y aura un petit intermède avec Drago publié en fin de semaine, et un autre chapitre mardi prochain !


À très bientôt <3


Mathilde

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