Secrets de Serpentard : La noble famille Black

Chapitre 8 : Le futur Ministre

3352 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 07/06/2022 17:19

Cygnus Black franchit en sifflotant le seuil du 12, square Grimmaurd. Il consulta sa montre : onze heures du soir. Une fois de plus, il s'était attardé au Ministère, mais cette fois-ci, ce temps avait été investi de la meilleure des façons – et c'était d'ailleurs la raison pour laquelle il était d'excellente humeur.

Quatre ans auparavant, un Sang-de-Bourbe – ou Né-Moldu, comme il fallait désormais les appeler, au grand dam de Cygnus Black – avait été élu Ministre de la Magie. Cygnus l'avait encore en travers de la gorge : il était alors le candidat adverse, et avait bien failli l'emporter, à quelques voix près. Tout ça parce que cet imbécile d'Ignatius Tuft, le Ministre sortant, s'était prononcé en faveur de cet imposteur... Les juges hésitants avaient basculé du côté de Nobby Leach – nom du fameux Ministre actuel, que Cygnus Black détestait tant – et lui avaient accordé la victoire.

Un Sang-de-Bourbe à la tête du monde magique britannique, c'était une première, évidemment, et Cygnus Black était bien décidé à tout faire pour que ce soit aussi la dernière. Comment cet homme pouvait-il comprendre toutes les problématiques d'un monde dans lequel il n'avait pas grandi ? Comment pouvait-il prendre les bonnes décisions pour le peuple sorcier, peuple auquel il n'appartenait que par erreur ? Et surtout, comment avait-il pu l'emporter face à Cygnus Black, dont le sang était pur comme une perle nacrée ? Comment le Magenmagot avait-il pu tourner le dos aux siècles d'Histoire que représentait Cygnus Black et son illustre famille ?

Non, décidément, Cygnus Black ne comprenait toujours pas. Et pourtant, Nobby Leach était devenu plutôt populaire, notamment à cause des lois dites tolérantes qu'il avait fait voter au Magenmagot. L'égalité de tous les sorciers, sans distinction aucune à propos de la pureté du sang, était devenue son cheval de bataille. Et dire que certains considéraient cela comme un progrès... Si le Ministère voulait se débarrasser des Sang-Pur, il ne s'y prendrait pas autrement, bougonnait intérieurement Cygnus Black. Mais il était hors de question de le laisser faire.

En songeant à la conversation qu'il avait eu une heure plus tôt avec son ami Abraxas Malefoy, Cygnus retrouva le sourire. Lors de l'élection de Nobby Leach, la plupart des partisans de Cygnus avaient démissionné, furieux que leur candidat soit débouté. Ce dernier les avait pourtant suppliés de rester, mais rien n'y avait fait, ils avaient tous claqué la porte, persuadés que le Magenmagot s'écroulerait sans eux. Résultat, les sorciers de Sang-Pur s'étaient drastiquement raréfiés au Ministère, et il était de plus en plus difficile pour Cygnus de faire peser ses arguments dans les décisions du Magenmagot. Mais il devait se battre, coûte que coûte, pour lutter contre la menace permanente que les Moldus faisaient peser sur le monde des sorciers...

Et justement, dans cette lutte acharnée, Abraxas Malefoy était un allié de choix. Rusé, informé, fortuné, influent, et surtout dénué de tout scrupule, Abraxas fourmillait d'idées pour chasser Nobby Leach du trône. Il venait d'en faire part à Cygnus, qui jubilait devant cette éventualité. Au départ, Cygnus s'était montré assez réticent à comploter de cette manière : il ne voulait pas d'une victoire ternie par la tricherie, ni par la violence. Mais il s'était laissé convaincre par Abraxas Malefoy : Leach était en train de déstructurer tous les fondements de la société des sorciers, il y avait urgence.

Bientôt, le Ministre tomberait malade, Abraxas le lui avait promis. Ça n'était qu'une question de mois. Abraxas avait mis au point le poison parfait : incolore, inodore, un subtil mélange de venin de serpent et de gouttes de trompettes des anges... Il avait déjà soudoyé les personnes qui lui permettraient de l'administrer au Ministre, chaque jour, sans qu'il ne s'en aperçoive. Nobby Leach tomberait malade, progressivement, afin que personne ne soupçonne l'empoisonnement, et il serait obligé de démissionner. Et ensuite, la voie serait libre pour lui, Cygnus Black...

Cygnus s'imaginait parfaitement en Ministre de la Magie. Il serait sévère, mais juste, intransigeant avec ceux qui fricotaient avec les Moldus. Et puis, sa vie en serait métamorphosée : il aurait un logement de fonction, et tous les Magicomages de Sainte-Mangouste se battraient pour soigner son épouse... En pensant à Druella, Cygnus se sentit légèrement coupable : elle n'était pas heureuse au 12, square Grimmaurd, Cygnus en avait bien conscience. Sa chère sœur Walburga était loin d'être commode. Cygnus en était désolé pour sa femme, mais après tout, Walburga les hébergeait, et elle payait le remède de cette satanée maladie, Cygnus ne pouvait donc pas se permettre de lui faire des remarques. Et puis, après tout, Druella était loin d'être irréprochable, elle aussi...

Cygnus Black accrocha sa splendide robe de juge à une patère dans le hall d'entrée. Il salua les personnages qui se trouvaient encadrés dans les portraits du hall, et ceux-ci s'inclinèrent respectueusement sur son passage. Cygnus se souvint avec nostalgie à quel point il était idolâtré, entre ces murs, dans sa plus tendre enfance. Il était le fils aîné, le fils prodige, celui que tous admiraient...

Il se dirigea vers la salle à manger, pensant prendre un repos bien mérité ; mais en ouvrant la porte, il constata, mécontent, que son beau-frère et cousin Orion était installé à table, en train de dîner et de lire Le Hibou Jacasseur, un journal satirique qui se plaisait beaucoup à faire de l'ombre à La Gazette du Sorcier et à tourner en dérision tout ce qui passait par la tête de ses rédacteurs. Bien évidemment, comme pour tout ce qui attrayait au rire et à la distraction, Cygnus trouvait ce journal tout aussi méprisable que ceux qui le lisaient.

Les deux hommes ne se côtoyaient pas autant que leurs épouses respectives, mais se détestaient tout autant, si ce n'est davantage. Orion travaillait à Gringott's, la banque des Gobelins, et il lui arrivait également de rentrer tardivement, pour le plus grand déplaisir de Cygnus, qui détestait dîner face à cette espèce de gougnafier mal léché, avec qui il n'avait de commun que le nom de famille.

– Mon cher beau-frère, l'accueillit froidement Orion, la bouche pleine. La journée a été bonne ? On a encore fait des courbettes à ce cher Nobby Leach ?

Lassé d'entendre une énième fois les sarcasmes qu'Orion ne manquait jamais de lui adresser, Cygnus ne put s'empêcher de fanfaronner :

– Oui, ce cher Nobby Leach... Eh bien je t'apprendrai, mon cher Orion, qu'il n'est plus Ministre pour longtemps.

Orion lui lança un regard dubitatif, auquel Cygnus répondit en claironnant :

­– Malheureusement, je ne peux pas en dire plus... Mais, sache que tu as devant toi le futur Ministre de la Magie.

Orion pouffa, propulsant des miettes de nourriture sur la nappe.

– Sacré Cygnus. Tu n'as toujours pas lâché l'affaire, hein ? Haha ! Franchement, c'est dingue. Walburga et toi, vous êtes vraiment deux têtes de mule, c'est terrible ! D'un côté, Walburga qui refuse catégoriquement de quitter cette vieille bicoque, sous prétexte qu'il s'agit de votre demeure familiale... Peuh ! Tous ces meubles grinçants, ces voisins moldus, et toutes ces odeurs accumulées par les siècles, ça me donne la nausée ! Mais que veux-tu, je n'ai jamais réussi à la convaincre de partir, tu la connais mieux que moi... Quant à toi, mon cher beau-frère, pour une raison que je n'explique pas, tu sembles irrémédiablement attaché à l'idée de prendre la tête de ce gouvernement d'incapables...

Cygnus observa Orion avec un mélange d'agacement et de pitié. Il n'avait absolument aucune estime pour son beau-frère, et aimait penser qu'Orion était une copie fanée de lui-même. D'ailleurs, la plupart des gens à qui il faisait part de cette réflexion ne pouvaient qu'être d'accord avec lui : ils avaient un air de famille, mais Orion était petit et boiteux ; il avait des cheveux noirs, plus ternes et plus clairsemés que ceux de Cygnus ; la moustache qu'il essayait d'entretenir au-dessus de sa lèvre supérieure était totalement inconsistante, contrairement à celle de Cygnus qui était bien fournie et toujours parfaitement taillée ; les yeux d'Orion étaient gris, comme ceux de Walburga et de Cygnus, mais les siens brillaient d'un éclat retors et avide qui les privait de toute beauté.

Et bien sûr, l'attitude d'Orion jouait un rôle certain dans la répugnance que Cygnus éprouvait à son égard. Lorsqu'il mangeait, de la graisse dégoulinait sur son menton et sur ses doigts ornés de chevalières, sans qu'Orion n'y trouve le moindre inconvénient ; au lieu de lire l'éminente Gazette du Sorcier, il préférait se délecter des articles satiriques et des caricatures insultantes du journal concurrent, Le Hibou Jacasseur ; et puis, il se remplissait les poches en collaborant secrètement avec les pires escrocs du monde sorcier, ce que Cygnus trouvait passablement dégradant, malgré les énormes bénéfices qu'Orion en retirait.

– Je suis d'accord avec toi sur ce point-là, c'est bien un gouvernement d'incapables, approuva Cygnus avec suffisance. Mais en tant que Ministre, je pourrai changer ça, et rebâtir une société digne de ce que sont les sorciers.

Ils avaient déjà eu cette conversation une centaine de fois, mais comme aucun d'eux n'arrivait à convaincre l'adversaire, ils remirent leurs arguments sur le tapis.

– Allons, allons, s'indigna Orion, tu sais bien que ce sont des idioties. Le Ministère est gangrené par ses satanés Sang-de-Bourbe, et ils fourrent leur nez partout ! Crois-moi, le seul moyen de changer ça, ce serait un bon coup de Bombarda Maxima au Magenmagot... Oui, bon, évidemment, je plaisante. Mais il faut t'y résoudre, Cygnus : nous, les Sang-Pur, sommes devenus les parias de la société des sorciers ! Ces imbéciles préfèrent se tourner vers les Moldus, les mêmes qui nous persécutaient il n'y a encore pas si longtemps ! Et pour lutter contre ce fléau qui envahit le Ministère, emprunter la voie traditionnelle, comme tu dis, ce ne sont que des coups d'épées dans l'eau. Non, il faut s'y prendre différemment, et agir dans leur dos, pas en leur mangeant sagement dans la main comme tu le fais !

– Je ne suis pas le seul à agir de la sorte. Nous sommes plusieurs, au Ministère...

– Sauf ton respect, Cygnus, tu es le seul à croire vraiment au retour pacifique de nos privilèges. Oui, c'est vrai, tu as quelques sorciers respectables de ton côté, dont ce cher Abraxas, je le concède... Mais la seule raison pour laquelle ce vieux bougre met encore les pieds au Ministère, c'est par ennui, et non par conviction ! Non, crois-moi, tu ferais mieux de prendre part à mes affaires, les recettes y sont plus alléchantes... Et tu serais surpris de l'influence qu'on peut avoir, même sans robe rouge, même en agissant dans l'ombre...

– Orion, je veux croire au monde sorcier dans lequel nous vivons. Il est certes imparfait et menacé, mais cela reste un socle sur lequel nous pouvons nous appuyer. Je ne veux pas le voir sombrer dans le chaos, même si cela implique quelques compromis !

Orion ricana en suçotant son os de poulet.

– Pourtant, tu sais, le chaos est plein d'opportunités... Pour ceux qui y sont bien préparés.

Puis il baissa ses petits yeux gris et mornes, et essuya ses mains poisseuses sur sa chemise verte satinée, ponctuée de petits boutons carrés.

Juste derrière la porte, Narcissa écoutait leur conversation, captivée. Presque tous les soirs, elle entendait Orion revenir à la charge pour rallier son père à ses activités frauduleuses : au début, Narcissa s'attendait donc à voir son père céder à l'appât du gain, et quitter son poste au Ministère pour travailler à la solde d'Orion. Mais cela n'arriva pas, et Narcissa en fut d'autant plus admirative à son égard : elle espérait qu'il continuerait de résister à son oncle, aussi longtemps qu'il le faudrait.

Quand Narcissa avait vu Orion pour la première fois, elle avait été très surprise par sa petite taille : même s'il était toujours représenté plus grand que Walburga sur les portraits qui décoraient la maison, Orion était nettement plus petit qu'elle, et surtout, bien plus petit que son père, ce dont Narcissa tirait une immense satisfaction.

Orion avançait en boitant méchamment : sa jambe gauche traînait toujours derrière l'autre, trop raide. Narcissa aurait aimé savoir pourquoi, mais les adultes n'en parlaient jamais, comme s'ils ne remarquaient pas. Sirius et Regulus n'avait jamais cherché à le savoir, Bellatrix s'en fichait, et Andromeda et elle avaient trop peur de poser la question à quelqu'un d'autre. À part ça, il avait toujours les mains jointes derrière le dos, le regard toujours en mouvement. Bref, Narcissa avait beau chercher, à part la jalousie, elle ne voyait pas ce qui pouvait pousser Orion à détester son père à ce point. Et ce soir-là, Narcissa comprit : son père allait être Ministre de la Magie ! Voilà à quoi rimaient tous ces sacrifices, depuis le début ! Elle sentit sa poitrine se gonfler d'espoir. Son père, Ministre ! Quel triomphe !

Soudain, Narcissa entendit un sanglot discret derrière elle : elle sursauta, et fit volte-face pour découvrir son cousin Sirius, débraillé dans son pyjama rayé, les joues inondées de larmes. En regardant mieux, Narcissa s'aperçut qu'il avait une large tâche humide au niveau de son bas de pyjama.

Sirius avait toujours eu un sommeil capricieux et ce genre d'incident arrivait de temps à autre, surtout quand Orion et Cygnus se disputaient aussi bruyamment. Et si Walburga avait le malheur de s'en apercevoir, cela déchaînait de véritables drames dans la maison, car elle ne supportait pas l'idée que son fils soit imparfait, et puisse mouiller ses draps pendant la nuit. Une fois, Walburga l'avait menacé de lui interdire d'aller à Poudlard si cela continuait, pour éviter qu'il ne « répande la honte sur la famille Black ». Mais ces menaces n'avaient pas eu l'effet escompté, car depuis ce jour, les incidents étaient encore plus fréquents.

Dans la salle à manger, la dispute de leurs pères s'envenimait sérieusement, et Narcissa eut peur que son père ne les découvre en train d'écouter. Narcissa prit la main de Sirius et mit un doigt sur sa bouche pour le faire taire, puis l'entraîna vers sa chambre, pensant revenir écouter une fois que Sirius serait consolé. Ils montèrent les escaliers en prenant garde à ne pas faire de bruit – heureusement pour eux, Narcissa connaissait par cœur chaque marche et où poser le pied pour éviter qu'elles ne craquent, à droite, puis au fond à gauche, puis tout au bord, et ainsi de suite – jusqu'au dernier étage, où se trouvaient les chambres de ses deux petits cousins.

Narcissa lui tint la main jusque dans sa chambre, où elle découvrit les couvertures ouvertes sur une autre tâche humide. À la vue du spectacle, Sirius se remit à pleurer.

– Ne t'en fais pas, je vais t'aider, chuchota Narcissa. Tu verras, personne ne remarquera rien.

En faisant le moins de bruit possible, elle retira les draps, les roula en boule et les fit disparaître dans le fond de l'armoire. Soudain, Sirius lui fit un signe, et elle s'interrompit : un craquement dans le couloir leur signala que Kreattur faisait la ronde, à l'affût du moindre bruit.

– Maudit garnement, grommelait Kreattur, toujours en train de causer du souci à sa mère... Pauvre maîtresse, qu'a-t-elle fait pour mériter un fils pareil...

Ils attendirent, figés sur place, pendant plusieurs secondes : puis Sirius, l'oreille collée à la porte, leva son pouce en l'air, et Narcissa acheva de remplacer les draps. De son côté, Sirius s'empressa de changer de pyjama.

– Et voilà ! se félicita Narcissa lorsqu'elle eut fini, en nage. Même Kreattur n'y verra que du feu !

– Cette crotte de nez ambulante, renifla Sirius en s'installant dans son lit.

Narcissa remonta les draps propres jusqu'à son menton, et s'allongea à côté de lui.

– Pourquoi nos papas se disputent ? murmura Sirius. Est-ce que vous allez devoir partir de la maison ?

– Mais non, bien sûr que non, le rassura Narcissa en caressant ses cheveux bouclés. Tu verras, demain tout sera oublié.

– Alors, quand je me réveillerai, tu seras toujours là ?

– Bien sûr !

– Et on jouera à cache-cache ?

– Oui, exactement !

– Promis ?

– Promis.

Sirius parut satisfait, et se tourna sur le côté, appuyant sa joue ronde sur les oreillers.

– Tu sais ce que j'ai vu, cet après-midi ?

– Quoi donc ?

– Une grosse moto rouge est passée devant la maison. Elle faisait plein de bruit, c'était drôlement chouette !

– Ta mère ne serait pas contente, si elle t'entendait, remarqua Narcissa.

– Et alors ? On s'en fiche, non ?

Narcissa se sentit légèrement mal à l'aise, car son père aussi désapprouvait l'intérêt que manifestait Sirius pour ces engins bruyants ; mais elle n'eut pas le courage de le réprimander.

– Je ne veux pas que tu partes à Poudlard l'an prochain, murmura Sirius, luttant déjà contre Morphée. On s'amuse bien, avec Arantius, non ?

– Tu vas me manquer aussi. Mais tu ne seras pas tout seul, il y aura Regulus aussi, et...

– Berk ! Regulus, c'est un gros fayot, un vrai naze, murmura-t-il de plus en plus doucement.

Et il s'endormit.

Après deux années de solitude partagée dans cette grande maison, Sirius et Narcissa s'étaient pris d'affection l'un pour l'autre. Même s'ils ne discutaient pas pendant des heures comme Narcissa pouvait le faire avec Andromeda, Sirius était vraiment attachant, certes réfractaire à toute forme d'autorité mais excellent camarade de jeu.

Renonçant à retourner écouter la dispute qui avait lieu quatre étages plus bas, Narcissa s'allongea à côté de son cousin assoupi, et se perdit dans la contemplation de sa chambre. Contrairement à la chambre-placard de Narcissa, au premier étage, celle-ci était spacieuse et de la soie argentée masquait les murs de plâtre. Il y avait des rideaux de velours, et une grande armoire en bois verni où Sirius se cachait souvent pour faire enrager leur professeur, assortie au cadre sculpté du lit.

Mais surtout, et c'était ce que Narcissa lui enviait le plus, il y avait ce petit lustre en cristal attaché au plafond, qui surplombait et sublimait l'ensemble avec élégance, et qui, lorsque la tante Walburga écartait sèchement les rideaux de velours pour réveiller Sirius, disséminait mille diamants de lumière à travers la pièce. Narcissa adorait cet objet, fascinée par le miroitement des prismes et la pureté des cristaux.

À côté d'elle, la respiration de Sirius était devenue profonde et régulière. Narcissa songeait, rêveuse, à ce que pourrait redevenir sa vie si son père devenait Ministre de la Magie. Ils auraient à nouveau leur propre maison, dont Druella serait l'unique maîtresse. Narcissa obtiendrait sans doute facilement un lustre dans sa chambre, encore plus grand et plus scintillant que celui-ci, et elle veillerait bien à ce qu'aucun grain de poussière ne vienne en ternir l'éclat. Et en se réveillant tous les matins, la première chose que Narcissa ferait serait d'ouvrir les rideaux et d'admirer le soleil qui se répercuterait dans chacun des cristaux étincelants.

Oui, c'est certain, pensa Narcissa en s'endormant à son tour, je ne pourrais plus jamais être malheureuse si chacune de mes journées commençait ainsi, avec un joli lustre au-dessus de ma tête, plutôt que d'être réveillée en sursaut par le tintamarre des chaudrons et des casseroles, dans la lumière blafarde du jour qui se lève...


Laisser un commentaire ?