Jaune et Noir
La délégation de Poudlard avait été installée dans les jardins du domaine, il avait été planté une trentaine de tentes minuscules. On pouvait distinguer 4 couleurs de revêtement, évidemment, des rouges, des jaunes, des bleues et enfin des vertes. Lilly suivit donc le petit sentier qui menait à une poignée de tentes jaunes et constatait qu’elles étaient toutes nominatives. Elle finit par trouver celle qui portait l’inscription « Elenora Sparks – Lilly Arkensy » et se hâta d’y entrer. D’extérieur, la tente ne payait pas de mine et Lilly eut donc l’inquiétude de se retrouver sur un lit de camp, victime de promiscuité avec Elenora Sparks pendant des mois entiers. Fort heureusement, une fois à l’intérieur, elle put constater qu’elle était bien plus spacieuse qu’elle ne le semblait.
La tente était en effet composée de deux lits très similaires à ceux qu’elle pouvait avoir dans son dortoir à Poudlard, ils étaient espacés de trois mètres l’un de l’autre. Au sol étaient disposés de nombreux tapis douillets, aux couleurs de sa maison. L’un d’eux avait même un énorme blaireau brodé dont la queue entourait la coupe de Poufsouffle, emblème de sa fondatrice. Le reste du mobilier était composé d’armoires et commodes, de miroirs, et au fond, se trouvaient deux sofas couleur ocre autour d’une petite table basse en bois verni.
- Wouah ! s’exclama Lilly.
- Impressionnant n’est-ce pas ? Je suis arrivée il y une semaine et pourtant je ne m’y fais toujours pas.
C’était Elenora qui venait de lui répondre. Elle était tout comme Lilly, en sixième année et était membre de l’équipe de Quidditch de Poufsouffle au poste de poursuiveuse. Elles se connaissaient plutôt très bien puisqu’elles avaient quelques cours en commun depuis leur première année. Malgré son cercle social restreint, elle pouvait considérer qu’Elenora était une amie, même si leurs centres d’intérêt étaient pour le moins divergents. Elenora était très populaire, surtout de part sa position dans l’équipe de Quidditch, mais aussi par ses facilités à tisser des liens avec les gens. Elle participait régulièrement à des soirées clandestines inter-maisons, et pouvait se venter d’être en très bons termes avec la grande majorité des élèves de l’école.
- J’étais loin de m’attendre à tout ça, lui répondit Lilly.
- Je suis heureuse de partager ma tente avec toi, j’avais un peu d’appréhension à l’idée de partager ma tente avec une fille que je ne connaissais pas.
- Moi de même. J’espère que tu ne me rebattras pas les oreilles avec ton quidditch c’est tout, lui répondit-elle en riant.
- Tu plaisantes ! Ils n’ont même pas de terrain ici, ou en tout cas, il est très bien caché. De toute façon, les Français sont très mauvais au quidditch, admit Elenora en s’asseyant sur son lit. Tu peux ranger tes affaires dans cette armoire à côté de ton lit, j’ai déjà utilisé la mienne, on devrait avoir largement assez de rangement pour toute l’année.
Lilly s’avançait vers son armoire, sa minuscule valise à la main. Elle la posait au sol et la regardait étrangement.
- Tu as un soucis Lilly ? lui demanda Elenora.
- Un léger à vrai dire, ma baguette est rangée dans ma valise et Jasper Raywood me l’a réduite pour que je puisse la transporter plus facilement.
Elenora pouffa de rire en se saisissant de sa baguette et la tendit vers la petite valise posée au sol.
- Amplificatum !
La valise enfla à vue d’œil et reprit sa forme normale en une fraction de seconde. Lilly l’ouvrit en prenant soin de remercier sa toute nouvelle colocataire et commençait à poser ses affaires sur le lit avant de pouvoir les ranger une par une dans l’armoire qui semblait ne pas avoir de fond.
- Alors comme ça tu as sympathisé avec Jasper Raywood, demanda Elenora d’un air tout à fait innocent en s’allongeant sur son lit sur le ventre, la tête posée sur ses mains. Il n’est pourtant pas très bavard d’ordinaire.
- Je n’avais encore jamais discuté avec lui, nous étions dans le même compartiment pendant le trajet, lui répondit Lilly tout en continuant de plier ses nombreuses chaussettes.
- Je connais plusieurs filles de septième année qui se sont cassé les dents à vouloir essayer de faire connaissance, si tu vois ce que je veux dire, elle marqua deux guillemets avec ses doigts pour illustrer le terme « faire connaissance », puis elle reprit ; j’ai toujours cru qu’il était plutôt intéressé par les garçons, étant donné qu’il accordait peu d’importance aux filles.
- Elenora, on peut tout à fait avoir des relations amicales avec des garçons sans qu’il y ait quelque intérêt romantique dissimulé !
- Peu importe, tu as sympathisé avec le mystérieux Jasper Raywood, et ça ne n’est pas rien, argua-t- elle en coiffant ses cheveux.
- Il n’a absolument rien de mystérieux, il est même très...
- Charmant ? Ténébreux ? Voire carrément sexy ? dit-elle avec de grands yeux.
- Je voulais dire normal, Elenora.
La conversation s’acheva lorsque Zacharias Smith, le préfet de Poufsouffle passait la tête entre les deux rideaux qui fermaient la tente.
- Mesdemoiselles, le banquet de bienvenue aux nouveaux arrivants aura lieu ce soir, Elenora, je te laisse faire visiter à Lilly les abords du campement pendant ce temps.
- C’est comme si c’était fait Smith ! s’enjoua Elenora en se levant de son lit et attrapant une veste sur son porte manteau personnel puis invitant Lilly à faire de même.
La balade se fit sous les meilleurs hospices, le temps était radieux, à la température idéale. Lilly pu découvrir que le domaine était en réalité composé de plusieurs espaces. Elle avait pu distinguer au loin quelques hectares de vignes, mais également un grand lac sur lequel nageaient paisiblement un couple de cygnes. Elle avait remarqué également des bois denses qui s’étendaient à perte de vue. A l’arrière du château il y avait un grand terrain de sport, mais qui ressemblait davantage à un terrain de course que de quidditch. Elenora n’avait d’ailleurs pas manqué d’exprimer à nouveau sa déception face à cette découverte. De temps en temps elles avaient pu croiser des élèves de Beauxbâtons qui se baladaient, sûrement entre deux cours et qui les saluèrent chaleureusement en leur souhaitant la bienvenue.
Le soir était vite arrivé, et l’heure du banquet approchait. Elenora avait expliqué à sa camarade que les dîners organisés à Beauxbâtons devaient respecter une tenue vestimentaire stricte. Aussi, un uniforme avait été spécialement conçu pour les repas.
- Va savoir pourquoi, mais ici, ils ne veulent pas voir de capes de sorciers et de sandales dans leur salle de réception, lui avait expliqué Elenora.
Ainsi, Lilly avait pu découvrir la tenue réservée aux dîners dans la fameuse « salle de réception » qui devait sans nul doute être l’équivalent de la grande salle. Son uniforme était composé d’un chemisier blanc, sur lequel était reporté le blason de Poudlard, assorti à une veste noire cintrée, elle-même assortie à une jupe noire qui devait lui arriver au genou.
- Heu... Elenora ? fit Lilly.
- Oui ? lui répondit la poursuiveuse qui avait déjà commencé à se changer.
- Ils s’attendent vraiment à ce qu’on porte ça ? s’inquiétait-elle.
- Tu n’as pas le choix ma grande, c’est soit ça, soit Vaillancourt ne te laissera pas rentrer.
- Mais tu as vu ces chaussures ?! s’écria Lilly.
En effet, dans une petite boite en carton étaient disposées deux petites chaussures à talons vernis, qui malgré ses craintes, étaient tout à fait la pointure de la Poufsouffle.
- Ce sont des escarpins Lilly, et je peux t’assurer qu’ils sont tout à fait confortables ! la rassura Elenora, qui s’appliquait à rentrer dans sa jupe avant d’enfiler elle-même ses escarpins.
- Je n’ai jamais porté une tenue pareille.
A Poudlard les exigences vestimentaires étaient assez peu sévères. Les filles pouvaient se permettre de porter des pantalons ou des jeans quand elles le souhaitaient, à condition que chaque élève soit vêtu de sa cape de sorcier et du pull à l’effigie de sa maison d’appartenance. Lilly avait même l’immense plaisir de porter des baskets ou des chaussures plates à chaque occasion qui se présentait. Les escarpins et autres tenues très féminines ne faisaient pas vraiment partie de sa garde-robe.
Faute de ne pouvoir faire autrement, elle entreprit de se changer, et se chaussa de ses nouvelles chaussures à talons. Elle se sentait si instable qu’elle craignait de se ridiculiser en trébuchant à l’entrée de la salle de réception.
- Tu crois que les élèves de Durmstrang aussi portent des escarpins ? dit Lilly en grimaçant, accrochée à son lit à baldaquin.
- Les filles, sans doute, les garçons, évidemment que non.
- Bah voyons... ronchonna-t-elle.
Au même instant, Zacharias Smith passait à nouveau la tête entre les rideaux de la tente, et somma les filles de se dépêcher pour se rendre au banquet. Ce qu’elles firent, non sans difficultés pour Lilly qui marchait d’un pas lent et mal assuré. Elenora attendit le dernier moment pour lui donner une formule magique qui lui permettrait de rester stable sur ses talons.
- Tu ne pouvais pas le dire avant ? fit-elle boudeuse.
- C’était vraiment délicieux de te voir agir en fille, même pendant ces courts instants, lui répondit Elenora en riant devant la grande porte.
Lilly jeta alors le sort à ses chaussures lui permettant de se sentir comme dans ses vieilles baskets, et poussa un soupir de soulagement alors que les deux battants s’ouvrirent, laissant la salle de réception se dévoiler sous leurs yeux.