Inversement proportionnel

Chapitre 4 : Carl Neely, ses enfants et autres histoires

5232 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 12/07/2024 15:51

Le lendemain matin, les collègues sont perplexes de la décision de leur supérieur, mais plusieurs ont décidé de délivrer Carl Neely, puisque l'empreinte digitale sur l'arme n'est pas celle de leur collègue. Plusieurs étaient sincèrement attristés d'entendre l'attentat d'infanticide, seuls quelques collègues étaient indifférents. Carl Neely déambule dans les rues de la ville, plus déprimé que jamais, ayant entendu que des travailleurs sociaux vont bientôt l'observer et évaluer ses capacités à être père pour sa fille et son fils. Il finit par s'assoir sur un banc du parc et pleure, sanglote, laisse libre cours à sa tristesse de la perte de sa fille et de sa femme et de la vague de malheur qui s'abat sur sa famille. Une fois qu'il a séché ses larmes, il revient dans le petit appartement pour lui et ses deux enfants.

Milan Jovanović implore Calvin Byrd :

— Carl Neely est complètement brisé maintenant... moment idéal pour en faire notre cobaye... pour l'influencer et le posséder.

Le psychiatre hoche la tête pour toute réponse et se frotte les mains de joie. Alors, Milan Jovanović possède le détective qui ne lui présente aucune résistance.

L'arrière-grand-père maternel déplace le corps, malgré l'heure matinale, jusqu'à un café-bar pour qu'il boive plusieurs verres de whisky et de vodka jusqu'à être ivre. Le détective (âme) commence à paniquer, mais il ne sait pas trop que faire. Lorsque Carl Neely déambule dans les rues de la ville, Jim Clancy, ayant vu de dos le détective d'une démarche vacillante et son âme à sa droite, s'inquiète sérieusement pour son ami.

Carl Neely, en tant que corps possédé et en tant qu'âme, se retourne, le corps affirme d'une voix traînante :

— Jim Clancy... vous allez bien ?... Laissez-moi seul... le travail m'appelle...

Et le corps se retourne et continue son chemin.

L'âme de Carl Neely, contristé, s'excuse à son ami :

— Désolé de n'avoir pas eu la force de résister à cette possession... Je suis dépassé, hier soir, j'ai eu le droit à la visite des espions qui ont essayés de tuer ma fille et mon fils, mes anges... Je crains pour leur vie, j'aimerai les voir,... mais je n'ai présenté aucune résistance à l'esprit qui me possède, trop déprimé par les morts de ma femme et de ma fille et la présence imprévisible des espions hier... Et voilà l'état peu professionnel de mon corps... Que faire ?

Sur cette question, Jim Clancy lui réplique :

— Avez-vous commencé à enquêter sur votre famille ?

Carl Neely lui répond qu'il a commencé, mais qu'il n'a guère avancé depuis, trop déprimé et affecté par la mort de sa femme et de sa fille. L'ambulancier soupire et espère que le détective reprendra le contrôle de son corps rapidement.

Le corps possédé du détective, lui, s'assoit sur un banc du parc et commence à chanter Ко то каже, ко то лаже, Србија је мала [Qui dit, qui ment, que la Serbie est petite ?], puis se rend à la boutique où travaille Mélinda Gordon-Clancy. Cette dernière s'étonne du regard possédé du détective.

Il la salue et lui demande :

— Pourquoi cet étonnement ?

— Je ne m'attendais à vous voir ainsi, Monsieur Neely.

— Et qu'est-ce que c'est ainsi ?

— Ivre et possédé.

— Vous me faites rire, Madame Clancy.

Carl Neely éclate d'un rire démentiel. Rire démentiel qui n'est qu'un rire léger comparativement au rire démoniaque du méchant esprit errant qui le possède et du psychiatre Calvin Byrd.

Le détective possédé achète un objet et sort du magasin. Il se rend jusqu'à son bureau. Ses collègues sont étonnés de voir Carl Neely ivre, mais personne ne dit mot. Le détective fait les cent pas dans son bureau, puis Milan Jovanović cesse sa possession. Carl Neely s'assoit à son bureau et s'endort.

Trois heures plus tard, il est réveillé par Jim Clancy. L'ambulancier attend patiemment que Carl Neely se réveille complètement. Le détective, quelques minutes plus tard, l'interroge d'un ton qui se voulait sérieux, malgré son mal de tête :

— Jim Clancy, quelle est la raison de votre venue ? Une enquête ?

— Disons-le. Vous devez enquêter sur votre famille et tout particulièrement sur le psychiatre Calvin Byrd... si vous ne voulez pas terminer fou.

— Non, mais de quoi vous vous mêlez ? s'offusque Calvin Byrd. Voulez-vous encourir ma colère, mon influence sur votre femme ?

— Voulez-vous que je rende fou votre femme ? réplique Milan Jovanović.

— L'affaire est sérieuse, affirme Carl Neely.

Ce dernier est dégrisé par la situation.

— Très bien... J'espère ne pas faillir à la tâche.

Le détective remercie chaleureusement l'ambulancier et l'accompagne jusqu'à la porte pour lui-même sortir et aller jusqu'à l'hôpital pour s'informer de l'état de santé de sa fille Marianne et de son fils Daniel. Il reste au chevet de sa fille toute la soirée. Au moins, il est rassuré que sa fille peut revenir à la maison demain en après-midi, alors que son fils sort de l'hôpital deux jours plus tard.


Le lendemain matin, le détective se rend à son bureau pour continuer ses enquêtes de famille et sur Calvin Byrd. Les méchants esprits errants ne cessent de lui suggérer un pessimisme, mais il continue son enquête et demande des documents d'archives de l'hôpital psychiatrique Merciful Lord Asylum Hospital de la ville de Smallview et des archives de Belgrade. Le détective comprend que le docteur Calvin Byrd n'est jamais allé en Serbie, et que la seule façon pour que les deux hommes se soient connus, c'est lors de la visite de Milan Jovanović aux États-Unis en 1959. Sinon, le docteur Calvin Byrd, né en 1889 et mort en 1978, est un psychiatre qui travaillait à l'hôpital psychiatrique de Smallview toute sa carrière. Il était un psychiatre très respecté à son époque et écrivait plusieurs livres sur divers traitements.

Myriam Cohen-Neely, à l'instar de François Tricot, est contente que son mari soit plus optimiste, Hélène Neely est aux côtés de sa sœur Marianne. À la fin de la journée, le détective comprend que les deux hommes, de leur vivant, ne se sont jamais rencontrés, mais qu'ils ont un même penchant pour l'occultisme. Cette conclusion du détective déplaît à Milan Jovanović et à Calvin Byrd qui continuent à essayer de le briser psychologiquement en lui suggérant de sombres pensées.

Après son travail, Carl Neely salue ses collègues et part à l'hôpital pour ramener sa fille dans leur nouvel appartement qu'il a trouvé. Une fois dans l'appartement, Carl Neely appelle sa mère, Hélène Jovanovich, pour lui demander de venir surveiller sa fille, Marianne, le temps qu'il est au travail. Elle accepte. André Neely et Hélène Jovanovich restent une semaine pour aider leur fils.

Mais cette semaine n'est pas tranquille pour Carl Neely, partagé entre ses enquêtes de famille, son désespoir et sa motivation à protéger ses enfants, il ne sait pas s'il peut faire confiance à ses propres parents.

Tous les soirs, lorsque les enfants et ses parents dorment, Carl Neely, seul dans sa chambre, ne cesse de se tourmenter avec des idées sombres suggérées par Calvin Byrd et Milan Jovanović, auxquelles viennent se mêler ses conclusions provisoires d'enquêtes. Certains soirs, lorsqu'il ne peut plus supporter ces pensées, il part dans la cuisine boire un petit verre de šljivovica et un petit verre de whisky, en prenant toutes les précautions pour que personne ne doute de ses consommations, ce qui exaspère Myriam Cohen-Neely, Hélène Neely et François Tricot et réjouit Milan Jovanović et le docteur Calvin Byrd.


Début décembre 2002,

Toute la semaine était consacré à enquêter sur sa famille, et plus Carl Neely cherche, plus il s'étonne et plus Milan Jovanović le pousse au désespoir, le laissant le weekend très déprimé de ses conclusions, puisque sa famille paternelle, les Neely, sont surtout très versés dans l'occulte, et la famille maternelle, les Jovanović sont toujours des propriétaires terriens et des proches du pouvoir, proche d'un haut fonctionnaire proche du roi. Sans oublier que Milan Jovanović est profondément impliqué dans l'occultisme et a été initié jeune. Hélène Jovanovich, sa mère, a bien remarqué que son fils est très fatigué, épuisé de ses enquêtes et que la façade de sourire et de bonne mine ne l'a pas trompé.

Le samedi soir, une fois que Daniel et Marianne sont partis dormir et que son mari est sorti de l'appartement pour se promener dans les rues avant d'aller dormir, Hélène Jovanovich, inquiète pour son fils, le sollicite en serbe en ces termes :

— Mon enfant, mon Carl, je vois bien que tu feins la bonne humeur et la bonne forme, mais t'es clairement fatigué et épuisé. Est-ce tes enquêtes qui te laissent ainsi déprimé ou est-ce autre chose ?

— Mère, soupire le détective, je ne sais même pas si je peux te confier mes enquêtes...

Carl Neely prend sa tête entre ses mains.

— ... J'ai encore deux enquêtes urgentes à régler et j'ai des espions à mes trousses. Juste à penser à ces salauds, et à tous les bas coups qu'ils sont capables, je crains pour la sécurité de Daniel et Marianne,... sans oublier que je me sens fautif de la mort de ma femme et de ma fille benjamine... j'ai honte juste à y penser, je n'ai rien fait pour les sauver.

La voix du détective se brise et il se lève prendre un petit verre de šljivovica et revient à sa place initiale.

— ... Je me demande, parfois, qu'est-ce que j'ai fait à Dieu pour mériter une vie si difficile...

— Attends ! lui réplique sa mère.

Elle lui retient le bras droit, alors que son fils avait l'intention de vider d'un trait son verre d'alcool.

— ... J'espère que tu n'as pas pris l'habitude de te consoler dans l'alcool, mon fils ?

— Non, non, ...

Le détective descend ses yeux sur son verre lorsqu'il réplique à sa mère.

— ... Ce n'est qu'occasionnellement que je me remonte le moral avec l'alcool, tu n'as pas à t'inquiéter... Je demeure raisonnable dans mes consommations...

— ... Bon... À dire vrai...

Il murmure en français pour lui-même, toujours en fixant son verre.

— ... Je dois reconnaître que ces derniers jours, c'est plutôt rare les soirs où je ne bois pas, mais c'est un détail... D'ailleurs, je pense bien que je me suis habitué à mon insu.

— Qu'est-ce tu as dit mon enfant ? Je n'ai pas entendu.

— Euh... Rien mère... Rien de très pertinent...

— Tu ne m'as pas convaincu, mais bon! Si tu ne veux pas parler avec moi plus en détail, alors bonne nuit mon fils. Je vais bientôt aller dormir.

Quelques minutes plus tard, André Neely est revenu de sa promenade et le vieux couple parte dormir, laissant leur fils seul, dans la cuisine, à réfléchir à ses enquêtes et à la mort de sa femme et de sa fille, très déprimé. Ce qui fait rire Milan Jovanović qui attend que son descendant soit encore un peu plus brisé pour le posséder. Carl Neely est parti dans sa chambre avec les deux bouteilles d'alcool et un petit verre, il s'assoit sur le bord du lit buvant un petit verre de whisky ou de šljivovica pour surmonter, ou plutôt pour noyer, ses souvenirs douloureux et ses sombres enquêtes.

François Tricot indigné sermonne Myriam Cohen-Neely :

— Il est bizarre que votre mari boit et que vous ne faisiez rien pour le dissuader ! Quelle épouse faites-vous ! Vous m'étonnez ! Quelle est la raison de votre inaction, Madame Neely ?

— Je suis d'accord avec vous, mais ne pensez pas que je suis restée les bras croisés alors qu'il vide ses verres d'alcool, j'ai renversé maintes fois le contenu des verres. J'ai demandé à Marianne qu'elle fasse irruption dans la cuisine, mais mon mari est têtu et ne cesse de se servir à nouveau et cache le verre derrière son dos, bredouille une mauvaise excuse à notre fille, attendant qu'elle quitte, pour vider son verre; il a fait le même coup à sa mère, sauf qu'il s'est montré plus malin, dès qu'elle est arrivé, cachant son verre derrière le dos, il est parti jusqu'aux toilettes pour terminer son verre... D'ailleurs, depuis avant hier, il boit ses verres en cachette dans sa chambre, chambre qu'il barre à clé... Vous comprenez qu'avec un tel comportement, j'ai décidé de ne plus le dissuader, s'il veut boire, qu'il boive... même si que j'en suis attristée.

— Effectivement, c'est plutôt triste... Je crains plutôt une habitude à son insu... Un proverbe russe ne dit-il pas que si le mari boit, la moitié de la maison brûle [le proverbe russe exact est Si le mari boit, la moitié de la maison brûle ; si la femme boit, toute la maison est en feu]... Je vais essayer de l'influencer pour qu'il réalise que l'alcool n'est pas une échappatoire à sa situation et à sa douleur.

Le défunt militaire se rend à la droite du détective et essaie de l'influencer pour qu'il cesse de boire, Carl Neely, comme s'il l'a entendu, suspend son geste de porter son verre de whisky à ses lèvres, réfléchissant à ce qu'il va faire, puis murmure pour lui-même en serbe :

— La šljivovica et le whisky ne sont peut-être pas un moyen d'oublier ma douleur et ma tristesse, mais je peux dormir... Ah ! Je me suis peut-être trop habitué à mes alcools... Attend... Moi, alcoolique ?... Moi, dépendant de l'alcool ?... Bizarre à dire... Non... Impossible... Mais je dois me tester... Allez Carl, à partir de demain, jusqu'à deux semaines, c'est-à-dire jusqu'à la fin décembre, tu ne touches pas à une goutte d'alcool... Je verrai si je ne vais pas avoir des symptômes de sevrage alcoolique.

Sur ce monologue, il vide son verre d'un trait, range les bouteilles à leur place et revient dans sa chambre dormir. Myriam Cohen-Neely sourit à François Tricot, le remerciant de son aide.


Le lendemain matin, le détective continue son enquête sur Calvin Byrd, mais la laisse de côté rapidement, et appelle son collègue de Greatview, Paul Eastman, pour lui demander le nom de son mystérieux esprit protecteur. Paul Eastman hésite, François Tricot est apparu à sa droite et lui somme :

— Maintenant.

Et disparaît de sa vue pour revenir à la droite de son protégé. Le détective prend en note les informations mentionnées par son collègue. Il commence son enquête sur François Tricot. Cette enquête est vite terminée, puisque le militaire qui participe en 1912 aux Guerres des Balkans meurt lors d'un combat. Il est fils de Jean Tricot, citoyen français, et de Mila Pavlović, Serbe, et part à la guerre à l'âge de 27 ans. À 23 ans, il s'est marié à une Serbe, une certaine Vera Beraha, et le couple a quatre enfants, trois filles et un garçon. Sinon, aucun des descendants de cet homme n'ont de rapport matrimonial avec les Jovanović, les Nikolić ou les Neely. Bref, aucun rapport avec sa famille. François Tricot a un frère aîné, Robert, né en 1882 et mort en 1900, tué par un homme.

Le détective de Grandview est intrigué de la raison d'avoir un tel esprit qui le protège. Une fois qu'il a terminé cette enquête sur François Tricot, il range le dossier, mais le militaire n'est pas content que le détective n'a pas compris l'élément le plus important à son sujet, élément qui devrait être son enquête, à savoir sa raison de le protéger.

Carl Neely annonce à voix haute pour lui-même :

— J'ai réglé le cas de Jean Tricot, même si que c'est pas clair la raison de l'enquête, l'homme n'a commis aucun acte répréhensible et je ne vois pas son intérêt à me protéger, n'étant pas un ancêtre de ma famille par une alliance. Bref, un mystère, mais ce cas est réglé... Maintenant, il ne reste que le docteur Calvin Byrd... Ah, oui, il faudrait que je me déplace jusqu'à Smallview, pour visiter tout particulièrement l'hôpital psychiatrique Merciful Lord Asylum Hospital... Je vais le faire demain et après-demain... Je me donne maximum trois jours pour tout visiter.

Le détective, content que ses enquêtes se règlent facilement, sort de son bureau pour faire une tournée dans la ville.

Dans le parc, il voit Jim Clancy et sa femme, il les salue poliment. Jim Clancy demande à son ami :

— Monsieur Neely, pensez-vous aller à Smallview demain ?

— Oui, pourquoi ?

— Si vous voulez je vous accompagnerais, parce qu'il y a le docteur Calvin Byrd qui veut vous convaincre de visiter certains endroits, alors que votre protecteur, le militaire, vous fait savoir qu'il vaut mieux éviter certains endroits et votre épouse est clairement inquiète pour vous.

— Si vous voulez, je ne vais pas refuser votre aide... D'ailleurs, avez-vous un peu de temps ce soir, je vous inviterais et je vous expliquerais mes enquêtes. C'est correct pour vous ?

— Oui, alors à ce soir.

Sur ces mots, le détective quitte le couple et continue sa tournée.

Jim Clancy se tourne vers Myriam Cohen-Neely et l'interroge :

— J'espère que votre mari n'écoute pas beaucoup les stupidités des deux méchants esprits à sa gauche ?

— Disons qu'il est très déprimé et dépressif... surtout qu'il ne cesse de se culpabiliser de ma mort et de la mort de notre Hélène... Au moins, il s'est donné la résolution de ne plus boire jusqu'à la fin du mois, puisqu'il a pris l'habitude de boire un peu de šljivovica et de whisky le soir pour pouvoir dormir... Je m'inquiète s'il serait devenu dépendant... Et un père alcoolique monoparental est la pire des combinaisons possibles pour les enfants.

— Ce n'est pas rassurant, effectivement, Madame Cohen-Neely... Même s'il m'est difficile de rattacher Carl Neely avec ce problème... mais je vous crois Madame.

La défunte épouse disparaît pour rejoindre son mari et ses enfants, alors que Jim Clancy est parti faire une recherche sur la ville de Smallview.

Comme Mélinda Gordon regardait aussi avec son mari, elle se glace d'effroi en voyant l'école primaire, commence à s'agiter, à s'affoler et bredouille à son mari :

— J'ai reconnu... C'est l'endroit de ma vision d'hier... Il faut faire attention... Surtout éviter un sombre endroit...

— Mél, cette école primaire était un asile psychiatrique, le Merciful Lord Asylum Hospital, avant d'être détruit pour devenir l'école... Je suis certain qu'il y a encore beaucoup d'esprits qui hantent l'endroit.

— Mais de quoi vous vous mêlez, s'insurge le docteur Calvin Byrd qui se manifeste soudainement à la gauche du couple, sauf si vous voulez que je rende fou votre charmante épouse et votre ami le détective ? D'ailleurs, j'ai un allié de taille... Alors ne fourrez pas votre nez partout, compris ?

— Monsieur le docteur, je vous rappelle que vous n'êtes plus vivant, votre âme n'est plus rattachée à un corps, alors laissez-nous tranquille.

— Vous pensez me faire fuir ? Ah ! Ah ! Je suis mort de rire.

Sur cette remarque ironique, l'esprit errant s'en va.

— L'arrogance de cet esprit errant qu'est Calvin Byrd est incroyable!, commente Jim.

— Calvin Byrd, un psychiatre vêtu d'un complet noir et d'une chemise blanche avec des petites lunettes et avec un peu de cheveux sur la tête ?

— Oui, très exactement.

— Cet homme est un vrai sadique psychopathe qui veut que Carl Neely soit son cobaye, et pour ce faire, il cherche à le diviser, à le briser psychologiquement, en bref, il veut le rendre fou.

Un lourd silence plane entre le couple, très inquiet pour leur ami.

Le soir, lorsque le couple arrive devant la porte de l'appartement de Carl Neely, Jim Clancy sonne, attendant que son ami lui ouvre la porte. Il est chaleureusement accueilli par le détective en civil et son petit groupe d'esprits (sa défunte épouse et sa défunte fille, François Tricot, Milan Jovanović et Calvin Byrd). Une fois que tout le monde est à table, le détective demande à ses amis s'ils veulent un peu d'alcool, Jim Clancy accepte un peu de vin, Mélinda Gordon refuse, étant enceinte. Carl Neely félicite le couple et donne à manger aux enfants, aux amis et à lui-même. Une fois le repas terminé et la vaisselle propre, Mélinda Gordon surveille les enfants du détective le temps que son mari discute avec Carl Neely concernant son enquête à Smallview.

Une fois que le détective lui a expliqué l'enquête, le chuchoteur d'esprits lui conseille :

— Mon ami, j'accepte de vous seconder, ma femme et moi. Pour vous aider le plus possible et vous éviter une mauvaise surprise.

— Vous ferez mieux de laisser Mélinda Gordon surveiller mes enfants, elle est enceinte et je ne pense pas que les inquiétudes d'un détective soient bonnes pour votre bébé... Sans parler des espions, ils seront nécessairement à mes trousses...

— Non, n'écoutez pas les sordides esprits à votre gauche... C'est eux qui vous suggèrent cette idée qui ne peut que vous mener à votre perte. Je maintiens fermement que ma femme et moi devrons vous seconder. Vos enfants, laissez-les sous bonne garde à quelqu'un en qui vous avez confiance.

Carl Neely hoche la tête pour toute réponse et appelle Paul Eastman pour le conjurer s'il peut veiller sur son fils et sa fille pendant trois jours, le temps qu'il mène une enquête à Smallview, le collègue accepte. Le soir, Jim Clancy et sa femme reviennent chez eux, les enfants de Carl Neely dorment, alors que le détective ne ferme pas les yeux de la nuit inquiet pour ses enfants et son enquête. Alors il s'est levé pour prendre un verre whisky, mais, au moment où il voulait boire, il se rappelle de sa promesse de ne pas boire de l'alcool du reste du mois.

Il revient dans son lit et pense :

« Tant pis pour moi si je ne peux dormir sans alcool... Peut-être que je finirais par m'endormir à force de remâcher les mêmes idées ? »

Le détective s'endort deux heures plus tard après avoir remâché pour la centième fois les mêmes sombres idées.


Le lendemain matin, Carl Neely, très fatigué, accueille son collègue Paul Eastman, le salue et lui confie la garde de ses enfants. Le détective de Grandview part dans sa voiture de fonction et attend le couple d'amis. Jim Clancy et Mélinda Gordon-Clancy arrivent rapidement. L'ambulancier questionne Carl Neely :

— Mon ami, vous êtes certain que vous conduirez ? Vous m'avez l'air très fatigué ? Sans parler de tous ces esprits à votre gauche et à votre droite qui vous déconcentrent... Je peux conduire, si vous voulez ?

— Non, non, c'est correct... Euh, non, ce n'est pas correct... Je pense que je vais vous laisser conduire finalement, mes pensées ne cessent de passer d'un sujet à l'autre, ma concentration est absente.

— Très bien, Carl Neely... Et vous esprits errants, taisez-vous! Vous n'engendrez que cacophonie à mes oreilles.

Tous obtempèrent, sauf Calvin Byrd qui continue à influencer le détective. Jim Clancy conduit jusqu'à Smallview sans incident.

Une fois arrivé, Carl Neely demande à ses amis de l'attendre le temps qu'il passe chez ses collègues de la ville.

Mélinda Gordon l'implore sur un ton très inquiet :

— Devez-vous passer par cette station ? J'ai l'impression que vous serez entravé pour la suite. Et ce n'est pas rien l'entrave, c'est votre possible mort... Vos enfants seront orphelins...

Mélinda lâche une larme, effrayée pour la vie de leur ami.

— ... Je vous en prie ne rentrer pas dans cette station.

— Vous êtes certaine que vous ne dramatisez pas beaucoup, Madame Gordon-Clancy ?, réplique le détective en tenant nerveusement entre ses doigts sa carte d'employé.

— Non, je suis sérieuse.

Carl Neely, baisse les yeux sur ses pieds, hésitant entre croire à la jeune femme ou non, partagé entre les suggestions de sa défunte épouse et les suggestions du docteur Calvin Byrd. Il finit par écouter les suggestions du psychiatre. Il relève ses yeux et proclame haut et fort à la femme :

— J'y vais quand même. Vous ne m'effrayez pas avec vos propos.

Il parla ainsi et il se rend à la station, alors que Mélinda Gordon regarde son mari, étonnée de sa décision. Jim Clancy lui explique que le psychiatre influence leur ami. Après quelques minutes, Carl Neely revient auprès du couple, secondé par Milan Jovanović qui a un sourire ironique aux lèvres et Myriam Cohen-Neely qui a une mine inquiète. Les trois vivants déambulent dans les rues pour se rendre jusqu'aux archives de la ville et trouver le plus d'informations sur le psychiatre Calvin Byrd. Les informations n'étaient pas intéressantes pour le détective.

Le chuchoteur d'esprits s'inquiète de l'influence du psychiatre sur Carl Neely qui ne cesse de lui répéter :

— Mon doux et bon Carl Neely, vous ne pouvez m'échapper, vous êtes tout consacré à moi... Je connais vos secrets les plus monstrueux... Je vous connais en votre âme.

Les trois vivants se rendent à l'asile psychiatrique, qui est transformé en école primaire en 1980. Jim Clancy se penche vers sa femme et lui murmure :

— Il y a effectivement plusieurs âmes errantes dans cette école, certainement des patients de l'asile, les pauvres.

Carl Neely se rend au bureau du directeur et lui explique qu'il enquête sur le passé de l'école, lorsqu'elle était un asile et qu'il voudrait avoir accès à l'école, aux sous-sols et aux archives. Ce qui est accordé immédiatement, à la condition qu'il enquête lorsqu'aucun élève est à l'école, c'est-à-dire après 15 h 50. Carl Neely rapporte à ses amis les contraintes de l'enquête.

En attendant l'heure d'enquête, Carl Neely se promène dans la ville, sans but, alors que Jim Clancy et son épouse font une enquête à l'intérieur de l'école sous prétexte qu'ils sont intéressés à inscrire leur enfant plus tard.

En se promenant, le chuchoteur d'esprits voit une femme de vingt-cinq ans qui chante une berceuse russe, la Казачья Колыбельная Песня [Berceuse cosaque], tout particulièrement les vers suivants :

Дам тебе я на дорогу

      Образок святой:

Ты его, моляся богу,

      Ставь перед собой;

Да, готовясь в бой опасный,

      Помни мать свою...

Спи, младенец мой прекрасный,

      Баюшки-баю

Traduction

Je te donnerai une petite icône sainte

Pour ton chemin

Et quand tu prieras Dieu, 

Tu la mettras bien devant toi.

Quand tu te prépareras pour un dangereux combat

Je te prie de te rappeler ta mère

Dors, mon bébé, mon joli

Dodo, fais dodo.


Jim Clancy s'avance vers la femme et l'interroge, avec son russe rudimentaire, pour terminer la conversation en anglais :

— Madame, voulez-vous vous décliner et m'expliquer la raison de rester encore parmi les vivants ?

— Je suis Svetlana Pavlovna Diniyevna-Smith, Ouzbèke, mariée à John Smith, patiente de l'asile depuis mes vingt-deux ans, après l'accouchement de mon fils. Et je pense que mon fils est mort et que je n'ai plus de descendance... Mais faites attention à mon psychiatre, Calvin Byrd... Il est dangereux... Je protège les enfants de son influence.

— Je ferais une enquête sur vos descendants.

La patiente murmure, avant de disparaître :

— Qu'Allah vous bénisse.

Jim Clancy note les noms mentionnés et rejoint sa femme qui parlait avec le directeur.

Dès que le couple a terminé la visite guidée de l'école, Mélinda Gordon-Clancy, angoissée, informe son mari :

— Je crains le pire pour Carl Neely...

Sa voix se brise sous l'effet de l'intense émotion de peur.

— ... C'est un endroit d'horreur... J'ai reconnu des endroits de ma vision.

Jim Clancy rassure sa femme puisqu'ils vont secondés le détective et lui éviteront d'aller aux mauvais endroits.

La jeune épouse rassurée par le contact et les propos de son mari l'enlace et le couple se promène ainsi dans les rues de la ville. Ainsi, le couple rencontre Carl Neely assis sur un banc du parc de la ville, la tête soutenue entre ses mains, entouré, à sa gauche, de Milan Jovanović et de Calvin Byrd, à sa droite, de François Tricot et de Myriam Cohen-Neely. Le détective est visiblement désespéré, trop influencé par le psychiatre. Jim Clancy salue son ami et lui demande de ne pas abandonner l'enquête, qu'il ne prête pas foi aux propos mensongers du psychiatre.

Calvin Byrd se fâche et hurle à Jim Clancy :

— Très bien, vous voulez jouer au plus malin avec moi! Je vous montrerais mes capacités professionnelles sur votre ami même!

Le psychiatre disparaît de sa vue pour venir à la droite du détective et lui murmurer un discours déprimant. Discours qui affecte le détective, puisqu'il dit au couple, après plusieurs minutes de silence :

— Je doute même que je parvienne à mener à bien cette enquête,... je ne me sens pas à la hauteur de la tâche... Je crains pour la vie de mes enfants... Je suis un bien mauvais père... Pourquoi ne me contenterais-je pas de donner des contraventions au lieu d'être détective, au moins je n'aurais pas eu les espions à mes trousses... Arh ! Il faut que je me change les idées... Bon je vous laisse, joyeux et heureux couple, moi, je me rabats sur mes sombres pensées d'un détective veuf et père... À plus tard...

Sur ces mots, il se lève et Calvin Byrd lui murmure sa prochaine destination en français, ce qui fâche Myriam Cohen-Neely. Elle essaie d'influencer sur son mari. Jim Clancy demande à François Tricot de lui traduire les propos du psychiatre. Il lui rapporte que la prochaine destination suggérée par le psychiatre est le Joli Coin, un bar de la ville, réputé pour ses prostituées après 22 h 00. L'ambulancier fait la moue, ne pouvant imaginer son ami fréquenter des endroits si louches. Le couple, inquiet, continue leur promenade et attende leur ami à 15 h 50 devant l'école.

Carl Neely est arrivé à l'heure, suivi d'un psychiatre mécontent et d'une épouse contente; Jim Clancy compris immédiatement que son ami ne s'est pas laissé convaincre par le méchant esprit et qu'il n'a même pas bu de l'alcool.

L'inspecteur, mine sérieuse, très professionnel, annonce solennellement au couple :

— Maintenant, nous sommes à la dernière étape de l'enquête sur le psychiatre Calvin Byrd. Allons-y !

L'esprit mentionné lui réplique avec un sourire sadique dans le coin des lèvres :

— Enquête qui ne sera pas facile pour vous, Carl Neely.

Sur cette remarque, le psychiatre s'évapore.




À suivre

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