Rhaegar le Dernier Dragon

Chapitre 2 : Les hommes et les dieux

4826 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 10/11/2016 09:13

Le vent resta favorable, et l’Hydre filait à une bonne vitesse sur les vagues. Sur le pont arrière, le puissant Jonothor Darry se tenait à côté de Rhaegar. À cinquante ans, il était l’homme le plus âgé de l’équipage. Il naviguait sur ces eaux depuis près de trente-cinq ans. En tout ce temps, malgré les tempêtes et les coups de vent, il n’avait jamais fait naufrage. Presque tous ses amis d’enfance étaient morts. Certains s’étaient noyés quand leur vaisseau avait coulé. D’autres avaient été assassinés par des pirates. Deux étaient morts de la maladie de la toux, et un autre avait été tué à la suite d’une querelle pour une chèvre perdue.

Darry savait qu’il avait eu de la chance.

Des mouettes tournaient au-dessus de la voile noire ornée du Dragon Tricéphale. Le vent prit de la vitesse. Jonothor regarda le ciel. Les orages soudains étaient fréquents dans le Détroit. Peu de vaisseaux commerciaux s’aventuraient dans ces mers agitées.

— Si le vent tourne… dit-il.

— Tout va bien, il y a eu un orage il y a deux jours. C’est peu probable qu’un autre se déclenche si vite.

— Peu probable, mais pas impossible, marmonna Jonothor. Il ne faut pas tenter le Dieu Noyé.

— Je croirais entendre un Fer-né.

— Fer-né ou pas. Il y a des dieux différents dans des pays différents. Je ne veux offenser aucun d’entre eux.

Rhaegar réfléchit aux propos de Jonothor puis poursuivit :

— Les dieux sont différents c’est vrai, mais les uns sont moins cruels que les autres. Les prêtres rouges se prosternent devant R’hllor, les Sans Visage devant le dieu Multiface, les îles de Fer croient au Dieu Noyé, même les gens du nord prient des dieux encore plus cruels.

— Et vous mon prince, quel dieu vous priez ?

— Je ne crois qu’en moi-même, réplique Rhaegar d’une voix sombre. Un homme peut tout surmonter si son courage ne lui fait pas défaut.

— Tout le monde n’a pas votre courage, majesté.

— Pourtant tu es bien courageux, fit-il remarquer.

— Il y a plusieurs formes de courage, une femme peut craindre son mari, mais n’hésiterait pas à affronter une armée pour sauver ses petits, moi-même je n’hésiterais pas à sacrifier ma vie pour mon roi, mais je serais incapable de le provoquer ouvertement comme vous les faîtes. Suis-je donc à moitié courageux ? Ou à moitié lâche ?

— Personne n’oserait défier mon père, affirma Rhaegar en soupirant. Et pourtant les gens ont de bonnes raisons de le défier.

— Permettez-moi de couper court à cette conversation, mon prince, dit Jonothor à voix basse. Mon courage je le crains s’amenuise quand il est question du roi votre père.

Rhaegar éclata de rire et lui tapa l’épaule. Jonothor lui sourit puis le regarda relever le timonier de la barre du gouvernail. Rhaegar aimait prendre les commandes de l’Hydre et naviguer sur les flots. Un jour. Il tiendrait les gouvernails des Sept Couronnes, et peut être parviendrait-t-il à ramener la paix que son fou de père s’amusait à enfreindre. Et pourtant…  le prince n’avait semble-t-il, aucune envie de devenir Roi. Il préférait rester cantonné à son rôle de prince marchand et naviguer sur les mers en vendant ses marchandises dans les cités libres, comme Pentos ou Myr ou Qarth. Rhaegar n’aimait rien devoir à son père. Il avait bâti lui-même sa fortune en travaillant dans le commerce, empruntant  à la Banque de Fer de Braavos, et remboursant ses emprunts une fois ses opérations commerciales couronnées de succès. Maintenant le prince possédait une flotte commerciale de quatorze navires qui parcourraient le Détroit et la mer de Jade, sans oublier la Baie de Serfs. D’aucuns murmuraient qu’il serait plus riche qu’un Lannister.   

Jonothor vit un homme de grande taille approcher. Son visage était à moitié brûlé et il portait une armure noire et une grande épée accrochée sur le dos. Ce gaillard avait un regard si glacé que Jonothor en était troublé, le nouveau venu s’arrêta devant lui puis le regarda dans les yeux.

— Puis-je vous parler ? demanda-t-il d’une voix bourrue.

— Pas de passager ici ? réplique sévèrement Darry.

— J’ai juste des questions, m’sieur, lui avait répondu poliment l’homme.

— A quel propos ? avait-il demandé.

— A propos du bateau.

— Du navire, avait rétorqué sèchement le capitaine.

— Du navire, ouais. Je ne sais pas parler comme un marin. Fit l’étranger  de cette même voix acariâtre.

— Il tient bien la mer, avait dit Jonothor. Deux cent quarante rames, et il peut affronter n’importe quelle tempête que les dieux pourraient nous envoyer. L’Hydre est certainement le plus grand vaisseau de Westeros… même un bateau pirate y réfléchirait à deux avant de l’attaquer. Première fois en mer mon garçon ?  

— C’est ma première fois, confirma le géant. Et j’aime pas trop l’idée de crever en armure de combat en coulant comme un plomb dans la mer.

— Le danger principal, ce sont les pirates, répliqua Jonothor gravement, et c’est la raison de ta présence à bord.

Il le fixa du regard puis s’enquit prudemment :

— Tu n’es pas un mercenaire n’est-ce pas ?

— Je suis juste quelqu’un qui sait buter à l’occase, réplique l’homme de cette même voix boudeuse, merci a vous.

Il tourna les talons et redescendit sur le pont principal où il se fraya un chemin jusqu’à la proue. Là, il s’assit sur un rouleau de corde, en s’adossant à une balle recouverte de toile.

— Sandor Clegane ! S’exclama Rhaegar en arrivant devant Jonothor. Un sacré gars pas vrai ?

— Clegane ! Un nom funeste, réplique le capitaine avec gravité. On dit que son frère est aussi cruel que puissant au combat.

— La Montagne à Cheval, confirme Rhaegar de cette même voix douce, j’ai jouté une fois contre lui, j’ai même failli me battre à l’épée lorsque je l’ai désarçonné. Ser Gregor n’a aucune pitié pour ses adversaires. En fait il n’a de pitié pour personne. Il a défiguré son propre frère que tu vois en lui brûlant la moitié du visage

— Pourquoi voyage-t-il avec vous ?

— Sandor est différent. Quand j’ai voulu l’armer chevalier il a refusé tout net, alors je l’ai engagé dans l’Hydre comme bras armé

— Je vous connais mon prince, que cherchez-vous à faire de cet homme ?

Rhaegar demeura silencieux puis continua :

— Je sais ce que c’est d’avoir un parent terrible.

Jonothor se tut quand un des marins désigna l’horizon en criant.

— Voile ! Voile à l’horizon!

Rhaegar et Jonothor Darry virent un navire à l’est, toutes voiles dehors, et trois rangées de rames qui ressemblaient à des ailes gigantesques.

— Avec à peine cent vingt quatre guerriers, j’espérais ne pas voir de pirates, grommela le capitaine Darry.

— On n’a pas toujours ce qu’on veut dans la vie, répliqua Rhaegar avec gravité. Combien de temps avant d’atteindre Pentos ?

— Deux jours, peut-être trois si le vent tombe.

Il se retourna et s’adressa au hommes du pont.

— Allez chercher vos armes.

Rhaegar pénétra dans sa cabine et enfila une armure en cuir sous l’œil inquiet de Serala, cette dernière portait une robe bleu clair, et avait tressé ses cheveux en une natte qui pendait sur le côté. Le prince jaillit Noire Sœur de son fourreau et ressortit sans regarder son amante qui le suivait des yeux, mais elle l’interpela.

— Mon dragon ?

Rhaegar s’arrêta et la regarda avec un visage de marbre.

— Sois prudent. De tous mes amants tu es celui qui m’est le plus cher.

Rhaegar Targaryen lui sourit puis partit rejoindre ses hommes. Il monta en proue afin d’observer la trirème qui venait sur eux. Même à cette distance, il arrivait à discerner les combattants qui s’étaient amoncelés sur le pont. Il remarqua un bélier renforcé par du bronze et comprit aussitôt que si les rameurs allaient à la bonne cadence, un bélier comme celui-là pouvait éperonner n’importe quel bateau, même si l’Hydre était un navire qu’on aurait pu qualifier de navire de guerre. Jonothor Darry vint à ces côtés.

— Ils vont nous aborder avec des grappins.

— Je sais, dit Rhaegar gravement, ils veulent nous piller.

— Nous pouvons les distancer.

Rhaegar souleva Noirceur et porta son regard sur le pont de l’Hydre. À présent, ses hommes avaient revêtu leurs armures, et leurs visages étaient déterminés. Les archers escaladaient les gréements afin de se positionner au-dessus du pont, prêts à flécher l’ennemi.

L’Hydre changea de cap et fila vers l’ouest, puis vira de nouveau de bord. Au loin, deux nouvelles voiles étaient visibles. Jonothor jura.

— On ne pourra pas tous les affronter.

Rhaegar jeta un coup d’œil à la grand-voile et puis aux nouveaux navires.

— On dirait que ce ne sont pas les mêmes, fit remarquer Rhaegar. Ils sont plus gros. Et ils n’ont pas de rames. Ils louvoient face au vent. Si nous nous concentrons sur la trirème, ils ne pourront pas nous rattraper.

— Très bien mon prince, mais il n’empêche qu’ils sont deux fois plus nombreux que nous.

— Leur atout majeur ce sont les rames, exposa Rhaegar d’une voix décidée, nous allons les briser.

— Possible, admit le capitaine Darry, mais cela nous obligerait à être à portée de grappin. Et là, c’en serait fini de nous ; ils nous aborderaient.

— C’est nous qui allons les aborder, cracha Rhaegar.

Pendant un long moment, Jonothor regarda son prince, incrédule. Puis, poussant un juron, il tourna la barre. L’Hydre vira de bord en direction de la trirème.

 

Son nom était Bloss, mais aucun de ses hommes n’utilisait ce nom, quand ils lui adressaient la parole, ils l’appelaient Seigneur des Mers, tandis que dans son dos, ils utilisaient le surnom de Baleine Blanche. Car Bloss était si gros et si large d’épaules qu’il paraissait énorme. Il avait un grand cou et des yeux gris protubérants qui brillaient comme deux perles. Il ne souriait jamais. D’aucuns disaient qu’il aurait été originaire des ils du Basilic au sud de la mer d’Eté, et qu’il avait été un chef pirate pendant vingt ans. Aujourd’hui il était l’un des seigneurs corsaires les plus puissants de l’océan. On disait qu’il possédait plusieurs palais à Yunkaï, et qu’il était plus riche qu’un roi car cela se reflétait dans son apparence. Il portait un plastron d’argent forgé sur mesure pour quelqu’un de sa corpulence, le crâne rasé et des boucles d’oriel en diamant. Il possédait un sabre avec une poignée en ivoire et une garde en or. Bloss aimait jouer de cette apparence pour signifier son rang parmi les pirates, même les Greyjoy évitaient de naviguer sur son territoire.

Il se tenait à la poupe du bateau, tandis qu’on battait la cadence. Le martèlement régulier des tambours forçait les rameurs à accentuer leurs efforts, et si cela ne suffisait pas, un coup de fouet venait claquer sur le dos dénudé des lambins. En voyant le riche navire virer de bord pour venir vers le Briseur d’Os, il plissa ses yeux pâles.

— Qu’est ce qu’il fait ? demanda le géant Caspios.

Bloss leva les yeux vers l’homme.

— Il a vu les navires de Juma, et essaie de se faufiler entre nous. Il n’y arrivera pas.

Il se retourna vers le barreur, un petit vieux édenté nommé Uba, et réalisa que celui-ci avait déjà modifié le cap.

— Doucement, lui dit-il. Il ne faut pas l’éperonner.

— Oui, Seigneur des Mers.

— Préparez les grappins ! Beugla Caspios.

Le géant regarda les hommes attraper les rouleaux de cordes pour y fixer des grappins à trois crocs.

— Regardez, Seigneur des Mers ! dit-il en désignant la proue de l’Hydre

Il y avait un homme vêtu de noir qui s’y tenait debout ; il brandissait une épée au-dessus de sa tête en signe de défi.

— Ils n’arriveront jamais à couper toutes les cordes, déclara Caspios.

Bloss ne répondit pas – il scrutait le pont du vaisseau ennemi, cherchant une présence féminine. Il n’en vit aucune et son humeur s’assombrit. Pour compenser sa déception, il se remémora le dernier vaisseau dont il s’était emparé, trois semaines plus tôt, et de la fille d’un noble de Volantis qu’il transportait. Il se pourlécha les lèvres rien que d’y repenser. Fière, arrogante, belle – le fouet n’avait pas réussi à la dresser, les gifles non plus. Même après avoir été violée plusieurs fois, le meurtre brillait toujours dans ses yeux. Elle débordait de vitalité, pour le moins. Mais il avait réussi à trouver son point faible ; comme toujours. Le moment de la victoire, quand elle l’avait supplié de la prendre – elle lui avait promis de le servir pour toujours, de la manière qui lui plairait -, avait été jubilatoire. Mais la tristesse l’avait emporté, remplaçant la colère. Il l’avait tuée rapidement, au grand dam de l’équipage. Mais elle avait au moins mérité ça, pensa-t-il. Elle avait résisté pendant cinq jours dans les ténèbres de la cale, en compagnie des rats.

Bloss renifla et s’éclaircit la voix. Ce n’était pas le moment de penser  au plaisir. Il regarda la mer et aperçut des requins qui nageaient avec son navire, les vautours des mers ; il ne les aimait pas.

Le vent tourna, et l’Hydre oscilla comme une danseuse sur le sommet d’écume des vagues. Sur le pont du Briseur d’Os, des dizaines de guerriers étaient accroupis derrière le bastingage tribord. Les deux bateaux se rapprochaient. « Ils ne vont pas passer loin, pensa Bloss ; ils vont encore virer de bord et essayer de se dégager ». Anticipant la manœuvre, il aboya un ordre à Caspios qui était debout au milieu des hommes. Le géant se pencha par-dessus bord et répéta les instructions au maître rameur. Aussitôt, les rames tribord sortirent de l’eau, laissant les cent vingt rameurs bâbord continuer seuls leur effort. Le Briseur d’Os vira de bord.

L’Hydre prit de la vitesse et vira à son tour, mais vers la trirème. Sur la proue, le guerrier aux cheveux d’argent agitait toujours son épée en acier valyrien – et à cet instant précis, Bloss sut qu’il avait fait un mauvais calcul.

— Ramenez les rames ! hurla-t-il.

Caspios leva les yeux, étonné.

— Pardon, seigneur ?

— Les rames ! Ils nous attaquent !

Mais il était trop tard. Alors que Caspios se penchait pour gueuler ses ordres, L’Hydre passa à l’attaque, oscillant violemment vers le Briseur d’Os; sa proue heurta la première rangée de rames. Le bois se brisa brutalement dans une série de craquements assourdissants, entremêlés aux cris des esclaves que les énormes rames percutaient aux bras ou au crâne, aux épaules et aux côtes.

Des grappins furent lancés, et leurs crocs métalliques mordirent dans le bois ou se prirent dans les gréements de L’Hydre. Une flèche westerienne se planta dans la poitrine d’un corsaire ; l’homme tomba à la renverse, lutta pour se relever et s’écroula. Les corsaires tirèrent sur les grappins et les deux navires se retrouvèrent presque bord à bord.

Bloss était furieux. La moitié des rames tribord avaient été endommagées, et les dieux seuls savaient combien de rameurs étaient estropiés. À présent, le bateau allait être handicapé pour rentrer à bon port.

— Parés à l’abordage ! cria-t-il.

Au même moment, le guerrier aux cheveux argentés du vaisseau ennemi prit appui sur la proue et plongea sur les premiers rangs des corsaires qui attendaient leur tour. Bloss n’en crut pas ses yeux. Ce guerrier envoya valdinguer plusieurs hommes à terre, et manqua lui-même de tomber. Puis, il fit tournoyer son épée. Un homme hurla, et du sang gicla d’une terrible entaille à la gorge. L’épée se leva et s’abattit – et les corsaires reculèrent devant le guerrier qui avait visiblement perdu la raison.

Il les chargea, et son épée se fraya un passage dans leurs rangs. Un peu plus loin, sur le pont, d’autres corsaires essayaient désespérément de prendre pied sur le pont de l’Hydre, mais ils rencontraient une résistance féroce de la part des guerriers westeriens. Au centre du navire corsaire régnait le chaos. Un corsaire brandissant une dague incurvée arriva en courant dans le dos de Rhaegar pour le poignarder. Aussitôt surgit Sandor Clegane qui l’éventra avec son énorme estramaçon, puis le souleva et le jeta à la mer comme si il ne pesait rien.

Et maintenant, d’autres guerriers westeriens venaient rejoindre leur prince. Bloss jura et dégaina son sabre, puis sauta sur le pont en contrebas. Un homme, une épée à la main, lui fonça dessus ; il para l’attaque et envoya une riposte qui, si elle manqua le cou de son assaillant, lui ouvrit la joue de la pommette au menton. Le guerrier recula, et Bloss lui enfonça son sabre dans la bouche, jusqu’au cerveau.

Rhaegar Targaryen se débarrassa d’un corsaire et avança vers Bloss. Le capitaine corsaire bloqua un coup d’estoc féroce et tenta de riposter, mais il dut reculer car la lame de son adversaire faillit lui taillader le visage. C’était visiblement un maître d’armes.

Bloss fit de nouveau un pas en arrière et dégaina une dague.

— Tu es de Valyria ? demanda-t-il.

L’homme sourit.

— Tout à fait.

Un corsaire bondit sur le bretteur. Celui-ci se retourna d’un geste fluide et l’éventra, puis fit volte-face à temps pour parer un coup d’estoc de Bloss.

— Je suis Rhaegar Targaryen.

Bloss sourit cruellement.

— Le Dernier Dragon.

Bloss attaqua son ennemi avec un déchainement de coups tranchants, mais Rhaegar para chacun et dévia les plus violents vers les côtés, puis fit une pirouette et lança une contre attaque que Bloss bloqua avec son couteau, puis riposta avec une estocade que Rhaegar détourna avec Noire Sœur. Bloss poussa un hoquet et regarda la lame en acier valyrien traverser son plastron et lui transpercer l’estomac et les poumons. Une gerbe de sang jaillit de la blessure. Bloss tomba à genoux, en donnant un dernier coup de sabre. Mais ses forces l’avaient abandonné, et il tomba face contre pont.

Caspios  armé d’un marteau de guerre sauta sur Clegane au moment où son estramaçon venait de se coincer dans les côtes d’un corsaire. Sandor se baissa pour esquiver l’arme, et balança un crochet du gauche qui percuta le géant sous le menton. Tandis que celui-ci s’écroulait, Sandor dégagea sa grande épée et trancha la tête d’un autre corsaire qui lui fonçait dessus. Trois autres guerriers se ruèrent vers lui. Il para le coup d’épée du premier, puis il glissa sur le sang qui couvrait le pont. En tombant, il se jeta dans les jambes d’un autre adversaire, qu’il renversa. Il se tourna sur le dos et bloqua une épée qui plongeait vers lui, puis il taillada les jambes de l’homme.

Jonothor Darry armée d’une épée bâtarde se jeta sur les assaillants et trancha la gorge de l’un d’entre eux. Sandor Clegane se releva d’un bond. Rhaegar se tenait à sa droite, et l’homme d’équipage à sa gauche. Les corsaires foncèrent vers eux.

Sandor Clegane, Jonothor Darry et Rhaegar Targaryen se ruèrent en avant. Ensemble, ils firent des ravages dans les rangs des corsaires. Jusqu'à ce quelqu’un crie :

— Nous nous rendons ! Jetez vos armes, les gars ! Par pitié ! Nous nous rendons !

Tous les corsaires jetèrent leurs armes, puis Rhaegar se tourna vers Sandor qui nettoyait la lame de son estramaçon. Rhaegar s’approcha de lui : 

— Tu t’es battu avec courage, je te suis redevable.

Clegane le regarda un moment puis désigna les deux autres navires qui approchaient.

— Nous ferions mieux de couper toutes ces cordes avant que les autres bateaux n’arrivent.

Les westeriens qui se trouvaient sur le Briseur d’Os avaient eux aussi repéré les vaisseaux en approche. Devant des corsaires immobiles, ils tranchèrent les cordes des grappins et retournèrent sur l’Hydre. Sandor et Rhaegar traversèrent en dernier. Personne n’essaya de les en empêcher. Par contre le géant que Sandor avait assommé se leva, chancelant, et courut jusqu’au bastingage. Il sauta pour attraper le jeune guerrier défiguré, et atterrit au milieu d’un groupe de guerriers westeriens, les éparpillant.

— Ce n’est pas fini ! hurla-t-il. Affronte-moi !

L’Hydre s’éloigna doucement du vaisseau corsaire, et le vent s’engouffra dans ses voiles. Sandor laissa tomber son énorme épée sur le pont et marcha vers le corsaire. Ce dernier  qui faisait bien trente centimètres de plus que Clegane couvert de sang frappa le premier, d’une droite violente qui fendit la peau de Sandor au-dessus de son œil gauche. Ce dernier ne broncha pas ; tout en continuant à avancer sur son adversaire, il balança un uppercut furieux qui s’écrasa contre la cage thoracique du géant. Le corsaire grogna sous l’impact et défonça la mâchoire de Clegane d’un crochet du gauche ; il tituba, et l’homme en profita pour faire pleuvoir sur lui une pluie de coups, droites puis gauches. Sandor Clegane les encaissa et assena une droite de haut en bas à son adversaire, qui lui fit faire un demi-tour sur lui-même. Il enchaîna. Il frappa le corsaire jusqu’à ce que celui-ci tombe à genoux. Puis recula d’un pas et lui balança un coup de pied vicieux qui souleva presque le géant du pont. Ce dernier s’effondra, puis essaya de se relever, mais resta au sol, immobile.

Sandor s’écroula à son tour pendant que l’équipage scandait son nom, ce dernier les regarda surpris et dérouté, puis jeta un coup d’œil au prince Rhaegar qui souriait en hochant la tête avec fierté. Sandor Clegane, le Limier éprouva des sentiments étranges, il avait l’impression de voler sur un nuage, il se releva et accepta les tapes sur les épaules et les félicitations de l’équipage.

Et l’Hydre échappa à ses poursuivants.

Quant à Rhaegar il se détacha du groupe d’hommes rassemblés devant le bastingage et alla s’installer sur le pont, au milieu du navire. Il s’allongea et regarda les étoiles qui commençaient à briller. La nuit tombait et le prince ferma les yeux en adressant une prière aux morts,

 

« Mais les dieux nous écoutent-ils ? demanda-t-il, R’hllor nous accompagne-t-il dans notre deuil ? Et ce Dieu Noyé ? Ou les Sept ? »

Rhaegar en doutait.  

 

 

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