Game of Thrones : Fire and Ice.

Chapitre 45 : Le bûcher des sacrifiés. (Jon Snow)

2483 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 06/06/2019 11:34

CHAPITRE NUMERO QUARANTE : JON SNOW.


Jon toisait les nombreux monticules de corps que l’on avait placé au niveau de l’est de Winterfell. Tous reposaient sur des fagots de bois et l’heure approchait où le bûcher funéraire allait commencer. Parmi ses centaines de morts il y avait des visages familiers. Des êtres qu’il avait aimé et avec qui il avait combattu. Jon ressentait une vague de tristesse quant au fait que jamais plus il n’aurait la possibilité de s’entretenir avec ceux qui avaient succombé au cours de la bataille.

Une main réconfortante se posa sur son épaule. C’était Arya. La jeune femme paraissait comprendre sa douleur bien qu’Arya s’échinait à feindre l’impassibilité. Sansa était également présente, se dressant aux côtés d’un Limier qui paraissait rêver que d’une chose, se trouver ailleurs. Néanmoins Sandor Clegane avait décidé qu’il lui revenait de faire ses adieux à Béric Dondarrion.

Pour sa part Jon se devait de le faire mais pas pour une mais plusieurs personnes. Il y avait notamment Tormund, le sauvageon aux rires reconnaissables entre tous et qui plus jamais Jon n’en percevrait la tonalité si singulière. Des seigneurs Nordiens gisaient également parmi les victimes. Certains de ceux qui l’avaient proclamé roi avant de le désapprouver lorsque Jon avait décidé que Daenerys était sa reine et qu’il en serait ainsi pour le peuple du Nord.


Une soixantaine de soldats Immaculés attendaient, torche en main, qu’il leur lance le signal pour réduire à néant ces êtres qui peu de temps auparavant comptaient parmi les vivants. Le tribut qu’il avait fallu payer pour cette bataille était bien lourd et pourtant Jon était bien loin d’éprouver un sentiment de victoire.

L’ennemi était encore là, quelques part plus au Nord. Le Roi de la Nuit lui avait déjà prit des êtres chers et Jon avait conscience que le prix risquait encore de s’élever avant que l’humanité ne vienne à bout de l’armée des morts. Si tant est qu’une telle chose fut possible.


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La silhouette de Daenerys se découpait à un peu moins d’une vingtaine de mètres. Elle paraissait si fragile si ce n’eut été ses pupilles devenues bleues. Jon frissonna devant cette vision avant de resserrer son emprise autour de la poignée de Grand-Griffe.

Jon avait parfaitement conscience de ce qu’il avait à faire. Ce n’était pas pour autant que le geste qui l’attendait soit aisé à accomplir. Ça non. Il lui suffisait de se rendre compte à quel point il lui était déjà difficile d’avoir à toiser ce faciès à la chevelure dorée.


« Jon ! »


La voix parvint jusqu’à lui. Probablement sur sa droite mais le son lui parut si lointain que Jon n’était pas tout à fait certain de l’avoir entendu. Il s’en désintéressa pour se concentrer uniquement sur ce qu’il devait faire. Daenerys ne pouvait apparaître aux siens dans son état actuel. Elle qui avait tout sacrifié pour concourir à ses côtés dans la lutte contre le Roi de la Nuit.

Daenerys était venue à Westeros dans l’unique but de reprendre le trône qui avait appartenu à ses ancêtres. Et malgré tout il était parvenu à la convaincre d’y renoncer pour se consacrer uniquement à cette guerre qui menaçait l’humanité toute entière.

Et voilà que les Anciens Dieux paraissaient avoir décidé de sacrifier Daenerys qui ne réaliserait dès lors jamais son rêve. Jon sentit sa main droite trembler et il se força à se reprendre. Il ne devait pas faillir et pourtant une partie de lui se sentait coupable. Sans son intervention jamais Daenerys n’aurait succombé ici. Elle serait probablement à l’abri derrière les murailles de la capitale.

De plus sans Jon, jamais Viserion n’aurait été tué au-delà du Mur puis ramené par le Roi de la Nuit et la bataille qui avait éclaté à Winterfell ne se serait probablement jamais produit ou tout du moins pas dans l’immédiat. Il avait enchaîné les mauvaises actions et aujourd’hui il en payait le prix.


« Jon, répéta Arya en lui attrapant le bras armé. »


Jon le sentit, Arya s’échinait à vouloir toute son attention. Il ne pouvait pas la lui accorder. Daenerys seule importait. Il avait perdu Tormund et à présent il allait devoir libérer cette femme qu’il avait peu à peu apprit à aimer et ce avant que la vérité sur ses origines n’éclate.

En un sens Jon se surprit à éprouver un sentiment de soulagement quant au fait que Daenerys n’ait pas à découvrir que Jon était l’héritier du Trône de Fer et lui-même n’aurait pas besoin de chercher à la rassurer au sujet de son non désir de devenir souverain. Tout comme il se consolait d’échapper à choisir si oui ou non il pouvait surpasser sa filiation avec Daenerys et se contenter des sentiments mutuels qu’ils avaient l’un pour l’autre.


Une fois de plus Arya voulut le forcer à se concentrer sur elle. Jon l’ignora, concentrant son attention sur le geste qu’il allait bientôt devoir accomplir. Il le redoutait tant que durant une fraction de seconde il fut sur le point de craquer et de laisser sa petite sœur l’accomplir à sa place. C’était là une idée si égoïste qu’il la chassa aussitôt de son esprit.

Daenerys n’était plus qu’à quelques mètres. Que la peau de son visage lui paraissait diaphane. Avait-elle toujours été aussi pâle ? Voilà qu’il ne pouvait jurer de rien. Tout ce qu’il pouvait affirmer c’est que les yeux rieurs lors de leur moment intime avaient laissé place à cet éclat froid et sans aucune émotion.

Jon leva Grand-Griffe. Le mieux qu’il pouvait faire était de l’enfoncer le plus rapidement dans le cœur de Daenerys. Ainsi tous deux souffriraient-ils moins, Jon n’aurait pu l’affirmer.

Et finalement le couple parvint l’un en face de l’autre, un pas suffirait pour combler le peu de distance qui les séparait toujours. Jon se devait de frapper maintenant, surtout ne pas faillir.


« Jon ouvre les yeux, elle n’est pas… . »


La peur était clairement perceptible dans les intonations de la jeune Stark. Malgré tout Jon avait la nette impression qu’Arya ne craignait pas que Jon soit blessé mais qu’il fasse du mal à une tierce personne. Comment pouvait-elle croire cela ? Il voulait simplement libérer Daenerys de cet état de spectre et il se devait de le faire avant qu’aucun de ses proches ne réalisent ce qu’elle était devenue.

Le spectre devant lui leva les bras. Allait-il l’attaquer ? Des flashs le prirent où il se revit sur le bateau lors de leurs premières étreintes et où la passion avait dépassé toute raison.

Les mains se posèrent sur son visage. Qu’elles étaient froides ! Pire que de la glace lui dictait son esprit. Il avait la confirmation que la vie avait quitté ce corps. Il sentit sa vision se troubler et il hésita à porter le coup qui délivrerait la jeune femme.

Les doigts sur son visage formèrent des caresses ce qui l’étonna un peu. Comment un spectre pouvait-il effectuer de tels gestes ? C’étaient si incongru qu’il y vit là de la malignité du Roi de la Nuit pour le forcer à échouer dans sa mission.

Une voix s’éleva. Elle ne provenait pas d’Arya mais de Daenerys. Le souffle qui en émana était chaud et doux à la fois. Jon cligna plusieurs fois des paupières tout en secouant mentalement sa tête. L’iris de Daenerys parurent se modifier, reprenant une teinte normale. Avant de virer une fois de plus au bleu typique des spectres.

Que venait-il d’arriver ? Avait-il halluciné ? Était-ce une façon à lui de renier la vérité sur le trépas de Daenerys ? Non c’était autre chose. Une chose que son propre corps s’escrimait à lui faire comprendre. Tout comme le ton de supplique d’Arya avait tenté de lui faire réaliser. Tout comme ses doigts chauds sur son faciès.

Et lorsque la lumière se fit il laissa choir Grand-Griffe dans la neige et il s’empara du visage de la jeune femme à la chevelure argentée. La terreur l’avait gagné tout entier alors qu’il réalisait petit à petit qu’il s’était fourvoyé et qu’il ne s’était fallu d’un rien pour qu’il n’élimine lui-même Daenerys Targaryen.


« Jon, marmonna celle-ci. Jon… . »


A bout de force, elle s’écroula dans ses bras et Jon demeura dans cette position pendant un peu plus d’une minute. Toujours abasourdi par la façon dont les choses s’étaient déroulées. Comment tout ceci avait-il pu être ? Une réponse lui vint, le Roi de la Nuit l’avait probablement manipulé, d’une manière ou d’une autre, pour l’inciter à tuer celle qu’il aimait. Ce qui en disait long sur le pouvoir de son adversaire. Et ce constat n’avait absolument rien de rassurant.

Soutenant toujours Daenerys, il caressa les cheveux de cette dernière, soulagée qu’elle fut toujours vivante. La soulevant en suivant, elle qui était si légère, Jon fit face à Arya qui paraissait assez méfiante à son égard.


« Tout va bien, lui déclara-t-il. Tout va bien. »


Mais était-ce réellement le cas ? Si vraiment le Roi de la Nuit possédait la capacité de manipuler qui que ce soit alors qui sait ce que son adversaire lui dicterait de réaliser la prochaine fois ? Était-il condamné à devenir une menace pour ses proches et ce sans qu’il ne puisse y faire grand-chose ? Jon devait s’en ouvrir auprès de Bran, dont ses dons pouvaient peut-être lui permettre d’y voir plus clair. En attendant il lui faudrait rester le plus vigilant possible afin d’éviter de reprendre conscience de lui-même auprès d’un corps dont il n’aurait pas le souvenir d’avoir porter le coup fatal.


« Retournons auprès des nôtres, fit-il néanmoins à l’intention de sa sœur Arya. »


La cadette des filles Stark approuva par un hochement de tête. Il paraissait malgré tout évident qu’elle garderait un œil sur sa personne. Jon ne s’en formalisa pas, secrètement soulagé que ce fut le cas. Puis le trio, Daenerys étant inconsciente, s’éloigna de cette zone de combats.


********************


Jon sentit une main se refermer sur sa pogne droite et il serra ses doigts délicats et chauds. Tournant légèrement la tête, il put voir le sourire de Daenerys, un sourire où se percevait néanmoins de la tristesse quant à la perte de centaines d’hommes qui l’avaient suivi depuis Essos, notamment le commandant de ses armées Ver Gris.

De tous ses fidèles, seul demeurait Jorah Mormont. La mine taciturne de ce dernier était semblable à celle de sa nièce qui se tenait auprès de lui. Nombreux étaient les soldats de l’Île aux Ours qui avaient succombé au vue de l’écusson qui se voyait sur l’armure de plusieurs corps qui attendaient d’être réduits en cendres.

Il décida qu’il était alors grand temps de donner le signal aux Immaculés et ceux-ci placèrent les torches entre les fagots. Moins d’une minute plus tard plusieurs brasiers s’animèrent de flammes écarlates et la chaleur qui s’en dégagea chassa le froid de l’hiver qui continuait de régner sur le nord de Westeros.


Jon se mit à réfléchir sur leur situation actuelle. Le conflit contre le Roi de la Nuit était loin d’être terminé et ils avaient encore le cas de Cersei qui les préoccupaient tous puisque cette dernière pouvait à tout moment œuvrer contre eux ce qui rendraient dès lors leur situation plus que critique si les morts venaient à frapper une fois de plus.

Que leur faudrait-il faire pour y remédier ? Existait-il seulement une possibilité pour eux de venir à bout et du Roi de la Nuit et d’une Cersei devenue plus forte encore depuis que Jaime Lannister avait avoué que sa sœur possédait à présent les hommes de la Compagnie Dorée.

Jon pensa à Jaime Lannister, depuis que celui-ci leur avait communiqué cette information au sujet de Cersei il croupissait dans les cachots sous Winterfell. Une décision prise par Jorah Mormont qui était devenu le nouveau commandant des armées de Daenerys.

Cette dernière avait approuvé le geste de Jorah mais était encore trop faible pour se confronter au meurtrier de son père. Seuls l’intervention de Tyrion et de Jon avait valu que Jaime puisse avoir droit à son procès auquel cas son corps aurait déjà été débarrassé de son chef. Et même si pour l’heure la reine Targaryen toisait la dépouille de Ver Gris avec des larmes dans ses yeux clairs, Jon ne pouvait s’empêcher de se remémorer l’éclat de colère et de vengeance qu’il y avait décelé lorsqu’on lui avait fait part que Jaime Lannister avait été placé aux arrêts et qu’il se tenait désormais dans les souterrains sombres de Winterfell.

Daenerys était pressée d’affronter Jaime et il paraissait évident qu’elle connaissait la sentence qu’elle prononcerait contre le principal intéressé. Ce côté impulsif et vengeur ne rassurait pas Jon qui, sans qu’il ne sache d’où pouvait lui venir cette conviction, avait la sensation que la jeune femme en était à un tournant et que leur relation était sur le point de changer.

Malgré tout une partie de lui était persuadé qu’il lui fallait s’ouvrir auprès de Daenerys et lui déclarer quel était son secret. Le ferait-il toutefois ? Voilà qu’il en était de moins en moins certain, puisque si Jaime venait à être condamné à mort pour son geste, qui sait ce que Daenerys pourrait bien faire en réalisant qu’elle était loin d’être la prétendante légitime au Trône de Fer.

Et bien que les doutes continuaient inlassablement de le hanter, Jon ne lâcha pas la main de la jeune femme, resserrant au contraire son emprise autour de ses doigts fins qui s’enlaçaient aux siens. Et dans le silence qui régnait alors seuls les crépitements de flammes et des corps qui brûlaient vinrent troubler cette période de deuil.




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