La fin d\'un équipage
Dans un effort surhumain, je me saisis du Wado Ichimonji qui gisait non loin de moi. Pardonne-moi Zoro, mais dans ton état, cela m'étonnerait que tu puisse me sermonner. Je relevai la tête de façon à pouvoir observer ses gestes. Cependant, mon regard s'attarda sur ses yeux cruels qui me fixaient avec un plaisir malsain. Le sang dans ma bouche sembla se transformer en un brasier éclatant prêt à tout ravager sur son passage. Je ne sais quelle force me permit de me lever à cet instant, mais je me retrouvai debout, le dos voûté et empoignant le katana dans une position pitoyable. Mais debout, en vie, et plus déterminée que jamais à tuer le démon qui me faisait face. Je resserai mon étreinte sur l'arme et maîtrisai non sans peine mon souffle saccadé. J'avançai d'un pas; ma jambe sembla exploser. Je ne pus retenir un gémissement, pour le plus grand plaisir de mon bourreau. Celui-ci écarta les bras et partit d'un rire puissant, mauvais. Ce son s'insinua dans mon cerveau, pour s'infiltrer dans mon sang et terminer sa course dans les muscles de mon bras valide, qui se souleva de lui même, portant le Wado Ichimonji à hauteur de mon visage. Désolée, Zoro, tu ne vas pas apprécier. Je lançai le katana. Il tournoya dans les air, aussi fragile qu'un bout de bois, et sectionna le bras de Teach au niveau de l'épaule, dévoilant ses os, muscles, et son sang, qui inonda la plaie. La douleur se lit sur son visage, mais je ne reconnus nulle trace d'inquiétude. C'est en croyant avoir des hallucinations que j'en compris la cause : la partie de son bras qui avait été séparée de son corps rampait sur le sol, attirée par le moignon sanguinolent. Les fils de muscles arrachés se rejoignèrent, le sang rejoint les artères, les cellules se reconstituèrent, et la seule trace restante de mon acte désespéré fut les poils qui eux ne s'étaient pas rétablis. Ma cause me sembla soudaine vaine, si vaine qu'un rire nerveux s'écappa de mes lèvres. Quelle sotte je fut pour avoir cru pouvoir tuer un homme qui avait envoyé en enfer la totalité des pirates au chapeau de paille. Je tombai à genoux. Des sanglots et des larmes de désillusion se mélangèrent au sang qui s'évadait de ma bouche.
_Luffy...qu'est-ce que je dois faire?
Fuis. Sauve ta vie. La voix de mon capitaine me murmurait ces conseils à l'oreille.
_Mais...
Fuis. Sauve ta vie. C'était à présent la voix rassurante de Zoro qui me disait de les abandonner.
_Je ne peux pas...vos corps, ils...
FUIS! Tu ne peux pas gagner! Pour perpétuer la mémoire de l'équipage...FUIS!
Ce fut comme un éléctrochoc. Les voix en choeur de mes compagnons me portèrent. J'oubliai la douleur dans ma jambe et tournai le dos à notre tortionnaire. Sans lui laisser le temps de comprendre, je pris la fuite. Ma seule volonté m'attirait vers...à vrai dire, je n'en savais rien. Je laissais mes amis me guider. Je ne pensais qu'à eux, à leurs visages, à leurs voix. Je ne regardais pas où j'allais. Je fuyais. Mes cheveux fouettaient mon visage et la pluie se mêlait à mes larmes, ma jambe et mon bras me faisaient atrocement souffrir, le sang me laissait un goût de fer dans la bouche, mais j'étais en vie, et je courais. Ma vue devint floue et je ne vis plus devant moi. Je trébuchai sur une branche, et ce fut ma tête qui amortit le choc. Mais je me relevai et continuai ma course. C'est alors que je sentis un froid étrange sur mes pieds nus. J'avançai plus prudement et reconnus la sensation de l'eau salée sur mes chevilles. J'étais sauvée. Mes sanglots repartirent de plus belle. Je plongeai dans l'océan et nageai. J'eus l'impression que le sel arrachait ma jambe et mon bras et des picottement désagréables vinrent envahir mon corps tout entier. Mais j'étais sauvée. Une fois assez loin de la côte, je marquai une pause. Je m'étendis sur la mer et obsevai le ciel à présent dégagé. Je sentis à nouveau les larmes me brouiller la vue. Ma gorge se contracta et je laissai s'échapper un cri sauvage. Animal.