JoJo's Bizarre Adventure : Lost Baby
Chapitre 38 : A Picture of Home & A Kiss From a Rose
3250 mots, Catégorie: T
Dernière mise à jour 23/03/2024 17:49
Depuis le sommet d’un des bâtiments délabrés, Batya scrutait de ses jumelles l’appartement de la manieuse qu’elle avait mis hors d’état de nuire quelque jours plus tôt dans la ménagerie du Jardin des Plantes. Elle respectait la promesse qu’elle avait faite à Monsieur Polnareff de surveiller Adam peu importe où il se rendait (même si c’était dans la gueule du loup le plus souvent).
Batya : Je ne sais pas si je vais devoir intervenir. D’un côté, leur ennemi est particulièrement dangereux mais de l’autre, j’ai la curieuse impression qu’ils maîtrisent la situation. Cette détermination…Je l’avais déjà ressenti quand ils avaient affronté cette fille aux confiseries.
Elle ramassa un prospectus qui s’était collé sous sa botte et le regarda quelques instants. Il représentait une femme les cheveux au vent, faisant face à la caméra. Ses yeux rubis scintillaient tant que Batya avait l’impression que le papier lui-même conservait une partie de l’âme de la mannequin.
Batya : Leurs vies sont en danger, si je n’interviens pas, ils mourront. S’il leur arrive quelque chose, Monsieur Polnareff ne me le pardonnera pas. Je vais utiliser mon Stand pour -
Son souffle fut coupé par la surprise. La fenêtre qu’elle surveillait depuis plusieurs minutes avaient totalement disparu ou plutôt, elle était incapable de déterminer de laquelle il s’agissait. Son esprit se perdait dans la multitude d’ouvertures du bâtiment et, peu à peu, l’immeuble lui-même se déformait et semblait gagner de nouveaux étages jusqu’à atteindre le ciel, aspiré par la voûte céleste.
Batya : Il ne faut pas que je panique. Il s’agit sûrement d’une attaque de Stand. Peu importe sa puissance, ma capacité le surpassera sans problème. Il me suffit simplement de trouver le manieur.
Elle chercha la fenêtre vainement en tournant son regard dans toutes les directions jusqu’à repérer une silhouette se tenant derrière elle, silencieuse. Elle était enveloppée d’un long manteau noir et portait un masque menpō et un casque de samourai kabuto qui ne laissait voir que des yeux d’un rouge sang. Il ne bougeait pas d’un millimètre comme une présence fantomatique qui viendrait persécuter les mortels.
Batya : Te voilà. Je vais t’annihiler et retourner à mes affaires au plus vite. Picture of Home !
Un Stand apparut à ses côtés dans un éclair blanc semblable au flash d’un appareil photo. Il s’agissait d’une silhouette semblable à un pantin dont le visage reprenait les éléments d’un polaroïd. Ses jambes étaient recouvertes d’un motif constitué de quadrillages colorés de trois couleurs : rouge, vert et bleu. Le mot “Technicolor” était inscrit sur sa ceinture. La manieuse sortit une photo de la poche de sa veste et commença à la secouer pour faire apparaître l’image.
Batya : Picture of Home : Shake it off ! Pluie de couteaux !
De l’image maintenant nette qu’elle tenait, sortit un torrent de couteaux qui se rua vers l’ennemi comme une nuée d’insectes sur un champ. La silhouette masquée esquiva les projectiles par la droite à une vitesse surnaturelle tandis que Batya attrapait l’appareil qui pendait à son cou. Elle l’enclencha et, quelques secondes après, une impression sortit de l’avant.
Batya : Picture of Home ! I Palindrome I !
Elle leva le bras en tenant l’image entre son majeur et son index. Son Stand qui planait derrière elle l’attrapa. En une fraction de seconde, la photo lévitait entre les paumes du pantin qui se rapprochait pour l’écraser. La photo se plia dans le sens de la longueur en un geste agile.
Batya : Pour le reste du monde, les couteaux ne seront que d’un côté mais pour toi qui est piégé dans le royaume symétrique de mon Stand, l’attaque couvrira les deux côtés.
La silhouette partit vers le centre comme esquivant des attaques invisibles. Il se dirigeait désormais vers la photographe qui ne put s’empêcher de laisser échapper un rictus de satisfaction.
Batya : Comme tu es prévisible.
Picture of Home : DOWADOWADOWADOWADOWAAAAAAAA !
Les impacts se succédèrent comme les flashs des paparazzis lorsqu’une star hollywoodienne apparaît au Festival de Cannes. La douleur était sans doute l’émotion qui plaisait le plus à Batya. Là où la plupart des autres sentiments n’étaient associés qu’à un nombre limité d'expressions, la souffrance en développait sans cesse de nouveaux mots comme un livre écrit par un auteur immortel. Elle avait déjà pensé à enlever un passant et à l’enfermer pour pouvoir expérimenter toutes les tortures du monde et découvrir toutes les couleurs que prenait le désespoir. Cependant, est-ce qu’un oiseau en cage chante aussi bien que celui qui vole tous les jours ? Est-ce-qu’en créant cette douleur de toute pièce, elle ne travestissait pas cette source d’inspiration ? Ne blasphémerait-elle pas son art en n’agissant comme un vulgaire faussaire ? La photographe serait probablement contrainte de profiter des rares moments où son corps ou celui de ses ennemis chanterait le récital électrique de la souffrance. Quel gâchis que son ennemi se cache ainsi derrière un masque de métal. Aucun moyen de profiter de l’instant.
Picture of Home : DOWANO !
La silhouette s’écroula d’un seul coup comme dans un geste inhumain. Cela ne surprit pas la manieuse du Stand photographe : après tout, tous les os de son corps devaient être réduits en bouillie à l’heure actuelle. Cependant, quand elle regarda ses poings, elle ne trouva malheureusement pas une splendide teinte brune momie issue du mélange des tissus et des os. C’était une étrange peinture multicolore, semblable aux reflets que font les rayons du soleil au contact de l’essence. Son ennemi s’était joué d’elle. Elle se retourna mais il était déjà trop tard. La peinture avait coulé derrière son dos et s’était matérialisée sous la forme d’une silhouette tout à fait similaire mais dépourvue de masque et de visage. Elle tenta de fuir mais la bête de pigments parvint à lui asséner deux coups qui tranchèrent sa jambe et son bras droits. La silhouette s’agenouilla et lui dit d’une voix inhumaine, semblable à la superposition de centaines d’autres.
Silhouette : Reste en dehors de tout ça ou je serais obligé de te tuer.
Son corps amputé traînait là sur le bord de cet immeuble et son sang se mélangeait à la peinture de son ennemi. Bientôt, ce même mélange, sous l’impulsion du monstre auquel elle faisait face, la guida lentement et inexorablement vers le vide. Son esprit ne songeait pas à la douleur, elle pensait seulement à cette énigme : S’il s’agissait d’un Stand et non d’un manieur, pourquoi prenait-il la peine de porter un masque pour dissimuler son visage ? C’était sa seule préoccupation tandis que sa silhouette mutilée plongeait vers le sol.
***
Adam : Sérieusement, quelques centimètres, saloperie…C’est tout ce qu’il me manque !
Adam tentait toujours d’atteindre la commode avec le crayon salvateur. Il gâchait de précieuses secondes, l’image liée au nombre “60” avait déjà été aspirée et celle du nombre “70” n’allait pas tarder à émerger du bras de celle qui n’avait plus l’apparence de son âge. Il était difficile de croire que cette femme était une petite fille quelques secondes plus tôt. Il rentrait dans un moment clairement critique et il savait que Shizuka n’en avait plus pour très longtemps. Son cerveau traversait la liste des options à sa disposition encore et encore mais, sans allonge supplémentaire, impossible de faire quoi que ce soit. Jusqu’à ce que, dans un coin reculé et abandonné de son esprit, dans un tiroir mental couvert de toiles d’araignée et recouvert de poussière, une idée, à première vue stupide, lui vint à l’esprit.
Adam : Mon dieu, mon corps va regretter pendant des jours ce que mon cerveau s’apprête à lui faire endurer. Butterfly ! Déboite-moi l’épaule.
D’un mouvement de poignet, le Stand enroula son pendule autour de son poing et frappa de toutes ses forces sur l’épaule de son manieur qui se mordit les lèvres jusqu’au sang pour ne pas crier. L’allonge supplémentaire lui permit de renverser la commode et tous les produits de beauté se renversèrent. Au milieu des grains de poudre et des rouges à lèvres qui virevoltaient dans les airs, il repéra le crayon que son Stand attrapa et lui jeta avant que la deuxième vague de douleur se fasse ressentir.
Adam : Je me souviens maintenant…Pourquoi je m’étais juré de ne plus jamais faire ça…Mais me déboiter simplement l’épaule n’aurait pas suffi…Il fallait que je brise tous les os… et que je déchire tous les muscles… de mon bras… pour que je gagne assez d’allonge… Bon sang, ça fait encore plus mal que la dernière fois ! C’est allé jusque dans mes côtes…J’en ai trois…non…quatre de cassés !
Il prit le crayon et griffonna, avec sa main encore fonctionnelle, sur la zone déchirée pour faire apparaître le message. Malgré tous ces mouvements qui traçaient des traits chaotiques sur le papier, le seul motif qui se dessinait était l’incompréhension sur son visage.
Adam : Non…Non…NON! Par pitié, on a pas pu faire tout ça pour rien ! Qu’est-ce que je peux faire…Je dois tenter de rentrer des combinaisons au hasard avec mon Stand…Si j’y mets toutes mes forces, je pourrais sûrement en tester au moins une dizaine dans les 10 prochaines secondes…
Il tenta de se relever mais en vain : un frisson paralysant lui parcourait les omoplates se propageant comme une fissure sur un lac gelé.
Adam : Nom de dieu…Mon corps ressent encore les effets de mon Stand. La fissure est en train de se propager…Si elle continue comme ça, elle va me briser la nuq-
La douleur devenait trop intense. De sa gorge, ne sortaient que des bruits étouffés comme si sa voix s’était éteinte. Il était à moitié conscient, les dents serrées et les muscles tendus par le séisme qui traversait son être. Sa vision se floutait peu à peu et il commençait à ne plus distinguer la silhouette agonisante de celle qu’il n’avait pas réussi à sauver. Il sentait que sa gorge se serrait comme pris dans une étreinte terrible. Adam sentait comme des dizaines d’aiguilles lui perforer le cou.
Adam : Q-Qu…oi…?
Il avait réussi à articuler cette simple syllabe avec le peu de force qui lui avait été soudainement rendue. Il put réaliser que la situation avait évolué en quelques secondes. Une vieille femme inconnue se tenait devant lui et décorait son cou d’un collier d’épines.
??? : Ça ne te soignera sûrement pas totalement mais ça empêchera ta nuque de se briser….
Il réalisa soudainement que la totalité de son corps était recouvert des mêmes épines qui portait, par endroit, de magnifiques roses allant du noir au blanc en passant par le rouge ou le bleu.
Adam : Q-Qui…ê-êtes-vous…vous ?
??? : Moi ? Je suis celle qui arrive quand tout semble perdu…C’est ça la méthode Shizuka Joestar. J’imagine que je me bonifie avec l’âge héhéhé.
Le bras de la fillette que le Stand ennemi avait déguisé en grand-mère était entouré d’épines roses. Elles étaient reliées à celles recouvrant le corps d’Adam. Au-dessus d’une gravure de “80”, se tenait une des images représentant une vieille femme sur une chaise à bascule en train de lire paisiblement un livre au coin du feu. La photographie était prisonnière du nouveau pouvoir de la jeune fille bien que le coffre tentait en vain de l’aspirer.
Shizuka : Pour aspirer les années de vie, le Stand du coffre aspirait les sources d’énergie vitale du corps.
L’énergie vitale est un concept qui suppose que la vie est animée par un flux qui est partagé par tous les êtres sur Terre. Il se retrouve dans de nombreuses civilisations très différentes allant des Inuits (où il est qualifié de “Silla”) à l’Inde (“Prâna”) en passant par la Grèce Antique (“Pneuma”) ou par l’Océanie (“Mana”). Elle est à l’origine de la plupart des cosmogonies et du lien entre l’Homme et le reste de la nature.
Adam : Qu’est-ce que c’est…que ce nouveau pouvoir… que tu as ?
Shizuka : Ah ça ? Je te présente “Kiss From a Rose”, visiblement c’est une nouvelle capacité de mon Stand. Elle me permet de faire éclore des fleurs sur une personne. Cependant, elle fonctionne à l’opposé des fleurs classiques : là où les autres puisent de l’énergie dans le sol pour pousser, celles-ci transmettent de l’énergie vitale à ceux qui sont en dessous. C’est un peu long mais ça permet de soigner les blessures plus vite que ton Butterfly !
Grâce aux effets de Kiss From a Rose, Adam retrouvait peu à peu ses forces et arrivait à articuler ses pensées bien que son cerveau avait toujours beaucoup de mal à comprendre la situation qui se jouait sous ses yeux.
Shizuka : Il est arrivé quand je sentais que je n’avais plus de force comme pour me pousser à continuer de vivre et de ne pas abandonner. J’ai senti ce que tu m’avais expliqué : cette détermination qui éclot au fond de son âme.
Adam : Il faut toujours qu’on trouve ce code !! On peut pas rester attaché à ce coffre et nous laisser mourir de faim !
Shizuka : Oh justement ! Il fallait que j’essaye un truc ! Alors, 3, 9 et un autre 3 et…
Elle utilisa ses épines pour tourner la grande roue qui se trouvait de l’autre côté du coffre. À la fin du tour complet, un clic de délivrance se fit entendre, signe que leur enfer était terminé.
Adam : Comment tu as trouvé ça ?!
Shizuka : C’est grâce à toi ! Tu sais, en disant que le coffre voulait dissimuler sa faiblesse. J’ai compris que la lettre cachait quelque chose ! Mais j’ai compris que le code n’avait jamais été écrit ! Enfin, pas explicitement… Il s’agissait d’une énigme !!
Adam : Une énigme ? Qu’est-ce que tu racontes ?
Shizuka : C’est simple, la lettre disait “Thank you Abigaïl-San pour cet achat”. Pourquoi “Thank you”?
Adam : Parce que son auteur est étranger et mélange les langues ?
Shizuka : J’y ai pensé mais le reste était écrit dans un français parfait et les messages enregistrés également. Donc les termes choisis devaient avoir une importance. C’était suivi par “Voici le code!”. Bien sûr, cela pouvait parler de la suite qui était déchirée mais cela pouvait aussi signifier la phrase précédente !
Adam : Mais comment tu sors des chiffres d’une phrase aussi anodine ?
Shizuka arbora un sourire de malice sur son visage qui reprenait peu à peu ses traits d’enfant.
Shizuka : Souviens-toi, l’entreprise qui a produit le coffre était japonaise : si on le prononce à la française, on ne voit rien de particulier mais, dans cette langue, on prononce “Thank” en “San-Ku” et devine quoi : “San” signifie “trois” et “Ku” signifie “neuf” ! Et pour le dernier chiffre, il suffisait de convertir le deuxième “San” après “Abigaïl” et le tour était joué !
Les chiffres et les langues sont historiquement très liés et les mathématiques ont beau paraître universelles au premier regard, la culture joue un rôle clé dans leur interprétation. La façon de considérer les chiffres a toujours été très différente en fonction des civilisations. Par exemple, les sumériens avaient pris l’habitude de compter en “base 60” contrairement à notre base 10. Ils comptaient les phalanges sur une de leurs mains en excluant celles du pouce pour atteindre douze et, sur l’autre, les douzaines avec chaque doigt ce qui donne bien cinq douzaines soit 60. Nous avons hérité de ce système bien particulier à travers les degrés d’un cercle en géométrie et le nombre de minutes dans une heure. Les celtes qui peuplaient la France avant les Francs, quant à eux, comptaient sur les doigts de leurs pieds et de leurs mains ce qui donne 20 plutôt que 10 qui est repris en français avec le nombre “quatre-vingts”. Grâce à ses origines japonaises, Shizuka a pu résoudre cette énigme avec brio, là où la plupart des autres auraient échoué.
Adam : Mais c’est extrêmement ingénieux ! Bien joué, tu m’impressionnes ! En essayant de détruire le coffre, j’ai commis une erreur que l’univers m’a fait payer. Nous avions face à nous un jeu que le destin nous faisait affronter et, en voulant annihiler l’adversaire, nous commettions une des trois tares : la tricherie !
Shizuka : D’où le fait que j’ai essayé de le battre à la loyale ! Finalement, tes leçons m’avaient mâché le travail.
Adam : Encore bravo mais il faut que je garde le rythme sinon je risque de me faire dépasser par ma propre élève hahaha !
Dans la Mystery, bien plus loin, un colosse se tenait assis sur un des sièges arrières en jouant avec le collier qu’il portait autour du cou et souriait dans l’ombre. Son Stand bleuâtre se tenait derrière lui comme un garde du corps fantomatique.
Job : Effectivement, il va vous falloir conserver le “rythme” si vous voulez rester au niveau.
Nom du Stand : 『Picture of Home』(ピクチャー・オブ・ホーム)
Nom du manieur : Batya Amon Düül
Picture of Home est lié aux photographies instantanées que prend sa manieuse et son effet diffère en fonction de la cible prise en photo :
-Si la cible prise en photo est un objet, elle peut conserver la photo et utiliser sa capacité “Shake it off” qui lui permet en secouant l’image de faire sortir une ou plusieurs copies de l’objet photographié.
-Si la cible prise en photo est une personne, le pouvoir “I Palindrome I” s’active et elle est piégée dans un monde qu’elle est la seule à voir et elle est la seule à ressentir les changements par rapport au monde réel. Le Stand peut plier la photo, le monde parallèle est alors modifié et devient symétrique en suivant le pli comme axe (tous les éléments d’un des côtés sont donc transposés à l’autre comprenant les projectiles, les bâtiments…). Ce pouvoir peut très bien être utilisé sur la manieuse si elle le désire en se prenant elle-même en photo.