L'Ecrin des illusions

Chapitre 25 : Hurle-au-Vent (deuxième partie)

4614 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 22/04/2024 11:45

Note : il s'agit de la deuxième partie du chapitre 25


Hazel et Seren tombèrent dans un étang couvert de nénuphars pourrissants. Hazel regagna la berge. Elle se redressa, frissonnante, un épais brouillard entourait le manoir et la forêt le protégeait de sa barrière impénétrable. Seren essora son pull mouillé et s'approcha d'elle.

- Hazel, tu as des sangsues.

Elle baissa la tête et aperçut les petites bêtes immondes s'agrippant à ses vêtements. Seren se saisit de sa baguette et d'un sort, fit tomber les petites sangsues. Hazel clopina jusqu'à une souche, s'y assit afin de retirer ses souliers remplis d'eau. Un poisson sortit de sa chaussure et vint agoniser sur le sol gelé, dépourvu d'herbes. Seren s'assit à son tour, sans proférer le moindre mot, plongé dans des pensées que la jeune sorcière devina bien moroses. Elle se rapprocha de lui, il refusait de la regarder.

- Je suis désolé, j'aurais dû... J'ai essayé de te le dire, mais...

Il s'interrompit, guettant sa réaction.

- J'avais peur de gâcher notre amitié, avoua-t-il d'un ton coupable.

- Tu sais, répondit enfin la jeune sorcière, si je l'avais découvert quelques mois plus tôt, je ne te l'aurais jamais pardonné... Si j'ai appris quelque chose cette année, c'est que rien n'est vraiment tout blanc ou noir. Tu es mon ami, Seren... Tes parents ont tué le père et le fiancé de Morgan mais toi, tu n'as rien à voir avec cette histoire.


Elle avança ses doigts vers lui et serra sa main gigantesque dans la sienne. Les doigts du Serpentard se replièrent contre les siens. Hazel releva la tête : un rayon de soliel se mit à jouer avec les cheveux de Seren, le nimbant d'un halo lumineux, seule source de lumière chaleureuse dans ce tableau désolé. En dépit de ce qu'il croyait sur lui-même, Seren était un être solaire, qui n'avait pas de secret pour elle. Il était honnête et entier et ne se parait pas des voiles obscures du mystère. Tout lui paraissait si simple quand Seren était à ses côtés.


Les deux sorciers jetèrent un regard à l'écharpe inanimée flottant sur l'étang. Seren voulut se lever pour aller la chercher, mais Hazel l'en empêcha. Elle ne voulait plus porter cette écharpe, craignant de se retrouver à nouveau victime d'un mauvais tour ! Son regard s'assombrit : sans compter qu'elle refusait de porter un vêtement appartenant à une ancienne Mangemort ! L'image idéalisée qu'elle se faisait de sa mère commençait à se fissurer et Hazel avait l'impression que son père et elle avaient été victimes d'une bien cruelle illusion. La femme et la mère tant aimée n'avait-elle été qu'au final, le fruit de leurs souvenirs et imagination trop tendres ? La jeune fille replia ses genoux sous son menton. Seren s'écarta de quelques pas, comprenant qu'elle avait besoin d'être seule. Quand Hazel plongeait dans les rares souvenirs qui lui restaient de sa mère, elle revoyait cette femme toujours un peu distante, froideur que son père avait toujours pris pour de la timidité... mais était-ce réellement le cas ? Dahlia Black les avait-elle seulement aimés ?


- Hazel, regarde !


La jeune fille se leva. Son ami pointait son doigt vers la girouette rouillée dressée sur la plus haute tour de Hurle-au-vent. Une lumière rouge, ressemblant à un Vermilleux, éclairait la girouette, lui conférant une allure quelque peu inquiétante. Les deux compères échangèrent un regard intrigué, animés par la même curiosité. La raison leur dictait de quitter le tableau et de prévenir leurs professeurs ; leur témérité, quant à elle... Ils s'avancèrent jusqu'aux deux petits sentiers s'enfonçant dans la forêt protégeant le manoir.


- Un seul de ces deux chemins conduit à Hurle-au-vent, indiqua Seren en pointant son index vers le sentier situé à leur droite.

Hazel lui décrocha un regard dubitatif : le chemin de gauche, propre et bien entretenu, encadré par de sublimes rosiers où se déployaient de jolies roses d'un blanc immaculé lui paraissait beaucoup plus sûr que l'autre chemin, escarpé, fait de ronces et de petits cailloux pointus.

- Fais-moi confiance, reprit Seren, ma grand-mère m'a toujours interdit l'autre chemin, un piège destiné aux indésirables.

Franchement peu rassurée, Hazel s'engagea néanmoins sur le petit sentier désolé, regrettant de s'éloigner de l'autre chemin exhalant un parfum de fruits frais et de fleurs épanouies. La pénombre s'abattit bientôt sur eux et Hazel peinait à mettre un pied devant l'autre, sans compter cette odeur de vieille charogne flottant autour d'eux. La jeune sorcière protégea son nez de sa main avant de poursuivre sa pénible avancée.

- On ne pourrait pas éclairer notre route ? demanda-t-elle à voix basse, craignant de réveiller les drôles de bestioles dont elle surprenait quelquefois les cris menaçants.

- Surtout pas ! On risquerait de se mettre en danger !


Que pouvait-elle bien faire d'autre ? Réfrénant son instinct de rébellion, Hazel jugea plus prudent d'écouter les conseils du jeune maître des lieux. Soudain, elle sentit la main de Seren attraper la sienne et la presser avec affection. Elle avait beau ne pas pouvoir distinguer ses traits dans l'obscurité, elle devinait le regard déterminé qu'il arborait à cet instant. Elle entremêla ses doigts à ceux du Serpentard, s'abandonnant à son étreinte, lui accordant une confiance aveugle. Ils marchèrent encore pendant un long et interminable moment, guettés par de curieux petits yeux jaunes se dessinant à travers le feuillage touffu des arbres aux formes spectrales.


- Le voilà, déclara Seren en l'entraînant vers un réverbère bien esseulé se trouvant sur le bord du chemin.


Hazel plissa les paupières et vit son ami se saisir de sa baguette. Il marmonna quelques mots tout en tapotant la lampe du bout de sa baguette. Le bec à huile s'illumina et le chemin se retrouva éclairé d'une lumière plus que bienvenue ! Le réverbère s'inclina vers le jeune maître du manoir avant de se déplacer en sautillant, guidant ainsi leurs pas sur le sentier, devenu beaucoup moins effrayant, à travers l'épaisse forêt aux arbres épineux. Hazel ralentit sa marche, sans pour autant relâcher la main de Seren, découvrant un tout autre décor : débarrassée de son manteau nocturne, la forêt lui apparut de suite, beaucoup moins effrayante ! Les affreux petits yeux perçants avaient disparu, remplacés par de sympathiques créatures, de curieux petits singes aux grands yeux bleus et aux narines inexistantes. Tous portaient des tenues écossaises et des bonnets du plus bel effet !


- Des brownies, la renseigna Seren en prenant un accent écossais. Ils vivent là depuis des lustres et viennent parfois donner un coup de main à notre elfe de maison.

- Un réverbère s'animant seul, des brownies, qu'est-ce qui se cache d'autre dans votre forêt, Mr. Wilde ?

- Ne te moque pas, répliqua Seren en lui tirant la langue, sinon, je demande au Cat Sith et au Nuckelavee du coin de venir te dévorer !


Ils pouffèrent de rire avant de reprendre leur marche, rendue beaucoup plus agréable depuis la dispersion des ombres et la disparition de l'odeur pestilentielle. Ils quittèrent la forêt et ils se retrouvèrent face à un gigantesque manoir. Hazel, soufflée par la majesté de la bâtisse, lâcha la main de Seren et s'avança de quelques pas. Bien que jonchée de ronces et de feuilles mortes, la cour abandonnée impressionnait par sa prestance. La jeune sorcière reconnut la fontaine où avait été prise l'une des rares photographies qu'elle possédait de Dahlia. Elle s'en approcha et s'y pencha. La fontaine était remplie d'eau de pluie et des feuilles collaient à la pierre rongée par le temps et les intempéries.


- Bienvenue à Hurle-au-vent, déclara Seren se rapprochant d'elle.


À cet instant, un gros matou noir sauta sur la fontaine et vint vers les deux jeunes sorciers. Il portait une curieuse tache sur son fier poitrail charbonneux. Hazel voulut tendre la main vers le chat mais ses doigts traversèrent son pelage ! Elle se retourna vers Seren, bouche bée.

Cat Sith, l'informa-t-il d'un ton amusé. C'est un chat-fantôme.


Le chat spectral s'étira, poussa un ronronnement de plénitude avant de les abandonner pour rejoindre la forêt, en quête d'oiseaux et autres souris fantomatiques. Hazel détacha son regard de l'animal-fantôme et se concentra sur la girouette illuminée, celle-ci, complètement désarticulée, pointait une petite fenêtre située dans l'une des tours. Seren se grattait les cheveux, perplexe.

- Tu crois qu'on devrait aller voir ?

- C'est toi le maître des lieux, chuchota Hazel. Quelle pièce se trouve à cet étage ?

- C'est ma chambre, répondit Seren de plus en plus intrigué.


Prenant leur courage à deux mains et tout en se tenant sur leurs gardes, ils n'avaient pas oublié qu'ils ne se trouvaient pas face au véritable Hurle-au-vent mais dans un tableau ensorcelé, les deux jeunes sorciers gravirent les marches du perron et s'arrêtèrent devant la grande porte de l'entrée. Hazel eut un frisson en voyant le heurtoir, en forme de main tranchée, s'animer à leur passage et frapper trois petits coups contre la porte. Celle-ci s'ouvrit sans difficulté. Ils pénétrèrent dans un gigantesque vestibule empreint de tristesse, en dépit de sa majesté. Hazel baissa les yeux vers le vieux tapis persan s'effilochant et aux couleurs ternies. Les meubles offraient un aspect plus que désolé et étaient recouverts de poussière. Elle leva les yeux, contemplant la coupole en verre, fendillée à de nombreux endroits, s'élevant au-dessus de leurs têtes et n'offrant que très peu de lumière.


Hazel se tourna vers Seren. Son géant piqua un fard et baissa la tête, honteux. Il avait toujours tiré une certaine fierté de son sang pur, seule Misty savait dans quel état de délabrement et décomposition se trouvait Hurle-au-vent. Le tableau ne mentait pas quant à la désolation du lieu ayant abrité ses jeux d'enfant : depuis des années, et ce bien avant l'emprisonnement de ses parents à Azkaban, la famille Wilde sombrait dans une lente et douloureuse décadence et leur ruine apparaissait à chaque génération chaque jour davantage, tel un nouveau trou dans un vêtement rongé jusqu'au dernier fil. Il secoua la tête et, ne supportant pas le regard de compassion de son amie, se dirigea vers le grand escalier en bougonnant. Hazel, le cœur serré, suivit le Serpentard, tout en prenant garde à ne pas glisser sur l'une des marches rongées par les termites.


Ils furent accueillis par un tableau aux couleurs ternes et baveuses représentant une sorcière dont les traits rappelaient ceux de Seren. Son visage ne reflétait aucune trace de sympathie et ses petites lèvres pincées en une noue réprobatrice n'invitait guère à la discussion.

- Grand-mère Morrigan, soupira Seren. Dans la réalité, son portrait ne cesse de me hurler des ordres et de crier après notre elfe de maison.

Hazel jeta un regard au tableau heureusement privé de parole et songea, avec soulagement, qu'elle n'aurait jamais à affronter la terrible sorcière : celle-ci ne l'inviterait jamais dans son manoir décati ! Seren s'engouffra dans le couloir mal éclairé situé à sa droite, Hazel s'élança sur ses talons, bien décidée à ne pas le lâcher d'une semelle ! Les murs, à la tapisserie suintante de moisissure et se décollant par morceaux, étaient couverts de portraits que la jeune sorcière identifia comme les ancêtres de son ami : des sorciers et des sorcières aux visages renfrognés et aux airs hautains.


Seren s'arrêta devant une porte vermoulue, s'agenouilla devant la serrure et lui murmura quelques mots en créole. La porte s'ouvrit, révélant un escalier en colimaçon serpentant jusqu'au sommet d'une tour. Guidée par son ami, Hazel gravit les marches tout en prenant garde à ne pas se rompre le cou. Ils pénétrèrent enfin dans une chambre située sous les combles, spacieuse, un brin désordonnée et beaucoup plus agréable que le vestibule ! Les murs bien que décrépis, avaient été peints de couleurs chatoyantes et des images d'animaux fantastiques comblaient les trous dans le plâtre. Hazel pouvait sans peine s'imaginer les images s'animant dans la véritable chambre de Seren, dans le vrai Hurle-au-Vent. Seren donna un coup de coude à son amie, attirant son regard sur la forme reposant sur le lit aux draps dépareillés et épars. Les deux compères s'approchèrent du lit et y découvrirent La Chose, reposant sur l'oreiller.


Hazel se saisit de sa peluche et glissa une main tremblante dans sa poche. Elle en retira un bijou, un dahlia en onyx dont il manquait le pistil. Le dernier morceau manquant à la clef ouvrant l'écrin tant convoité. Les deux amis, comprenant qu'ils touchaient à la fin de cette curieuse chasse au trésor, échangèrent un regard entendu : ils devaient s'échapper au plus vite du tableau, avant de s'attirer de nouveaux ennuis. Hazel remit le précieux dahlia dans sa peluche et la glissa dans la poche de son manteau.


Avant de se diriger vers la porte de la chambre, elle jeta un regard à la photo posée sur la table de chevet encombrée de livres et de papiers en tout genre. Seren attrapa le cadre et, répondant à la curiosité de son amie, lui montra la photographe : deux sorcières, d'un âge fort respectable, leur adressaient un petit signe de la main. L'une d'elle portait une curieuse créature fantastique sur son épaule droite. Combien les deux femmes étaient différentes de l'odieuse Morrigan Wilde, dont l'image n'inspirait que crainte et méfiance !


- Ma' Althea, murmura Seren en effleurant l'une des deux sorcières, et Ma' Cassandre. Je leur ai parlé de toi et tu leur plais beaucoup !

Hazel reposa le cadre en souriant et se retourna vers Seren. Le géant passa une main nerveuse dans sa tignasse ébouriffée.

- Tu sais, j'ai aussi parlé de toi à Morgan, confessa Hazel. Au début, elle me conseillait de me méfier, m'écrivait que tu n'étais pas digne de confiance.

Les yeux de Seren se remplirent de larmes douloureuses, la jeune sorcière s'empressa de le rassurer :

- Et je lui ai raconté comment tu m'avais sauvée : d'abord en me prenant ma baguette et ensuite, contre Carew. Elle espère bien te rencontrer un jour.

- C'est vrai ? balbutia le Serpentard, mais je suis...

Il se tut, incapable de mentionner le crime horrible dont s'étaient rendus coupables ses parents. Ils avaient tué le père de Morgan et n'avait eu aucune pitié pour son fiancé, un jeune Moldu dont le seul tort avait été d'être tombé amoureux d'une jeune femme luttant contre les Mangemorts et appartenant à une très ancienne famille de sorciers.

- Quand tout ça sera terminé, reprit Hazel, je compte bien tous vous inviter à l'Allée des Cerisiers !

- Si tu promets de ne pas me faire gonfler la tête comme un ballon, j'accepte l'invitation.


Hazel et lui éclatèrent de rire : quelques mois auparavant, la jeune Gryffondor avait régalé ses deux nouveaux amis de Serpentard de son « exploit » lors du mariage catastrophique de son père et de Mary. Ce jour-là, ils étaient en étude dans la Grande Salle et au lieu de réviser leurs leçons, avaient préféré raconter des anecdotes d'enfance. Quand Hazel avait évoqué ce souvenir, Rogue était passé derrière elle et elle aurait juré avoir vu un rictus se dessiner sur ses lèvres, quand elle avait évoqué les cris de la cousine Pétunia...


Une fois leur fou rire calmé, ils redevinrent sérieux et sortirent leurs baguettes. Hazel trouvait cette expédition encore plus simple que la dernière fois et elle devait se montrer plus prudente, après tout, peut-être qu'un dragon se dissimulait dans l'une des nombreuses armoires encombrant le manoir. Seren posa sa main sur la poignée de la porte et la retira aussitôt. Un courant d'air glacial s'engouffra par l'interstice et une odeur nauséabonde envahit la chambre. Seren et Hazel se reculèrent, baguettes tendues et aux aguets. La poignée devint un bloc de glace et tomba au sol, la porte s'ouvrit avec lenteur, dévoilant une ombre que les deux sorciers ne reconnurent que trop bien...


- Un Détraqueur, murmura Seren avec effroi. Hyde a réussi à placer un Détraqueur dans ce foutu tableau !

La main immonde de la créature se mit à griffer l'encadrure, purulente et couverte de croûtes grisâtres. Hazel fut saisie d'effroi quand elle entendit les bruits produits par le monstre, ce mélange insupportable de succions et du crissement d'une craie glissant sur un tableau noir.

- C'est quoi déjà le sort lancé par Rogue ? chuchota Hazel à Seren.

Spero patronum, répondit-il d'un ton paniqué, on ne sera jamais capable de produire un Patronus !

Tous deux avaient conscience qu'ils n'avaient pas le niveau suffisant pour espérer repousser la créature.

- Hazel, ordonna Seren en pointant sa baguette vers leur ennemi, ferme les yeux et rappelle-toi d'un moment heureux. Quand je compterai jusqu'à trois, nous lancerons le sort, ok ?

Hazel hocha la tête et les yeux clos, se mit à songer à son enfance, à ces journées passées au bord de la mer en compagnie de Morgan et de son père. Elle tendit sa baguette mais sentit que sa puissance ne serait pas de taille à lutter. Elle écoutait la respiration hachée de Seren se tenant à ses côtés. Il marmonnait des mots dans la langue de sa grand-mère paternelle ; quant à elle, elle ne parvenait pas à se saisir d'un souvenir rempli de bonheur ; tous ses souvenirs semblaient ternis par l'aura maléfique de la créature s'agitant derrière la porte.

- Un, énonça Seren peu rassuré.

Hazel était saisie de panique : elle avait beau fouiller dans sa mémoire, ses souvenirs disparaissent aussi vite qu'ils n'apparaissaient ! À peine avait-elle le temps de les effleurer, qu'ils s'évanouissaient dans les limbes de sa mémoire. Elle devait se dépêcher !

- Deux...

En quête de solution, elle replia ses doigts contre sa poitrine, sur le petit lien invisible palpitant dans son cœur. De suite, elle sentit ses angoisses s'apaiser et un souvenir rejaillit dans sa mémoire, beaucoup plus solide et empreint de lumière que les précédents : elle se trouvait dans le grenier du Cerbère et avait réussi, pour la première fois, à contrer un sort lancé par le maître des potions. Ce dernier s'était contenté de l'approuver par un petit mouvement du menton hautain, mais ce simple geste avait suffi pour lui redonner confiance.

- Trois !

Spectro patronum ! crièrent les deux amis en chœur.


Ils ouvrirent les yeux. Leurs deux baguettes étaient à présent reliées par un halo lumineux. La porte s'ouvrit sur le Détraqueur, ils poussèrent un cri terrifié et la lumière argentée, quasiment imperceptible vint frapper le Détraqueur de plein fouet. La créature tituba et tomba lourdement au sol. Elle se prit les pieds dans sa cape et dégringola les escaliers escarpés.

- Joli coup, la complimenta Seren.

- Tu n'étais pas mal non plus.


Un gémissement se fit alors entendre, ils brandirent leurs baguettes vers l'armoire d'où surgit le fantôme d'une jeune fille. Celle-ci possédait de longs cheveux lui arrivant jusqu'aux chevilles et était vêtue d'une longue robe déchirée ; des traces de larmes maculaient ses joues creuses. Hazel reconnut la Triste Emily, le spectre mystérieux hantant le manoir des Wilde. La demoiselle se posa sur le sol, ses petits pieds nus effleurant à peine le parquet. Elle porta la main à son visage, écarta ses longs cheveux de sa figure, révélant son doux regard mélancolique. Elle s'approcha de Seren et sans proférer le moindre mot, le traversa avant de glisser jusqu'à une petite porte qu'Hazel n'avait pas encore remarqué.


- Ma salle de bain ? murmura Seren. Je ne comprends pas...


Le fantôme passa à travers la porte, invitant les deux jeunes gens à la suivre. Intrigués, ils s'élancèrent à sa poursuite et se rendirent dans une minuscule salle de bain. La Triste Emily pointait son index vers la baignoire aux pieds imitant la forme de ceux d'un griffon. Le froid envahit la petite pièce et un murmure confus se fit entendre. Le Détraqueur venait de reprendre ses esprits et son ombre malsaine emplissait la chambre de Seren de son pouvoir malfaisant.


Hurle-au-vent a de nombreux passages secrets, confessa Seren en s'accroupissant près de la baignoire, je ne les connais pas tous...


Aidé de Hazel, il se mit à chercher un quelconque mécanisme qui leur permettrait d'accéder à une cachette beaucoup plus sûre. Hazel ouvrit les robinets ; Seren quant à lui, examina les pieds de la baignoire et finit par découvrir un petit bouton sur l'une des griffes du griffon. Il l'actionna. Un petit bruit grinçant se fit entendre et quatre carreaux du carrelage s'entrouvrirent, révélant un espace suffisamment grand pour qu'une personne adulte puisse s'y glisser. Hazel et Seren n'hésitèrent pas une seule seconde : l'un après l'autre, ils se faufilèrent dans l'ouverture et glissèrent le long d'un toboggan rouillé. Ils atterrirent dans un long tunnel fait de tuyaux rouillés et de canalisations grinçantes. Armés de leurs baguettes illuminées, ils entamèrent une longue traversée dans le tunnel étroit et ruisselant. L'eau mouillait leurs pieds et tombait en gouttes épaisses sur leurs épaules transies de froid. Ils parvinrent au bout du tunnel et remarquèrent un escalier en cordes conduisant jusqu'à une trappe.


Seren monta le premier, ouvrit la trappe et en sortit. Il aida Hazel à se hisser dans cette nouvelle cachette. Ils se trouvaient à présent dans une petite remise, remplie d'un bric-à-brac divers. Seren reconnut les lieux.

- L'atelier du grand-oncle Oscar. Gamin, je pouvais y passer des heures !

Hazel s'approcha de la petite fenêtre encrassée de poussière et jeta un regard à l'extérieur : ils se trouvaient dans une petite cabane modeste, située non loin de la grande fontaine. Ils pourraient regagner la forêt et retourner à leur point de départ. Seren se mit à fouiner dans la cabane, à la recherche d'un quelconque objet qui pourrait leur être utile. Hazel examina les lieux, s'étonnant d'y découvrir des créatures empaillées, des livres variés et des inventions moldues. Elle souleva une vieille couverture et poussa un cri :

- Un vélo ?!

- L'oncle Oscar appréciait les Moldus, expliqua Seren en fixant l'objet d'un œil curieux.

Hazel tira le vélo par le guidon et le fit rouler jusqu'à la porte de la remise. Elle l'enfourcha sans la moindre hésitation, s'attirant un regard étonné de la part du Serpentard.

- Tu sais utiliser ce machin-là ?! Et qu'est-ce que tu veux en faire ?!

- On ira beaucoup plus vite. C'est à toi de me faire confiance à présent !


Elle tapota le porte-bagage. Fort peu rassuré, Seren s'installa derrière elle et suivant son conseil, se positionna de telle sorte à éviter d'avoir les pieds traînant par terre. Une fois son équilibre trouvé, il passa ses bras autour de la taille de Hazel et s'y accrocha avec force. La jeune sorcière pointa sa baguette vers la porte, prononça un sort pour l'ouvrir et se mit à pédaler avec fureur. Le vélo dégringola dans la petite pente, frôla la fontaine avant de s'engager sur le petit sentier. Poussée par le vent, Hazel n'avait pour le moment, aucune difficulté à supporter le poids de Seren.


- C'est génial, ce truc ! cria Seren en relevant la tête.


Ils n'eurent pas le temps de s'enthousiasmer davantage. Le Détraqueur avait retrouvé leur trace, il passa au-dessus de leurs têtes et se plaça sur le chemin, devant eux. Hazel tenta de freiner, mais le mécanisme ne fonctionna pas. Seren pointa sa baguette vers la créature immobile, le choc était inévitable... Ils fermèrent les yeux et... traversèrent le Détraqueur comme ils l'auraient fait avec un fantôme !


- Une illusion, chuchota Hazel, comprenant que ce Détraqueur n'était que le fruit d'une image créée par Hyde pour les effrayer.

Comme pour confirmer ses impressions, des ombres jaillirent des bois, sous la forme de Détraqueurs, de nouvelles illusions provoquées par Hyde. Seren pointa sa baguette vers les roues du vélo et prononça un sort :

Celeritas Maxima !


Le vélo bondit et les pédales se mirent à tournoyer à toute allure, Hazel leva ses pieds et laissa la magie prendre le contrôle. Agrippée au guidon, elle ne parvenait plus à suivre la cadence frénétique de la bicyclette. Ils filèrent à travers le sentier sombre, pourchassés par les faux Détraqueurs, sous une averse glaciale et un déluge de bruits morbides. Bientôt l'étang ne fut qu'à quelques mètres, Hazel tenta d' actionner à nouveau le frein ; rien ne se produisit. Elle ferma les yeux, craignant de se voir chuter dans l'eau noirâtre. À sa grande stupéfaction, le vélo traversa l'étang sans s'y enfoncer.

- L'Oncle Oscar a dû apporter quelques aménagements magiques ! cria Seren.

- Qu'il en soit remercié !


Le bord du tableau se rapprochait dangereusement. Hazel pouvait sentir le souffle des illusions contre sa nuque et secoua la tête pour échapper aux images sordides qu'elles provoquaient en elle. Seren agita sa baguette, le vélo s'emballa à nouveau, les roues décollèrent du sol et le vélo s'éleva dans les airs. Hazel poussa un cri et se cramponna au guidon. Seren bougea sa baguette, faisant léviter le vélo et le fit traverser le tableau avec douceur. Il abaissa sa baguette, le vélo se posa lentement sur le sol, dans le couloir conduisant aux cachots. Les deux jeunes sorciers descendirent du vélo, les jambes tremblantes, mais heureux de cette petite expédition.


Hazel posa la bicyclette contre le mur avant de se tourner vers son ami :

- Pourrais-tu aller chercher les autres ?

- Bien sûr, mais qu'est-ce que tu comptes faire ?

- Ouvrir cet écrin, répondit Hazel avant de tourner les talons, on se retrouve dans le Grand Escalier !


Abandonnant Seren, elle partit en courant et quitta les cachots afin de gagner la tour Gryffondor.


Notes :


  1. Le Cat Sith, les Brownies et le Nuckelavee sont des créatures issues des légendes écossaises.
  2. Le nom du manoir des Wilde est directement inspiré du roman Les Hauts de Hurlevent d'Emily Brontë. Le fantôme du manoir porte d'ailleurs le prénom d'Emily pour cette raison.



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