L'Ecrin des illusions

Chapitre 23 : Les Flammes de la Saint-Valentin (première partie)

2551 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 07/04/2024 15:37

À un mois de janvier frileux succéda un mois de février pluvieux. Hazel avait été plus qu'heureuse de retrouver ses amis et partagea le récit de sa rencontre avec Hyde, sa découverte concernant l'écrin et leur confia même les quelques informations obtenues grâce au livre de Skeeter. Misty lui conseilla de ne pas prêter attention aux écrits de la journaliste qu'elle avait qualifiée de « vieille grenouille baveuse ». Les quatre Gryffondor et les deux Serpentard se réunissaient souvent à la bibliothèque, au grand dam de Mrs. Pince, afin de tenter de percer le secret du coffret à bijoux, mais pour le moment, leurs recherches s'étaient avérées infructueuses. À l'instar de nombreux élèves, ils suivaient également avec avidité les actualités concernant Altaïr Hyde. La Gazette du sorcier prétendait un jour, que le sorcier se trouvait du côté d'Édimbourg et le lendemain, affirmait qu'on avait aperçu sa trace non loin de Dublin... Jonathan en était venu à la conclusion que les journalistes du monde sorcier étaient tout aussi fiables que ceux de la BBC.


Ce matin-là, après un solide petit-déjeuner et un rapide coup d'œil à la Gazette - prétendant cette fois-ci, que Hyde avait été aperçu du côté de Chawton -, les Gryffondor de première année étaient descendus pour le cours de potions. Hazel, conformément à sa promesse, n'avait rien dit concernant les cours donnés par Rogue lors de ses vacances forcées à Poudlard. Flitwick l'avait complimentée pour ses progrès, soulignant qu'il avait bien eu raison de lui conseiller la patience ; seul Jonathan, lui avait décroché un regard suspicieux quand elle avait réussi un sortilège après seulement cinq tentatives. Hazel s'était contentée de répondre qu'elle s'était un « peu » exercée lors des congés.


Tout en s'approchant des cachots, Hazel songea aux dernières semaines écoulées : Rogue avait retrouvé son masque impassible et même s'il se montrait beaucoup moins injuste avec elle, il ne lui épargnait pas les remarques acerbes, houspillant son manque de précision et sa déplorable façon de peser les ingrédients nécessaires à la confection des potions.

- Espérons que Rogue soit de bonne humeur, grommela Charlie. Je n'ai pas envie de vider à nouveau des entrailles de crapauds !


Ses amis pouffèrent de rire ; Charlie leur tira une langue moqueuse et prit un air faussement peiné. Les premières années se regroupèrent près de la porte donnant sur la salle de cours. Celle-ci s'ouvrit et une flopée d'étudiants de sixième année en jaillit, arborant des mines un peu trop réjouies. Quelques filles passèrent en pouffant ; des garçons se donnaient des coups de coude idiots en jetant des regards entendus à certaines camarades. Les premières années les laissèrent passer, un peu intrigués par la joie se lisant sur leurs visages : en général, les élèves sortant des cachots avaient une bien triste figure !


- Entrez ! aboya la douce voix du professeur des potions.

Les jeunes Gryffondor s'exécutèrent en silence et furent bientôt rejoint par leurs camarades de Serpentard. Jonathan et Hazel rejoignirent Misty et Seren. La jeune Serpentarde donna un petit coup de coude à Jonathan :

- Dis-moi Clopin-Clopant, tu ne trouves pas qu'il y a une drôle d'odeur dans cette salle ? Je me demande ce que ces crétins ont bien pu fabriquer !


La réponse se trouvait juste en face d'eux : un immense chaudron trônait au milieu des cachots, juste devant le bureau de Rogue. Hazel, imitant certains camarades tout aussi curieux qu'elle, se jucha sur son tabouret et jeta un regard à la potion aux volutes de fumée dessinant des spirales. Celle-ci n'avait rien d'exceptionnelle et possédait une jolie couleur nacrée. La jeune sorcière avait beau renifler, les cachots avaient toujours cette odeur de renfermé, un peu fétide...

- Mais si, s'entêta Misty. Vous ne sentez vraiment rien ?!

Ses trois amis secouèrent la tête en signe de négation. La jeune Serpentarde paraissait fort contrariée d'être ainsi contredite :

- Par Merlin, vous avez le nez bouché ! Ça pue le chocolat, l'odeur des vieux bouquins et le shampooing aux œufs !

Hazel se concentra mais ne distinguait aucune odeur particulière. La seule odeur s'approchant de celle décrite par Misty était celle des cheveux de Jonathan.

- Vos camarades ne sentent rien car, contrairement à vous, ils n'ont pas encore la cervelle envahie par des pensées futiles...

Rogue fit son apparition et tendit sa baguette vers le chaudron. D'un sort, il fit disparaître le liquide nacré et se tourna vers les élèves.

- Cette potion est bien trop subtile pour vos petites cervelles et seuls les élèves les moins médiocres pourront espérer la préparer en sixième année.

- Professeur Rogue, s'enquit Rain en levant la main. De quelle potion s'agit-il ?

- L'Amortentia, répondit-il en grommelant.


Voyant la mine perplexe de ses jeunes élèves, il poussa un soupir désolé en levant les yeux au ciel. Hazel devina le fond de sa pensée à cet instant : il déplorait sans nul doute, le manque de curiosité des élèves et aurait souhaité se trouver loin, très loin, des cachots pour se livrer à la confection de ses chères potions sans avoir à remplir la cervelle de jeunes pousses de son enseignement. Elle masqua son sourire derrière la paume de sa main et se mordilla l'intérieur des joues pour ne pas pouffer de rire.


- L'Amortentia est un puissant philtre d'amour, laissa-t-il tomber d'un ton blasé. Son odeur est différente pour chacun de nous, dès que nous commençons à expérimenter cette chose ridicule nommée « amour ».

Misty en resta muette de stupeur. Ses joues s'enflammèrent et elle marmonna quelques mots soulignant l'idiotie d'une telle potion. Les explications de Rogue suscitèrent quelques commentaires intrigués de la part des élèves de première année. Sofia leva timidement la main, avide d'informations complémentaires.

- Professeur, c'est possible de susciter l'amour à partir d'une simple potion ?!

- Bien sûr que non. Cette potion provoque seulement une forte attirance, qui n'a rien à voir avec l'amour. Lorsque les effets de la potion s'estompent, le contrecoup peut être très violent...

Il esquissa un curieux rictus et jeta un regard aux quelques gouttes nacrées accrochées au fond du chaudron. Hazel retint son souffle lorsqu'elle vit le masque de glace se fissurer, laissant apparaître cette vive affliction qu'elle avait eue l'occasion de remarquer à certaines reprises.

- Même le plus puissant des sorciers serait bien incapable de provoquer un amour aussi sincère que durable chez autrui... Le mystère de l'amour est plus grand que le mystère de la mort...

Conscient sans doute d'avoir livré une minuscule part de lui-même, Rogue se redressa d'un bond, comme frappé par la foudre. Il effaça les dernières gouttes d'Amortentia d'un geste rageur et fit apparaître des fioles vides sur les tables de ses élèves.

- Au Diable toutes ces balivernes, je veux une potion Wiggenweld pour la fin de l'heure. Assurez-vous de bien peser vos ingrédients cette fois-ci. Celui ou celle qui ne réussira pas sa potion aura droit à des devoirs supplémentaires !


Des chuchotements de protestation se firent entendre en toute discrétion, mais tous les élèves sortirent leurs instruments en quelques minutes seulement. Rogue inscrivit les instructions au tableau et se mit à arpenter la salle afin de critiquer les préparations des élèves. Hazel tâcha de se concentrer afin de ne pas récolter du travail en plus. Elle travaillait en silence, aidée par Jonathan qui, en plus de préparer sa propre décoction, s'occupait de ses trois amis. Misty, contrairement à son habitude, avait gardé sa langue scellée et n'avait lancé aucune taquinerie à ses camarades. Hazel jura même l'avoir vue rougir plus que de raison lorsque Jonathan l'aida à touiller sa potion afin de lui donner une texture moins épaisse. Elle échangea un sourire avec Seren qui s'était également aperçu de la gêne de son amie d'enfance. Le sourire de Seren devint un clin d'œil complice et Hazel comprit qu'il se priverait pas d'embêter Misty au sujet de l'Amortentia...


À la fin de l'heure, Hazel fut plutôt satisfaite de sa préparation : certes, sa potion avait une couleur un peu étrange et dégageait une odeur peu attirante, mais elle se rapprochait un peu de celle, parfaite, confectionnée par Jonathan. Rogue leur ordonna de nettoyer leurs instruments, de ranger leurs affaires et les informa qu'il désignerait un élève pour l'aider à ramasser les différentes fioles laissées sur les tables. Il passa dans les rangs et s'arrêta devant la table de Hazel.

- Evans, rangez-moi ces potions en quatrième vitesse. Si vous en brisez une, je vous ferais nettoyer le sol avec un mouchoir en papier !


Laissant ses camarades sortir pour rejoindre la cour pour une pause bien méritée, Hazel se leva et ramassa les potions de ses camarades. Elle se rendit dans la réserve, déposa son fardeau sur une étagère et s'approcha de Rogue lui tournant le dos.

- Prof...

Elle le vit sortir sa baguette ; d'un geste vif, elle se saisit de la sienne et la pointa en position de défense.

Bucca globus !

Protego ! répliqua Hazel.

Elle parvint à parer le sort de son professeur. Celui-ci eut un petit hochement de tête approbateur. Hazel rangea sa baguette, satisfaite de lui avoir prouvé qu'elle maîtrisait à présent le sort du bouclier et qu'elle était capable de l'exécuter avec rapidité.

- Au revoir, professeur, déclara-t-elle d'un petit ton crâneur avant de tourner les talons.

- Evans ?

Elle pivota et le sort la frappa à nouveau et cette fois-ci, elle ne fut pas en mesure de le contrer. Elle ne put retenir un hoquet et expulsa quelques bulles de savon. Elle plaqua sa main contre sa bouche qui semblait imprégnée de liquide vaisselle.

- Retenez bien la leçon, Hazel Evans : ne tournez jamais le dos à un adversaire.

Dépitée de s'être ainsi laissée bernée, elle poussa un petit cri rageur, évacuant à nouveau quelques bulles de savon. Rogue tendit à nouveau sa baguette et mit fin à son sortilège.

- Maintenant filez et n'oubliez pas de vous tenir sur vos gardes.


Hazel ramassa son sac et déguerpit en vitesse, afin de ne pas être frappée par un nouveau sortilège. Elle s'empressa de retrouver ses amis dans la cour du clocher. À contrecœur, le petit groupe dut se séparer : les Serpentard avaient un cours de métamorphose, les Gryffondor eux, étaient condamnés à deux longues heures d'Histoire de la magie.


Le professeur Binns sortit du tableau et Hazel sentit ses paupières s'alourdir quand le fantôme commença à évoquer diverses lois régissant le monde magique... Le menton reposant au creux de sa paume, Hazel laissa son esprit s'égarer loin de la salle poussiéreuse et du ton monocorde du professeur Binns.

- Ms. Evans, pourriez-vous me répéter ce que je viens dire ?

Charlie assis à côté d'elle, lui écrasa le pied afin de la réveiller. Elle secoua la tête et vit le professeur Binns penché vers elle, son souffle glacial frôla son visage.

- Alors, Miss Evans ? Quel événement historique s'est produit en l'an 79 ?

- Pompéi, dragon, volcan, murmura Charlie.

- Un dragon a provoqué l'éruption du Vésuve, répondit Hazel avec précipitation.

- C'est exact, fit le professeur Binns en lévitant jusqu'au fond de la salle de classe. C'est à partir de ce « malheureux » incident que le décret sur la détention de dragons...


L'attention de Hazel, à l'instar de celle de ses camarades, sombra à nouveau, comme la pauvre ville de Pompéi. Ils retrouvèrent un semblant d'énergie quand le professeur Binns leur indiqua la fin de cette séance. Il leur demanda également d'écrire tout un parchemin sur les lois concernant la possession de dragons et les autorisa enfin à sortir. Les jeunes Gryffondor ne se firent pas prier davantage et quittèrent la salle tels une volée de dragons affamés.


Ils croisèrent le concierge en proie à bien d'autres tourments : en cette journée de Saint-Valentin, des élèves avaient cru pertinent de lancer des colombes et autres angelots porteurs de messages amoureux dans les couloirs de Poudlard. Peeves, participant à la fête à sa façon, poursuivait les petits cupidons afin de leur dérober leurs carquois ou de leur arracher des plumes. Rusard s'égosillait à perte, ramassant les déjections des colombes et les plumes des pauvres angelots martyrisés. Le petit groupe tomba nez à nez avec l'esprit frappeur, celui-ci avait volé un costume appartenant au professeur Flitwick et s'en était revêtu. Perché sur une armure, il s'amusait à lancer des flèches sur les élèves passant à sa portée. Hazel et ses amis tentèrent de l'éviter, mais Peeves fut le plus rapide : il banda son arc et dans un éclat de rire hystérique, décocha une flèche au petit groupe. Charlie, Sofia et Jonathan l'évitèrent de justesse, Hazel eut juste le temps de baisser la tête, mais la pointe de la flèche toucha sa joue et la fit saigner. Peeves, ravi de son mauvais tour, disparut en disant qu'il allait à présent « s'occuper du cœur de son amie Jekyll ». Hazel porta la main à sa joue et l'essuya, s'inquiétant des éventuelles répercussions.

- Tant que ce n'est pas ton cœur qui est touché, tu ne crains rien, la taquina Sofia en s'occupant de sa blessure.

- Il n'y a rien à craindre de ces angelots, confirma Charlie. Ma tante Muriel a essayé d'en utiliser un pour toucher le cœur d'un voisin... il s'est juste retrouvé à Sainte-Mangouste avec un œil en moins.

- Et puis, acheva Jonathan, tu n'as pas entendu Rogue ? Aucune potion, aucun sort, ne peut provoquer l'amour. Qu'est-ce que tu risques ? Tomber amoureuse de Rusard et soupirer après son petit crâne dégarni ?

Le concierge, devinant être leur sujet de conservation, se tourna vers eux, son balai déplumé brandi au-dessus de sa tête. Il leur hurla de déguerpir s'ils ne tenaient pas à passer le reste de la journée à ramasser chaque fiente de colombe tachant le moindre recoin de Poudlard. Les quatre amis s'éclipsèrent pour gagner la Grande Salle. Sur leur chemin, ils croisèrent une élève de Serdaigle plongée dans la lecture d'une carte, non loin d'un tableau représentant l'éruption du Vésuve.



Note:

  1. La citation de Rogue est une citation de la pièce Salomé d'Oscar Wilde: "The mystery of love is greater than the mystery of death."

Laisser un commentaire ?