Mutations contrôlées
5 - Appel
Avec un craquement sinistre, le front du géant heurta durement le sol. Il ne restait maintenant plus qu'un mercenaire, là haut dans les étages. Mais comme le reste de son groupe, je ne comptais pas l'épargner. La proximité de ces pillards avec la route commerciale reliant ma ville et les autres n'était pas envisageable. Et il restait cette radio. Cet endroit était certes le meilleur pour émettre sur des dizaines de miles à la ronde, mais si les pillards s'en servait cela ne présageait que des emmerdements futurs... Ramassant ma batte, je m'engageais dans l'escalier de ferraille, couvert de rouille et de mousse par endroits. A chaque pas, l'édifice grinçait et tremblait. La déflagration de ma grenade, un peu plus tôt, devait avoir endommagé la structure de l'immeuble. Je pus dire adieu à l'effet de surprise en arrivant aux derniers étages. Les escaliers menaçaient de s'effondrer au moindre coup de vent dans un vacarme métallique.
Alors que j’atteignais le palier du neuvième étage, le dernier de mes adversaires me sauta dessus par derrière. Il avait du se placer en embuscade en escaladant la paroi creusée par le temps. Pauvre type... Tant d'effort pour si peu de résultat? Avec n'importe qui d'autre, cette ruse aurait sans doute marché. Mais pas avec moi. Le choc me plaqua tout de même contre le sol, mais l'inconscient tenta immédiatement de me nouer les mains. Quelle ne fut pas sa surprise lorsque sa peau se mit à fondre à mon contact. Je sentis immédiatement un liquide chaud couler sur mes mains. Pendant que mon agresseur hurlait à la mort et gigotait en tenant fermement sa main droite contre son buste, je me relevai d'un bon et m'approchai de lui. La vision de ce cafard, rampant sur le sol, pleurant à moitié pour que je l'épargne, me dégouttait. Je ne le regardais même pas alors que je l'achevais d'une balle dans la caboche.
Enfin! 5 minutes pour souffler...
- Grzzz... zzz... clic! ...m'entends? On s..a là dans une...maine...
La radio était en marche... Et quelqu'un tentait d'établir la communication! Je m'empressai de décrocher le combiné et de répondre.
- J'entends très bien, dis-je d'une voix douce. En revanche, vos collègues beaucoup moins.
- Quoi? Attendez... Salopard! Attends qu'on débarque et tu feras moins le fier!
Puis le son coupa brutalement. Merde... Je venais seulement de comprendre. Ces bandits n'étaient pas là pour piller l'endroit mais pour le maintenir sous surveillance, afin de relancer l'émetteur radio et de rassembler un groupe bien plus importants. Merde, merde, merde! Combien vont venir? Et pourquoi viennent-ils? Que peut il bien se trouver dans les environs pour que les clans de pillards tentent de se rassembler. Ils ne sont jamais plus d'une douzaine généralement. Au-delà, la zizanie éclate et ils finissent par s’entre-tuer. Mais pour qu'ils se réunissent, leur but devait être important. Peut être que quelqu'un s'était mis en tête de rallier une armée?
Quoiqu'il en soit, je devais prévenir Hancock. Si une armée belliqueuse s'approchait, il fallait se préparer. Je réglai la fréquence de la radio et tentai d'entrer en contact avec Goodneighbor.
- Goodneighbor? Répondez! Ici Dante Borg. Une troupe de pillard a pris possession de la tour à l'Est de la ville. Hancock? T'es là? C'est important!
- Je suis là gamin, dit alors une voix rauque derrière moi.
Je me retournais vivement, une expression de surprise sur le visage. Hancock était là. Son long manteau de pirate rouge semblait ternis par la poussière. Sa face de goule, fripée et repoussante lui offrait une autorité naturelle dont il usait à la perfection. Le tricorne rapiécé et les vieux vêtements qu'il portait ne diminuait en rien l'aura de ce leader charismatique.
- Hancock... soufflais-je. Je suis... vraiment désolé. Les pillards dans cette tour m'ont blessés et j'ai...
- Assez, dit-il sèchement. J'attendais ton retour il y a 2 jours. J'ai envoyé des hommes à ta recherche tu sais? Ils sont tombés sur le pêcheur du lac artificiel qui leur a raconté une histoire intéressante...
Je baissais honteusement la tête. Ma séparation avec le Doc. avait été troublante et désagréable (sans doute plus pour lui que pour moi). Qu'avait-il pu raconter à nos éclaireurs? Je l'avais presque agressé sans m'en rendre compte en lui brûlant la main.
- Et voila qu'en suivant ta piste, depuis le lac, je tombe sur cette tour radio que je croyais désaffectée depuis des lustres. Si mes souvenirs sont bons, tu devais ramener des vivres et des munitions. Où sont elles?
- Hancock... C'est plus grave que ça en à l'air... Ces gens vont...
- Réponds à mes questions gamins. A-tu fais ton devoir?
Hancock mettait un point d'honneur à affirmer son autorité quelque soit les circonstances. Dans ce cas précis, il se fichait pas mal des rations et des munitions, mais son statut l’empêchait de montrer qu'il avait eut peur pour moi. Contrôlant mon anxiété, je soufflai lourdement et décidai de rentrer dans son jeu:
- Les munitions sont dans mon sac. Je fouillerais les cadavres pour en trouver d'autre. Mon gibier à été volé quand ces pillards m'ont cassé la jambe.
- Ta jambe est cassé? Tu es sûr?
- Elle l'était. Le Doc. Miles m'a soigné pendant la tempête d'hier. Mais tout s'est enchaîné si vite après ça...
- J'ai cru comprendre... Bien, en route. Dans 2 heures nous serons de retour à la maison. Mais d'ici là, je compte sur toi pour me faire un résumé précis.
Exécution. On ne discute pas, avec Hancock, on exécute. Aussi, je lui résumais les événements de ces dernières 48 heures en prenant soin de ne rien lui cacher. Quand j'évoquais ces sensations nouvelles après mon exposition aux radiations de la tempête, Hancock continua de marcher, le regard droit, sans broncher. Quand j'eu terminé mon récit, il m'adressa un regard bienveillant.
- Tu as géré petit. Et ne t'en fais pas. Peu importe ce que tu es. Ce que tu fais compte bien plus.
Le maire était doué pour ce genre de phrases. Moi qui vous parle, j'ai mis des semaines à comprendre tout le sens de cette dernière.